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Le coeur léger

photo trouvée sur le net. Les gouffres sont immenses et nombreux mais mon cœur est léger. Grace au froid mes mains se sont retrouvées. Et rien de bizarre à voir des ailes se reformer. Ma cervelle est celle du pinson, ce chant traverse brumes et brouillards pour t'avertir du soleil. Prend garde à la tristesse pauvre sirène. Plutôt guette au haut clocher ce coq en fer. Que les vents malmènent et qui sur une même patte tient bon ne perd pas axe. Drames, comédies, larmes de mort, larmes de joie, rien n'y changera sauf l' innocence vraie. Noël ! miracle que produit la neige au moment où tu t'y attendras le moins. Que tout le lourd produise un coeur aussi léger, quel mystère !|couper{180}

Le coeur léger

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Le but en soi

peinture Marc Chagall. Toujours énormément peiné sur la notion de but. Déjà dit de nombreuses fois sur ce blog. Ce qui fait peiner à partir d'un certain âge c'est de perdre son temps. C'est que l'on ne voudrait surtout pas perdre ce temps de plus en plus précieux en se trompant de but. Et malheureusement la méthode que j'ai le plus souvent utilisée c'est celle d'aller au bout des buts qui n'en sont pas vraiment. Des buts à la mode, des buts illusoires. Ce texte naît d'une réflexion sur la vie du peintre Chagall. Pourquoi un simple boulot de commande, des illustrations qu'il avait à faire sur la Bible devient le cœur de son œuvre. N'a t'il pas par accident, ce qu'on nomme le hasard découvert un but qui allait bien au-delà de la réalisation d'un travail que l'on pourrait considérer comme alimentaire. J'imagine qu'en se mettant au travail un but s'est ainsi trouvé collé à l'évidence. Tous les astres se sont retrouvés alignés. Ce serait ça un but digne de ce nom. Un alignement de planètes. Une configuration qu'on ne saurait remettre en question. Et qui nous impliquerait par une mystérieuse alchimie dans cette configuration. C'est ce que j'attends depuis des années, depuis toujours. Et probable que ce n'est pas la meilleure des postures qui rendrait l'apparition de cette grâce favorable. Aussi des années que j'´ai renoncé à cette posture de l'attente. Que jour après jour je me mets au travail dans une régularité de métronome, sans rien attendre d'autre que de mener cette simple tâche à bien c'est à dire de l'effectuer quoiqu'il puisse advenir. S'enfoncer dans cette volonté de non but n'est pas une petite affaire. C'est qu'on les voit défiler justement tous ces buts toutes ces illusions. On se retrouve un peu comme Tantale l'assoiffé qui voit passer l'eau mais qui ne peut la boire. Qui s'interdit lui-même de se désaltérer parce que cette satisfaction n'est qu'éphémère, qu'elle n'étanche aucune soif. Parce qu'il faut s'asseoir au milieu de la soif comme au milieu de l'ennui et constater de quoi elle se constitue aussitôt qu'on veut bien la penser, la conceptualiser. Une soif inventée de toute pièce par la pression atmosphérique, par l'extérieur. Mais si l'on se tient suffisamment sage et immobile, si au lieu de s'en faire une ennemie on la considère comme une malheureuse, une démunie, que l'on cherche à dialoguer avec elle sans fausse compassion, sans bienveillance exagérée, car elle est rouée comme tout ce qui est humain, alors quelque chose se produit dans l'énergie. une inversion électrique qui entraîne la découverte surprenante : cette soif a besoin de moi, elle ne peut réellement exister sans moi. c'est le moi dont elle se fait le but en soi. Ce qui se produit ensuite c'est la représentation de tous les buts qui défilent comme sur une scène de théâtre devant l'être et la soif comme spectateurs. Ils jouent leurs rôles, tragiques ou comiques avec le plus grand sérieux ou une nonchalance de mise. Ils brouillent tellement bien les pistes. Et c'est à ce moment là que les spectateurs se donnent de petits coups de coude. C'est à ce moment là qu'ils se disent mutuellement tu as vu, rien de bien extraordinaire et justement c'est cela l'extraordinaire. Et comme un but qui dépasserait la tête de tous les autres, le banal serait démystifié. Le banal serait ce miracle justement que tu attendais depuis toujours sans parvenir à déposer le fameux grain de sel sur sa queue pour l'attraper. Que le Christ soit présent sur les tableaux de Chagall, une énigme pour certains. Mais si l'on en revient au fameux but, pas vraiment. Il 'faut de toute évidence sacrifier un agneau quel qu'il soit, une certaine forme d'innocence pour être en mesure d' offrir une connaissance de lui-même au monde.|couper{180}

