Autofiction et Introspection

Habiter n’est pas impossible, mais c’est un vrai problème pour le narrateur. Il occupe des lieux sans jamais vraiment y entrer. Maison, atelier, villes traversées : ils existent, mais restent comme à distance. Il imagine que peindre ou écrire l’aidera à habiter autrement, à investir un espace intérieur qui compenserait l’absence d’ancrage. Mais cela demeure du côté du fantasme. Le réel, lui, continue de glisser, indifférent.

C’est de ce décalage que naissent ces fragments. Écrire pour traverser l’évidence, pour examiner ce qui ne s’examine pas. Écrire comme tentative d’habiter, sans garantie d’y parvenir.

voir les tous les mots-clés de cette thématique

vue Obsidian

compilation de tous les articles du mot-clé

articles associés

Carnets | juin 2025

28 juin 2025

À droite de l'écran se dresse d'abord un mur vert percé d'une fenêtre grande ouverte en raison de la chaleur que l'on cherche à expulser pour la remplacer par la fraîcheur matinale. Considérations climatiques futiles qui m'auront échappées puisque j'étais parti pour décrire les lieux. Mais j'y reviendrai peut-être. Sur le climat. Donc, nous avons une fenêtre de forme rectangulaire, il est rare par ici de voir des fenêtres carrées. Les rondes ou en losange sont encore plus rares. Ici aussi je crois qu'on pourra se passer de la géométrie. Au-delà de la fenêtre, un mur qui monte jusqu'à une ligne taillée en biseau, et qui est tout simplement le fait souligné d'une ombre encore plus noire que la pénombre. Si l'on veut laisser l'œil s'élever encore on peut avoir un triangle de ciel gris bleu dans la partie supérieure de la fenêtre. Avec peut-être une légère nuance purpurine. Description qui n'est que l'écho d'une page lue ce matin. Ce qui me fait penser à Laurent Mauvignier quand on lui demande quels sont les auteurs qui l'ont inspiré. Il parle de cet écho chez d'autres auteurs d'un quelque chose qu'il cherche à dire. Est-ce cela l'inspiration, je ne sais pas. Peut-être que ça parle de solipsisme prometteur plutôt. Comme si à la lecture on avait franchi un mur. On aurait découvert cette percée, cette fenêtre que j'évoque au début, on passerait par celle-ci et l'on se retrouverait dans un jardin, dans une ville, dans ce que l'on voudra, une bibliothèque. La seule chose dont on ne pourrait plus douter c'est que c'est à soi de s'occuper des lieux. Car pas de jardinier ici, pas d'éboueur pour ramasser les ordures, pas de bibliothécaire pour épousseter les ouvrages, balayer les sols. Tout nous appartiendrait, d'accord. Mais nous serions les seuls responsables à la fois des merveilles qu'on y trouve comme des dégâts qu'on y cause. Une idée fugace passe, laisse-la passer, ne la retiens pas. Patience. Si elle revient une seconde fois note qu'elle se représente avec un léger étonnement. Mais laisse-la passer encore. La troisième fois cependant note-la car il y a de grandes chances qu'elle ne se représente plus. Cet espoir de retrouver goût à la lecture lui tomba dessus comme la grâce. Qu'allait-il en faire lui qui dans chaque espoir décelait déjà les prémisses d'une deception à venir. Donc le mot propriété revient par la bande. C'est à dire que tu lis un livre, tu le lis parfois plusieurs fois, tu t'en imprègnes et à la fin de voici étrangement devenu son propriétaire . Je ne parle pas de placer le livre sur l'étagère de la bibliothèque, évidemment. Je parle de cette sorte d'avidité incroyable au fond de soi qui s'accapare le monde de toutes les manières dont on peut imaginer que le monde se présente à soi. Que ce soit une rue que l'on arpente à période régulière et dont on fait sa familère, comme jadis on parlait de favorite. Que ce soit les fleurs du jardin que l'on arrose le matin pour qu'elles ne dépérissent pas trop vite. Que ce soit les livres que l'on lit et dans lesquels parfois on se reconnaît plus ou moins. L'idée d'être assisté pour respirer. Par une machine. L'agacement soudain s'additionne à la chaleur, se cumule, s'amplifie. Vers 23h j'arrache le masque. C'est à dire que le confort au bout d'un moment m'est tout aussi insupportable que tout le reste. C'est à ce moment, ne parvenant plus à dormir que j'ouvre les Nouvelles Complètes de Conrad, chez Quarto. Je n'avais jamais lu la préface de Jacques Darras. Il évoque la présence de Rimbaud et de Jozef Konrad Korzeniowski au même moment à Marseille, en 1875. Et surtout cet attrait des deux jeunes hommes pour les langues étrangères notamment l'anglais et le français pour le jeune polonais. "L'oreille devient organe majeur, les recherches linguistiques saussuriennes sont proches d'une formulation théorique". Hier encore je m'interrogeai sur l'utilité d'un récit de voyage et aussitôt que je lis ces pages ce sont les noms de lieux qui attirent l'oeil. l'île de Bangka au nord de Sumatra Semarang Singapour et Bornéo Aden Kinshasa Stanley Falls Harar L'hôpital de la Conception à Marseille.|couper{180}

