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L’englouti

Tu connais le mécanisme de mieux en mieux à présent. Et surtout que le désespoir qui t'assaille à date de plus en plus rapprochées ne provient pas d'un dysfonctionnement biologique ou psychique. Qu'au dessus de cette grisaille que l'on ne cesse de te marteler comme unique réalité , trône l'astre solaire et au-dessus encore l'infinie beauté des mystères des nuées. Là-haut perce le mystère désormais, ça et là, des vulves métalliques, de sidérantes mandorles, objet identifiés de toute éternité. arches vaisseaux, navires qui te ramènent à l'arôme, à l'ineffable goût des amandes. Que le miracle de la vie ne nécessite qu'une attention à l'infime, autant qu'à l'exceptionnel. Que les deux extrêmes se rejoignent dans un seul battement de cœur, un seul souffle. Tu vois tout autour de toi un monde se dissoudre par et dans la vanité qu'une poignée inflige à l'ensemble devenu son bétail. Un monde qui, dans sa frivolité, continue à vouloir ignorer sa fin proche. Des occupations vides, et la détresse que déclenche cette absence de sens. Les bêtes dans la plaine se sont mises à tourner en rond comme les oiseaux du ciel, signes avant-coureurs irréfutables du retour des grandes catastrophes. Une nouvelle fin des temps. Tes yeux creusent l'apparence pour s'ouvrir sur l'englouti. Tu t'introduis dans les corridors sombres, des labyrinthes sans fin laissés derrière eux par les anciens géants. Et la langue marquée sur leurs parois t'es devenue familière même s'il t'es impossible d'en prononcer le moindre mot. La pénombre ici est apaisante elle charrie des parfums d'humus et de silex. Parfois tu peux voir d'étranges éclairages creusés à même les voûtes et qui diffusent une lueur suffisante pour maintenir en toi cette sensation de calme et de paix te permettant de continuer à progresser. Il y a aussi ces étranges sculptures installés à des points clefs du labyrinthe, la plupart ressemblent à des gargouilles qui ornent les vieilles cathédrales de la surface. Elles ne sont plus effrayantes comme autrefois. Elles semblent attendre une délivrance tout comme toi qui t'incline face à elles en les croisant. Tu ne sais pas où te mènent tes pas à l'intérieur du labyrinthe qui reside ici de toute évidence depuis des temps immémoriaux. Tu comprends seulement que tu n'as pas le choix tu dois t'enfoncer de plus en plus profondément dans les lieux désertés, mêler ton souffle au souffle unir ton cœur au cœur de l'englouti. Tu as enfin reçu l'onction de la noirceur. Et te voici pauvre enfin, avec pour seul présent cette délivrance.|couper{180}

L'englouti

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Coherence

La différence te saute aux yeux sitôt que tu aperçois quelqu'un qui veut être cohérent alors qu'il ne l'est pas. C'est pour ainsi dire un sixième sens que tu as développé depuis l'enfance. Autrefois percevoir cette différence t'effrayait. c'est sans doute pour cette raison que tu faisais ces rêves de personnages masqués qui, lorsqu'ils les retiraient devant toi, ne laissaient plus voir alors que des corps décapités. Effroyable comme sensation. De véritables cauchemars. Puis l'effroi s'est peu à peu déplacé dans la réalité de tous les jours. Cependant que ce sont plus des somnambules que tu vois désormais. Des gens qui dorment et qui semblent animés par des programmes qui tournent en boucle, des batch qui leur imposent de temps à autre de parler tout haut de cohérence comme pour mieux encore enfoncer ce concept dans leur vie de somnambule. Ce qui fait toujours le même drôle d'effet. Ce n'est plus aussi effrayant qu'autrefois évidemment et parfois tu te dis que c'est presque dommage. Car l'effroi possédait des propriétés sans doute plus motivantes que la drôlerie. L'effroi te faisait ruer dans les brancards , déployer maintes ruses, et au bout du compte elle te prodiguait la sensation d'être un peu plus malin que tous ces écervelés obsédés par cette emprise qu'avait sur eux cette obligation de cohérence. Jusqu'au jour où tu t'es retrouvé seul à naviguer dans l'incohérence générale. Tu as acheté des manuels de cohérence que tu as lus en long en large et en travers pour essayer d'en saisir la substance mais tu n'as jamais acquis la même célérité que celle des programmes informatiques. Et comme la médiocrité t'es insupportable tu as fini par abandonner ce projet comme tant d'autres du même acabit.|couper{180}