Le but en soi

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Carnet 35

Un mot au bout de la langue, écrire là-dessus pour cette 35/40 proposition. Pour faire mode dans cette époque de vitesse on utilisera BDL pour «&nbsp;le bout de la langue&nbsp;», traduction du TOT anglais. &nbsp;«&nbsp;Tip of the tongue&nbsp;». Et pour cette proposition il s’agit donc d’examiner une défaillance cognitive bien connue. D’imaginer ce que ça déclenche. De le dire ou de l’écrire. Je l’ai sur le bout de la langue, 160 pages chez Bernard Noël <em>le syndrome de Gramsci</em> … Autrement dit encore comment s’y prend-on pour broder sur le BDL.&nbsp;? L’évocation de plus en plus fréquente de la maladie d’Alzheimer de nos jours. Forme de danger supplémentaire qui nous guette tous, comme très récemment celui de l’hiver. Elément qui s’ajoute à la liste de tous les éléments nécessaires pour créer une atmosphère anxiogène. L’ambiance qui saute au visage à l’œil ou à l’oreille sitôt que l’on se connecte au monde via les machines prévues à cet effet. Ordinateur, télévision, portable, tablette, transistor. La diffusion désormais en boucle de nouvelles horrifiques qui s’accrochent à nos tympans, parce qu'on le veut bien. Sauf si on coupe tout, si on se bouche les oreilles si on s’exclu volontairement de cette pestilence, du méphitique de l’information. Information qui, comme le disait Deleuze, n’informe en rien, mais inocule comme un poison la collection de mots d’ordres -nécessaires pour tout pouvoir à la surveillance et au contrôle des masses. A fabriquer et entretenir une pensée constituée aujourd’hui par un savoir et non une connaissance. La façon d’apprendre, l’éducation, n’est-elle pas à l’image ou le produit même d’une ’économie qui ne cesse de diffuser l’importance du capital. Il serait peut-être utile de délaisser les façades, les écrans biologiques médicaux, sanitaires, qui servent surtout d’emballage conjoncturel à un état de fait structurel.et d’examiner de plus près, sous un angle inédit cette pseudo défaillance cognitive que l’on nomme familièrement le BDL. Le savoir considéré comme un capital n’a rien à voir avec la connaissance. Ça ne part pas de la même intention. Accumuler du savoir n’implique pas la même qualité d’attention. C’est une attention dirigée vers un but dit utile. On pourrait parler d’une attention utilitaire. On apprend ainsi des dates importantes de l’histoire de France, les numéros des départements, les tables de multiplication, les noms des grands hommes et assez peu des grandes femmes dans le seul but de ne pas échouer à des contrôles, des examens voilà en gros à quoi sert ce savoir. Et une fois le passage effectué, ces savoirs sont d’une volatilité surprenante bien souvent. La connaissance c’est autre chose. Cela nécessite une forme d’engagement. D’être présent et que les choses que l’on désire connaitre le soient d’une certaine façon elles-aussi. L’intention de vouloir connaitre extraie sa nature comme sa qualité de l’instant présent. De cette façon il est rare que l’on puisse vraiment oublier quoique ce soit car la connaissance n’appartient à personne en particulier, elle n’est pas un avoir, une propriété. On ne peut perdre ce dont on n’est pas le propriétaire. On ne peut subir l’angoisse du propriétaire qui vient de se faire cambrioler pas plus que sa peur par anticipation permanente de l’être un jour. Le BDL est le signe que quelque chose déconne à ce niveau où nous avalons des informations sans même les mâcher, les ruminer, les apprécier pour ce qu’elles sont réellement, des bribes éparses d’une connaissance dont on a oublié l’intention première qui est de réunir l’être et le monde et non le contraire désormais qui est hélas de les distinguer beaucoup trop souvent. Ce qui corrobore cette réflexion est la découverte de certaines études effectuées sur le sujet. Chez les individus « normaux » le BDL touche généralement les mots principaux dans la production de la parole, et jamais les éléments comme des adverbes, des adjectifs, des conjonctions de coordination. Qu’on puisse ainsi perdre un mot considéré par les chercheurs comme « important » demande bien sur de se pencher sur la notion d’importance attribuée à ce type de mots. Qu’on puisse ainsi perdre le mot framboise est-il d’une importance « capitale » si on parvient malgré tout à évoquer sa nature, sa couleur, et presque son odeur et son gout. Que l’on puisse perdre le nom d’ETIENNE MARCEL (1) a-t-il une importance capitale pour des gens qui ne le considèrent plus que comme boulevard ou bouche de métro. Donc il s’agit bien d’un degré d’importance que nous conférons aux mots selon une grille de lecture qui n’est pas forcément notre. Qui n'est pas celle de l'intime. Avoir un mot au bout de la langue pourrait signifier un écart du corps, de l’être, de l’âme, une résistance à cette grille collective de lecture de la réalité, du savoir capitalisé. Avoir un mot sur le bout de la langue serait alors un véritable acte de résistance contre un langage formaté, un savoir formaté et que la langue - ce muscle avant tout- rejette soudainement au moment où l’on s’y attend le moins. Et c’est très bien qu’elle le fasse justement ainsi., La langue met l’accent sur nos intentions d’origine d’amasser, de capitaliser les mots les noms et non d’entretenir avec eux une relation plus cordiale, une connaissance comme on parlerait de vieille connaissance par exemple. Notes (1) Étienne Marcel, né entre 1302 et 1310 et mort à Paris le 31 juillet 1358 , est prévôt des marchands de Paris sous le règne de Jean le Bon Atelier d'écriture le grand Carnet Article à lire si intéressés ( il y a véritablement matière à écrire bien plus de 160 pages, par contre pas sûr qu'elles ne soient pas chiantes à lire.)|couper{180}