Auteurs littéraires Autofiction et Introspection réflexions sur l’art

Carnets | juin 2025

27 juin 2025

Relu quelques textes de 2019. Notamment ce récit d'un voyage Quetta-Karachi effectué en 1986, relaté en novembre 2019 durant l'époque des confinements. La première idée : corriger le texte, l'améliorer. Quelque chose me tarabuste. Ça ressemble à un récit qui se donnerait pour objectif de relater une sorte de vérité des faits. Mais assez vite, ce n'est pas le doute concernant les faits qui me dérange — c'est un doute sur la narration même, sa raison d'être. J'imagine que c'est parce que ce voyage, je ne l'ai jamais mené au bout. L'hépatite attrapée, le rapatriement, le trait tiré sur ce grand reportage, sur ces rêves d'autrefois. Devenir grand reporter, grand photographe, grand. Devenir grand tout simplement. Car c'était effarant de comprendre à 26 ans qu'on est encore un enfant. C'est une honte. Qu'est-ce qu'on a fait ou pas fait pour mériter ça ? Alors on remet toute l'existence en question, à commencer par la sienne. Partir vers l'inconnu. Partir vers le pire, la guerre. Avec le recul : il n'y a qu'un gamin pour oser ça. Puisqu'il faut passer par le pire du pire pour être un homme, selon les traditions rapportées. Selon les modèles imposés. A-t-on les moyens de remettre en question ces modèles ? Ce serait la première mission de la jeunesse justement : douter, inventer autre chose. Mais je me rends compte qu'on invente probablement des versions du même. Une sorte de clonage d'un mécanisme qui date de l'époque des chasseurs-cueilleurs. Une chasse au tigre à dents de sabre. Tu ramènes une dent en pendentif, te voilà un homme. Et ensuite tu raconteras tes exploits — ou tu verras ceux-ci se transformer d'abord dans ton propre crâne, puis s'amplifier dans la communauté, devenir une sorte de légende. Est-ce vraiment ça que tu voulais à 26 ans ? Pas sûr que ce soit si simple. Tu voulais faire quelque chose de ta vie. Déjà l'idée de repartir de zéro te tenaillait. Tout ce que tu fais n'est pas suffisant. Ne l'est jamais. Quelque chose ou quelqu'un te regarde. Tu es un acteur qui joue sur une scène de théâtre devant ce quelque chose, ce quelqu'un. Tu en es un peu conscient. C'est peut-être un peu toi aussi, le spectateur. C'est celui qui se raconte une histoire, qui ne sait pas encore qu'il se trompe en se prenant pour un photographe. En fait, il est déjà écrivain. Il écrit déjà avant d'écrire, comme dirait Blanchot. Et oui. Une petite erreur de casting qui va déclencher toute une série de bourdes, de catastrophes à venir. Il avait dit 16h, il est arrivé à 16h. L'homme apportant la machine. La machine censée pallier l'apnée, améliorer la qualité du sommeil. Il est sympathique. Il prend le temps d'expliquer dans le détail, très pédagogue. Ses ongles sont bien taillés, ses cheveux sont bien taillés, sa barbe est bien taillée. Son ton est parfaitement mesuré — à la fois empathique, professionnel, pas un mot plus haut que l'autre — et tout ça avec le sourire. La machine n'est pas très imposante. Moins que ce que j'avais imaginé. C'est surtout le tuyau blanc et le masque. Je me demande comment je vais pouvoir dormir avec ça sur le visage. Il y a même un aspect pratique à la visite : il me fait démonter-remonter les différentes pièces de la bécane. J'ai l'impression de me retrouver face à une arme. Tout juste si je ne ferme pas les yeux. "Une minute pour démonter-remonter, allez, et on essaie de s'améliorer." Mais non : "Prenez votre temps, et si vous voulez je peux vous remontrer, prenez votre temps." Panique. Il a diagnostiqué ma faille tellement vite. Ne pas vouloir être pris en défaut. Être capable de. Ne pas dévoiler ma gigantesque inaptitude à être ou à vivre. "Et si on faisait un essai pour de vrai, allongé ?" me dit-il. Je dis oui. Et d'aller m'allonger sur le canapé du salon, ainsi affublé de ce masque relié à cette machine posée sur la table basse, à côté du puzzle de 1000 pièces que termine S. On ne se rend pas compte à quel point nous traversons des scènes étranges, surréalistes. L'enchaînement des faits vers des buts inventés nous semble si normal. Bref, je m'allonge. Je ne sens rien au début. Impression de respirer tout à fait normalement. C'est quand je le dis — "C'est drôle, je ne sens rien, j'ai l'impression de res... pir... rer... nor... ma... le... ment" — que je comprends qu'il se passe quelque chose d'étrange. Le type se marre. "Et oui, vous verrez, on s'habitue. J'ai des clients qui arrivent à parler en même temps, avec un peu d'entraînement. Je vous laisse expérimenter, je vais remplir les papiers en attendant." En vrai, je me sens bien. J'ai presque envie de me laisser aller, de m'endormir. Mais au bout de deux minutes, ça suffit : et si je m'endormais vraiment ? J'aurais l'air fin. Je me relève, retire le masque qui émet un chuintement de mécontentement. J'appuie sur le bouton on/off. J'arrive en disant : "Bon, ce n'est pas la mer à boire." On prend rendez-vous pour dans une semaine et il repart. Ce type fait tout l'Isère et un peu de la Drôme aussi. Ça fait de la route. Que peut-il y avoir derrière son masque d'amabilité ? Peut-être de l'amabilité seulement. Amélioration du squelette de compilation mensuelle. Désormais il y a un bouton et une liste de choix pour créer un article SPIP ou un fichier markdown à télécharger. Pour le moment, réservé seulement à la partie privée du site — la rubrique d'archivage restant invisible au public. Ce qui fait désormais un outil vraiment pertinent pour repasser de nombreux textes à la moulinette. J'ai même prévu un versioning : version 2, version 3, etc. Même si je versionnais une fois par jour un seul texte, je ne vivrai pas assez longtemps pour épuiser les possibilités de stockage de la base de données. Ce qui signifie que je devrai me contraindre à deux ou trois versions maximum et étaler dans le temps, pourquoi pas. Rien ne presse. Se dire que tout ça ne prendra sens qu'après. Longtemps après, sans doute. Après moi.|couper{180}

Autofiction et Introspection Technologies et Postmodernité

Carnets | juin 2025

17 juin 2025

Toujours le 17 mais le 17 vraiment. La chaleur n'enlève rien à l'agacement. Elle le confit. Il devient mou, gras, onctueux. Donc je disais qu'un petit vent de révolte planait. Je m'en souviens. C'était hier encore. À cause des commentaires. Ce n'est pas la première fois. Je devrais créer un livre avec tout ce que j'ai déjà dit sur le commentaire en général. Il y aurait matière. Mais je ne le ferai pas. Bien sûr que non. Je suis encore bien trop bien élevé pour cela. Bien dressé à dire : « Oh mais tout ça, n'allez pas songer que c'est vrai. » Le fameux « c'était pour rire », vous savez. J'ai dû le sentir passer celui-là, pas qu'une fois. On te jette à terre, ou dans l'eau, ou du haut d'une falaise, et quand tu ressors : « Oh, fais donc pas la gueule, c'était pour rire, allez. » Je résume en une phrase à peine désormais, c'est bien, ça n'en mérite pas plus. Et maintenant s'ajoute à la pitrerie la guerre. Ça devait les démanger. Toute une génération qui ne l'aurait pas connue. On ne pouvait pas mourir tranquille sans au moins avoir assisté à cela. Déjà en 1990 ou 1991, la première guerre du Golfe excitait les cervelles. Même la mienne, c'est pas peu dire. La nuit je faisais des rêves de déserts et de balles traçantes et je me disais qu'esthétiquement ce n'était pas mal. L'esthétisme nous aide beaucoup dans la foirade, je l'ai souvent remarqué. Oh, pas la Joconde, pas Quentin de La Tour, pas même Picasso ni Pollock ni Opalka. Un esthétisme débarrassé de modèle plutôt. Un esthétisme dépouillé — c'est-à-dire de la poésie au final, ce mystère. Mais je ne vais pas faire un cours magistral ce matin. Trop las. Revenons au code. En ce moment j'alterne entre haine du monde, haine de moi, et code. Impression que le code c'est imparable. Pas de tergiversation possible. Ça marche ou ça ne marche pas. C'est la première étape. Ensuite vient l'esthétique. Le problème c'est qu'il faut tout inventer de ce côté-là encore. Enfin moi, je pars de rien. Comme d'habitude. Je crois que si rien n'existait pas, je serais bien embêté, car je ne pourrais jamais partir. Donc je resterais là, accroché à quelque chose. Vous savez, ce quelque chose qui a l'air tangible mais qui dès qu'on l'effleure tombe en poussière. Rien de ce que je peux classer dans la catégorie « quelque chose », voire « quelqu'un », n'est encore là pour me prouver le contraire. Tout ce qui portait cette étiquette s'est effacé, les définitions ont glissé, le dictionnaire n'est plus tout à fait le même. Alors quoi ? À quoi se fier ? Je vous le demande sans vous le demander. Hier soir tout de même, un bon moment. Apéritif chez B.E., à la sortie de Roussillon — là-bas le repère c'est la borne d'incendie. Le rosé était bien frais et claquait sur la langue, mais on s'est contenté de raconter et d'écouter l'accident, le pied coincé dans un rocher en Bretagne. La difficulté de marcher dans le sable. Il y avait aussi de petits morceaux de melon avec du jambon fumé très fin, de petits paquets enroulés sur eux-mêmes, prêts à bondir jusqu'à la bouche au bout d'un pique. Et puis deux chats dont l'un est sourd et qui ne s'entendent plus. Et puis le cerisier au fond du jardin qui allait bien donner jusqu'à ce que les fortes pluies tombent. Et puis c'est dommage parce qu'on aime tous le clafoutis et que c'est un souvenir d'enfance. Et que nous, on gardait les noyaux, tandis qu'eux non. Et de chercher ainsi tout un tas de petits sujets pour confectionner une jolie conversation très anglaise finalement, ou britannique, british. Une conversation somme toute polie, agréable, sans heurt aucun, et où à la fin tout le monde peut se lever et repartir avec cette impression d'avoir passé un bon moment, sans trop savoir pour quelle raison vraiment. Que serait ce monde sans tous les bavardages, les commentaires, sans la musique au creux de tout ce tintamarre ? La question subsiste. C'est ce qui est capital pour parler comme les riches. Still the 17th but the 17th for real. The heat doesn't take away the irritation. It preserves it. Like fruit in syrup. The irritation becomes soft, greasy, unctuous. So I was saying that a little wind of revolt was hovering. I remember that. It was only yesterday. Because of the comments. It's not the first time. I should create a book with everything I've already said about comments in general. There would be material. But I won't do it. Of course not. I'm still far too well-bred for that. Well-trained to say : "Oh but all that, don't go thinking it's true." The famous "it was just a joke," you know. I must have felt that one coming, not just once. They throw you to the ground, or into the water, or off a cliff, and when you surface : "Oh, don't make that face, it was just a joke, come on." I summarize in barely a sentence now, that's good, it doesn't deserve more. And now war gets added to the clowning. It must have been itching at them. A whole generation that wouldn't have known it. We couldn't die in peace without at least having witnessed that. Already in 1990 or 1991, the first Gulf War was exciting brains. Even mine—that's saying something. At night I would dream of deserts and tracer bullets and I would tell myself that aesthetically it wasn't bad. Aesthetics helps us a lot in the mess-up, I've often noticed. Oh, not the Mona Lisa, not Quentin de La Tour, not even Picasso or Pollock or Opalka. An aesthetics stripped of models rather. A stripped-down aesthetics—that is, poetry in the end, that mystery. But I'm not going to give a lecture this morning. Too weary. Let's get back to code. Right now I'm alternating between hatred of the world, hatred of myself, and code. Impression that code is foolproof. No room for prevarication. It works or it doesn't work. That's the first step. Then comes aesthetics. The problem is that I have to invent everything on that side too. Well, I start from nothing. As usual. I think that if nothing didn't exist, I'd be pretty embarrassed, because I could never leave. So I'd stay there, clinging to something. You know, that something that seems tangible but that the moment you brush against it turns to dust. Nothing that I can classify in the category "something," or even "someone," is still there to prove me wrong. Everything that bore that label has been erased, the definitions have slipped, the dictionary is no longer quite the same. So what ? What to trust ? I'm asking you without asking you. Last night all the same, a good time. Drinks at B.E.'s, at the edge of Roussillon—over there the landmark is the fire hydrant. The rosé was nice and cold and snapped on the tongue, but we contented ourselves with telling and listening about the accident, the foot caught in a rock in Brittany. The difficulty of walking in sand. There were also little pieces of melon with very thin smoked ham, little packages rolled up on themselves, ready to spring to your mouth at the end of a toothpick. And then two cats, one of which is deaf and who don't get along anymore. And then the cherry tree at the back of the garden that was going to produce well until the heavy rains came. And then it's a shame because we all love clafoutis and it's a childhood memory. And we used to keep the pits while they don't. And searching like that for a whole bunch of little subjects to make a pretty conversation, very English in the end, or British, British. A conversation all in all polite, pleasant, without any friction, and where in the end everyone can get up and leave with that impression of having had a good time, without really knowing why. What would this world be without all the chatter, the comments, without the music in the hollow of all that racket ? The question remains. That's what's essential for talking like the rich.|couper{180}