Coherence

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ce qui n’empêche pas

La bonne façon ce n'est pas de se retenir d'écrire ce qui vient spontanément comme ça vient. Mais de connaitre l'intention qui provoque ce type d'écriture. Ne pas s'arrêter à la satisfaction médiocre que noircir du papier ou la page d'un logiciel de traitement de texte procure. On peut ainsi se dire ouf je l'ai fait, j'ai respecté la consigne d'écrire tous les matins entre telle heure et telle heure, boulot terminé passons à autre chose. Non, si tu examines de près cette satisfaction tu ne peux que la découvrir médiocre, c'est à dire incomplète, inachevée, pas aboutie. La bonne façon c'est te demander ce que tout ça peut bien vouloir dire. Te dire surtout à toi-même. c'est à dire pourquoi as tu besoin de dire autant de choses comme pour t'en débarrasser la plupart du temps. Est-ce qu'écrire est pour toi un job de déménageur ? Et si c'est cela pourquoi pas après tout... mais avec la montagne de textes que tu as déjà écrits tu dois avoir fait appel à la mauvaise équipe ou alors tu habites un château. Presque 2800 textes en quatre ans. Et elle est où la nouvelle demeure où tout serait rangé, enfin à sa place ? Que voudrait dire d'ailleurs rangé à sa place ? définitivement rangé ? C'est à dire que l'on ne pourrait plus rien déranger dans ces nouveaux lieux, qu'il serait impossible de changer le moindre mot ? Quand tu te poses ces questions tu ris bêtement, tu es gêné n'est-ce pas. Comme si quelqu'un entrait tout à coup dans l'atelier et te dise : comment peux-tu vivre dans un tel merdier... et là tu réponds quoi- rien. Tu penses tu rumines tu te dis ils peuvent bien dire tout ce qu'ils veulent et moi avec, ce qui n'empêche pas...|couper{180}

ce qui n'empêche pas

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croyance et technique

Lecture à voix haute de Jules Verne, le but est de créer un audio pour les enfants. Très vite je mesure la difficulté du projet. Comme il est difficile de bien lire ainsi sans que des obstacles, des parasites, presque aussitôt surgissent. Et ces obstacles qui empêchent la voix sont exactement les mêmes que dans la vie. Une difficulté à se positionner d'une façon générale. Aussi bien physiquement dans un espace qu'intérieurement dans un choix. C'est à dire une interprétation erronée d'une réalité, que l'on tente de résoudre à l'aide de clichés. Il en résulte une voix kaléidoscopique comme autant de facettes que l'on va piocher dans la mémoire ou dans des "on-dit- collectifs, on dérive, s'éloigne du texte. Ce qui entraîne un constat peu agréable, s'apercevoir que l'on n'a jamais réellement lu Jules vernes, on a juste imaginé l'avoir lu une fois dans l'enfance sans jamais y revenir comme on irait consommer n'importe quoi en l'oubliant une fois englouti. On aura seulement retenu une ambiance de lecture mais rien à voir avec 20000 lieues sous les mers. Donc la pensée surgit comme un pansement... il doit exister des techniques pour surmonter de telles difficultés de lecture à haute voix. Et là, découverte de Jean Sommer sur YOUTUBE. En très peu de temps tu comprends que tu viens d'arriver à l'un des camps de base au pied de l'Himalaya. Et surtout que ton désir de gravir cette montagne se heurte soudain à une sensation de poids incommensurable. Le tien, ton corps, tes habitudes tellement ancrées, ton âge. Tu te retrouves encore une fois de plus au début, sur une ligne de départ, tu imagines que nombreux seront ceux qui s'élancent déjà dans leur tête vers les sommets. Et comme un idiot tu fais un pas en arrière tu te défiles. Tu te dis oh non pas encore tout ça ... Puis tu ouvres à nouveau le micro, tu reprends le livre et comme c'est drôle, désormais les mots semblent sortir de ta bouche plus naturellement.|couper{180}

