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Liste de tous ceux

J’allais m’y mettre faire la liste de tous ceux et puis mon doigt est resté en suspens au dessus du clavier la longue et belle liste de tous ceux qui quoi grande question|couper{180}

Liste de tous ceux

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C’est pas qu’ils veulent

C’est pas qu’ils veulent qu’on crève ils ne savent même pas qu’on existe|couper{180}

C'est pas qu'ils veulent

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Pourquoi on supporte encore

Supporter porter à bout de bras marche ou crève endurer charger la mule et pourquoi t’en souviens-tu encore l’habitude d’endurer si bien ancrée comme une amnésie obligée l’antichambre de l’oubli de la sénilité pas une question d’âge ça commence de plus en plus tôt vers 7 ans chez moi je le sais parce que je l’ai écrit sur un bout de papier juste avant d’oublier où je l’ai enterré mais rien que ça se souvenir m’autorise encore à me demander pourquoi on supporte encore pourquoi tout ne s’écroulerait pas est-ce que ça pourrait être pire je ne sais pas|couper{180}

Pourquoi on supporte encore

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Tout ce qui ne se fait pas

Ça ne se fait pas attention danger tu risques gros mon coco de devenir comme nous qui ne faisons pas grand-chose sauf le strict nécessaire pour remonter de temps en temps à la surface et regarder le ciel avec nos yeux de poissons morts toute une vie ainsi combien de goulées d’air au regard de cette apnée continuelle tout ce qui ne se fait pas ne s’est jamais fait ne se fera jamais et tant mieux si tu parviens malgré tout à chasser le regret bravo champagne cotillons confettis l’indifférence totale des morts vivants la timbale en argent c’est pour toi et ça te sert à quoi puisque la brandir non plus ça ne se fait pas|couper{180}

Tout ce qui ne se fait pas

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Arborescence

Chantier permanent Plusieurs fois le mot arborescence si ce n’est pas un signe du pied dors encore et ne te réveille pas ce serait terrible bien sûr bien sûr mais ne jamais se réveiller alors que l’on sait pertinemment que l’on dort n’est pas pire tous les rêves en remontent pollués par l’obstination craintive quelle fureur tout à coup et bien oui les arbres communiquent c’est limpide sa fureur transmise par les racines les radicelles je ne sais qu’en faire à l’automne en prime pas le bon sens des sèves mais si c’était aussi ça l’éveil se retrouver tout à coup sur l’autoroute en train de dormir on ouvre les yeux merde on comprend que l’on est à contre sens on cherche alors à remonter l’arborescence on file comme une flèche sans ponctuation vers où peu importe encore l’urgence est de faire quelque chose de ce legs c’est tout tu n’es même pas tenu de remercier ou d’être poli|couper{180}

Arborescence

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En rire et ensuite

Collage travail d’élève Rire de se désespérer d’être désespéré d’être désespéré. Et ensuite ? Toucher à la profondeur de l’idiotie enfin se sentir chez soi Sourire béat ?|couper{180}

