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Référence
Encore la référence en ligne de mire. Lire un essai, une critique de bouquin truffés de références. L’impression de remplissage, le soupir, comme si pour étayer la moindre incartade personnelle il fallait aussitôt comme dans un cirque un filet en cas de chute. Cette normalisation journalistique. Comme si on avait le temps ou l’envie d’aller farfouiller chaque référence pour quoi faire. Un consensus où se fabriquer sa propre idée on ne sait. Certains en abusent, ce ne sont pas les meilleurs. S’il y a référence j’aime la découvrir par moi-même, être agréablement surpris qu’elle ne soit pas exhibée. L’auteur y gagne presque aussitôt ma sympathie, pour ce qu’elle peut lui valoir évidemment. C’est à dire la plupart du temps rien ou pas grand chose admet-le donc.|couper{180}
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En principe
En principe je devrais. En principe c’est toujours comme ça. En principe c’est à ce moment là que. En principe les gens. En principe on devrait. En principe si tu va jusque là. En principe si tu restes. En principe les choses. En principe le temps qu’il fera. En principe on en parle. En principe on se tait. En principe on a de quoi. En principe on peut se le permettre. En principe mieux vaut ne pas le faire. En principe on devrait y arriver. En principe après cela. En principe ça dure. En principe l’eau bout à plus ou moins cent degrés. En principe il prend l’autre pour un con. En principe quand tu ne sais pas tu te tais. En principe une vache donne du lait. En principe le feu brûle. En principe il faut boire. En principe l’oisiveté est mère de tous les vices. En principe c’est toujours la charrue après les bœufs. En principe il ne vient jamais. En principe à cette heure là il. En principe il ne prend pas de sucre. En principe il fuit. En principe il se tache. En principe on ne lui fait pas confiance. En principe il adore. En principe il va naître bientôt. En principe on l’enterre aujourd’hui. En principe tu ne devrais jamais en parler. En principe le silence est préférable. En principe on s’en fiche. En principe il n’y verra que du feu. En principe pour que la viande soit saignante. En principe on a cinq doigts à la main. En principe l’homme descend du singe. En principe Dieu y pourvoira. En principe il ne faut pas faire confiance aux femmes. En principe on devrait aller au cinéma. En principe si tu fais ceci tu auras cela. En principe la foi déplace les montagnes. En principe n’écoute pas les fous. En principe tu ne tiens compte de personne. En principe tu fais n’importe quoi. En principe je t’aimerais mieux si. En principe on ne devrait plus jamais se revoir. En principe la nuit vient après le jour. En principe et à défaut du contraire.|couper{180}
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Récrimination
Désir d’autrui non de me voir tel que je suis mais comme il voudrait que je sois. Souvent, indique un manque de discernement, tant chez autrui que pour moi-même. Limite à partir de quoi une surdité s’installe désormais.|couper{180}
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Disparaître
Évidemment, l’évidence de la mort. Ultime. Mais en amont tout ce que l’on peut faire et surtout ne pas faire, ne plus faire. Apprendre le plus tôt possible à disparaître. En ne donnant plus d’indication, plus signe de vie. Disparaît-on pour autant à soi-même, pas si simple. Ne plus écrire changera t’il quoique ce soit. Déjà fait. Des années sans. Et rien n’a changé pour autant. Ce qui résiste, la volonté de disparaître totalement, l’échec.|couper{180}
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réparation
Encore une fois le mot réparation. Obsédant. Vient-il seulement de la culpabilité, non. Problème réglé. Au demeurant assez facile à régler en tenant compte du mot ordre. Et bien sûr de son contraire le désordre. Ordre et désordre, la tentative permanente de remettre quelque chose en ordre sans vouloir tenir compte des usages que seraient la chronologie, le classement par catégorie, par arborescence, par couleurs, par synesthésie. L’obsession de réfuter l’usage et en même temps celle induite par la réparation. Trouver le moyen de réparer quelque chose de bancal, qui ne fonctionne plus, autrement que par les moyens dits normaux, classiques, logiques, raisonnables, et non plus magiques ou mystiques. L’immobilité et le silence que cette attente procure. Est-ce confortable, pas vraiment. C’est juste juste. Comme justesse avant d’être justice. Une affaire d’équilibre qui ne se constitue justement que par un déséquilibre permanent à maintenir. Accueillir réfuter. Passer au tamis, filtrer. Discerner. Comme aussi un ressort que l’on compresse sachant qu’une fois relâché quelque chose, une fulgurance, peut jaillir. Le fait qu’elle ne surgira pas de façon systématique empêchant de sombrer dans la facilité du truc, de la martingale. Sur quoi s’appuyer alors. L’hébreu dans ce qu’au figuré, ce mot inspire d’impossibilité. La Torah. Les tablettes recueillies dans un désert au sein d’un buisson ardent qui parle une langue mystérieusement intime. Ce désir n’est-il pas de tous les désirs traversés le plus suspect de tous. Comme la dernière cartouche, la dernière balle qui reste dans l’arme que l’on dirige contre soi-même à la fin d’une partie de roulette russe. Crever dans la Torah en apprenant l’hébreu. En se fondant tout entier dans une origine fantasmée. Pas bien différent que de sombrer dans le Coran, dans la télévision, dans le sexe ou l’alcool. Du déjà-vu qu’on ne veut pas voir afin de s’illusionner encore un peu. Quelle réparation dans ce cas précisément ? Écrire alors, écrire tout cela. Pourquoi, pas de réponse. surtout pas de réponse.|couper{180}