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Réthorique

La littérature se confond pour toi avec la rhétorique dans ce qu'elle a d'ailleurs, paradoxe, de plus agaçant. C'est à dire vouloir persuader ou convaincre. Quant à l'éloquence avoue que tu n'es pas très doué dans ce domaine non plus. Parfois tu te dis qu'il n'est peut-être pas trop tard pour apprendre à devenir éloquent puis tu remontes la rivière en bon saumon pour retrouver le lieu de la ponte, l'intention. Pourquoi veux-tu être éloquent tout à coup alors que tu ne l'as jamais été.. Donc c'est là que la rhétorique reprend le dessus. Et tu uses de toutes ses techniques pour te convaincre ou te persuader que tu es toujours en quête d'un ailleurs pour ne pas accepter d'être simplement ici tel que tu es, cette masse de contradictions insoluble. Sauf que la rhétorique possède aussi des limites, une sorte de patience qui s'épuise tôt ou tard. Donc l'intention est d'épuiser toute réthorique, et tout ce qu'elle dissimule de mauvaises intentions. Si tu te diriges vers un rêve d'éloquence avant d'achever d'épuiser tes convictions qui tournent à vide, relis Don Quichotte encore une fois pour te persuader que tu as définitivement raison d'être cet idiot.|couper{180}

Réthorique

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monologue

photo de spirale trouvée sur Pinterest. L'ambiguïté tient surtout à un mauvais choix, voire une absence de choix. Si tu ne parviens pas à décider pour qui tu écris, tu te retrouves face à cette ambiguïté. Et dire je ne sais pas ne fait qu'accroitre le doute, la complexité de ce mécanisme. Donc décide d'écrire pour toi, seulement pour toi. D'écrire par exemple ce que tu rêves de lire et que tu ne lis jamais. Ce qui est logique puisque tu ne l'as pas encore écrit, puisque tu es encore perdu dans les méandres de cette obsession, celle d'avoir à t'adresser à quelqu'un que tu ne connais pas. Que tu ne connaîtras probablement jamais. Et si ton but est cette connaissance par exemple, tu peux t'y attacher en faisant de toi-même cet autre indéfini. Tout en sachant qu'il y a de grandes chances que le résultat soit le même. Que tu ne saches jamais vraiment si ce que tu écris est lu comme tu imagines que cela doit l'être. Mieux encore fais donc l'impasse sur cette idée de retour, sur ce fantasme idiot que les choses te reviennent. Répète- toi plusieurs fois dès le matin cette phrase... rien ne te revient comme rien ne t'appartient . Le monologue n'est pas obligatoirement néfaste. Rien n'est absolument néfaste sauf le point de vue obstiné de vouloir le considérer comme tel. Donc si le désir de monologuer surgit, monologue jusqu'au bout, ne te pose pas d'autre question avant de résoudre celle-ci.|couper{180}

