Croire et savoir

— Shanti, Shanti réveille-toi ! la guerre est là à notre porte ! C’est bientôt l’heure de prendre le taureau par les cornes.
La voix de Maria se fait de plus en plus insistance, elle traverse les couches épaisses du doute pour m’atteindre en plein cœur, et je sais ainsi que je possède un cœur au plus profond du rêve. Peu à peu j’émerge, j’ouvre les yeux et consulte l’affichage lumineux du radio réveil sur la table de nuit : 3h45.
Je me lève sans faire de bruit pour me rendre au rez-de-chaussée de la maison. Un bon café me fera du bien je crois.
Je ne sais plus vraiment si je rêve ou si tout cela est réel. Toute cette histoire que je suis en train d’écrire nuit après nuit jusqu’à présent n’est t’elle pas en train de me rendre complètement cinglé ?
Il me semble que de vieux démons que j’avais réussi à repousser durant tant d’années sont revenus. Ce besoin irrépressible d’écrire, de pénétrer dans la transe de l’écriture, de me laisser totalement emporter par celle-ci...
Et la question que je me pose est celle-ci :
Me suis-je laissé capturer par mon égo, l’ai-je laissé me leurrer à un tel point qu’il puisse imaginer se confondre avec qui je suis vraiment ?
Peut-être que la schizophrénie s’est frayée un chemin jusqu’à cet instant présent où j’écris. Peut-être a t’elle finalement trouvé le moyen ainsi de tout dévaster peu à peu depuis l’oubli où j’avais tenté de la reléguer.
— Qui est en train de penser ces choses Shanti ? La voix de Maria me fait sursauter. Elle est là bien que je ne puisse la voir, dans la cuisine.
Qui parle de folie ? N’est-elle pas cette folie sur laquelle j’ai posé un nom comme pour lui donner chair afin de mieux l’identifier, la placer à distance ? Et ainsi me donner la possibilité de la comprendre, de l’aimer ou de la détester ? De parvenir enfin à la connaissance de ma propre folie ?
— Shanti réveille toi, il n’est plus temps de jouer avec ton mental, tu n’as plus le loisir de t’amuser ainsi. Il faut agir, repousse le doute, pénètre dans la certitude.
Maria appuie exactement là où ça fait mal. Cet entre-deux entre le doute et la certitude dans lequel je réside depuis toujours.
— C’est une des épreuves que tu as choisie Shanti. Mais désormais tu touches enfin au but, il te faut choisir une bonne fois pour toutes.
— Choisir quoi ? la folie ? elle nait chez moi tout autant du doute que de la certitude.
— Oui mais cette hésitation te vide de toute ton énergie ! Agis Shanti, car c’est par l’action que tu retrouveras la raison, l’énergie, que tu seras vivant.
— Agir ? mais que faire ? Quoique je fasse le doute revient à la charge presque aussitôt.
— C’est parce que tu te refuses au choix comme au renoncement reprend Maria. Le doute t’enfonce dans les vibrations les plus basses, il te conduit vers l’anéantissement.
— Je ne sais jamais si le choix que je veux effectuer est le bon
— Il n’y a pas de bon ou de mauvais choix Shanti, tout choix est un leurre, chaque décision une impulsion qui fait naitre le mouvement et le mouvement c’est la vie ! Chaque choix et un déclencheur dont tu ne peux comprendre les tenants et aboutissants. Tant que tu es l’outil tu ne peux comprendre tout cela.
— L’outil ?
— Il y a deux Shanti, le petit qui se tient dans cette pièce et qui se pose toutes ces questions en buvant son café et puis il y a le grand Shanti qui sait exactement pourquoi il est venu sur cette Terre. Entre vous deux il y a l’oubli et aussi tout ce que ce monde peut imaginer comme moyens pour tenir ses habitants dans une sorte de servitude volontaire.
— Les reptiliens encore eux ? tu veux vraiment que je crois à tous ces cauchemars Maria ? Tu veux vraiment que j’abandonne la raison, le bon sens ?
— Je vois, tu crois que tout ce que tu as écrit jusqu’à présent est une sorte de fiction finalement, tu ne crois pas plus en moi qu’en toutes ces histoires, tu penses être si fort que cela de pouvoir inventer autant de mensonges une fois de plus et tromper tout le monde et toi même ?
— J’en ai bien peur.