Carnet 35

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Le sérieux.

Bal au moulin de la Galette, Renoir. Un grand mot. Beaucoup l'ont en bouche, le trompettent mais ça ne fait pas tomber les murs de Jericho. La fréquence, celle-ci en tous cas, n'est pas la bonne. Le sérieux contre la fantaisie, contre la poésie, et la réalité bien sur contre le rêve. Voilà donc un sérieux qui ne se constitue que par ce à quoi il s'oppose. Comme le riche ne l'est que par le nombre de ses pauvres. C'est si ridicule si grotesque qu'on n'y fait même plus attention. Mais c'est justement cette inattention qui renforce d'autant plus le sérieux du sérieux. Et qui par conséquent tue toute fantaisie. Voilà donc où le sérieux atteint à la fois à l'absurde comme à l'effroi. Un effroi authentique cette fois capable de détruire tout ce qui vit ici-bas. Mort de trouille. C'est qu'il en faut du courage de la bravoure pour s'attaquer au sérieux. Une étoile, un vieux canasson pourri, quelques moulins à vent, une Dulcinée de Tobosco où de Pierrefite pourquoi pas. Et une fleur entre les dents. Encore que si on la laisse dans son massif ou dans son champs ce ne sera pas plus mal non. Toujours été contre cette sale manie de cueillir des fleurs pour se les mettre à la bouche à la boutonnière avoir l'air de. Horreur de cela. Sérieusement pour le coup. Disons le clairement ce sérieux là devient obscène de plus en plus. On ne le supporte plus du tout. Et sans doute que ce sera le fait de ne plus être en mesure de le supporter justement qui créera le trouble, les émeutes, une pagaille comme encore jamais vue. Et des explosions de joie, de rire, des embrassades. Que les pompiers sortent les tréteaux et rameutent leurs flonflons, il y aura grand bal et l'on s'aimera, on dansera je ne vois que ça, sérieusement, je ne vois que ça.|couper{180}

Le sérieux.