monologue

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Focalisation de l’attention

les tous premiers chefs d'œuvre Deux petits enfants de 10 et 7 ans sont à la maison en ce moment, c'est donc un autre rythme que leur présence impulse à la journée. Une fois par jour je leur propose de me rejoindre à l'atelier pour peindre avec moi. Ils s'en réjouissent et moi itou. Je leur propose de travailler sur des petits formats et leur montre tout ce que l'on peut faire à condition de prendre le temps de bien le faire. Leur difficulté principale est dans la durée dans laquelle maintenir l'attention. Ils sont là depuis une semaine et je remarque que cette durée s'accroît au fur et à mesure des résultats qu'ils obtiennent. Sorte de preuve par neuf que plus on passe de temps, plus on prend soin de ce que l'on dessine ou peint, plus la satisfaction apportée par l'œuvre achevée est importante. Cette récompense passe cependant beaucoup par le regard des adultes à qui ils montrent ces petits tableaux. À commencer par moi qui ne me laisse pas séduire facilement et qui les encourage régulièrement à persévérer. Car au bout de quelques minutes déjà après le début de la séance ils me disent : j'ai fini. Ce qui, une fois le message décodé, signifie plutôt : je ne vois pas que faire de plus c'est peut-être suffisamment beau comme ça qu'en penses-tu... Et bien sûr je les encourage en battant des mains sans oublier de dire toutefois - oui c'est formidable et si tu remplissais un peu plus l'espace blanc que tu as laissé que pourrait-il arriver encore, ou bien et si on utilisait un de ces feutres fins de couleur noir pour rehausser le dessin n'aurait-on pas encore quelque chose de plus épatant... Et c'est ainsi qu'en quelques jours à peine, la séance s'est dilatée, de quelques minutes à désormais deux heures. Ce qui est déjà une sorte de recompense formidable. Le regard des autres membres adultes de la famille change aussi. Ce n'est plus ce regard condescendant que les adultes accordent généralement à la production d'œuvres enfantines, entre deux activités qui mobilisent l'attention. Non, ils sont véritablement surpris par la qualité inédite de ces petits chefs d'œuvre. Ce que ressentent clairement les enfants. Parvenir ainsi à focaliser l'attention d'un adulte est donc aussi une sorte de réussite. Et sans doute la plus importante car les enfants ne se rendent pas compte seuls de la qualité de leur travail. Pour eux, il disent simplement qu'ils on fait une peinture avec Pidou, ce qui signifie un bon moment passé ensemble car nous nous sommes accordé de l'attention les uns les autres. Puis une fois l'activité terminée ils retrouvent leurs tablettes, passent d'un jeu à l'autre, d'une vidéo à l'autre, et quand ils en ont assez demandent à regarder la télévision, la chaîne des dessins animés. Ils passent ainsi une grande partie de la journée devant des écrans -comme nous tous. Jusqu'à ce que notre attention soit enfin mobilisée par une chose un peu plus importante ou attrayante qu'à l'ordinaire. Personne n'échappe donc à la fascination des écrans et nous avons tous une excellente raison pour nous convaincre de continuer à nous enfouir dans cette hypnose. Mon épouse dit qu'elle travaille en cherchant de nouveaux lieux d'expositions ou des communes qui accepteront de recevoir la troupe de théâtre avec laquelle elle produit ses pièces. Quant à moi dans l' atelier je ne peux guère passer beaucoup de temps sans me retrouver à un moment ou un autre en train de regarder une vidéo sur un peintre, un écrivain, de chercher la définition d'un mot, vérifier mes messages, ou de chercher une musique entraînante pour peindre. Sans compter les nombreuses fois où je note des phrases des bribes de textes qui me passent par la tête. Il résulte de tout cela une impression assez étrange comme si la plupart du temps nous étions dans une sorte de sommeil et que les rares fois où nous sentirions que nous sommes éveillés c'est lorsque une attention surgit suffisamment durable envers l'autre un objet ou une idée. La sensation d'être vivant quelques instants avant de replonger dans une confusion un chaos de sollicitations qui ne laisse au final que très peu de souvenirs, très peu de satisfaction. Ainsi peut-être est-ce une réaction de survie de vouloir tout couper, tout éteindre, s'éloigner de ces écrans afin de retrouver le silence. On évoque souvent le silence en pensant à une absence de son, mais je crois qu' il existe aussi un silence visuel. Et cela fait du bien pendant un moment ne plus rien regarder de cette façon là qui est de voir sans voir. A moins que tout à coup on enfile ses chaussures, se couvre chaudement et referme la porte de la maison derrière soi pour aller faire quelques pas dans la campagne pas très loin. Ne plus voir les mêmes choses ou voir de "vraies" choses...|couper{180}