— Voilà le nœud véritable du problème Shanti : ta peur de croire à quoi que ce soit.
— C’est pas faux.
— C’est exactement le discours entretenu par cette matrice crée par les reptiliens. J’espère que tu t’en rends compte. Il te font croire justement que toute croyance est de l’ordre de la stupidité tout en n’arrêtant pas de t’assener des croyances en un tas de choses, notamment la mort, la raison, la science j’en passe et des meilleures. Et ils ne font cela que dans un seul but, vous rendre vulnérables et perméables à leur haine d’eux mêmes, pour vous amener à leur propre désespoir, à leur propre peur d’être, et d’aimer tout simplement.
— Disons que ce dans quoi tu me demandes de ne pas avoir peur de pénétrer c’est un peu le monde des bisounours Maria ...
— Oui c’est le terme qu’ils utilisent pour ridiculiser l’amour, je connais. Et pourtant ne te souviens tu pas d’avoir souffert de cela toi-même ? As tu déjà tout oublié ou bien la carapace que tu as crée pour ne plus souffrir te rend t’elle désormais aveugle et sourd à la vraie vie ?
— Je me souviens plus ou moins, mais cela me semble tellement loin à présent.
— C’est du passé, on s’en fiche tu as raison. Mais dans le présent tu peux tout retrouver, il suffit juste d’écouter ton cœur Shanti c’est lui qui t’aidera faire jaillir la lumière.
— Mon cœur, j’ai souvent pensé que j’en étais dépourvu. Qu’il n’était qu’un mot.
— On ne t’a pas laissé suffisamment de temps pour parvenir à croire que tu avais un vrai cœur Shanti, et tout cela est parfait n’en doute pas.
— Parfait ? On voit que ce n’est pas toi qui a reçu...
— D’une certaine façon j’ai reçu autant que toi Shanti, tout ce que tu as éprouvé je l’ai éprouvé moi aussi. Je t’ai toujours accompagné depuis le début. La souffrance est un passage obligé ici-bas c’est une vérité à ne jamais négliger, à ne jamais oublier non plus quelque soient les circonstances. Remplace ta certitude de la souffrance par la certitude de l’amour, les deux marchent dans la main.
—tu me demandes en gros d’avoir la foi ...
— Oui mais je ne te demande pas de croire en une religion quelconque Shanti, juste de croire en toi-même, non pas en tant qu’outil seulement, non pas dans le petit Shanti, mais dans le Soi là où le véritable Shanti réside.
— j’avoue que je m’y perds Maria. Le Soi tel que je le comprends ne peut pas porter de nom. Il ne peut pas plus être nommé Shanti que Dieu ou Allah ou quoi que ce soit.
— Et tu as raison Cependant tu es un humain, et tu vis dans un univers de basses vibrations, ta cervelle a besoin de s’accrocher à des symboles, des choses simples Shanti. Accepte enfin de n’être qu’humain vis ta vie comme il se doit.
— C’est bien ce que je fais puisque quoique je fasse selon tes propos tout est parfait , tout est programmé d’avance.
— Encore ton habilité à manier les pensées et les concepts dans lesquels tu ne cesses de t’entraver tout seul. Tu te compliques trop la vie Shanti.
Réveille toi, la guerre est là à notre porte, il va aussi falloir choisir et agir.