Autofiction et Introspection

fictions

Brico Cash et autres maladresses

It doesn't stick or adhere. Given the barely concealed complaint received by email. People send you comments and you don't respond to them. Right. True, I can't say otherwise. However, I do read the comments. I read them all, the comments. Not just mine. And the impression each time is strange. A mixture of love, tenderness and clumsiness that's almost unbearable. So I read, it hurts, but I don't write comments anymore. Let that be said. Apart from sending my text from time to time to whoever's concerned. I try to say hello, here's this or that, best wishes. I could reduce it further, for sure. Just say here, take this. And nothing more. But respect, politeness, a minimum of civility all the same. I'm the one asking in this specific case. You have to put in a minimum of form. Then whether what I write pleases or not, big deal. I've come a long way on that front. After walloping my morning peepers so regularly, and my evening ones too from time to time - mustn't abuse good things though. What I mean is I've already had enough grief with people skills in painting that I'm not going to start all over again with writing. I can't stand three-quarters of people. That's not mean, what I'm saying. I already bore myself so much that I don't need some third party holding the candle. But maybe it's a character writing this, maybe. After all it says autofiction, that's not for nothing. Otherwise spent an hour wandering around the Brico Cash in Chanas waiting for them to mount my tires. I try to remember the names of the different brushes I looked at but nothing doing. Should have taken a photo. But then what would that serve, to say I know the names of all these brushes. To look like I know, nothing more. I did the same with loads of various powders for filling, sealing, coating surfaces of all descriptions. Same thing, really not much left that I don't already know a bit about. On this point of looking for new vocabulary, you go to all that trouble for not much in the end. You have to work with what you've got. It pleases, it doesn't please, doesn't matter. What matters is continuing to sit down right there, to open this word processor and get on with it, to take your little snail tongs and pull the worms from your nose bit by bit. So an hour. The weather was nice but nothing special, and especially much less hot. That'll be 10,000 kilometers, hardly more. I don't know where I'll be in 10,000 kilometers, I thought. Ça ne colle ni n'adhère. Vu la plainte à peine dissimulée reçue par mail. On t'envoie des commentaires auxquels tu ne réponds pas. Bon. C'est vrai, je ne peux pas dire le contraire. Cependant, je lis les commentaires. Je les lis tous, les commentaires. Pas que les miens. Et l'impression à chaque fois est étrange. Un mélange d'amour, de tendresse et de maladresse quasiment insupportable. Donc je lis, ça fait mal, mais moi je n'écris plus de commentaire. Que ce soit dit. À part pour envoyer mon texte de temps en temps à qui de droit. J'essaie de dire bonjour, voici ceci ou cela, amitiés. Je pourrais encore réduire, c'est sûr. Dire seulement tiens voici. Et puis pas plus. Mais le respect, la politesse, un minimum d'urbanité quand même. C'est moi le demandeur dans ce cas précis. Il faut mettre un minimum de forme. Ensuite que ça plaise ou non ce que j'écris, la belle affaire. J'ai bien avancé de ce côté-là. À force de me tamponner matinutinalement le coquillard, vespéralement itou de temps à autre, il ne faut pas non plus abuser des bonnes choses. Je veux dire que j'en ai déjà assez bavé comme ça de l'entregent avec la peinture que je vais pas m'y remettre avec l'écriture. Je ne peux pas blairer les trois quarts des gens. Ce n'est pas méchant ce que je dis. Je m'ennuie déjà tellement avec moi-même que je n'ai pas besoin d'un tiers d'une tierce qui tienne la chandelle. Mais peut-être que c'est un personnage qui écrit ça, peut-être. Après tout c'est marqué autofiction, ce n'est pas pour des prunes. Sinon passé une heure à errer dans le Brico Cash de Chanas en attendant qu'on monte mes pneumatiques. J'essaie de me souvenir des noms des différents pinceaux que j'ai regardés mais rien à faire. J'aurais dû prendre une photo. Mais ensuite ça servirait à quoi, à dire que je connais le nom de tous ces pinceaux. D'avoir l'air, rien de plus. J'ai fait pareil avec plein de poudres diverses et variées servant à reboucher, colmater, enduire des surfaces de tout acabit. Pareil, il ne m'en reste vraiment pas grand-chose que je ne sache pas déjà un peu. Sur ce point de chercher du vocabulaire neuf, on se met en peine pour pas grand-chose au final. Il faut faire avec ce que l'on a. Ça plaît, ça ne plaît pas, c'est pas important. L'important c'est de continuer à s'asseoir là exactement, à ouvrir ce traitement de texte et d'y aller, de prendre sa petite pince à escargot et de se sortir les vers du nez petit à petit. Donc une heure. Il faisait beau mais sans plus, et surtout beaucoup moins chaud. Ça vous fera 10 000 km, guère plus. Je ne sais pas où je serai dans 10 000 km, j'ai pensé.|couper{180}