En rire et ensuite

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Ecrivaine

La dose de confiance en soi quel dealer quel carrefour quel parking la nuit ou le jour on y touche comment quand le matin un soir et on est à crocs sûrement en tous cas c’est ainsi que j’ai compris ce que j’ai vu et entendu et puis le milieu le terreau ça compte aussi certainement une histoire de terre acide ou basique terre riche ou de silex Conserver la détermination parce que la rage seule ne suffit pas il faut un but et s’y résoudre à chaque instant, mais même 10 minutes par jour dans le métro peuvent suffire si c’est répété durant des jours des mois peut-être des années / La détermination alimentée par la régularité on peut s’installer comme ça mais sans but ça ne fonctionne pas j’ai beaucoup essayé je peux en parler mais hier pas osé un mélange curieux d’admiration et d’agacement contre moi-même m’en aura bien empêché il faut au moins avoir été mené je me dis ça sa mère à elle qui lit Proust dans le RER, je l’ai retenu et c’est pas rien de lire Topor aussi toute une fois à cette fameuse confiance en soi pour ça que c’est si dur pour les enfants d’ouvriers de paysans qui ne connaissent de la détermination que ce que leur parents leur apprennent à moins qu’ils ne l’apprennent en creux par réaction mais la réaction seule suffit t’elle pour se dire je suis écrivain écrivaine et cela tout de suite quasiment avec encore du lait plein le nez qu’est ce qui fournit la détermination et la confiance en soi l’orgueil sans doute aussi il doit bien y avoir de la violence brute de la violence à l’état pur a un moment donné ou de l’amour brut c’est la même chose non En tous cas il y a cette chose qui s’insinue au plus profond et qui dit vas-y c’est ça ton truc ne lâche rien quoiqu’il advienne ne lâche rien /Est-ce qu’on peut se le dire seul à soi seul à force de détermination à force de régularité peut-être oui aussi bien qu’on peut aussi passer par là quand la première voie s’est dérobée sous les pieds /c’est plus *dur* mais on peut et puis enfin qu’est ce qui est dur ou pas c’est selon chacun certainement aussi une résistance au mal une propension à se contenter du douillet doit aussi jouer dans la balance C’est injuste tu dis tu le dis souvent comme on se rabâche une excuse injuste que d’autres aient eu plus de chance, plus de détermination et aussi plus de rage plus d’amour que toi tu n’en as jamais eu que tu n’en auras probablement jamais Je comprends intellectuellement toutes ces choses et aussi que j’en suis arrivé au même point avec la peinture que l’écriture à ce plafond de verre contre lequel je n’arrête pas de buter comme envers l’autre aussi c’est la même chose le même plafond de verre je m’arrête toujours à la centième bosse pas plus vraiment totalement acharné jusqu’à 100 mais pas plus ce serait la limite donc fixée jusqu’au sang. Ce que j’ai appris de cet entretien avec A.S c’est sans doute que 100 ce n’est rien qu’il faut pousser jusqu’à 1000 au-delà du sang en tous cas. Et qu’à partir de là recommencer finalement dans un état d’esprit flirtant avec l’infini du recommencement jusqu’à ce que finalement on devienne un junky du recommencement plus que n’importe quel but à atteindre la providence s’en émeut devient amène et cependant nous teste encore et toujours en nous offrant ce que nous désirions le plus juste pour voir si la détermination la régularité tiendront encore tiendront toujours ///farceuse providence/// Et au bout du compte aimer jouer est d’une importance capitale jouer avec tout ce qui nous entrave nous empêche nous gêne s’attarder aussi à cette ludicité plus qu’à la lucidité qui de plus en plus je le crois de plus en plus chaque jour est une croyance S’entraîner aussi à se répéter cette croyance qu’elle n’est qu’une croyance. A partir de là être brillant n’a plus d’importance d’enjeu on n’a plus besoin de vouloir le dissimuler pour ne blesser personne surtout c’est sans doute cela aussi la conclusion que je trouve à cet entretien la liberté d’être brillant et tant pis si cela peut sembler injuste pour les gens injuste ou transmuté en petits noms d’oiseau comme chiant pénible vaniteux exaspérant pas grave du tout puisque au demeurant cela nous laisse tout aussi seul qu’indiffèrent. Et enfin est-ce qu’on écrit on peint pour les gens ou pour soi c’est encore une fois cette même question qui fabrique en grande partie ce fameux plafond de verre dans l’idée que l’on se fait des réceptions en amont souvent de faire quoi que soit qui nous entrave régulièrement jusqu’à ce qu’on décide que ce n’est pas là l’important, le vital //Que l’important est de parler sa propre langue autant que possible une langue bien à soi de l’explorer tout en la parlant et en s’amusant de préférence bien sur//|couper{180}