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Aimant
Pourquoi est-ce que j’attendrais quoique ce soit qui est déjà là depuis belle lurette. Qui n’attend- mais l’attend-t’il vraiment et pour quelle raison- que je me rende enfin compte que l’objet supposé de cette attente existe déjà depuis l’origine, que je l’ai en ma possession depuis toujours. Tout l’enjeu du jeu est probablement dans cette énigme d’apparence absurde. Attendre quelque chose que l’on possède déjà. Ce qui en d’autre terme signifie que si je prend un arc et une flèche, celle-ci de toute façon ne peut pas rater son but. Le but est déjà installé dans une portion du temps, appelons ça l’avenir si l’on veut. Mais en réalité pas de temps. Juste des aimants qui se réactualisent perpétuellement sous la forme d’intentions.|couper{180}
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C’est rien, c’est tout
Prendre n’importe quel croyance et l’épingler sur un tableau. Reculer de dix mètres environ, la considérer. Ce que c’est vraiment, je n’en sais strictement rien. Je détourne un seul instant les yeux et elle renaît aussitôt dans une flamboyance stupéfiante qui envahit toute la pièce. Voilà ce que c’est, c’est rien et c’est tout. Belle avancée.|couper{180}
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Passer
Passer d’un événement à un autre, ne rester collé à aucun. Hier, sur la route que j’emprunte pour rejoindre les cours, j’ai songé à un moment m’enregistrer et puis j’ai laissé tombé. L’intention me paraissait trouble encore une fois. Mais je me suis mis à lire à voix haute tous les textes des pancartes que mon regard apercevait sur le bord de la route, ceux que je parvenais à lire en passant à hauteur des zones industrielles ou commerciales, les sigles au cul des camions, les plaques d’immatriculation, toute écrit perceptible, au moins durant le laps de temps nécessaire pour atteindre le pont de Vernaison. Une quinzaine de minutes environ. Exactement le même effet que de lire à haute voix un poème. Stupéfiant. Un état proche de la transe, une sensation étonnante de bien-être à la clef. Comme quoi le sens n’a que peu d’importance que ce soit dans la récitation, dans la prière, dans l’énoncé de plaques minéralogiques. L’intention qui se loge en amont, scellée à notre compréhension, seule compte. Et, sans doute que tout ce que nous pouvons faire est de nous y fier aveuglement sans discuter. Passer ainsi le temps, la vie, dans cette obstination têtue quoiqu’il puisse advenir pour tenter de nous en détourner. Rester face au doute un bref instant, puis passer, passer encore.|couper{180}
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Chute
La petite dame s’est cassée la figure cette nuit en allant pisser. Patatra. Hurlements dans la maison. Très assourdis au point de ne pas m’alerter, peut-être chez les voisins ou autre, car j’étais dans l’atelier réveillé vers deux heures du matin. Je me demandais encore pourquoi je voulais écrire, ou peindre. Rien de bien important. Puis la porte de la cuisine au- delà de la cour s’est ouverte violemment, des pas jusqu’à la porte de l’atelier, ouverte brutalement elle aussi, comme sous l’effet d’une rafale de vent. Ma mère s’est cassée la figure mais tu es là, tu n’as rien entendu, tu n’en as rien à foutre, j’ai du la relever toute seule. portes qui claquent, hurlements encore et encore, hystérie totale. J’ai attendu quelques instants puis suis venu voir de visu. Un bleu au pouce de la main gauche, la petite dame comme une petite fille prise en faute, encore plus sèche, plus voûtée que jamais. Rien de cassé je demande. Non non tout va très bien elle dit. Un peu plus loin mon épouse en train de balayer la terre d’un pot qui se sera renversé dans la chute. C’est aujourd’hui que je rentre chez moi dit la petite dame. Hein c’est bien aujourd’hui. Pas encore E. Je réponds, pas encore, le peintre n’a pas tout à fait fini son travail, peut-être demain, ou après demain. Vous verrez vous aurez un appartement tout propre refait à neuf. Oui mais c’est aujourd’hui que vous me ramenez chez moi elle redemande. Bruit de la terre noire dans la pelle de plastique. Mauve la pelle. Pourquoi est-ce qu’on a choisi cette couleur de pelle… très étrange ce début de journée. Manque plus que la radio. Mais ce n’est pas encore l’heure. Et puis soudain la phrase : « enlacer l’absurde ». La façon dont les phrases surgissent parfois, au moment où l’on s’y attend le moins.|couper{180}
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La radio le matin.
