Sous cloche.

— Ce qui est stupéfiant c’est de constater à quel point les gens dorment profondément alors qu’ils se croient réveillés.

— Oui mais c’est seulement stupéfiant lorsqu’on se réveille soi-même et qu’on le constate. Donc c’est là-dessus que tu dois travailler. Tu ne peux pas changer le monde en descendant seul dans la rue avec une pancarte pour protester.

Maria s’est redressée, son visage est un peu plus dur que d’habitude. Il ne lui manque qu’une armure et un casque pour qu’elle ressemble à Athéna la déesse de la Justice.

— J’ai envie de les secouer pour qu’ils se réveillent.

— Surtout pas réplique t’elle. Tu ne peux pas interférer ainsi brutalement dans la vie que chacun s’est choisi de vivre.

— Que faire dans ce cas ? je ne supporte pas cette passivité, cette impuissance.

— Il y a plus d’une façon de lutter me dit Maria. Et parmi toutes l’une des plus difficiles est de lutter avec élégance, en s’effaçant à chaque fois afin de ne pas se laisser envahir par la vanité ou l’orgueil. En mettant de coté ton petit égo.

— C’est pour cela que j’ai toujours voulu être artiste. Mais quelque chose m’en a toujours plus ou moins empêché. Je me suis mis les bâtons dans les roues tout seul sans vraiment savoir pourquoi.

— Sans doute parce que tu ne prends pas les choses dans le bon ordre. On n’a pas à "vouloir" quoique ce soit, on l’est ou on ne l’est pas. Si tu te sens artiste sois-le et voilà tout. Puis elle me tourna le dos et sorti de la maison sans un mot de plus.

Je me retrouvais seul à me demander ce qui pouvait bien clocher encore. Qu’avais je dit ou fait pour contrarier mon ange gardien, pour le pousser tellement à bout ?

Alors je me centrais sur moi-même pour écouter les battements de mon cœur. Je remontais le fil des événements et je n’eus guère à aller chercher bien loin.

Je me revis la veille au soir en train de faire le pitre. Des amis étaient venus pour diner et ils désiraient visiter l’atelier, voir mes derniers tableaux.

La série Révélations les étonna. La femme dit je n’aime pas du tout, l’homme dit on dirait de la BD.

Comme ça m’agaçait j’ai lâché quelques mots notamment celui d’abduction en indiquant sur l’un des petits formats la scène ou un extraterrestre est en train d’opérer sur une silhouette allongée. Et j’ajoutais que cela m’était arrivé que cette série relatais ma propre histoire, ce dont j’étais parvenu à me souvenir.

J’ai vu la mâchoire de l’homme se modifier comme s’il serrait les dents fortement. Il n’osait pas rire je le voyais.

La femme m’a regardé et elle m’a dit

— Tu déconnes là.

Je n’ai pas répondu à la question j’ai dis aller on va boire un coup, on va prendre l’apéro.

Ils avaient apporté un jeu de société et nous avons joué un peu tout en buvant l’apéro. De temps en temps ils me regardaient bizarrement.

D’autant que c’était un jeu où il fallait dire un mot et trouver la carte qui correspondait le plus à ce mot

— Abduction j’ai redis le même mot.

Et je les ai vu se décomposer aussitôt.

Du coup ils m’ont demandé ce que ça pouvait vraiment vouloir dire. Et je leur ai raconté qu’à l’âge de 8 ans je me suis fait enlevé par les gris tout à fait sérieusement.

Plus je racontais l’histoire plus je les voyais s’enfoncer dans le canapé où ils étaient assis ne sachant plus s’ils devaient rire ou bien se mettre en colère d’avoir à écouter de telles inepties.

Je les voyais tellement mal à l’aise que j’ai eu honte. Alors j’ai fait une plaisanterie et ça a détendu un peu l’atmosphère.

Néanmoins ils voulaient soudain en savoir plus. Alors j’ai continué ; j’ai dit qu’en ce moment j’étais pas mal dans le sujet parce que j’écris ce roman et que les tableaux que j’ai envie de peindre sont en lien avec toutes ces idées qui m’occupent toute la journée et la nuit.

— tu déconnes a encore dit la femme lorsque je lui ai dit que mon vrai corps était quelque part sur une planète de la constellation d’Orion que j’avais découpé mon âme en plusieurs morceaux pour remplir plusieurs missions en même temps dont une sur cette terre.

— Et c’est quoi au juste ta fameuse mission me demande l’homme en rigolant.

— Aider les gens à se réveiller car vous avez tous été mis sous cloche. Vous dormez et vous ne vous en rendez pas compte.

— Ah ouais a dit la femme et toi t’es éveillé, t’es un peu comme Bouddha ou Jésus n’est-ce pas... sur un ton ironique.

— Oui c’est la raison pour laquelle il ne faut pas vous étonner outre mesure si je traverse la pièce en lévitant j’ai dit en clignant d’un oeil.

On est tous parti dans un sacré fou rire. Mais j’ai tout de suite senti au fond de moi je n’aurais pas du raconter ces choses. J’avais enfreint quelque chose d’important sans faire vraiment attention.