Autofiction et Introspection fictions brèves

Carnets | juin 2025

16 juin 2025

On annule Madrid. Et de tenter de revendre les billets pour le Prado sur Le Bon Coin. On annule ainsi, à tour de bras. Pas sans regret ni remord, on ne peut quand même pas dire ça. On annule parce que le blé manque, qu'il fera trop chaud, on annule parce que quand même faut pas pousser, on annule parce que tu ne gagnes pas assez de fric, que tout repose sur mon dos, et que ça commence à bien faire. Que la retraite, je ne la voyais pas comme ça. Que tout est bien sûr encore de ma faute et que je laisse passer l'orage parce que tu veux dire quoi, faire quoi. Encore 150 euros pour finir de payer les pneumatiques — quatre d'un coup, pour être tranquille, toute saison — et qui s'ajoutent encore au reste. J'y vais ce matin pour 9 heures, tout est prêt comme à l'hôpital, on vous attend, tout juste s'il n'y a pas masque et gants blancs. Lu un peu de tout. Rien qui me donne envie d'en parler parce qu'en parler, je ne sais pas faire. Mon truc, c'est de l'écrire, mais hier encore beaucoup plongé dans le code pour améliorer l'aspect rien de ma nouvelle version. C'est-à-dire retirer peu à peu. Oh, le graphisme, la mise en page, ce n'est rien. C'est de tout autre chose dont il faut parler. Ou plutôt non, ne rien dire du tout. Faire. Sinon, le cousin a dû rentrer de l'hôpital. Problème de vessie ou de rein, on ne sait pas encore. On gratte, on prélève, on suppute. Résultats fin de mois. Ne pas oublier. Presque oublié de le noter hier. Sinon, des rêves incroyables encore en si peu d'heures de sommeil. À croire que l'on pourrait faire une théorie basée sur le faible temps de sommeil et la qualité des détails oniriques. Le type que j'ai écrabouillé avait un imper gris maculé de taches de graisse. Mais ce n'était rien à côté de l'odeur épouvantable, un mélange de tabac et de sueur, avec un je ne sais quoi d'épicé à l'urine et au foutre. Et de le croiser comme ça au crépuscule. « Je n'arrive pas à mettre les photos sur Le Bon Coin, tu peux venir m'aider ? » Donc le croiser au crépuscule et de me souvenir d'avoir été frappé par ce type autrefois. Et lui de me sourire en me croisant et moi de lui aplatir la gueule, ni plus ni moins, comme si je voulais oblitérer son visage large, mais ma main, même écartée à fond, n'allant pas jusqu'à ses contours. Ce qui, par dépit, s'achève in extremis par un coup de pompe dans les parties. Mais ce n'est rien. La suite : je me retrouve dans une sorte de prison et un type cogne à la porte et me remet un couteau en plastique encore sale de beurre. Il faut comprendre immédiatement que l'autre que j'ai sonné a le bras long et qu'il veut se venger. Fondu au noir. On se retrouve dans une salle de sport et je vois le type qui m'a tendu le couteau qui ressurgit, mais d'en haut. Il y a un étage. Il tente de m'agresser avec des ciseaux à bout plat bizarres. Genre pelle à tarte, ce qui me fait pouffer. Du coup, je lui dis : « Salut, moi c'est Michel. » Incroyable, non ? Michel est mon second prénom. On devient copains. Mais il y aura des suites, l'autre, le commanditaire, est rancunier. Qui ne le serait pas après avoir reçu un coup de pompe dans les parties ? « Tu as vu l'heure ? Tu ne t'es pas lavé. » Donc il faut que j'arrête là, à contrecœur. Car le rêve continue encore, tout à fait net encore, et je pourrais le poursuivre les yeux ouverts sans difficultés. Mais la contingence oblige. We cancel Madrid. And try to sell the Prado tickets on Craigslist. We cancel like that. Left and right. Not without regret or remorse, you can't say that. We cancel because there's no money, it'll be too hot, we cancel because enough is enough, we cancel because you don't make enough cash, everything's on my back, and this is getting old. Retirement I didn't see like this. Everything's my fault of course and I let the storm pass because what you want to say what to do what. Another 150 bucks to finish paying for the tires—four at once, to be safe, all-season—and that goes on top of everything else. I'm going this morning at 9, everything's ready like at the hospital, they're waiting for you, just short of masks and white gloves. Read a little of everything. Nothing makes me want to talk about it because talking about it I don't know how to do. My thing is writing it but yesterday still deep in the code to improve the look nothing of my new version. That is removing little by little. Oh the graphics the layout, that's nothing. It's something else entirely we need to talk about. Or rather no, say nothing at all. Do. Otherwise the cousin had to come home from the hospital. Bladder or kidney problem we don't know yet. We scrape we take samples, we guess. Results end of month. Don't forget. Almost forgot to write it down yesterday. Otherwise incredible dreams again in so few hours of sleep. You'd think you could make a theory based on little sleep and the quality of dream details. The guy I smashed had a gray raincoat stained with grease spots. But that was nothing next to the awful smell, a mix of tobacco and sweat, with something spicy like urine and come. And running into him like that at twilight. I can't get the photos on Craigslist can you come help me. So running into him at twilight and remembering being hit by this guy before. And him smiling at me as we pass and me flattening his face plain and simple like I wanted to obliterate his wide face but my hand even spread out all the way not reaching his edges. Which out of spite ends up with a kick in the balls. But that's nothing. Next thing I'm in some kind of prison and a guy bangs on the door and hands me a plastic knife still dirty with butter. You have to understand right away that the other one I knocked out has connections and wants revenge. Fade to black. We're in a gym and I see the guy who gave me the knife coming back but from above. There's a level. He tries to attack me with weird flat-tipped scissors. Like a cake server which makes me laugh. So I tell him hi I'm Michel (incredible right ?). Michel is my middle name. We become friends. But there'll be consequences, the other one, the guy behind it, holds grudges. Who wouldn't after getting kicked in the balls. You see what time it is, you haven't washed. So I have to stop here against my will. Because the dream continues still completely clear still and I could keep going with my eyes open no problem. But reality requires it.|couper{180}

Autofiction et Introspection écriture onirique rêves

Carnets | juin 2025

14 juin 2025

Se réveiller tard. Ranger le désordre. Se contenter d'avoir passé une agréable soirée. Faire taire les miaulements en jetant une poignée de croquettes. S'asseoir sur le banc dans la cour. Se dire qu'il faut donner à boire à l'hortensia. Joindre le geste à la pensée. Boire enfin le café passé, non je ne veux rien manger, le dire gentiment. Écouter les martinets. Lever les yeux vers le ciel. Fera-t-il beau, sans doute. Tu as cours à 10 h. C'est bien. Tu as juste trois heures devant toi. C'est à la fois beaucoup et peu. Calculer le temps qu'il reste avant de. Une obsession depuis toujours. Parfois ça se modifie un peu. Combien de temps est-il convenable de rester à un anniversaire, à un mariage, à un enterrement afin de prouver sa participation à un ensemble. Cette arithmétique des présences, tu devrais aller en parler à « quelqu'un ». Comme si personne ne rencontrait jamais quelqu'un. On peut inverser la phrase. Comme si quelqu'un se mettait à écouter personne. Calembredaines, kalam-berdàn, propos froids et faibles. Dans cette fissure-là, justement — entre le dire et l'entendre —, l'or s'est sans doute infiltré il y a de cela des millions d'années. Il faudrait une pompe pour aspirer l'interstice, une laverie flottante pour traiter le gros gravier. Rêver au Klondike. De boues gelées, de terres noires. De l'eau glaciale qui monte jusqu'aux cuisses. S'imaginer ainsi apte à réparer tout et n'importe quoi. Par seule imagination et débrouille. Puis se réveiller : trop tard. Tu as loupé le vol pour l'Alaska. Le cercle arctique s'éloigne, fond, disparaît et tu te retrouves nez à nez avec un géranium. Plus de quarante ans de remords dans une jardinière qui chaque année refleurit rageusement. Se demander si c'est la même jardinière qu'autrefois, lorsqu'elle reposait sur le rebord de la fenêtre familiale. Respirer. Compter jusqu'à trois. Qu'y a-t-il donc dans le mot évasion, sinon un z invisible qui te rappelle le bourdonnement persistant des mouches à merde l'été, le tas de fumier, le gros manche de la fourche plantée. Ou alors tout lâcher comme on lâche une friteuse. Fermer les yeux en attendant que ça passe. Des milliers de brûlures se confondent en une seul, magistrale. Se demander si l'incinération n'est pas pur égoïsme. Imaginer plutôt le festin des asticots, des vers. Participer. Même mort tu participes encore — plus fort que l'or du Klondike, plus patient que l'hortensia. Wake late. Set the disorder right. Be content with having passed a pleasant evening. Quiet the yowling by throwing down a handful of dry food. Sit on the bench in the courtyard. Think that the hydrangea needs water. Join deed to thought. Finally drink the cold coffee—no, I want nothing to eat, say it kindly. Listen to the swifts. Lift your eyes to the sky. Will it be fair ? Probably. You have class at ten. Good. You have just three hours spread before you. It is both much and little. Calculate the time remaining before. An obsession since always. Sometimes it shifts a little. How long is it proper to stay at a birthday party, a wedding, a funeral, to prove your participation in the whole ? This arithmetic of presence—you should go talk to "someone" about it. As if nobody ever met anyone. You can invert the sentence. As if someone took to listening to nobody. Balderdash, kalam-berdàn, talk gone cold and weak. There in that very crack—between the saying and the hearing—gold infiltrated itself, no doubt, millions of years past. You would need a pump to suck the fissure dry, a floating washery to work the heavy gravel. Dream of the Klondike. Of frozen mud, black earth. Ice water rising to your thighs. Imagine yourself thus equipped to repair anything and everything. By imagination alone, and resourcefulness. Then wake : too late. You have missed the flight to Alaska. The Arctic Circle pulls away, melts, vanishes, and you find yourself nose to nose with a geranium. Forty years of remorse in a planter box that each year blooms back, furious. Wonder if it is the same planter as before, when it rested on the family windowsill. Breathe. Count to three. What is there in the word escape, if not an invisible z that calls back the persistent buzz of shit-flies in summer, the dung heap, the thick handle of the pitchfork, planted. Or else let everything go the way you let go of a deep fryer. Close your eyes and wait for it to pass. A thousand burns blur into one magnificent burn. Wonder if cremation isn't pure selfishness. Imagine instead the feast of maggots, of worms. Participate. Even dead you still participate—stronger than Klondike gold, more patient than the hydrangea.|couper{180}