Ecrivaine

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une journée de permanence

https://youtu.be/8uYjXr4Qkl4Une journée de permanence Aujourd’hui dimanche je suis en route pour Orlienas, un village médiéval de la couronne lyonnaise. Je vais accueillir le public dans l’une des trois tours devenue un lieu d’exposition. c’est à dire être présent pour recevoir le public. Pour l’accueillir. Aller au devant de lui, se tenir prêt à l’accueil, être présent avant son arrivée. cela commence déjà sur la route. Question ici d’état d’esprit. Quand se prépare t’on. Peut-être avant de monter dans la voiture. Y avoir pensé en amont. Être ainsi de permanence depuis un bon bout de temps déjà. et surtout une fois que l’on sera dans les lieux rester jusqu’au bout d’un temps donné.Il s’agit simplement d’accueillir le public tout un dimanche. De 10h à 18h. S’en tenir à cette idée d’accueil comme fil conducteur d’une journée. C’est la première fois que je montre au public mes visages imaginaires. D’habitude je suis plus à l’aise avec mes tableaux abstraits. Trop à l’aise, comme on peut l’être quand on s’installe dans une répétition, une habitude.on finit par pouvoir répondre à tant de questions qui nous ont déjà été posées. C’est presque de l’ordre de la récitation. Mais aujourd’hui c’est différent. Je n’ai rodé aucun discours, j’ai la sensation d’avancer avec une fragilité que j’avais oubliée. Ce n’est pas une inquiétude, pas une angoisse, plutôt une curiosité. Comment s’effectuera la réception de ces peintures de visages, de ces peintures dont j’ai compris que le prétexte est le visage.c’est à dire ce qui est mis é en avant, cette partie de nous qui sert à nous identifier, à exprimer une émotion, à échanger avec l’autre, à se reconnaître ou à se distinguer. Visage. On dit aussi figure en peinture. On se figure quelque chose de l’autre en prenant appui sur l’expression de son visage. Et justement que se figure t’on... comment nous fabriquons nous une idée de l’autre à partir d’une série d’expressions. Comment fabriquons nous cette croyance que l’autre est souvent en premier lieu un visage. Lorsque j’étais gamin j’avais l’impression que les visages étaient des masques, je me demandais toujours ce qu’il pouvait y avoir de caché derrière ces masques. Ma pire angoisse c’est qu’il ne puisse rien y avoir du tout. Que derrière un visage, un masque il n’y ait que le néant. Et bien sûr ce néant me renvoyait au risque de percevoir en moi-même le même anéantissement. C’est à partir de cette angoisse que je me suis mis à dessiner au tout début des visages imaginaires. Pour contrer quelque chose, pour que le néant n’emporte pas tout. Pour exorciser quelque chose. Plus tard j’ai dessiné et peint de beaux visages. Mais quelque chose me gênait. L’intention qui se dissimulait derrière ces belles peintures. Être reconnu, accepté, aimé parce que j’avais un bon coup de crayon ou de pinceau. C’était au final désespérant aussi. Il fallait accomplir un genre de prouesse pour bénéficier de ces choses et une fois acquises il y avait un sentiment d’imposture qui n’en finissait pas de persister. Une trahison. J’étais parvenu à imiter assez bien ce qu’on appelle la réalité. Du moins de façon suffisamment convainquant pour que ça en l’air. Mais ce n’était pas ma réalité. C’était la réalité commune si l’on veut celle dont il fallait apprendre les codes pour appartenir à la communauté, parler la même langue, sans trop chercher à se distinguer. Ou alors se distinguer par une expertise particulière. Le dessin ou la peinture étaient les moyens qui se trouvaient le plus facilement à ma portée. Je crois que le mot compromission va bien avec cette période tellement difficile. On se sent obligé de se compromettre par des actions qu’au find de soi on sait débiles. Pour faire rire mes camarades je dessinais des caricatures. J’ai été accepté comme ça je crois comme un bon dessinateur et en même temps un