La radio dès le matin au réveil, insupportable. La raison pour laquelle je ne viens à la cuisine que pour remplir ma tasse et repartir vers l’atelier. Mais le peu que j’en entends, suffisant pour tout déranger de l’univers d’où je resurgis vers la septième heure du matin. Ces voix de la réalité dont le souvenir, mensonger probablement, évoque une sensation, comment dire … réconfortante ou de sécurité, durant quelques micro secondes je renfile le costume de pauvre bougre en train de se bourrer le mou quant à ces idées devenues pavloviennes, pur réflexe autrefois. insupportable de se sentir presque aussitôt renouer avec le risque de ce réflexe, nostalgie détestable. Et pour la fuir cette nostalgie j’ai au fil des années élaboré maintes stratégies pour parvenir à une efficacité, une agilité bluffantes. Des le contact de la poignée de la porte, par la cour, la façon de la tourner pour n’indiquer ni urgence, ni lassitude, plutôt un mouvement le plus neutre possible. Ensuite les quelques pas menant à la cafetière posée sur le plan de travail, deux mètres pas plus, s’effectuant en trois pas mesurés du même écart. Attraper comme un voltigeur la poignée du pot sans secousse mais suffisamment fermement comme la main d’une partenaire en apesanteur sous le chapiteau d’un foutu cirque. Appuyer sur la languette arrière libérant par l’avant le liquide thermostaté doucement, inclination de la tasse et du broc dans une oblique impeccable. Puis dire bonjour, bien dormi durant le laps de temps nécessaire, suffisant pour rebrousser chemin, réouvrir la porte et la refermer doucement derrière moi.|couper{180}
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Luz
Lorsque Dieu créa le monde il se servit du pouvoir mystérieux des lettres. On peut en retrouver la trace dans le Zohar où il est dit que celles-ci se déroulèrent devant lui en ordres diverses et sous des figures variées, pour participer à cette création du monde, à sa manifestation, à sa mise en œuvre. ( Zohar I, 204a) Le Très-Haut ordonna que cette mise en œuvre s’achève par la lettre yod qui signifie « main » en hébreu. Puis une fois cet ordre passé, il laissa le pouvoir des lettres agir à sa guise. Or, il se trouva que la lettre tet resta suspendu dans les airs au dessus du lieu auquel serait donné le nom de Luz. La lettre tet signifie lumière de la vie, par conséquent il fut interdit à l’ange exterminateur de franchir les murs de cette nouvelle ville. Lorsque les gens ayant atteint un grand-age désiraient mourir, il ne leur était pas possible de le faire dans l’enceinte de Luz. Alors ils devaient franchir l’une des quatre portes et atteindre le désert afin de satisfaire leur vœu de quitter cette terre. Impossible de mourir en ville. De plus ils mouraient fort paisiblement sans aucune souffrance selon les trois étapes que sont : expirer, mourir et enfin rejoindre ses pères. Trois séquences quoique distinctes se déroulant très rapidement et en douceur. Parfois, ce passage s’effectuait même si rapidement qu’ils ne se rendaient même pas compte qu’ils passaient ainsi de vie à trépas. La raison pour laquelle les gens n’éprouvaient aucune difficulté ni souffrance ni douleur à mourir resta longtemps une énigme. Il fallut que bon nombre d’érudits, de sages se penchent sur le problème ainsi que sur des ouvrages éminemment complexes à l’entendement normal, pour parvenir enfin à obtenir un embryon de piste raisonnable et, grâce à quoi on pourrait enfin résoudre cette énigme. Il fut clairement établi que toute souffrance provenait d’une erreur de compréhension de certaines règles, nécessaires à maintenir la vie dans son abondance. Que tout ce qui empêchait cette abondance vitale pouvait être classé comme péché. Si les habitants de Luz mourraient si aisément en franchissant les portes de la ville c’était tout simplement parce qu’ils ne connaissaient pas le péché. De deux choses l’une soient ils étaient si savants et vertueux dans la connaissance de la vie et la respectait à la lettre, soit ils étaient ignorants du péché mais n’en étaient pour autant aucunement fautifs. C’est à dire que la souffrance leur eut été inutile comme connaissance ou moyen de purifier quoique ce soit de souillé. Les choses changèrent