Autofiction et Introspection Temporalité et Ruptures

Carnets | juin 2025

13 juin 2025

En français / in french C’est pendant la nuit que les voix s’éloignent peu à peu, d’elles-mêmes, comme si elles avaient pris conscience de leur propre insignifiance. Comme blessées par cette reconnaissance de leur inutilité, elles auraient décidé de se taire. Ne laissant plus que l’écho de leurs paroles encore présent dans la chambre, comme une présence qui persiste. Elles se taisent, ne disent rien, mais tout ce qu’elles ont dit, tout ce qu’elles auraient pu continuer à dire reste là, comme une branche morte sur l’arbre des possibles. Une branche morte sur laquelle on ne peut plus espérer voir repousser la moindre pousse nouvelle, une branche qu’on pourrait couper sans remords ni regrets mais qu’on ne décide pas de couper précisément à cause de ces regrets et remords. Une branche morte encore attachée à l’arbre des possibles et qui indique par cette seule présence que toutes les possibilités ne conduisent pas vers un avenir. La voix qui demeure n’émet pas vraiment de son, mais un flot d’images qui déferlent ; ce pourrait être un flot de larmes si c’était un œil qui ne cligne pas, qui affronte l’obscurité environnante sans nourrir l’espoir d’une clarté. Un œil grand ouvert sur le noir de la nuit, avec pour seule compagnie ses vieilles peurs. Pendant le rendez-vous avec le médecin à la clinique du sommeil, il y a cette question à un moment : voyez-vous des images avant de vous endormir ? J’ai repensé à ces images avant de répondre que c’étaient des monstres, que c’était l’absurdité la plus absurde déguisée en monstres aux regards froids et figés. C’était très exagéré. C’est comme utiliser la caricature pour atteindre la ressemblance d’un portrait. C’était exagéré, et cette voix qui sortait de ma bouche à cet instant précis inventait au fur et à mesure, parlant de ces choses dont elle ne parle jamais. C’était exagéré parce que c’était un simple questionnaire, un oui ou un non aurait suffi. Pas besoin de décrire tout ça. Mais à cet instant-là, j’ai dû me croire déjà mort, en train de traverser de nouveau le bardo dans le bureau du docteur. Ce genre de choses n’attend pas. Ça vous frappe sans prévenir. Alors on exagère peut-être pour chercher en soi ce qui pourrait encore éveiller la peur. Et moins on la trouve, plus on force l’effet. Heureusement qu’il ne m’écoute pas, me suis-je dit. Car à ce moment précis, j’ai compris qu’une fois encore, je ne parlais qu’à moi-même. Et je me suis arrêté net. J’ai répondu par oui et par non aux autres questions en essayant d’attraper l’écho de ce que je venais de dire, qui avait fini par se coincer contre les murs du bureau, probablement près de la photographie du moai de l’île de Pâques découpée à contre-jour. en anglais / in english It's during the night that the voices gradually pull away, on their own, as if having become aware of their own insignificance. As if wounded by this recognition of their uselessness, they had decided to fall silent. To leave only the echo of their words still present in the room as a kind of lingering presence. They are silent, they say nothing, but everything they said, everything they might have continued to say is still there, like a dead branch on the tree of possibilities. A dead branch on which one can no longer hope to see the slightest new growth return, a branch one could cut without remorse or regret but which one doesn't decide to cut precisely because of those regrets and remorse. A dead branch that would still be attached to the tree of possibilities and which indicates by this presence alone that not all possibilities lead toward a future. The voice that remains doesn't really emit sound, but a flow of images that streams forth ; it could be a flood of tears if it were an eye that doesn't blink, that confronts the darkness surrounding it without nurturing hope for clarity. An eye wide open on the blackness of night with its old fears for company. During the appointment with the doctor at the sleep clinic, at one point there's this question : do you see images before falling asleep ? I thought back to those images before answering that they were monsters, that it was the most absurd absurdity disguised as monsters with cold, frozen gazes. It was very exaggerated. It's like using caricature to achieve the likeness of a portrait. It was exaggerated and this voice that emerged from my mouth at that precise moment was inventing as it went along, speaking of these things it never speaks of. It was exaggerated because it was a simple questionnaire, a yes or no would have sufficed. No need to describe all that. But in that instant I must have thought I was already dead, that I was crossing back through the bardo in the doc's office. That kind of thing doesn't wait. It hits you out of nowhere. So maybe you exaggerate to search within yourself for what might still awaken fear. And the less you find it, the more you force the effect. Good thing he's not listening to me, I thought to myself. Because in that instant I understood that once again I was only addressing myself. And I stopped short. I answered yes and no to the rest of the questions while trying to catch the echo of what I had just said, which had ended up stuck against the walls of the office, probably near the photograph of the Easter Island moai silhouetted against the light. Traduction anglaise réalisée par IA Illustration La havane 2006 @pblanchon|couper{180}