pitre. C’était restreint mais mieux que rien. Cela m’a permis aussi de ne pas avoir trop à me bagarrer avec les autres à expérimenter la violence. Je m’en tirais avec un dessin humoristique, et une sensation à peine déguisée de mépris que je devais essuyer. La compromission dont je parle c’est surtout ce genre de lâcheté de ne pas oser mettre son poing dans la figure de l’autre quand il nous attaque et nous blesse. Faire un dessin calme le jeu mais ressemble aussi à une sorte de défaite, comme une éponge que l’on jette sur un ring de boxe pour dire stop. J’ai mis du temps à laisser venir la maladresse. À ne pas bien peindre ou peindre comme il faut ces visages. J’ai mis du temps à traverser le jugement issu des règles. Ce n’est pas une affaire de cervelle mais de main. Laisser aller la main qui tient le pinceau. Ne plus la contraindre par la norme la pensée. Même ayant compris intellectuellement la valeur des maladresses, du bancal, de l’inachevé. Peut-être trop intellectuellement. Comme on tente de panser des plaies, des blessures par manque de confiance en l’être ou la nature. Par manque. Et puis un jour la main possède une intelligence qu’on lui découvre. On abdique. La pensée abdique parce qu’elle se rend compte que quelque chose est plus fort qu’elle. Une inconscience dont on prend enfin conscience. Et à laquelle on s’en remet. Pas par dépit mais au contraire parce qu’elle nous propose un point de vue neuf sur ce que peut être l’unité. La beauté , la laideur, le normal et l’étrangeté. Tout ce chemin effectué par le prétexte du visage j’ai décidé de l’exposer peut-être pour affronter encore une fois l’idée de l’écart. Pour mesurer plus finement cet écart par le retour, la réception de ces œuvres qu’on m’en fera ou pas d’ailleurs. C’est une exhibition plus qu’une simple exposition. Exhibition de cette fragilité dont au bout des années je suis parvenu à me convaincre non sans difficultés qu’elle pouvait être une force. Et que ce mouvement pouvait se partager. Que ce travail pouvait apporter une valeur à l’autre, lui faire éprouver le même doute que celui que j’avais traversé quand au mots fragilité, faiblesse et force. Tout cela sans discours simplement en lui montrant mes peintures de visages.peut-être éprouvera t’il elle ce dérangement, ces gênes successives que j’ai traversées en les peignant et les dépassera t’il elle comme je les ai dépassés. Je me tiens dans l’accueil sans attendre quoique ce soit. En refusant d’attendre quoi que ce soit. Sans me faire d’idée par avance de la réception de ces toiles accrochées. Rester dans cette vigilance d’une non idée ou d’une non attente c’est aussi cela je crois être dans l’accueil. Être de permanence. À la fois pour se préserver sans doute mais pas seulement. Pour laisser la place a l’autre de dire ce qu’il voudra dire. Ce qu’il osera ou non dire. Même le silence sera d’importance. Ensuite il y aura mes réponses aux questions, tenter aussi de rester attentif à ce qu’elles seront dans l’immédiateté. Je n’ai rien préparé concernant les questions possibles. Je ne veux pas réciter. Je veux expérimenter cette fragilité aussi en dehors du cadre de la toile. Même me retrouver démuni m’intéresse parce que cela m’apporte un recul vis à vis de ce je crois encore être muni. Une observation en creux. Ici il ne s’agit pas du succès ou de l’échec d’une exposition de mon exposition. Il ´s’agit simplement du succès ou de l’échec d’une expérience, maintenir si je peux un état d’esprit d’accueil toute une journée de permanence, tout un dimanche. Ces visages sont des prétextes mais sûrement que l’exposition aussi est prétexte à quelque chose de plus vaste il ne faut pas l’oublier. De plus vaste et de tellement simple une fois toute la complication traversée. Il s’agit probablement de la relation à l’autre. L’autre quelqu’il soit et tel qu’il est. Tout comme ces visages peints ne sont rien d’autre que ce qu’ils sont.|couper{180}