Post-scriptum
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Faites au mieux
—Faites au mieux… Phonétiquement j’eus un doute. Fête ou faites. Je perdis quelques heures en supputation sans oser demander de précision. Il vaut mieux ne jamais poser de question en réunion. C’est très mal vu. Les jeunes se font avoir régulièrement. Les jeunes posent des questions en réunion. Un ange passe. Les vieux sourient intérieurement. Mais ils ne le montrent pas bien sûr. Avoir un jeune en réunion c’est toujours une attraction à ne pas louper. Chacun doit faire sa petite expérience. Et Au mieux, OMIEUX ? était-ce le nom d’un lieu-dit où la fête se tiendrait si, dans mon incompréhension totale, en tâtonnant je dusse m’y rendre. Je me doutais que ce ne pouvait être si simple, et puis c’était illogique d’envoyer ainsi un employé faire la fête avec tout ce travail encore à faire. Je fis semblant de ne pas avoir entendu ce que je venais de penser et je hochai la tête en silence. Ce fut la réponse attendue. Un ou deux jeunes gens posèrent des questions saugrenues, des anges passèrent et repassèrent, les vieux furent, comme chaque lundi matin, hilares intérieurement. Je sortis mon calepin pour faire des gribouillis destinés à faire baisser la tension nerveuse, pour m'évader tout en étant là, pour être attentif autrement à tout ce qui pourrait se dérouler là. Mais tout de même cela me préoccupa durant quelques heures encore. Car ne faisais-je pas déjà du mieux possible à peu près chaque tâche qui m’incombait. Fallait-il faire encore faire mieux que d’habitude ? Fallait-il faire mieux que mieux, c’est à dire mal au final ? Un étrange doute accompagné de plusieurs soupçons naquirent comme des champignons après les pluies d’octobre, étaient-ils comestibles, toxiques, je me penchais encore des heures sur l’embarras du choix et fit chou blanc comme il se doit. A la fin de la journée je n’avais strictement rien fichu. Le directeur entra en trombe dans la salle, s’approcha du bureau derrière lequel j’étais et il me demanda :— alors c’est fait ? Sans ciller je hochais gravement la tête. Il exhiba un sourire satisfait. Ce qui était une chose excessivement rare pour être marquée d’une pierre blanche. Où allais-je dégotter une pierre blanche à cette heure cependant ? Je l’ignorais. Puis la semaine passa et nous passâmes tous en même temps à toute autre chose. C’est à dire à la semaine suivante. Nous avions tous fait au mieux sans nous appesantir plus qu’à l’ordinaire. Nous serions prêts pour la prochaine réunion hebdomadaire. Aucun incident notoire ne pourrait l’empêcher. A part la fin du monde si elle daignait arriver comme un cheveu sur la soupe. Encore qu’on peut encore avaler la soupe nonobstant le cheveu , quand on n’est pas bien fier, quand on veut faire au mieux, et surtout ne pas se poser de question insoluble.|couper{180}
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Se lancer
D'après une idée d'atelier d'écriture où je ne pense pas avoir tout compris du premier coup. Mais, je me lance tout de même Photo découverte sur l'excellent site https://www.michellagarde.com/ dans ses dramagraphies Il faut vous lancer… on ne sait pas comment vous le dire… et sur tous les tons… lancez-vous… Je mis un temps avant de comprendre qu’ils s’adressaient à moi. Ou du moins à eux-mêmes au travers de moi. Car il est extrêmement rare que l’on s’adresse vraiment à moi tel que je suis. Moi-même y parvenant une fois tous les dix ans et encore, assez difficilement Il fallait donc se rendre à l’évidence. Il fallait se lancer aussi dans cette approche. Je n’étais ni plus ni moins qu’un épouvantail, un homme de paille, à moitié Turc. Il insistaient sur la tête. Se lancer… ils me la baillaient belle. On ne se lance pas comme ça sans y penser. Sans y réfléchir. Sans établir de plan en tous cas. Peser le pour et le contre en amont mais aussi en aval. On oublie toujours l’aval. Sans compter qu’il faut en premier lieu une rampe de lancement. Une armée d’ingénieurs, des super calculateurs. Sans oublier la matière première, le béton, l’acier, le fer. Sans oublier la bonne volonté, une quantité très précise de hargne, ajouté à quelques soupçons de naïveté. Et puis c’est tellement trivial de le dire mais il faut tout de même le dire, pour se lancer il faut surtout le nerf de la guerre. Ça ne se trouve pas sous le sabot du premier cheval bai cerise venu. Tout une machinerie à mettre en branle, pour dégotter le fameux nerf. Sans oublier tous ces rencards. Rendez-vous chez le banquier avancez de deux. Rendez-vous à l’Urssaf reculez de trois. Sans oublier l’imprimeur, combien pour une publicité