Autofiction et Introspection

Carnets | juin 2025

12 juin 2025

Se disperser n'est pas jouer. Mais quelle fatigue. Physique. Se traîner n'est pas vivre. Hier, S. s'apitoie et me dit : « Annulons Madrid. » Puis, tout de suite après : « Tant pis, on perdra les billets pour le musée. » Ce qui, forcément, me fait réagir : « Mais non, allons déjà en Avignon en juillet, on verra ensuite. » Ce n'est pas parce que moi, j'ai envie de rien qu'il faut en faire un programme. À certaines périodes, il faut aussi accepter que d'autres puissent avoir envie de quelque chose. Tout ça n'est pas égal. Je suis retourné chercher la mallette à 13 000 euros à la clinique du sommeil. J'ai patienté derrière la porte bleue et j'ai tout de suite vu le tableau. Un petit tableau qui cache, je le sais désormais — comme je le savais à ma première visite — un trou dans le mur. « Vous avez récupéré le tableau ? » je demande au toubib. « Non, j'en ai acheté un autre », me répond-il en me rendant ma carte Vitale. Puis, après un silence : « On ne demande pas de caution pour les mallettes, mais lisez attentivement le mode d'emploi. » Ce sur quoi : « Ça fera vingt-quatre euros. » Et toujours pas de sans-fil, il faut se souvenir du code. Cette fois, je m'en souviens du premier coup. Mais tout est en désordre. Dans ce texte, rien ne colle comme d'habitude. Ça ne prend pas. Peut-être même que ça rebute. Faudrait demander, mais on sait très bien comment ça finit quand on demande : l'un dit blanc, l'autre noir, un troisième dit gris. Et voilà. Et tout à coup, en déchargeant la Dacia Logan DCI, je vois le pneu à plat. C'est parti. Morceau de bravoure. Tu mimes la panique à la perfection. C'est la fatigue qui veut ça, et surtout l'envie de rien — et en priorité l'envie que ça crève quand t'as rien demandé. Mais peut-être que quelqu'un, tout au fond, le demande. Ça pourrait être plausible. Un qui ne dit rien. Il ne dit rien, mais à un moment ça suffit, et on se retrouve avec une crevaison. « Attends », que je dis, « tu ne vas pas le croire : j'ai une bombe anti-crevaison qui traîne dans le coffre depuis... je ne sais pas quand. 2020. » Mais on peut aussi appeler l'assurance, parce que je ne sais pas retirer cette roue de secours. Et où est passé le cric ? Tu le sais ? Moi, non. Et la fatigue qui tape en même temps que le soleil, déjà dès 10 h du matin. Nous irons au garage, et j'en passe. Puis payer les sous pour effectuer la réparation, afin de revenir au garage et valider le C.T. avant le 5 juillet, rappelle-toi. « Et vous comptez partir en Avignon avec ça, à quatre ? » — « Oui m'sieur. » On est dans le même état, à peu près tous : des zombies dans un véhicule fantôme. Il appuiera sur la pédale d'accélérateur à fond, on ouvrira les fenêtres en grand, et on passera de vieux CD en poussant le volume. En attendant, on est encore en juin. On n'a même pas franchi la moitié. Il faut que j'aille rendre la mallette. Ça ne m'a pas fait grand-chose, de dormir — le peu que j'ai dormi — avec du plastique dans le nez. C'est sans doute raté pour aujourd'hui. Une fois de plus. Tu t'es encore mis à parler de quelque chose alors que tu ne voulais parler de rien. Mais la prise de conscience arrive vite, presque instantanément. Dans le texte même, au moment où il te mène par le bout du nez. Puis se demander si tout doit être traduit systématiquement. En anglais notamment. Probablement que non. Car il faut bien plus qu'une IA pour traduire certaines parties de ce texte sans que ça ne devienne ridicule. Hier j'ai laissé « la position du soldat », alors que je voulais écrire « en chien de fusil ». Sauf que même si je peux y voir un vague rapport, le soldat recroquevillé dans un trou en attendant que ça passe, ce n'est pas tout à fait la même idée que chien de fusil. Donc ce texte demande une traduction plus « artisanale » si artisanale veut dire peine et temps pour un résultat juste. Pas de traduction aujourd'hui.|couper{180}

Autofiction et Introspection Essai sur la fatigue Murs

Carnets | juin 2025

11 juin 2025

Une voix, faible, parvient à quelqu’un couché sur le flanc. 20h, l’été. Être allongé ainsi — rien de remarquable, peut-être. Pourtant, un peu tôt. S’il était 22h, le silence suffirait. S’il était 2h du matin, on pourrait s’en offusquer. Allongé sur le flanc à 2h du matin ? On dit 2h, et c’est la nuit. Ça mérite d’être noté. À cette heure-là, 2 ou 4, à quoi bon distinguer ? Disons-le : après minuit, les choses se délitent. Et être là, étendu, alors que la lumière traîne encore… cela ne dit pas vraiment le repos. Pas vraiment. Plutôt comme un arbre tombant de biais, sans qu’on sache de quel côté il basculera. Mieux vaut se décaler. Mieux vaut ne pas chuter avec lui. Et pourtant, à 20h, on pourrait se demander : pourquoi es-tu là, comme ça ? Toi qui ne t’allonges jamais sans raison. Quelques heures, recroquevillé — en soldat, en fœtus, brièvement — et puis c’est tout. Quelque part, dans l’un de ces monologues que tu transportes comme compagnie, quelqu’un a parlé de fatigue. Pas celle qu’on nomme. Celle qui s’insinue en silence. Peau. Chair. Os. La fatigue qui est la peau, qui est l’os. Au début, tu l’as niée. Tu as dit : c’est pour les autres. Pas moi. Ce genre de phrase finit rarement bien. Une fois qu’on dit « les autres », on est déjà dehors. Et pourtant tu as toujours préféré la compagnie. Le « il » ou le « elle », sans poids, sans nom, sans visage. La voix sans odeur, sans rugosité, sans gorge véritable. « Il », « elle » — mieux que Machine. Mieux que Chose. Mais eux aussi : peau. Chair. Os. Juste loin. Plus que loin. Mars, à côté, c’est la porte d’à côté. Alors peut-être qu’allongé comme ça, tu pourrais commencer à penser. Passé. Présent. Futur. Pourquoi ne pas être optimiste ? Même un mourant peut espérer — à condition que ça ne prenne pas trop de temps. 20h, encore tôt, disent certains. Tard, disent d’autres. Tu sais combien la compagnie se régale de ces bêtises. Et soudain cela revient — net, proche, comme si c’était maintenant — ce souvenir : être allongé sur le flanc, sur le sol de la chambre. Une veillée. C’est assez nouveau pour toi, non ? Tu aimes ce genre de chose. Es-tu à l’aise ? Le fait est que, lorsqu’on est ainsi allongé, et qu’on regarde un corps étendu — certains réflexes s’installent. Peut-être que le vrai geste — le grand — serait de se lever. 20h02. Dire : non, pas encore. Attendre. Il y aura le temps. Le temps de s’allonger à 2h ou 4h. Quelle différence, puisque la nuit vient de toute façon ? Je ne veux pas être Beckett. Je veux être moi. Même si ça vacille. Même si ça manque de style. Je ne veux pas briller. Ce n’est pas le propos. Je veux me déplier. Comme des draps restés pliés trop longtemps. Raides. Marqués. Non pour être montrés. Juste pour les étendre. Les lisser un peu. Voir ce qui s’est pris dans les ourlets. Ce qui n’a pas été dit — alors que cela aurait dû l’être. Ou ce qui a refusé, obstinément, d’être jamais dit. Peut-être que cela ne mène nulle part. Peut-être est-ce le propos. Aller nulle part — mais le dire. Et que ce « nulle part » soit plein. Parce qu’il aura été dit. Je ne veux pas une autre voix. Je ne veux pas de masque. Je veux l’écho. Le bourdonnement. Le mien, même tremblant. Même hésitant. Ce qui compte, c’est que ça passe. À travers moi. Juste : que ça passe. Et si quelque chose parfois sonne comme Beckett, ce n’est pas de l’imitation. C’est une rencontre. Brève. Comme lorsqu’on aperçoit quelqu’un à une fenêtre et qu’on se demande — était-ce quelqu’un que j’ai connu ? Ce pourrait être le bon moment. Pour commencer une sorte d’autobiographie. Petite. Mesurée. Mais tu ne le fais pas. Tu retiens. Tu ne sais pas pourquoi. Peu importe. Ce qui compte, c’est que, allongé ainsi, la lumière encore présente, tu deviens de plus en plus habile à ne pas entrer. Pas à ne pas écrire — non. Mais à ne pas pénétrer ce que tu appelles le « réel ». Ce « réel » que tu portes comme un poids léger. Presque rien. Mais qui te dévie de ta route. Tu te retiens comme on retient une larme. Elle monte. Elle ne tombe pas. Comme une main posée sur une porte qu’on n’ouvre jamais. Tu ne veux pas de confessions. Tu détestes ce mot. Trop proche de la faute. Trop proche du pardon. Tu ne veux pas d’explications. Que pourraient-elles expliquer ? Que tu es couché sur le flanc, l’été, à 20h ? Que tu songes à toutes les choses que tu ne diras pas ? Tu ne veux pas briller. Tu veux être exact. Ou frôler, du moins, une forme précise de silence. Une vérité qui arrive de biais. Par la retenue. Par l’évitement même. Pas par refus. Une manière d’être debout, en étant couché. Une manière d’être là, sans avancer. Une manière de rester, sans faire un seul pas. A voice, faint, reaches someone lying on their side. 8 p.m., summer. Lying like this—nothing remarkable, perhaps. Still, a little early. Had it been ten, silence would suffice. Had it been two a.m., one might object. Lying on your side at two a.m.? They say two, and it's night. That's worth noting. At that hour, two or four, what’s the use distinguishing ? Let's agree—after midnight, things unravel. And to be down like that while light still lingers... that doesn’t suggest rest. Not really. More like a tree falling sideways, unclear where it’ll land. Best to step aside. Best not to go with the fall. Still, at 8 p.m., you might wonder : why are you here, like this ? You, who rarely lie down without a reason. A few hours, curled—soldier-like, fetal, brief—and done. Somewhere, in one of those monologues you carry for company, someone mentioned fatigue. Not the kind you name. The kind that slides in quietly. Skin. Flesh. Bone. The fatigue that is skin, is bone. At first, you denied it. Said : that’s for others. Not me. That sort of sentence rarely ends well. Once you say “others,” you’ve already stepped out. And yet you always preferred company. The “he” or “she,” weightless, nameless, faceless. The voice not tied to any scent, any roughness, any real throat. “He,” “she”—better than Machine. Better than Thing. But they too : skin. Flesh. Bone. Just far. Farther than far. Mars, by comparison, is next door. Maybe, then, lying like this, you could start thinking. Past. Present. Future. Why not be optimistic ? Even a dying man may hope for something—so long as it doesn’t take too long. 8 p.m., still early, say some. Late, say others. You know how the company delights in such nonsense. And suddenly it returns—clear, close, as if now—this memory : lying on your side on the bedroom floor. A wake. That’s new enough for you, isn’t it ? You like that sort of thing. Are you comfortable ? The thing is, when you lie like this, and look at a body laid out—certain reflexes creep in. Maybe the real act—the big one—is to rise. 8:02 p.m. Say : no, not yet. Let’s wait. There will be time. Time to lie down at 2 or 4. What’s the difference, if night is coming anyway ? I don’t want to be Beckett. I want to be me. Even if it falters. Even if it lacks style. I don’t want to shine. That’s not the point. I want to unfold. Unfold, as in sheets left folded too long. Stiff. Lined. Not to display. Just to lay it flat. Smooth it some. See what got caught in the hems. What remained unsaid—when it should’ve been. Or what refused, stubbornly, ever to be said. Maybe it leads nowhere. Maybe that’s the point. To go nowhere—but say so. And let that “nowhere” be full. Because it was spoken. I don’t want another voice. I don’t want a mask. I want the echo. The hum. My own, even trembling. Even stuttering. What matters is that it gets through. Through me. Through, full stop. And if something sometimes sounds like Beckett, it’s not mimicry. It’s encounter. Brief. As when you glimpse someone in a window and think—was that someone I knew ? This could be the right moment. To start a kind of autobiography. Small. Measured. But you don’t. You hold back. You don’t know why. Doesn’t matter. What matters is, lying like this, light still lingering, you’re getting better and better at not going in. Not writing—no. But not entering the thing you call “real.” That “real” you carry like soft weight. Nearly nothing. But which turns you off-course. You hold back like someone holding back a tear. It rises. It never falls. Like a hand on a door never pushed open. You don’t want confessions. You hate the word. Too near guilt. Too near pardon. You don’t want explanations. What would they explain ? That you’re lying on your side, summer, 8 p.m.? That you’re thinking of all the things you won’t say ? You don’t want to shine. You want to be exact. Or brush, at least, a precise kind of silence. A truth that arrives sideways. Through restraint. Through even avoidance. Not refusal. A way to stand, while lying down. A way to be there without stepping forward. A way to remain, without a single step.|couper{180}