une journée de permanence

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L’inspiration

Pour inspirer, il faut qu’il n’y ait plus d’air dans les poumons. Que ce soit vide. C’est à ce moment-là que l’on peut inspirer. S’il y a encore de l’air dans les poumons, comment un nouvel air peut-il y entrer... c’est logique qu’il n’entre pas s’il n’a pas sa place. C’est aussi pourquoi avant d’inspirer, il faut d’abord expirer. Est-ce que c’est différent de ce que l’on appelle l’inspiration en peinture ? Non pas tellement. Il y a forcément une relation puisqu’on emploie le même mot. Par conséquent, lorsque une personne me dit : « je suis peu inspirée en peinture » je réponds —Oui mais as-tu pensé à expirer avant d’essayer d’être inspiré ? Car presque toujours la réponse est là, dans cette question.|couper{180}

L'inspiration

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photofiction| notes sur un accrochage d’exposition, l’attendu, ce qui arrive vraiment. Orlienas.

L’attendu, ce que j’imagine d’un événement quelconque est rarement la réalité. Cependant que ce que j’attend ainsi me sert de point de repère. Pour mesurer quoique ce soit ne faut-il pas une règle ? Se soucier de l’exactitude de sa gradation, s’en occupe t’on vraiment, ou bien accorde -t’on d’emblée une justesse à celle-ci. On pourrait se poser déjà la question de l’outil. Est-ce que j’utilise le bon outil pour dessiner, ébaucher l’attendu ? En tous cas il parait fondamental de se créer un moyen de mesurer la différence entre ce qui est attendu, espéré, et ce qui advient pour de vrai. puis c’est à l’aide de cet outil que je vais décider, par la suite, si ce qui est advenu dans ce que j’appelle une réalité se situe au-dessus ou en-dessous de ce qui avait été attendu. Ensuite est-ce important de s’accrocher à une telle attente. À ce genre d’évaluation. Mais à quoi cela sert-il vraiment ? Quelles conséquences cette croyance, cet acharnement parfois entrainent- t’elles ? Et bien parfois il arrive d’être agréablement surpris par ce qui advient alors que l’on s’attendait à tout autre chose. Ou encore d’être surpris que cela se rapproche tellement de ce que l’on avait espéré. Parfois ce qui arrive est si semblable à l’attendu que l’on a même un peu de peine à y croire. Parfois aussi il semble que la réalité dépasse ce qui avait été espéré ou attendu. C’est ainsi que l’on progresse peu à peu vers une souplesse d’esprit. Si le contraire advient, que *cela* apparaisse pire, complètement, absolument en dessous de l’attente, peu importe en fait. Un but en cache un autre souvent. Celui que l’on découvre est de relativiser de plus en plus régulièrement l’attendu et la réalité. Il arrive aussi cette étape où l’on s’interroge seulement sur ce que l’on attend d’un événement. Rare qu’on y réfléchisse en amont de la bonne façon. C’est plutôt inconscient ou émotionnel bien souvent. Enfin évidemment je parle pour moi, je sais qu’il existe des espèces à sang-froid. Un bon exemple est l’accrochage d’une exposition dans un lieu inconnu. Ou disons plus exactement un lieu que l’on aurait visité mais dont on n’aurait pas forcément pris la juste mesure. On pourra s’interroger sur les raisons que l’on s’est données pour préférer s’en tenir à une approximation. Ce qui gêne au moment de prendre correctement, disons objectivement cette mesure. Et d’observer ensuite comment l’à peu près se sera dilué dans l’idée vague générale. Ce film que l’on se fabrique en amont de l’événement « accrochage ». Ma position sur cette étape a t’elle beaucoup évoluée depuis mes toutes premiers expositions ? Je ne le crois pas. La seule modification que j’aurais apportée à cette étape de prévisualisions que je nomme l’attendu, c’est de la débarrasser peu à peu de son contenu émotionnel