25.Conscience du tableau

Le flux d’information est ininterrompu. C’est seulement lorsque l’attention parait s’assoupir, accaparée par d’autres objets que la sensation d’une déconnexion s’installe.
Rester focalisé sur l’attention nécessite de vibrer à une fréquence particulière dont la source est le cœur. Et en même temps abandonner cette fréquence est tout aussi nécessaire pour explorer la souffrance, la compassion, pour être humain.
Nous ne sommes pas tout seul dans cette galère.
Nous sommes seuls et en même temps nous ne le sommes pas. C’est toute l’ambiguïté de la conscience qui ne peut évoluer sans créer l’altérité.
Il en va de même du peintre face au tableau. Le tableau n’est pas au delà du champs de la conscience. Il ne peut rien y avoir d’autre que la conscience.
Si je ne peux voir le tableau avant de le faire c’est que c’est le chemin que ma conscience me demande d’emprunter. C’est le processus qu’elle découvre en même temps qu’il s’opère pour se découvrir elle-même.
Pablo me secoue l’épaule.
— Le café est prêt camarade. Je reconnais immédiatement son accent je sais que c’est lui en même temps que l’odeur de pain grillé pénètre dans la pièce.
Plus précisément je me vois allongé sur le lit, je vois la pièce, la porte s’ouvrir , Pablo apparait sur le seuil avec un plateau sur lequel est posé une tasse de café et des tartines beurrées. Puis il pose le plateau sur la table de chevet, s’arrête un instant pour me regarder dormir, hausse les épaules et me secoue l’épaule.
Plus précisément encore tu pourrais encore mieux faire et évoquer tout ce que tu n’as pas vu me dit Pablo en souriant.
Puis il se dirige vers la fenêtre et tire les lourds rideaux de velours. La lumière pénètre dans la pièce et je dois plisser les yeux pour m’adapter à la clarté.
—Le fait que tu aies des implants n’arrange pas les choses me dit-il.
—Des implants ?
— Il s’agit de cristaux que les reptiliens plantent dans la cervelle des êtres humains pour réduire leurs capacités, en faire des esclaves dociles.
— tu rigoles Pablo ? Je me serais aperçu de ça si on m’avait enfoncé des cristaux dans la cervelle tout de même ?
— Bien sur que non mon cher. Il ne s’agit pas de cristaux tels que as l’habitude d’en voir, ça ne se passe pas au niveau de ta cervelle physique, mais au niveau du corps éthérique. Il suffit parfois d’un rien pour qu’ils te mettent leur sale patte dessus. Un cauchemar par exemple, du moins tu penseras que ce n’était qu’un cauchemar, alors qu’en fait tout est parfaitement réel.
— Mais il faut qu’un rêve ne soit qu’un rêve pour que la réalité soit la réalité Pablo. Tu me flanques la trouille là. Dans ce cas nous ne pouvons jamais être surs de rien ?
— Qu’est ce que ça veut dire être sur ? me demande Pablo. Puis il repart avec son plateau et je reste seul avec l’écho de la question qui rebondit sur les parois de la chambre.
Je bois lentement mon café, puis soudain je regarde la tasse. Sur celle-ci une inscription surgit comme si elle s’écrivait dans l’instant. "écoute ton cœur" en lettres dorées.
Et là un vertige me saisit. Est-ce que c’est moi qui invente ou bien est-ce tout simplement une coïncidence ?
C’est à ce moment là que Pablo ouvre à nouveau la porte et me dit
—Ecoute ton cœur dans l’instant ! le lave vaisselle a fini par effacer la suite, mais la seconde partie de la phrase est essentielle. Puis il repart comme il est venu.
ça y est ma cervelle commence à bouillonner, je suis réveillé pour de bon, je jette un coup d’œil par la fenêtre et j’aperçois le ciel bleu au dessus des toits de la ville. Il faut que j’écrive toutes ces choses avant de les oublier.
Je m’assieds à ma table, j’ouvre mon cahier je prends le feutre noir à pointe fine fétiche avec lequel j’ai l’habitude de noircir toutes ces pages et je tente de récapituler les idées dans l’ordre,
Il n’y a que lorsque j’écris que j’ai la sensation d’être en accord avec un ordre qui m’appartient, qui n’appartient qu’à moi.
— Ce que tu dis est drôle me dit le peintre, je pourrais dire exactement la même chose lorsque je peins.
Je tourne la tête mais je sais déjà que je ne verrai rien.
La conscience ne voit que ce qu’elle a besoin de voir d’instant en instant et rien de plus ni rien de moins.