Focalisation de l'attention

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Démystification

illustration de William Blake. L'invisible, le mystère, les forces inconnues dont la connaissance nous échappent, les mythes sont toujours d'actualité. Ils continuent à exercer une fascination en même temps que de nourrir, d'entretenir nos angoisses. Peut-être parce que l'angoisse est un ingrédient important de notre vie. Parce que sans celle-ci l'existence devient fade. Sinon comment expliquer notre attrait pour les histoires fantastiques les films catastrophes, les peintures et poésies de William Blake, la musique des Doors. Il y a donc un besoin à la fois du mythe et de l'angoisse. Bien difficile comme la question de l'œuf ou de la poule de determiner qui des deux vient en premier. Ensuite on peut s'interroger sur la façon dont on va réagir face à ces créations de l'imagination collective ou individuelle. Se laisse-t'on submerger d'une façon hystérique à la panique ou alors en appelons-nous à la raison pour explorer patiemment et avec le plus grand calme ce qui, de prime abord, paraît indicible, nous stupéfie. En gros lutter contre l'hystérie qui nous plonge dans l'immanence et nous déshumanise ou bien résister en relevant les manches pour aller fourrer les mains à l'intérieur de cette hystérie, essayer de saisir comment et en quoi elle se constitue. à condition de posséder suffisamment d'ambition, de curiosité ou de révolte en soi pour imaginer risquer cette aventure. Car même le plus raisonnable des hommes doit admettre que son contrôle ne s'étend que sur une partie infime de son environnement comme sur lui-même. Les pulsions de peur, les mobiles de fascination comme d'admiration ne disparaissent pas à la lumière de la raison. Elle les éclaire seulement. Le risque encouru par les démystificateurs de tout acabit est de se retrouver contraints de vivre dans un monde sans magie, un monde glacial où ne subsiste que l'illusion d'avoir vaincu tous les mythes. Et probable que c'est toute l'imagination que nous répudions ainsi. Fort heureusement ce scénario s'avère impossible. Nous serons toujours mystifiés par une chose ou l'autre tout simplement parce que nous avons en nous, au plus profond de nous, le désir de l'être. L'intérêt du mécanisme est la qualité que chaque partie y gagne. Les mythes comme l'angoisse d'un côté deviennent de plus en plus diffus ce qui hausse leur qualité à un niveau jamais atteint jusqu'à présent alors que la raison s'améliore dans la précision quasi chirurgicale qu'elle est obligée de mettre en œuvre pour tenter de dire l'indicible.|couper{180}

Démystification

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Profil du hater

Il est rare que tu lises des réflexions désobligeantes à propos de tes élucubrations sur les réseaux sociaux. Sans doute parce que tu n'incarnes pas l' apparence ou l' illusion attendue d'un consensus. Tu n'as pas à proprement parler de communauté. Juste des gens qui te font signe parfois quand ils te lisent. Et même de cela tu auras appris à t'écarter, non sans difficulté d'ailleurs. Tu es certainement l'unique hater de tes publications. Sans doute parce que tu désires autant que tu fuis cette idée de communauté. Cette ambiguïté ne t'a bien sûr pas échappée. Et peut-être que cette invention d'être ton pire ennemi te sert de prétexte pour ne pas chercher à créer de communauté au sens où ce terme est désormais utilisé. C'est à dire pour résumer, cette foultitude de félicitations, d'encouragements, ces preuves d'amour incessantes que tu considères factices la plupart du temps. Et qui demandent implicitement une rétribution. Toutes ces petites phrases de quelques mots à peine qui semblent dire, je suis là, j'espère que tu le remarques et que tu m'en seras gré ou, plus insidieusement, redevable. Ce que tu chasses de ton esprit aussitôt que tu veux y songer. Et puis il suffirait de l'énoncer clairement à voix haute pour en saisir le ridicule. C'est à dire la pression de la pensée collective, ce consensus justement, sur ta propre volonté de désirer obstinément t'en écarter. Un ridicule "classique" qu'éprouve tout individu s'accrochant à l'absurdité d'une foi quelconque en sa singularité. Cette persistance d'une singularité probablement utile au collectif et qui lui sert à se renforcer dans sa certitude grégaire. Aussi utile qu'un pauvre pour asseoir la moindre richesse. Cependant en étant ainsi ton propre détracteur tu joues un double jeu dont la motivation est de te prémunir par anticipation de toute velléité d'agression provenant de l'extérieur. Sans doute est-ce lâche dans le sens où tu te ferais encore des idées sur ta bravoure. Il y a cette zone trouble au fond de toi qui ne peut exister vraiment sans la présence d'un bourreau pour que tu te vautres dans cette sensation hypnotique d'être sa victime siamoise. Jusqu'à ce moment où tu t'insurges contre la répétition de ce mécanisme, que tu t'en offusques, batte ta coulpe, te flagelle en inventant une toute nouvelle discipline, de préférence à l'apparence inédite. comme si l'illusion de l'inédit te proposait la promesse d'une voie de repli, un espoir d'évasion. Ce dont tu peux désormais douter étant donnée la liste impressionnante de tes défaites.|couper{180}