Autofiction et Introspection

Carnets | juin 2025

10 juin 2025

Réparations à faire suite au C.T. avant le 05/07. Dans les 800 € et encore, « on s'arrange », a dit le gars. C'est pas que ça m'arrange, moi, en ce moment, mais de toute façon il faut le faire. Je commence à regarder tout ce que je peux vendre pour récupérer un peu de sous. Le projecteur par exemple : depuis combien de temps je ne m'en suis pas servi ? Pareil pour tous ces ordis stockés au grenier. Hier j'ai vu qu'une carte mère pouvait être revendue jusqu'à 30 ou 40 €. C'est la mode du DIY où les gens essaient de rafistoler tout un tas de choses avec même un certain « style ». Claviers mécaniques avec touches en bois ou en plastique fondu reconverti en touches vernissées, boîtiers de box ou de home bidule en tout genre. Avec les imprimantes 3D, rien de plus simple désormais. Mon voisin, ingénieur en retraite rescapé d'une greffe de foie, fait tourner la sienne en pleine nuit. Il m'a raconté les nuits qu'il a passées à discuter avec les plus jeunes pour la monter. Parce que vous savez, c'est tout en kit comme chez les Suédois, et là le plan est vraiment qu'en chinois. Faut que je m'arrête, je raconterais ma vie, celle des voisins, la vie de tous les habitants de la rue, du village, du département si je ne m'arrêtais pas. J'ai tellement l'impression de connaître tout le monde. Et pourtant je peux passer des semaines sans piper mot à qui que ce soit. J'ai déjà testé. Il faut dire que c'était à Paris. Que mon boulot était de parler de 17 h à 21 h à la France entière pour lui demander ce qu'elle avait regardé comme chaîne et si elle avait vu la pub et si durant la pub la France avait zappé pour aller voir autre chose. C'était encore facile à l'époque, y avait pas tant de chaînes. Je ne sais pas comment ils font aujourd'hui. Peut-être que tout est désormais inclus dans la télé ou dans la télécommande. Là aussi faut que je m'arrête. Sinon je vais encore partir sur des plombes là-dessus, la bêtise audiovisuelle, la mesure d'audience, et pendant que j'y suis, les sondages politiques. « Je vote Chirac parce qu'il présente bien. Ah non, j'aime pas machin parce qu'il est trop petit. » Bref. Pas avancé d'un iota sur la proposition de la semaine. La voix dans la nuit, la voix dans la journée... tout ça est resté en plan. En revanche j'ai construit un script de recherches super pointu dans SPIP. Je donne un mot, je peux choisir sur le site entier, sur une rubrique et il m'affiche ensuite toutes les phrases où le mot est utilisé. Avec export en format .md ou PDF. J'essaie de faire un script parallèle sur l'analyse des phrases. Je galère pour les fonctions PHP et là où j'en suis désormais tout est pratiquement nickel : je peux sélectionner le nombre de mots, le type de ponctuation, presque me fabriquer de nouveaux textes rien qu'avec des phrases de 5 mots ou 3. Sauf que j'ai un problème de formatage quelque part, mes phrases sont truffées de losanges puis de caractères sibyllins. Là aussi faut que je m'arrête. J'ai passé le Kärcher dans la cour pour me détendre. C'était pas du luxe. 800 €, merde, je me disais. Peut-être que vu que je m'en sers une fois l'an, je peux revendre aussi le Kärcher... Repairs needed following the MOT before 05/07. Around 800 quid and even then, "we'll sort something out," said the bloke. It's not that it suits me right now, but there's no getting around it, really. I'm starting to look at everything I can flog to scrape together a bit of cash. The projector, for instance—how long since I've actually used the bloody thing ? Same goes for all those computers gathering dust in the loft. Yesterday I saw that a motherboard could fetch thirty or forty quid. It's all this DIY craze where people are trying to cobble together loads of stuff with a certain "style," whatever that means. Mechanical keyboards with wooden keys or melted plastic converted into varnished keys, cases for modems or home-thingummy boxes of every description. With 3D printers, nothing's simpler these days. My neighbor, a retired engineer who survived a liver transplant, runs his through the night. He told me about the nights he spent chatting with the younger lads to get it assembled. Because you know how it is, it's all flat-pack like the Swedes, except the instructions are entirely in Chinese. I need to stop myself here or I'd end up telling you my life story, the neighbors' lives, the lives of everyone on the street, in the village, in the entire bloody county if I didn't put the brakes on. I have this overwhelming sense that I know everyone. And yet I can go weeks without saying a word to anyone. I've tested this. Mind you, that was in London. My job was talking to the entire nation from five to nine, asking what they'd been watching on telly and whether they'd seen the ads and if, during the ads, the nation had switched over to something else. It was easier back then—there weren't so many channels. I don't know how they manage it now. Maybe it's all built into the TV or the remote these days. I need to stop again here or I'll be off on one for hours about audiovisual stupidity, audience measurement, and while I'm at it, political polling. "I'm voting for Blair because he looks the part. Oh no, I don't like that other bloke because he's too short." Christ. Haven't made the slightest progress on this week's project. The voice in the night, the voice in the day... all of it's been left hanging. On the other hand, I've built this incredibly precise search script in SPIP. I give it a word, I can choose to search the entire site or just one section, and it shows me every sentence where the word appears. With export to .md or PDF format. I'm trying to build a parallel script for sentence analysis. I'm struggling with the PHP functions, and where I've got to now, everything's practically perfect—I can select word count, punctuation type, almost construct new texts using nothing but five-word or three-word sentences. Except I've got some formatting problem somewhere, my sentences are riddled with diamonds and mysterious characters. I need to stop here too. I took the pressure washer to the courtyard to unwind. Not a moment too soon. Eight hundred quid, bloody hell, I was thinking. Maybe since I only use it once a year, I could flog the pressure washer as well...|couper{180}