grandement avec la venue de Jacob. Elles changèrent d’ailleurs à un point tel que l’on peut dire sans trop se tromper qu’il y eut un temps « avant Jacob » puis un autre après lui. Essentiellement pour mourir. Jacob était un grand sage et il recueillait ça et là dans la ville certaines observations des habitants concernant les disparitions intempestives. Celles-ci étaient si instantanées que nul ne prenait le temps de dire adieu à leurs proches. La raison probable était que mourir n’était pas vraiment mourir dans la mentalité des habitants de Luz. Mourir n’était pas un anéantissement, le terme même d’anéantissement n’existant pas dans leur langue. mais au contraire un passage vers encore plus de vie. Et surtout rejoindre les vivants des temps anciens, autrement dit des retrouvailles. Qu’ importait alors de dire adieu à des personnes qu’on retrouverait de toutes façons tôt ou tard dans l’autre vie ? aucune de toutes evidence. Ce fut Jacob qui implora le Très-Haut pour que les personnes désirant mourir tombent malades deux jours au moins avant de quitter ce monde pour un autre encore meilleur. Ainsi le futur plus que vivant bénéficierait de tout le temps nécessaire pour dire au revoir à ses proches. Hashem écouta Jacob et comme Il créé le futur, accepta sa requête. N’est-ce pas à partir de là que les cris et les larmes firent naître le mensonge de la mort, le doute nécessaire sur ce qui pouvait advenir après celle-ci. Mensonge qui persiste encore de nos jours mais qui sera certainement dévoilé tôt ou tard, peu importe quand d’ailleurs, puisque le temps n’est qu’un outil, un moyen de compréhension des plus grands mystères de cette terre et de cette vie et de ce que nous nommons Dieu sans bien savoir qui Il fut, est, ou sera. Note… le mot luz désigne également une vertèbre cervicale, nécessaire selon la légende et utile pour la résurrection des morts. Ce serait à partir de cet os imputrescible que se se reconstitueraient tous les autres os ainsi que la chair|couper{180}
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honte
Texte de fiction. Inspiré cependant par des faits avérés, notamment les souvenirs persistants très précis voire documentés de vies antérieures que l’entité qui s’incarne en ce que je suis aujourd’hui réactualise peu à peu. S’ajoute aussi des lectures plus contemporaines notamment quelques ouvrages d’Annie Ernaux ayant obtenu récemment le prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre. La honte éprouvée comme habitude, et à laquelle on finit par ne plus faire attention. Un état si habituel qu’il devient l’ordinaire du moi. Cette sensation permanente d’imposture. C’est avant tout de la colère si ma mémoire est bonne. Donc de la peur. Soit une émotion insupportable mais supportée d’être ou de ne pas être reconnu essentiellement pour ce que l’on imagine être, jamais pour ce que l’on est vraiment. De la peur, de l’imagination. Et plus encore un défaut de croyance en une réalité, en un optimisme, dans la vie. Le pessimisme accompagnant toujours cette honte et qui toujours nous fait voir les choses en noir. Qui ne s’oriente que vers le pire comme plausible. Défense dérisoire de l’orgueil blessé qui ferait tout pour ne plus éprouver la douleur, la prévoyant ainsi comme donnée systématique. Cette stratégie enfantine qui ne prend pas de recul et donc persiste encore à l’âge adulte. La honte défaut ou qualité typiquement humaine. Fabrication à partir de l’anticipation une armure. Directement issue du principe féminin, de la chair, du mouvement de la vie corrompue par cette propension au fragile qui agite anime l’humain. Aucun os aucun roc ne saurait éprouver de honte. Mais aussi dont l’intensité est plus ou moins variable, cuisante, selon les circonstances les rencontres les opportunités qui la ravivent, la nourrissent, l’entretiennent comme on entretient un animal de compagnie, un pet ou un hobby. La honte comme prise de conscience d’un déséquilibre, d’une erreur, d’un péché qui ne nous est pas forcément attribué directement. Un héritage dont on aurait oublié que son origine nous dépasse de tant de générations passées d’hommes et de femmes. La honte comme un fardeau dont on prend en charge, accepte le relais, de l’endosser