Profil du hater

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fascination

trouvé sur Pinterest. Comme beaucoup, il t'arrive d'être fasciné. Mais est-ce vraiment plus fort que toi de t'engouffrer dans ce vortex que la fascination crée sitôt qu'elle surgit. N'y a t'il pas une configuration particulière qui, à un moment, dans la journée, dans la saison, dans l'année, te prédispose plus qu'un autre à te laisser dominer par son influence. A désirer plus que toute autre raison à te laisser aller et céder à cette séduction devenue non sans surprise, irrésistible. En cherchant un peu tout au fond de toi-même, tu ne tardes pas à découvrir que cette configuration particulière dans laquelle la fascination devient un centre, provient avant tout de ta disponibilité à bien vouloir être fasciné. Ce qui une fois le mécanisme détecté, provoque presque aussitôt un retrait, un reflux, c'est à dire une volonté, assez obscure, de vouloir y mettre terme ou en tous cas te ressaisir par un surcroît d'attention afin d'y resister. Il y a donc un mouvement double provoqué par toute fascination. D'un côté la volonté d'être bon public et de t'immerger presque entièrement dans cette étrange absence de libre-arbitre. Et, simultanément ce rejet parfois violent et qui tire vers un genre d'extrémisme. Qui cherche ou désire, dans une urgence suspecte à vouloir l'abolir sitôt que tu en prends conscience. Tu peux désormais remonter assez aisément le cours des événements de ta vie comme on démonte un jeu de poupées russes afin de parvenir à cette toute première fois où tu te seras livré à ce besoin d'être fasciné , par un objet, une idée ou un être et qu'aussitôt, en éprouvant le danger tu te seras arc-bouté pour tenter de t'en évader. Et si tu creuses encore plus lucidement ce mécanisme tu t'apercevras non sans dégoût ou horreur que la plupart des relations que tu as entretenues avec autrui n'ont été construites qu'ainsi, dans ce double mouvement d'attirance puis de rejet. Tu pourrais évoquer le mauvais sort, la malediction qui auront provoqué ce mécanisme perpétuel, en empruntant encore une fois un point de vue de victime. Mais tu te doutes que ce serait désormais beaucoup trop facile, qu'ainsi tu ne prendrais pas suffisamment la mesure de ta responsabilité dans ce genre d'affaire. Que tant que tu n'auras pas élucidé cette propension qui te pousse d'une fascination vers une autre, avec toute la cohorte de tes fuîtes, tes hontes ta culpabilité, tu resteras immobilisé comme un fossile dans un morceau d'ambre au fin fond des profondeurs de la mer Baltique. Inutile aussi de vouloir lister ou détailler tout cela dans une sorte d'urgence qui serait tout autant une fuite. S'enfuir encore dans l'action d'écrire toutes ces choses, ces anecdotes par exemple, te semble suspect, ou enfantin. Et puis n'est-ce pas ce que tu as déjà fait mille fois sans jamais véritablement obtenir la sensation "vraie" de résoudre enfin cette difficulté une bonne fois pour toutes. Tout au plus de vagues bouffées de satisfaction douteuses qui se seront évanouies aussitôt que le doute aura surgit juste après les avoir rédigées. Il en va de même pour l'écriture bien sûr. Pourquoi la fascination et le rejet n'interviendraient- ils pas tout autant vis à vis de celle-ci. Surtout vis à vis de celle-ci. Car au bout du compte tu constates à quel point désormais elle "cristallise" à la façon dont Stendhal emploie le mot, tout un univers personnel crée par ce mouvement d'attirance et répulsion. Et tout à coup naît aussi ce pressentiment inquiétant comme jamais pressentiment ne le fut. Que personnel et factice sont devenus les meilleurs synonymes. Tu ne peux plus échapper à cette impression, fascinante elle aussi, que le "personnel" est une invention tout comme celle de l'individu, et cette solitude dans laquelle tu te réfugies pour désirer l'oublier. Cette solitude des êtres qui depuis toujours te fascine autant qu'elle t'aura indigné, que tu te seras battu pour en démonter pas à pas l'illusion. Cependant que la source des difficultés que tu entrevois est aussi cette illusion du collectif, du groupe, s'il n'est jamais autre chose qu'une somme d'individualités mensongères. Et pourtant le collectif est certainement tout autre que la simple somme de ses parties, un mystère encore intact au même titre que ceux d'une ville, d'une bibliothèque, d'une symphonie. En dernier recours il y aurait donc cette fascination pour le mystère pour cette part d'inconscience ou de hasard et bien sûr le mécanisme sera le même que pour tout le reste. La violence du rejet immédiatement au rendez-vous. Et cette fatigue inouïe qu'on éprouve au réveil, après avoir traversé des rêves emprisonné dans l'ambre des désirs et des regrets.|couper{180}