ou affectif. Pour une grande part l’attendu est devenu une position où je ne m’attends à rien de spécial. Rien d’extraordinaire. Que ce soit en terme de succès ou d’échec. On pourrait dire qu’un accrochage est devenu une routine. Il n’y a pas à y réfléchir une fois que l’on y est. Il suffit simplement d’enchaîner un certain nombre de gestes, d’actions dans un certain ordre. J’ai supprimé hier une petite opération que je fais régulièrement durant l’accrochage. La photographie et la vidéo des diverses étapes. L’arrivée, le choix des emplacements, l’hésitation, puis la scène finale. J’avais déjà noté cette réticence lors de mon dernier accrochage à Pelussin. Je n’avais pris que très peu de photographie et aucune vidéo. Je ne m’en expliquait pas les raisons, je sentais seulement que ces opérations n’étaient plus si nécessaires. Peut-être en revisitant l’intention qui jusqu’alors m’avait incité à photographier ou filmer. Essentiellement nourrir le contenu sur les différents réseaux sociaux. Peut-être qu’aujourd’hui cela ne m’apparaît plus aussi indispensable. Peut-être ai-je compris que cela n’apportait pas vraiment de valeur à mes followers. Que des photographies, des vidéos semblables ils en étaient gavés, que cela sans doute n’était qu’une sorte de captation de leur attention, plus dans un but marketing que dans une réelle volonté de partage. Volonté que j’ai conservé longtemps et qui désormais ne résiste plus à la naïveté que j’y ai découverte. Donc pas de photo, pas de vidéo. Juste essayer de relater les faits d’une façon objective par exemple à 12h15 lorsque je monte sur l’escabeau pour régler un spot, tout le rail s’éteint plongeant ainsi la première salle dans l’obscurité. Dommage car c’est par cette pièce que le visiteur peut se faire une première impression de l’exposition. Coup de fil à la mairie. Les techniciens ne viendront qu’à 13h30. Cet après-midi je reçois trois classes de l’école primaire du village pour discuter avec eux de mes peintures. Dommage de le faire dans la pénombre. Pourvu que la panne soit réparée. De l’attendu encore. Après un déjeuner dans un restaurant des environs apprendre que les deux transformateurs sont H.S. Que l’on ne pourra rien faire pour régler le problème électrique. Mon épouse qui m’accompagne s’inquiète, c’est elle qui devra assurer la permanence durant les samedis. Je pense à ce matériel d’éclairage que j’ai acheté il y a quelques mois pour améliorer mes vidéos sur YouTube. Demain elle l’installera, problème partiellement réglé. Les trois classes d’enfants que je reçois arrivent en rang deux par deux devant la porte de la Tour. Tout s’enchaîne. C’est toujours un plaisir de s’entretenir avec des enfants concernant la peinture. Ils disent souvent des choses plus intéressantes pour moi que les adultes. Je récolte beaucoup d’informations. Nous échangeons sur le laid et le beau. Les maîtresses semblent ravies elles aussi. Fin de cette première partie à 16h. Denier soucis à régler, repartir chez nous. Depuis quelques semaines caprice de la Dacia au démarrage. Ils s’agit des charbons qui se collent aussitôt qu’on roule un peu longtemps. J’ai prévu en plaçant un couteau à bois dans la boîte à gant du véhicule. Si ça ne démarre pas il suffit d’ouvrier le capot et d’aller cogner sur une pièce métallique pour décoller ces charbons. Mais cette fois c’est inutile, démarrage au quart de tour. Une heure de route tranquille. Puis arrivé à la maison, on se découvre épuises. Je ne me réveillerai que quelques heures plus tard, même pas faim. Juste envie d’écrire ces quelques notes sur ce qu’est cet accrochage. Y revenir par la suite certainement car cette notion d’attendu et de ce qui arrive, cette évaluation recèle sûrement encore pas mal de pistes de réflexion.|couper{180}