Post-scriptum
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Faites au mieux
—Faites au mieux… Phonétiquement j’eus un doute. Fête ou faites. Je perdis quelques heures en supputation sans oser demander de précision. Il vaut mieux ne jamais poser de question en réunion. C’est très mal vu. Les jeunes se font avoir régulièrement. Les jeunes posent des questions en réunion. Un ange passe. Les vieux sourient intérieurement. Mais ils ne le montrent pas bien sûr. Avoir un jeune en réunion c’est toujours une attraction à ne pas louper. Chacun doit faire sa petite expérience. Et Au mieux, OMIEUX ? était-ce le nom d’un lieu-dit où la fête se tiendrait si, dans mon incompréhension totale, en tâtonnant je dusse m’y rendre. Je me doutais que ce ne pouvait être si simple, et puis c’était illogique d’envoyer ainsi un employé faire la fête avec tout ce travail encore à faire. Je fis semblant de ne pas avoir entendu ce que je venais de penser et je hochai la tête en silence. Ce fut la réponse attendue. Un ou deux jeunes gens posèrent des questions saugrenues, des anges passèrent et repassèrent, les vieux furent, comme chaque lundi matin, hilares intérieurement. Je sortis mon calepin pour faire des gribouillis destinés à faire baisser la tension nerveuse, pour m'évader tout en étant là, pour être attentif autrement à tout ce qui pourrait se dérouler là. Mais tout de même cela me préoccupa durant quelques heures encore. Car ne faisais-je pas déjà du mieux possible à peu près chaque tâche qui m’incombait. Fallait-il faire encore faire mieux que d’habitude ? Fallait-il faire mieux que mieux, c’est à dire mal au final ? Un étrange doute accompagné de plusieurs soupçons naquirent comme des champignons après les pluies d’octobre, étaient-ils comestibles, toxiques, je me penchais encore des heures sur l’embarras du choix et fit chou blanc comme il se doit. A la fin de la journée je n’avais strictement rien fichu. Le directeur entra en trombe dans la salle, s’approcha du bureau derrière lequel j’étais et il me demanda :— alors c’est fait ? Sans ciller je hochais gravement la tête. Il exhiba un sourire satisfait. Ce qui était une chose excessivement rare pour être marquée d’une pierre blanche. Où allais-je dégotter une pierre blanche à cette heure cependant ? Je l’ignorais. Puis la semaine passa et nous passâmes tous en même temps à toute autre chose. C’est à dire à la semaine suivante. Nous avions tous fait au mieux sans nous appesantir plus qu’à l’ordinaire. Nous serions prêts pour la prochaine réunion hebdomadaire. Aucun incident notoire ne pourrait l’empêcher. A part la fin du monde si elle daignait arriver comme un cheveu sur la soupe. Encore qu’on peut encore avaler la soupe nonobstant le cheveu , quand on n’est pas bien fier, quand on veut faire au mieux, et surtout ne pas se poser de question insoluble.|couper{180}
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Se lancer
D'après une idée d'atelier d'écriture où je ne pense pas avoir tout compris du premier coup. Mais, je me lance tout de même Photo découverte sur l'excellent site https://www.michellagarde.com/ dans ses dramagraphies Il faut vous lancer… on ne sait pas comment vous le dire… et sur tous les tons… lancez-vous… Je mis un temps avant de comprendre qu’ils s’adressaient à moi. Ou du moins à eux-mêmes au travers de moi. Car il est extrêmement rare que l’on s’adresse vraiment à moi tel que je suis. Moi-même y parvenant une fois tous les dix ans et encore, assez difficilement Il fallait donc se rendre à l’évidence. Il fallait se lancer aussi dans cette approche. Je n’étais ni plus ni moins qu’un épouvantail, un homme de paille, à moitié Turc. Il insistaient sur la tête. Se lancer… ils me la baillaient belle. On ne se lance pas comme ça sans y penser. Sans y réfléchir. Sans établir de plan en tous cas. Peser le pour et le contre en amont mais aussi en aval. On oublie toujours l’aval. Sans compter qu’il faut en premier lieu une rampe de lancement. Une armée d’ingénieurs, des super calculateurs. Sans oublier la matière première, le béton, l’acier, le fer. Sans oublier la bonne volonté, une quantité très précise de hargne, ajouté à quelques soupçons de naïveté. Et puis c’est tellement trivial de le dire mais il faut tout de même le dire, pour se lancer il faut surtout le nerf de la guerre. Ça ne se trouve pas sous le sabot du premier cheval bai cerise venu. Tout une machinerie à mettre en branle, pour dégotter le fameux nerf. Sans oublier tous ces rencards. Rendez-vous chez le banquier avancez de deux. Rendez-vous à l’Urssaf reculez de trois. Sans oublier l’imprimeur, combien pour une publicité