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Je voulais parler d’intégrité

diapason trouvé sur le net. Lorsque quelqu'un me ment ou se ment à lui-même devant moi j'éprouve aussitôt le besoin de m'en écarter. La plupart du temps désormais par un sourire, un silence. Autrefois c'était différent j'entrais dans des colères soudaines autant qu' incompréhensibles pour les autres comme d'ailleurs pour moi-même. Plus jeune le mot qui me venait confusément pour expliquer ces colères était l'injustice. Je pensais qu'il était injuste que l'on me mente ou que l'on se mente ainsi à soi-même en me prenant comme complice ou témoin. Ou encore que l'on m'imagine ainsi simple d'esprit. Mais l'injustice est trop proche d'une idée de morale. Je crois qu'il s'agit beaucoup plus de fausseté au sens musical de ce terme. Mon oreille repère un couac, une fausse note et cela me met en rogne. Voilà la vérité. Et c'est d'autant plus étonnant que, personnellement je ne me considère nullement musicien. Il s'agit sans doute bien plus d' une discontinuité dérangeante, perturbante dans un continuum de mots, de gestes, d'émotions et contre quoi quelque chose provenant du tréfonds de moi-même se heurte tout à coup. Et dont à ces moments là, vraisemblablement, je ne sais que faire, que penser, qu'éprouver, sinon que l'on m'impose ainsi un laisser-aller, un manque de respect, une certaine forme de vulgarité. Lorsque je repense à ces colères d'autrefois sans doute n'étaient-elles dues qu'à la crainte ressentie par anticipation d'être moi-même pris la main dans le sac à fausser une vérité. Ce qui ce sera produit assez régulièrement et ce depuis l'enfance. Si j'essaie de trouver une raison à ce comportement— cette fabrique permanente du mensonge— je dirais que non seulement je ne disposais que d'un sens moral assez limité et que de plus je me suis toujours méfié de toute vérité brandie comme prétexte ou comme dogme. Car, dans le fond des choses, qui donc sait la vérité sur quoique ce soit. Personne. Certains pensent qu'ils sont dans une vérité et voilà que lorsqu'ils veulent l'exprimer ou pire l'imposer aux autres — ils se trompent ou trompent l'autre. Assez souvent à profit— c'est qui est insupportable d'autant plus. Et en plus nombreux sont-ils qui y croient dur comme fer. Ils invoquent même la loi si besoin. Mais qu'est-ce que la loi aujourd'hui ? Ce qui les rend souvent ridicules ou inquiétants. Alors que si l'on prend l'habitude d'élaborer des mensonges consciemment— autrement dit des fictions, je crois qu'il est possible, avec le temps et beaucoup de patience, d'obtenir une bien meilleure oreille. Non pas une vérité mais un sens amélioré de l'ouïe. Maintenant il faut choisir le lieu. Ce ne peut-être dans la vie ordinaire évidemment. Elle est déjà bien trop dure à vivre — sans , qu'en plus l' on se rajoute des complications supplémentaires. C'est probablement l'écriture qui est le lieu par excellence, l'atelier, le laboratoire. On prend un mensonge on l'explore de fond en comble et ce n'est pas rare qu'au bout on n'éprouve pas enfin un peu plus la sensation de cette fameuse justesse. Et ce n'est pas une affaire d'idées, pas plus que d'émotions, pas même d'organisation. C'est juste une façon de dire les choses je crois. Un ton. Je veux dire que personnellement je sens immédiatement si un texte est juste ou faux à l'oreille. Comme autrefois les paroles. J'en perçois l'écart sur la portée. Mais je ne me mets plus en colère. Un sourire, un silence. J'éprouve même parfois une étrange gratitude de tomber sur ce genre de textes qui ressemblent tellement aux miens. Cela me permet de me relire d'une certaine manière moi qui ne me relis que très rarement. Cela me fait réfléchir. comme quoi l'humilité aussi peut arriver ainsi par l'ouïe. Autrefois on parlait de l'entendement, ce n'était pas si bête. Pas bête du tout. Le mot intégrité tourne en boucle dans mon esprit depuis plus d'un mois. J'avais bien l'intention d'écrire sur cela aujourd'hui, mais bizarrement voici que c'est la justesse qui vient se coller à sa place. Je cherche le lien... j'écoute le silence qui surgit après ces mots. Est-ce que ça sonne juste ou faux je n'arrive pas à l'entendre encore. Mais c'est dans la régularité aussi que l'on apprend à entendre n'est-ce pas. Que l'on devient aussi un peu moins sourd surtout à soi-même.|couper{180}