photofiction| notes sur un accrochage d'exposition, l'attendu, ce qui arrive vraiment. Orlienas.

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Le grand carnet

Un « grand carnet » collectif, nouvelle proposition d’atelier d’écriture de François. Je découvre cette vidéo dans la nuit. D’octobre à novembre sur quarante jours. Revenir à ce concept du carnet, d’une notation quotidienne. Mais vue au travers du collectif. Ce que cela peut rappeler de ce travail déjà effectué, l’excitation au souvenir de retrouver la même sensation d’étrangeté mais cette fois démultipliée. Quelle relation avec #photofictions, avec le blog, sur un plan à la fois individuel mais collectif aussi. Comme un double prisme. Un effet kaléidoscopique. Souvenir de ces appareils d’autrefois, en carton, assez fragiles, jouets d’enfants où des diapositives pouvaient défiler à l’aide d’une molette que l’on tournait dans un ravissement continu durant quelques secondes avant de passer à autre chose. Que ce soit durant la longueur irréelle d’un jeudi, ou durant une période de vacance, toujours cette idée d’infini, de temps lent et puis cette vision soudaine. Cette illumination. Ces photographies la plupart du temps de belles villes en couleur, un éblouissement éphémère certes. Mais qui prodiguait au reste de la journée une aura particulière. Même si on en était alors inconscient. Écrire une phrase, quelques mots à peine parfois à peine intelligibles dans un carnet, ne prodiguait-il pas justement la même aura sur la journée ensuite. Des journées parfois si mornes en revanche, une fois l’âge adulte atteint désormais . Écrire dans un carnet ne serait-ce que pour ça. Pour maintenir en soi une toute petite lueur, une attention au réel, à soi, au monde. Sachant le risque perpétuel qu’elle s’éteigne. Que l’on soit submergé par les ombres, par la platitude, le dégoût ou l’indifférence, danger jugé majeur. Écrire dans un carnet pour ne pas crever aussi facilement que parfois cela semble possible, voire tentant. Et découvrir aussi progressivement avec la répétition, l’homonymie. S’incarner dans un carnet. L’histoire que représente le mot carnet vaut bien à elle seule que j’obtempère. Que je recreuse cette veine. Surtout dans un processus collectif. Avec le recul possible du collectif. Une manière que j’avais déjà entrevue autrefois de redécouvrir par l’œil de l’autre ses propres textes, souvent rédigés en toute inconscience. Dans une sorte d’urgence. Oh les beaux jours comme dirait Beckett. Pour celles ou ceux intéressés par cet atelier le lien de la vidéo : https://youtu.be/_dE7zoixXBY|couper{180}