de lancement je vous prie. Et si je ne prends que le recto ? Attendez il me reste peut-être quelques pennies pour une ou deux capitales. C’est bien les Capitales pour lancer une campagne de lancement non. Ne pas être trop bégueule. Voir grand. Un flyer format A5. Avec en gros Demain, JE me lance.. Venez assister au spectacle. Deux francs six sous la place. Et ne croyez pas qu’il s’agit de l’homme Canon. Une vieille resucée de Luna parc. Rien de tout ça. Juste une tentative burlesque, tragique, comique ? Ah ah ah mystère et boule de gomme, vous le saurez si vous achetez le billet. Tarif promotionnel pour les Cents premiers : un francs vingt-cinq centimes seulement pour en prendre, EN AVANT PREMIERE , plein les mirettes. Lancez-vous ! laissez-vous tenter ! Venez nombreux assister au lancement.|couper{180}
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Tendre
travail d'élève, stage "oser, hésiter" mai 2023 Il faut tendre, sans être tendre, c’est à dire, ne pas céder comme le beurre cède au couteau qui rabote la motte ( négligemment le plus souvent) Il faut dire au couteau : Ce n’est pas parce que je compte pour du beurre qu’il faut en profiter ! Il faut tendre l’oreille, sans être dur de la feuille. Ceci étant dit si on tend l’oreille, ce n’est pas ce qu’elle va capter qui nous intéressera en premier lieu, mais plutôt se concentrer sur cette action machinale, vous savez, qui consiste à tendre une oreille. Comment tendre une oreille sans se casser les pieds, ou les casser aux autres, un enjeu de taille. Le placement du corps tout entier doit avoir une importance. Selon que l’on se tient de face ou de profil, on ne peut tendre l’oreille de la même façon. Idem si l’on est assis ou debout, voire allongé, et encore vivant ou mort, à dix-huit mètres de profondeur sous l’eau ou au sommet d’un poteau télégraphique. Le son frappe l’oreille suivent une règle de tangentes assez absconse mais bien réelle. Tendre du linge sur un fil demandera aussi un peu d’attention. Ne pas perdre de vue le fil, tout en tenant d’une main l’épingle, de l’autre la chemise— si c’est bien une chemise ( on peut le vérifier et modifier le mot ça ne changera pas grand chose sauf la phrase). Tendre vers le mieux, s’efforcer vers ça est à prendre avec des pincettes, sachant d’une part que le mieux est l’ennemi du bien et que d’autre part il faut savoir d’où l’on vient avant de prétendre se rendre où que ce soit. Mais si c’est vers un mieux, il y a de grandes chances que l’origine soit Un bien que l’on ne saurait supporter en l'étatUn mal que l’on cherche à renommerUne énigme, on ne sait pas d’où l’on part on se contente simplement d’emboîter le pas du plus grand nombre vers le mieux. Il faut noter les pistes consciencieusement pour ne pas s’égarer inutilement. Tendre vers une certaine précision, mais sans jamais l’atteindre de plein fouet, aucun carambolage n’améliore la précision. Aucun carambolage n’apporte quoique ce soit de bien précis si l’on n’en meurt pas, qu’on ne se retrouve pas hémiplégique, amnésique, amputé, groggy ou même indemne. On a juste assisté à un carambolage, peut-être même avoir endossé un rôle de premier plan, mais il ne vaut mieux pas profiter de l’occasion pour tendre vers la célébrité tout de même, où ce qui est la même chose, vers une idée toute faite. La précision ne s’atteint pas plus que la perfection, elle se rumine seulement, elle se rêve, on peut la désirer certes, la convoiter, mais la posséder serait beaucoup trop grossier. Tendre vers un soupçon de modestie à ce moment là si l'on sent que l’on s’égare, si l'on tend vers l'abus, l'extrême. Dans la tendance moderne d’arriver avant d’être parti, tendre est un verbe oublié. Enterré. Mais dont il faudra tout de même faire l'effort se souvenir pour ne pas sombrer à la fin des fins. Et puis par pitié, ne pas s’attendrir pour autant comme un bifteck sous le plat du couteau du boucher. Ne pas se ramollir. Quand bien même l'adversité produirait autant d' efforts démesurés pour nous nous maintenir dans l'ignorance ou dans l'oubli. Se réveiller le matin et toujours voir en premier inscrit sur un post-it qu’on aura collé sur la table de chevet la veille. TENDRE. En lettres capitales . Maître mot d’un début de journée . Ensuite si besoin est, se détendre en se levant, prendre une douche, un café si c’est absolument nécessaire. si l’on a pris l’habitude de s’imposer ce genre d’habitudes. Ce qui n’empêche nullement de tendre à les réduire voire les supprimer si elles ne vous servent à rien, si ce ne sont que de simples programmes installés dans la cervelle pour nous permettre de ne penser à rien.|couper{180}