Je voulais parler d'intégrité

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Arreter le monde

passer une heure à coder une page en langage html ou css, plonger si profondément dans les balises et leurs attributs, que cette heure on ne la voit pas passer. Arrêter le temps, arrêter le monde, ne s'occuper que de ses oignons, vraiment, profondément, totalement. regarder un dessin fait par un enfant. redevenir enfant. en comprendre soudain toute l'autorité comme l'hésitation. la part de rêve. puis tourner le visage vers la fenêtre et voir la neige tomber lentement doucement recouvrir le paysage entier de blanc. Être complètement absorbé par un petit tourbillon de vent qui promène un tas de feuille mortes en pleine ville aux heures de pointe et entendre le crissement des feuilles sur le béton. n'écouter que cela. Puis regarder en haut le ciel la vitesse stupéfiante des nuages derrière lesquels la nuit s'amoncelle. ouvrir la porte de cette chambre de plain-pied et voir toutes les fleurs du cerisier japonais tombées au sol. L'ineffable juste à la porte de sa chambre. Et presque instantanément le monde qui reprend sa course d'autant plus vite que s'il voulait rattraper ce tout petit moment perdu gagné. La chatte passe nonchalamment près de l'homme assit sur sa chaise, l'homme absorbé par le travail du jour. Un bond et la voici sur tes genoux et qui ronronne. Tu n'aurais par le cœur de l'ignorer, de la chasser. Tu passes un moment ainsi, à fourrager dans sa pelisse, à te réchauffer les mains, à réchauffer l'animal. complicité hors du temps. délit d'absence ou de présence.|couper{180}

Arreter le monde

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Carnet 33

" On aura dans ces 40 exercices des lignes verticales traversantes : les propositions du lundi, par exemple. Depuis quelques jours, on est résolument dans l’exploration mentale. Baudelaire, son « vieux meuble à tiroirs, encombré de vers, de billets doux, de romances... », laissons tomber billets doux et romances, gardons l’encombré, gardons le vieux meuble à tiroirs... On en a ouvert plusieurs. L’idée aujourd’hui serait de considérer plutôt ce qui nous reste d’espace, l’air ou le vide, la place nette sur le sol s’il en reste, ou un peu d’horizon loin. Le meuble et ses tiroirs, justement le laisser fermé. Procrastiner, repousser les problèmes et les factures à demain : pas forcément (encore que, justement, puisque c’est lundi). Même si tellement peu d’espace, même si zones d’ombre et du bruit, même si souffler ou respirer c’est si peu d’interstice. Construire le vide on fait comment. Construire la non-dépendance on fait comment. On travaille sur soi comment, pour arrêter le monde. C’est les yeux ? C’est cet exercice magique de laisser quelques secondes la langue au repos au fond de la bouche. C’est imaginer que les murs, le sol, le plafond et l’espace se distendent, que marcher jusqu’au mur serait impossible tellement il est loin ? Celles et ceux qui travaillent la méditation savent bien comme c’est une activité épuisante, qu’on doit apprendre de l’intérieur même de cette activité à s’offrir un temps ouvert, où l’attention pourra se suspendre, le corps s’alléger dans sa pleine conscience même. Mais pas question de déborder dans un domaine qui n’est pas le mien. Il y a ce temps particulier que connaissent les acteurs dans les minutes précédents que ça commence : certains dorment, allongés là bord de plateau, j’en ai connu. Il y a cela pour la musique aussi : les secondes d’avant jouer, voire dans le très léger changement d’équilibre ou de point de gravité du corps en franchissant ce mince espace des coulisses à la scène. Et en écriture, on se vide comment, pour qu’écrire soit libre ? Je cherche dans les livres qui m’entourent (j’ai fait le ménage par le vide, toute cette journée, plus moyen de poser les pieds par terre – je parle des pieds photo – dans ce bureau) : ceux qui me viennent les premiers sont plutôt les livres issus du théâtre, les notes aux acteurs d’Edward Bond, les textes de Tadeusz Kantor ou Jerzy Grotowsky, ou dans Le théâtre des paroles, de Valère Novarina : « C’est pour étouffer l’boucan des corps ». Et juste après : « Il entend la langue sans parole. Il danse ce qui n’est pas là. Il danse dans l’espacer qui n’est pas là. En chant muet, en langue sans parole, en danse immobile. » Et vous, comment faites-vous le vide en vous ? Comment vous vous y prenez en pleine journée, dans l’encombrement du jour ? Moi souvent c’est en promenant un livre, comme aujourd’hui Kamo No Chômei. Est-ce qu’on peut en parler, de cette construction du vide ? Ou du vide lui-même, si provisoire qu’on y atteigne ? " Proposition 33/40 Atelier d'écriture le grand carnet FB Tierslivre Comme deux mains qui se rejoignent enfin, arrêter le monde. Devenir le monde. La toile et le roc une seule respiration. bruit et silence suspendus à la touche du pinceau. Un trait, ne pas revenir dessus. Laisser venir ce qui est. trois visages imaginaires réalisations du jour|couper{180}