de lancement je vous prie. Et si je ne prends que le recto ? Attendez il me reste peut-être quelques pennies pour une ou deux capitales. C’est bien les Capitales pour lancer une campagne de lancement non. Ne pas être trop bégueule. Voir grand. Un flyer format A5. Avec en gros Demain, JE me lance.. Venez assister au spectacle. Deux francs six sous la place. Et ne croyez pas qu’il s’agit de l’homme Canon. Une vieille resucée de Luna parc. Rien de tout ça. Juste une tentative burlesque, tragique, comique ? Ah ah ah mystère et boule de gomme, vous le saurez si vous achetez le billet. Tarif promotionnel pour les Cents premiers : un francs vingt-cinq centimes seulement pour en prendre, EN AVANT PREMIERE , plein les mirettes. Lancez-vous ! laissez-vous tenter ! Venez nombreux assister au lancement.|couper{180}
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Tendre
travail d'élève, stage "oser, hésiter" mai 2023 Il faut tendre, sans être tendre, c’est à dire, ne pas céder comme le beurre cède au couteau qui rabote la motte ( négligemment le plus souvent) Il faut dire au couteau : Ce n’est pas parce que je compte pour du beurre qu’il faut en profiter ! Il faut tendre l’oreille, sans être dur de la feuille. Ceci étant dit si on tend l’oreille, ce n’est pas ce qu’elle va capter qui nous intéressera en premier lieu, mais plutôt se concentrer sur cette action machinale, vous savez, qui consiste à tendre une oreille. Comment tendre une oreille sans se casser les pieds, ou les casser aux autres, un enjeu de taille. Le placement du corps tout entier doit avoir une importance. Selon que l’on se tient de face ou de profil, on ne peut tendre l’oreille de la même façon. Idem si l’on est assis ou debout, voire allongé, et encore vivant ou mort, à dix-huit mètres de profondeur sous l’eau ou au sommet d’un poteau télégraphique. Le son frappe l’oreille suivent une règle de tangentes assez absconse mais bien réelle. Tendre du linge sur un fil demandera aussi un peu d’attention. Ne pas perdre de vue le fil, tout en tenant d’une main l’épingle, de l’autre la chemise— si c’est bien une chemise ( on peut le vérifier et modifier le mot ça ne changera pas grand chose sauf la phrase). Tendre vers le mieux, s’efforcer vers ça est à prendre avec des pincettes, sachant d’une part que le mieux est l’ennemi du bien et que d’autre part il faut savoir d’où l’on vient avant de prétendre se rendre où que ce soit. Mais si c’est vers un mieux, il y a de grandes chances que l’origine soit Un bien que l’on ne saurait supporter en l'étatUn mal que l’on cherche à renommerUne énigme, on ne sait pas d’où l’on part on se contente simplement d’emboîter le pas du plus grand nombre vers le mieux. Il faut noter les pistes consciencieusement pour ne pas s’égarer inutilement. Tendre vers une certaine précision, mais sans jamais l’atteindre de plein fouet, aucun carambolage n’améliore la précision. Aucun carambolage n’apporte quoique ce soit de bien précis si l’on n’en meurt pas, qu’on ne se retrouve pas hémiplégique, amnésique, amputé, groggy ou même indemne. On a juste assisté à un carambolage, peut-être même avoir endossé un rôle de premier plan, mais il ne vaut mieux pas profiter de l’occasion pour tendre vers la célébrité tout de même, où ce qui est la même chose, vers une idée toute faite. La précision ne s’atteint pas plus que la perfection, elle se rumine seulement, elle se rêve, on peut la désirer certes, la convoiter, mais la posséder serait beaucoup trop grossier. Tendre vers un soupçon de modestie à ce moment là si l'on sent que l’on s’égare, si l'on tend vers l'abus, l'extrême. Dans la tendance moderne d’arriver avant d’être parti, tendre est un verbe oublié. Enterré. Mais dont il faudra tout de même faire l'effort se souvenir pour ne pas sombrer à la fin des fins. Et puis par pitié, ne pas s’attendrir pour autant comme un bifteck sous le plat du couteau du boucher. Ne pas se ramollir. Quand bien même l'adversité produirait autant d' efforts démesurés pour nous nous maintenir dans l'ignorance ou dans l'oubli. Se réveiller le matin et toujours voir en premier inscrit sur un post-it qu’on aura collé sur la table de chevet la veille. TENDRE. En lettres capitales . Maître mot d’un début de journée . Ensuite si besoin est, se détendre en se levant, prendre une douche, un café si c’est absolument nécessaire. si l’on a pris l’habitude de s’imposer ce genre d’habitudes. Ce qui n’empêche nullement de tendre à les réduire voire les supprimer si elles ne vous servent à rien, si ce ne sont que de simples programmes installés dans la cervelle pour nous permettre de ne penser à rien.|couper{180}