pour d’obscures raisons qui n’en sont pas vraiment mais, semble t’il, toujours éminemment justifiées justement parce qu’elles n’en sont pas. Peut-on évoquer la honte sans aussitôt la réprimande ? Faire honte à son prochain ou à soi-même c’est ouvrir cette porte sensée indiquer la notion de droit chemin et indiquer à l’autre ou à soi l’écart parcouru de s’en être écarté. Chez nous autres juifs il est tout à fait interdit d’être en relation avec la honte. De même qu’en tant que Prêtre de haut rang je ne peux en aucun cas être au contact des morts ni de la défaite. Du moins cela aurait dû être ainsi avant que je ne sois excommunié. Mes souvenirs de ce qu’est la honte proviennent cependant d’ avant ma déchéance, que je ne dois qu’à la grande curiosité. Mais ceci est un autre histoire, je ne suis évidemment pas en train d’écrire ce texte pour parler de moi, mais de la honte. On peut néanmoins réprimander son prochain ou soi-même mais jamais sur le ton provoquant la honte. Faire honte publiquement à qui que ce soit, y compris soi-même, est un péché qui nous interdira toute félicité du monde futur. La honte est donc considérée comme un vice. On peut réprimander mais il est interdit selon le RAMBAM ( chapitre 6 du livre des tempéraments) de se gratter jusqu’au sang. Et c’est tout à fait logique étant donné l’irrépressible optimisme qui nous entraine nous autres, enfants du pays de Sem à toujours choisir la vie plutôt que la mort. La mort est ce mensonge que l’optimisme doit combattre jusqu’au dernier souffle afin que justement ce dernier souffle s’ouvre vers encore plus de vie et ne jamais parvenir au néant. Il n’est évidemment pas question de prêche au travers de ce texte. Aucune nécessité de ramener sur le droit chemin ceux qui depuis l’origine et même l’au-delà de cette origine ont choisi délibérément de s’en écarter. Ils ont leurs raisons toutes aussi respectables que peuvent être les miennes d’avoir choisi de naître juif. Il y a une autre raison à considérer la honte comme une erreur lorsqu’on ne peut plus se tenir dans l’ignorance de ce qu’elle est véritablement c’est à dire ni plus ni moins qu’un jugement. Et le danger est plus grand encore lorsqu’on ne l’ignore pas. Car le jugement s’effectue toujours selon la prise en compte d’un contexte dans lequel celle ou celui qui faute mesure ou non le périmètre de sa conscience de l’erreur. Il y a deux sortes d’erreurs, celle issue de règles que l’on connaît et celle issue de l’ignorance de telles règles. Le niveau de jugement se doit d’être adapté à cette conscience individuelle des règles. C’est pour cela aussi qu’il ne sert à rien de réprimander avec insistance, de réprimander plusieurs fois pour une même cause. Dans l’insistance la réprimande ne peut porter de fruit, elle ne peut conférer la connaissance complète et exacte de son erreur à l’autre ou à soi-même, juste un à priori, un savoir partiel et donc la réprimande trop appuyée ne fait que causer plus de tort encore. Comprendre partiellement une erreur c’est augmenter la douleur lorsque on la répète sans pour autant l’éradiquer. La honte est typiquement une erreur que l’on ne cesse de répéter et ce plus on prend conscience de l’écart qu’elle creuse avec l’image d’un droit chemin que l’on ne peut qu’apercevoir que partiellement aussi. Une autre chose à propos de la réprimande et de la honte est la notion d’irrémédiable sitôt qu’elles traversent la sphère privée pour attendre la place publique. Il est clairement dit qu’à partir de 10 personnes pour assister à une réprimande nous sommes dans la sphère publique. Je n’expliquerai pas en détail ici la raison du nombre 10 qui n’est pas du tout arbitraire mais fait principalement référence au Minian, l’attribution du nombre 10 pour prier et avoir une chance d’atteindre la kedousha ( sommet de la liturgie, moment où l’être humain devient ange ) 12 envoyés par Moise dans le désert et dont deux revinrent victorieux, au 10 jours de Techouva ( pénitence) voici donc quelques souvenirs d’un enseignement reçu il y a fort longtemps et que j’ai dû oublier pour le réapprendre de multiples fois afin qu’il pénètre chaque fois un peu plus l’essence des créatures dans lesquelles je me suis incarné|couper{180}