Carnet 33

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l’emprunt

huile sur toile 40x50 collection privée Les mots, la langue, ne sont qu'emprunts. Tu t'en souviens comme on s'éveille d'un rêve. Tu voudrais écrire cette sensation étrange de se retrouver comme un étranger face à tous ces mots, cette langue. Peut-être voudrais tu rendre tout simplement ce que tu as emprunté. Dire je suis vraiment désolé. Je ne savais pas que tout cela ne m'appartenait pas. Et te voici à nouveau à te demander si le silence t'appartient ou non. Te voici tout à coup si vieux et circonspect.|couper{180}

l'emprunt

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Economie du don

encore un tableau que l'on recouvrira de bleu. Le donnant donnant depuis la nuit des temps. Un don en appelant un autre en retour évidemment. Comment sortir de la boucle. Ne plus rien donner, donner sans attendre le moindre retour, refuser ce retour. Tout cela est bien compliqué. Trop. Donner quand ça nous chante. Revenir à la musique. Elle dépasse tout. Regret de ne pas savoir bien jouer d'un instrument. Il n'est jamais trop tard pour apprendre. c'est ce que l'on se dit surtout pour se consoler. Ça ne console en rien cependant. Quant à calculer ses dons, un fléau qui pour peser pèse trop.|couper{180}

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L’interprete

atelier du mercredi soir, adultes, travail d'élève. Passer une vie penché sur des dictionnaires de langues étrangères, apprendre à interpréter. Puis s'apercevoir de la sottise. Et d'une traîtrise surtout. Refermer tous les gros livres, se boucher les oreilles, mettre des lunettes noires. Réapprendre à balbutier sa propre langue déjà. S'émerveiller de sa sonorité inédite. Plonger comme un dauphin, un cétacé dans les mers profondes, les abysses de tous ces sons si familiers soudain. Cesser d'interpréter, apprendre à écouter, s'absenter pour encore mieux entendre. Aller à la rencontre de sa propre langue comme un enfant retourne à son jardin secret.|couper{180}

L'interprete

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De retour des étoiles

huile sur toile 40x50 De retour des étoiles il faudra bien se demander si on n'a pas rêvé. Si tout cela ne fut pas effectué pour se retrouver là, assis sur ce banc. Et de s'interroger encore une dernière fois sur la réalité d'un tel voyage, son but ultime. Ou véritable. Si l'idée du but est toujours si tenace. Que tout fut effectué ainsi pour parvenir au plus proche comme au plus lointain. A l'abolition du temps comme de l'espace. Parvenir enfin à soi. Et simultanément partout comme nulle part.|couper{180}

De retour des étoiles

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tolérance

petite avancée, l'usage du filtre bleu pour homogénéiser en partie un tableau. huile sur toile 40x50. Tolérer l'intolérable. Y a t'il un autre choix que celui-là. Après avoir exploré la révolte, l'insurrection, l'indifférence, tous les amours faux que distillent les panneaux lumineux. Trouver une place, la tenir sans y tenir. S'attendre à tout moment à être déporté. A pénétrer dans cette promiscuité de wagon plombé. Tolérer après avoir épuisé tous les courages toutes les lâchetés. Entrer en tolérance comme on pénètre dans le mystère de la géométrie. Tout tolérer pour en arriver enfin à soi.|couper{180}

tolérance