C’est pour cela que ce matin les mots ne sont pas venus comme d’habitude et que Maria probablement me boude.

On ne plaisante pas avec la source de la création. Sinon on ne fait pas avancer les choses et au lieu de libérer les gens sous cloche, on les renforce encore plus dans leur croyance en leur réalité. Ils s’y endorment encore plus profondément.

Post-scriptum

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Faites au mieux

—Faites au mieux… Phonétiquement j’eus un doute. Fête ou faites. Je perdis quelques heures en supputation sans oser demander de précision. Il vaut mieux ne jamais poser de question en réunion. C’est très mal vu. Les jeunes se font avoir régulièrement. Les jeunes posent des questions en réunion. Un ange passe. Les vieux sourient intérieurement. Mais ils ne le montrent pas bien sûr. Avoir un jeune en réunion c’est toujours une attraction à ne pas louper. Chacun doit faire sa petite expérience. Et Au mieux, OMIEUX ? était-ce le nom d’un lieu-dit où la fête se tiendrait si, dans mon incompréhension totale, en tâtonnant je dusse m’y rendre. Je me doutais que ce ne pouvait être si simple, et puis c’était illogique d’envoyer ainsi un employé faire la fête avec tout ce travail encore à faire. Je fis semblant de ne pas avoir entendu ce que je venais de penser et je hochai la tête en silence. Ce fut la réponse attendue. Un ou deux jeunes gens posèrent des questions saugrenues, des anges passèrent et repassèrent, les vieux furent, comme chaque lundi matin, hilares intérieurement. Je sortis mon calepin pour faire des gribouillis destinés à faire baisser la tension nerveuse, pour m'évader tout en étant là, pour être attentif autrement à tout ce qui pourrait se dérouler là. Mais tout de même cela me préoccupa durant quelques heures encore. Car ne faisais-je pas déjà du mieux possible à peu près chaque tâche qui m’incombait. Fallait-il faire encore faire mieux que d’habitude ? Fallait-il faire mieux que mieux, c’est à dire mal au final ? Un étrange doute accompagné de plusieurs soupçons naquirent comme des champignons après les pluies d’octobre, étaient-ils comestibles, toxiques, je me penchais encore des heures sur l’embarras du choix et fit chou blanc comme il se doit. A la fin de la journée je n’avais strictement rien fichu. Le directeur entra en trombe dans la salle, s’approcha du bureau derrière lequel j’étais et il me demanda :— alors c’est fait ? Sans ciller je hochais gravement la tête. Il exhiba un sourire satisfait. Ce qui était une chose excessivement rare pour être marquée d’une pierre blanche. Où allais-je dégotter une pierre blanche à cette heure cependant ? Je l’ignorais. Puis la semaine passa et nous passâmes tous en même temps à toute autre chose. C’est à dire à la semaine suivante. Nous avions tous fait au mieux sans nous appesantir plus qu’à l’ordinaire. Nous serions prêts pour la prochaine réunion hebdomadaire. Aucun incident notoire ne pourrait l’empêcher. A part la fin du monde si elle daignait arriver comme un cheveu sur la soupe. Encore qu’on peut encore avaler la soupe nonobstant le cheveu , quand on n’est pas bien fier, quand on veut faire au mieux, et surtout ne pas se poser de question insoluble.|couper{180}

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Se lancer

D'après une idée d'atelier d'écriture où je ne pense pas avoir tout compris du premier coup. Mais, je me lance tout de même Photo découverte sur l'excellent site https://www.michellagarde.com/ dans ses dramagraphies Il faut vous lancer… on ne sait pas comment vous le dire… et sur tous les tons… lancez-vous… Je mis un temps avant de comprendre qu’ils s’adressaient à moi. Ou du moins à eux-mêmes au travers de moi. Car il est extrêmement rare que l’on s’adresse vraiment à moi tel que je suis. Moi-même y parvenant une fois tous les dix ans et encore, assez difficilement Il fallait donc se rendre à l’évidence. Il fallait se lancer aussi dans cette approche. Je n’étais ni plus ni moins qu’un épouvantail, un homme de paille, à moitié Turc. Il insistaient sur la tête. Se lancer… ils me la baillaient belle. On ne se lance pas comme ça sans y penser. Sans y réfléchir. Sans établir de plan en tous cas. Peser le pour et le contre en amont mais aussi en aval. On oublie toujours l’aval. Sans compter qu’il faut en premier lieu une rampe de lancement. Une armée d’ingénieurs, des super calculateurs. Sans oublier la matière première, le béton, l’acier, le fer. Sans oublier la bonne volonté, une quantité très précise de hargne, ajouté à quelques soupçons de naïveté. Et puis c’est tellement trivial de le dire mais il faut tout de même le dire, pour se lancer il faut surtout le nerf de la guerre. Ça ne se trouve pas sous le sabot du premier cheval bai cerise venu. Tout une machinerie à mettre en branle, pour dégotter le fameux nerf. Sans oublier tous ces rencards. Rendez-vous chez le banquier avancez de deux. Rendez-vous à l’Urssaf reculez de trois. Sans oublier l’imprimeur, combien pour une publicité de lancement je vous prie. Et si je ne prends que le recto ? Attendez il me reste peut-être quelques pennies pour une ou deux capitales. C’est bien les Capitales pour lancer une campagne de lancement non. Ne pas être trop bégueule. Voir grand. Un flyer format A5. Avec en gros Demain, JE me lance.. Venez assister au spectacle. Deux francs six sous la place. Et ne croyez pas qu’il s’agit de l’homme Canon. Une vieille resucée de Luna parc. Rien de tout ça. Juste une tentative burlesque, tragique, comique ? Ah ah ah mystère et boule de gomme, vous le saurez si vous achetez le billet. Tarif promotionnel pour les Cents premiers : un francs vingt-cinq centimes seulement pour en prendre, EN AVANT PREMIERE , plein les mirettes. Lancez-vous ! laissez-vous tenter ! Venez nombreux assister au lancement.|couper{180}