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Retour à la case départ.

L'écriture ne se soucie pas de ce que tu as imaginé un jour ou un autre vouloir vivre pour écrire. Et tant pis si tu l'as vraiment vécu. Elle y est indifférente en très grande partie. Sauf pour aller, de temps à autre, puiser un mot qui ne soit pas totalement dénué de sens ; un des rares mots sur lequel il te faudrait t'arrêter une fois celui apparu. Et ensuite peut-être serait-il élégant d'effacer de ce qui aura préparer l'arrivée d'un tel mot. Oter l'échafaudage. C'est à dire l'isoler pour vraiment le regarder comme on peut parfois s'arrêter face à une façade neuve. Une femme inconnue. Un mot qui servirait à mesurer la distance plus ou moins réelle ou imaginaire entre les autres et toi. Puis une fois estimée cette distance creusée par le malentendu des définitions non pas essayer de corriger l'erreur mais plutôt l'énoncer le plus simplement possible. Ainsi cette phrase qui surgit à propos des femmes. Des inconnues disponibles tout comme tu te seras persuadé de l'être. Mais ta disponibilité n'avait pour but que d' explorer l'inconnu du langage. Une disponibilité qui s'évanouit sitôt le bon mot trouvé ; proche d'une ivresse. Et qui sera aussitôt épuisée par cette sensation trouble qui réunit la proximité, la familiarité, et la vulgarité. Comme si l'écriture te rendait quelques soient toutes ces histoires vécues, intouchable. Ce que tu as souvent mal interprété. Intouchable comme ces êtres relégués dans les plus basses castes de la société et simultanément comme ceux qui trônent à son sommet. Ambiguïté qui aura annulé tout désir d'appartenir vraiment à une quelconque société, de nourrir l'espoir ou le désir de te créer ta place, car cette place serait forcément médiocre. Définition personnelle produite par l'exigence que tu associais à l'écriture. Cette écriture ne te servait sans doute que de prétexte pour ne pas oser exprimer encore les mots véritables, c'est à dire ta violence, ta cruauté, ton égoïsme et au bout du compte ta bêtise. Ces derniers mois tout semble être retombé comme un soufflet raté. Il s'en suit une impression étrange d'être déconnecté d'à peu près tout. Une forme d'imbécilité mais qui n'est pas effrayante, sorte de retrouvailles avec l'enfant que j'étais il y a si longtemps et pourtant cela est comme hier, avant d'être forcé de me forger toutes ces armes, devenues inutiles désormais. Et si par oubli ou habitude tu veux encore t'emparer d'une de celles-ci elle se désagrège presque aussitôt que tu tentes de la brandir.|couper{180}

Retour à la case départ.

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Tremblement

peinture Zoran Music Tu t'es raconté maintes fois cette histoire. Celle de ce moment où la mort sera là, dans les parages. Tu te disais que tout à l'extérieur comme à l'intérieur de toi t'en avertirait suffisamment à l'avance pour que tu puisses être conscient de ce grand événement. Ton voyeurisme aura été jusque là. Provocation ou scandale jusqu'au bout. Et aujourd'hui que tu comprends mieux comment se fabrique ce genre de certitude, tu trembles. La mort peut surgir de tant de façons diverses et variées, elle dépassera toujours ton imagination. Et ce tremblement provient-il de ta colère ou de ton impuissance ?|couper{180}

Tremblement