Le grand carnet

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le verbe, le temps, les autres et moi, comment conjuguer.

Tout commence sur les bancs de l’école. Tout, c’est à dire La difficulté à saisir ce que peut être le mot conjugaison, son utilité, sa raison d’être dans ce qu’il propose de relation entre le temps, la façon de s’exprimer pour rendre compte d’actions, les miennes comme celles des autres. La plupart du temps. La plus grande part du temps nous devons mettre le verbe sous le joug de quelque chose, étymologie du mot lui-même, mais on ne sait pas vraiment ce qu’est ce quelque chose. Et puisque l’école propose un enseignement vertical, du type règle énoncée par l’instituteur ou professeur, obéissance ou non de la part de l’élève d’appliquer la règle, toujours éprouvé cette sensation désagréable de ne pas pouvoir en savoir plus. En détail. Pourquoi telle ou telle règle avait été conçue. Ce qui justifiait qu’elle avait été établie dans le temps, dans l’histoire. Une carence d’explications occultée par la pression du devoir à faire, la leçon à apprendre par cœur. Cela en dit long sur la façon dont la pédagogie scolaire n’a guère changée en un siècle. Apprendre ainsi par cœur les tables de multiplication ou les conjugaisons sans pouvoir prendre le temps de s’interroger sur les raisons, sur le véritable pourquoi des choses. Sans doute me suis-je posé des questions. Certainement les ai-je formulées à voix haute, parfois. Au tout début. Cependant, la réception de celles-ci se soldant en gros par un tais-toi et mange m’aura vite dissuader de les réitérer. Mais pas de continuer à m’interroger. Et d’inventer moi-même toutes les histoires possibles pour m’expliquer à moi seul pour moi seul, ce que pouvait être la conjugaison. Démarche précoce d’écriture ? Sans doute. À partir de ce que j’ai toujours plus ou moins considéré comme une fragilité face au monde. Une vulnérabilité congénitale. L’impossibilité vécue douloureusement d’accepter le par cœur jugé trop proche du bêlement des moutons. Sauf lorsque réciter s’approche du chant, d’une musicalité dans laquelle il arrive qu’on ressente un plaisir physique, un engagement du corps tout entier qui se propage depuis la bouche jusqu’à l’anus. Le par cœur comme le rituel d’un plaisir solitaire qui ne s’avoue pas. Et qui justement parce qu’il se tient dans une zone de non-dit, ou de l’interdît, fonctionne. Sauf que le choix et le renoncement se retrouvent ici encore une fois. Apprendre par cœur une récitation avec ce même plaisir toujours renouvelé. Mais certainement pas les dates de couronnement des rois et des empereurs, pas les numéros des départements de la nation. Dates et numéros subjectivement moins utiles pour l’accession au plaisir. Ce qui signifie déjà une prise de conscience tout a fait personnelle entre plaisir et utilité. Et aussi cette carence inouïe dans le domaine de la perspective. Un rejet de l’utile dicté par un programme au bénéfice du plaisir immédiat de dire de la poésie. De cette sensation de satisfaction immédiate qu’elle procure. Comme le chant, la prière, la litanie, l’écriture. Et que ce refuge dans la quête de ce plaisir immédiat est déjà un avant goût d’un modèle à venir qui peu à peu envahira toute notre société. La fuite hors d’une réalité commune, si proche du désagréable parce qu’elle n’est constituée cette réalité que de contingences, de devoirs à faire, d’obligations, de récompenses ou de punitions. Binaire. Le refus plus ou moins bien exprimé d’être un mouton devient ainsi d’une certaine manière le meilleur moyen d’en devenir un. Ce n’est pas la notion de plaisir qui est responsable du paradoxe. Mais la méconnaissance de la conjugaison. Du fait de ne pas pouvoir s’exprimer au futur pas plus qu’au passé, de ne rien pouvoir dire au travers de ces formes si complexes que prend le passé, le futur, lorsqu’ils sont composés du simple à l’imparfait, de l'antérieurs, au plus que parfait, notamment. Ce que devient l’emploi du temps dans cette situation, véritable mystère. Tout comme les mots priorité, important, urgent, obligatoire. Il y a un inconfort à s’en tenir uniquement au présent par ce renoncement à toute forme de flexion du verbe, et donc de l’action. Associé au différents séjours effectués au catéchisme, à la messe, en pension religieuse, à la génuflexion. Avais-je dans ma jeunesse les moyens intellectuels de comprendre les raisons de ma réticence à la flexion, sûrement pas. Emporté très vite par l’accumulation des urgences créant la contingence je n’aurais su prendre le temps comme un taureau par les cornes. Peut-être que l’achat de mon tout premier carnet dans une librairie proche de la Gare de l’Est, à Paris, fait partie des prémices d’une volonté de récupérer du temps perdu. De récupérer un accès au temps tout court. Prise de conscience soudaine, intempestive d’un gouffre que j’avais creusé seul vis à vis de l’usage commun du temps. Revenir aujourd’hui à plus de soixante ans à cette notion de verbe, d’actions à conjuguer, en moi-même ou avec autrui implique un effort d’humilité ou de modestie. Et qui découle probablement d’un orgueil mal placé à l’origine. Un orgueil dépourvu totalement de l’idée de sa propre situation dans le temps. L’orgueil déchu d’une divinité s’incarnant soudain dans la matérialité du monde. Et qui aura confondu cette ignorance avec l’idée de son éternité. Alors le fait de se sentir vieillir fait retour à d’anciennes fragilités d’enfant. Évidemment cette timidité oubliée, ravalée en force par les obligations de survivre que l’on se sera longtemps martelées . Bien sûr ce sentiment de ne rien savoir de rien, une fois les murailles que l’on avait construites effondrées. Bien sûr le chagrin d’origine se retrouve intact. Et une fois ces constatations formulées, que faire ? Rien d’autre que ce que j’ai toujours fait au final suite à toute remise en question, repartir de zéro, recommencer. Mais pas de la même façon. Expérimenter d’autres possibilités. Observer encore plus attentivement ce qui cloche dans mon emploi du temps. Les raisons, les excuses, surtout, pour ne pas l’employer à bon escient Est-ce juste encore de la littérature ? Est-ce encore du récit ? Une nouvelle fiction ? Comment le savoir ? Il ne suffit pas de se donner des petits coups ou de grand de discipline comme un moine fêlé. Encore faut-il saisir en quoi fléchir ou réfléchir produit un résultat tangible. Évidemment on pense au palpable, à l’argent. C’est un réflexe. Surtout quand on en manque. Ce qui conduit à adopter un système bien rodé, le même depuis toujours. Faire en gros n’importe quoi pour faire face. Se jeter tête baissée dans des jobs subalternes n’est plus si héroïque que je l’ai souvent pensé. Non, tout cela appartient au passé. Plus de Dieu, plus de héros. Juste un homme qui fait ce qu’il peut pour mieux conjuguer ses verbes.|couper{180}

le verbe, le temps, les autres et moi, comment conjuguer.