Autofiction et Introspection Technologies et Postmodernité

Carnets | juin 2025

9 juin 2025

Ce ne serait pas uniquement dans le noir. En plein jour aussi désormais. Tu es sur le chemin de terre près du Rhône, tu as décidé d'avancer. Tu avances. Le corps est lourd, pesant, récalcitrant. Et toi tu lui dis d'avancer, un pas après l'autre. Aller encore un. Et encore un. Et puis un pas encore. Qui dit d'avancer, demande cette voix derrière la voix. Mais tu ne t'arrêtes pas, toi tu avances. Les voix se chamaillent, elles se chamaillent toujours un peu. C'est de la distraction. C'est pour que tu ne voies pas quelque chose derrière ces voix. Comme si depuis tout ce temps tu ne l'avais pas vu. C'est le jeu. Tu fais semblant de ne pas l'avoir vu et tu te laisses distraire par ces voix en plein jour, comme en pleine nuit. Et tu avances comme ça sur le sentier de terre et tu avances comme ça jour après jour. Vers quoi, quelle importance. Quand ça s'arrêtera, tout se taira. Le silence aura son mot à dire enfin. It wouldn't be just in the dark. Broad daylight now too. You are on the dirt path by the Rhône, you have decided to move forward. You move forward. The body is heavy, weighted, balking. And you tell it to move forward, one step after another. Go on, one more. And one more. And then one step more. Who says move forward, asks this voice behind the voice. But you don't stop, you move forward. The voices squabble, they always squabble a little. It's distraction. It's so you won't see something behind these voices. As if all this time you hadn't seen it. That's the game. You pretend not to have seen it and you let yourself be distracted by these voices in broad daylight, as in deep night. And you move forward like that on the dirt path and you move forward like that day after day. Toward what, what does it matter. When it stops, everything will fall silent. Silence will have its say at last.|couper{180}

Autofiction et Introspection

Carnets | juin 2025

8 juin 2025

Journée bizarre. Travail sur le code de 5h à 11h. Mise en page à la Beckett. Sobriété avant tout. Plus d'images affichées dans les cartes. Priorité au texte. Simplification de la page rubrique carnets. J'ai pris modèle sur les 365 jours d'Ubuweb, mais avec un peu plus que du simple HTML. Il y a du JS et du Tailwind CSS. Mais tout cela devient de plus en plus léger, facile à naviguer. Pris aussi le parti de mettre les carnets en arrière-plan des groupes thématiques. Trop pénible de suivre l'ordre chronologique. Les compilations mensuelles sont sur la touche. Trop lourd, indigeste. À 11h, départ pour Pont-d'Isère où nous retrouvons les deux B. J'avais aussi pris un peu de temps pour faire un clafoutis en buvant mon café. Mais j'ai eu la main un peu lourde sur le sel. À noter que la pâte serait excellente pour un cake, mais à éviter pour les clafoutis. L'aspect flan a disparu sans doute en raison d'un excès de farine, et puis je n'avais que trois œufs. Plaisir de passer le reste de la journée à voir le temps passer. Soleil, pas trop chaud. Nous avons déjeuné sous le grand catalpa qui par endroits laisse apercevoir des bouquets de fleurs blanches et jaunes auxquels je ne me serais pas attendu. Discussion sur les petits-enfants qui entrent tous dans l'adolescence avec les premières difficultés occasionnées aussi par les séparations, les divorces. J'ai peu participé à la conversation. S. était plus en verve. De mon côté je réfléchissais à une voix dans la nuit. À mes insomnies, aux relations que peut entretenir la conscience avec le corps dans ces moments-là. Je n'ai pas eu le temps de lire les extraits de Compagnie de Beckett, sur quoi l'exercice est inspiré. Nous avons rapporté deux cageots d'abricots. Nous devions les couper en quatre le soir même pour les laisser sucrer toute la nuit mais au bout du compte je me suis presque tout de suite remis au code et S. s'est reposée devant une série. En conduisant j'ai pensé que ce serait bien que cette voix dans la nuit soit celle de l'insatisfaction chronique. J'ai pensé à ça en écoutant S. me dire un de ses regrets qui sonna à cet instant comme un reproche, ou que j'ai pris plutôt comme un reproche qui m'était adressé de façon indirecte. J'ai fait le point sur tous les reproches indirects que j'avais dû essuyer durant une vie entière que j'avais fini par prendre à mon compte. Et tout ça finissait par se confondre avec cette voix dans la nuit : elle se tenait assise sur mon ventre et je sentais son poids impressionnant, j'étais oppressé, et je me disais que ça serait bien qu'elle se lève et que je ne l'entende plus. Puis nous sommes arrivés et j'ai porté les deux cageots d'abricots jusqu'à la maison en me demandant ce que je pourrais bien alléger encore sur ce site pour qu'il respire un peu mieux. Odd day. Worked on code from five to eleven. Layout in the Beckett manner. Austerity above all. No more images displayed in the cards. Text takes precedence. Simplified the journal section page. I took the 365 days of Ubuweb as my model, but with slightly more than simple HTML. There's JS and Tailwind CSS. But it's all becoming lighter, easier to navigate. I also decided to place the journals in the background of the thematic groups. Too tedious to follow chronological order. The monthly compilations are sidelined. Too heavy, indigestible. At eleven, departure for Pont-d'Isère where we meet the two Bs. I had also taken time to make a clafoutis while drinking my coffee. But my hand was rather heavy with the salt. Worth noting that the batter would be excellent for a cake, but to be avoided for clafoutis. The custard aspect disappeared, no doubt due to excess flour, and I only had three eggs. The pleasure of spending the rest of the day watching time pass. Sun, not too hot. We lunched under the great catalpa which in places reveals clusters of white and yellow flowers I wouldn't have expected. Discussion about the grandchildren all entering adolescence with the first difficulties occasioned also by separations, divorces. I participated little in the conversation. S. was more animated. On my side I was thinking about a voice in the night. About my insomnia, about the relations consciousness might maintain with the body in such moments. I didn't have time to read the extracts from Beckett's Company, on which the exercise is based. We brought back two crates of apricots. We were to cut them in quarters that same evening to let them sweeten all night but in the end I almost immediately returned to code and S. rested in front of a series. While driving I thought it would be good if this voice in the night were that of chronic dissatisfaction. I thought this while listening to S. tell me one of her regrets which sounded at that instant like a reproach, or which I rather took as a reproach addressed to me indirectly. I took stock of all the indirect reproaches I had had to endure during an entire lifetime that I had ended up making my own. And all this finished by merging with this voice in the night : it sat on my stomach and I felt its impressive weight, I was oppressed, and I told myself it would be good if it would get up and I would no longer hear it. Then we arrived and I carried the two crates of apricots to the house wondering what I might lighten further on this site so it could breathe a little better.|couper{180}

Autofiction et Introspection Technologies et Postmodernité