Se lancer

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Tendre

travail d'élève, stage "oser, hésiter" mai 2023 Il faut tendre, sans être tendre, c’est à dire, ne pas céder comme le beurre cède au couteau qui rabote la motte ( négligemment le plus souvent) Il faut dire au couteau : Ce n’est pas parce que je compte pour du beurre qu’il faut en profiter ! Il faut tendre l’oreille, sans être dur de la feuille. Ceci étant dit si on tend l’oreille, ce n’est pas ce qu’elle va capter qui nous intéressera en premier lieu, mais plutôt se concentrer sur cette action machinale, vous savez, qui consiste à tendre une oreille. Comment tendre une oreille sans se casser les pieds, ou les casser aux autres, un enjeu de taille. Le placement du corps tout entier doit avoir une importance. Selon que l’on se tient de face ou de profil, on ne peut tendre l’oreille de la même façon. Idem si l’on est assis ou debout, voire allongé, et encore vivant ou mort, à dix-huit mètres de profondeur sous l’eau ou au sommet d’un poteau télégraphique. Le son frappe l’oreille suivent une règle de tangentes assez absconse mais bien réelle. Tendre du linge sur un fil demandera aussi un peu d’attention. Ne pas perdre de vue le fil, tout en tenant d’une main l’épingle, de l’autre la chemise— si c’est bien une chemise ( on peut le vérifier et modifier le mot ça ne changera pas grand chose sauf la phrase). Tendre vers le mieux, s’efforcer vers ça est à prendre avec des pincettes, sachant d’une part que le mieux est l’ennemi du bien et que d’autre part il faut savoir d’où l’on vient avant de prétendre se rendre où que ce soit. Mais si c’est vers un mieux, il y a de grandes chances que l’origine soit Un bien que l’on ne saurait supporter en l'étatUn mal que l’on cherche à renommerUne énigme, on ne sait pas d’où l’on part on se contente simplement d’emboîter le pas du plus grand nombre vers le mieux. Il faut noter les pistes consciencieusement pour ne pas s’égarer inutilement. Tendre vers une certaine précision, mais sans jamais l’atteindre de plein fouet, aucun carambolage n’améliore la précision. Aucun carambolage n’apporte quoique ce soit de bien précis si l’on n’en meurt pas, qu’on ne se retrouve pas hémiplégique, amnésique, amputé, groggy ou même indemne. On a juste assisté à un carambolage, peut-être même avoir endossé un rôle de premier plan, mais il ne vaut mieux pas profiter de l’occasion pour tendre vers la célébrité tout de même, où ce qui est la même chose, vers une idée toute faite. La précision ne s’atteint pas plus que la perfection, elle se rumine seulement, elle se rêve, on peut la désirer certes, la convoiter, mais la posséder serait beaucoup trop grossier. Tendre vers un soupçon de modestie à ce moment là si l'on sent que l’on s’égare, si l'on tend vers l'abus, l'extrême. Dans la tendance moderne d’arriver avant d’être parti, tendre est un verbe oublié. Enterré. Mais dont il faudra tout de même faire l'effort se souvenir pour ne pas sombrer à la fin des fins. Et puis par pitié, ne pas s’attendrir pour autant comme un bifteck sous le plat du couteau du boucher. Ne pas se ramollir. Quand bien même l'adversité produirait autant d' efforts démesurés pour nous nous maintenir dans l'ignorance ou dans l'oubli. Se réveiller le matin et toujours voir en premier inscrit sur un post-it qu’on aura collé sur la table de chevet la veille. TENDRE. En lettres capitales . Maître mot d’un début de journée . Ensuite si besoin est, se détendre en se levant, prendre une douche, un café si c’est absolument nécessaire. si l’on a pris l’habitude de s’imposer ce genre d’habitudes. Ce qui n’empêche nullement de tendre à les réduire voire les supprimer si elles ne vous servent à rien, si ce ne sont que de simples programmes installés dans la cervelle pour nous permettre de ne penser à rien.|couper{180}

Tendre