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L’attente de la vague
Je ne suis pas surfeur. J'aurais probablement adoré l'être si la providence m'avait conduit à habiter près d'un océan. Et je me vois très bien avec ma planche plantée dans le sable fin à guetter l'horizon dans l'attente de la vague. Ce ne serait pas si différent finalement de ce que je vis tous les jours dans mon atelier, au Péage de Roussillon, commune d'Isère, un peu sinistrée par les complexes commerciaux installés à sa proche périphérie. Je ne compte plus le nombre de locaux commerciaux à louer, à céder... c'est ainsi depuis nous sommes venus nous installer ici, il y a huit ans. Pas grand chose n'a évolué durant toutes ces années, et lorsqu'on croise les habitants pour échanger quelques mots sur le temps qu'il fait, le marasme ne tarde jamais trop longtemps à devenir le sujet principal de toutes les conversations. Ainsi on peut habiter quelque part en France, loin de l'océan, loin de la mer et être tout autant dans l'attente de la vague que ce surfeur imaginaire que j'évoque. On l'imagine, on l'espère, et en attendant on laisse passer de nombreuses occasions de s'entrainer sur des vagues plus modestes. Je crois que vous comprenez bien ce dont je suis en train de parler n'est-ce pas ? Parfois il y a des gouttes qui tombent sur les cranes, de petites gouttes de rien du tout qui ne nécessitent pas d'ouvrir un parapluie. On se dit toujours plus ou moins, ce n'est rien, ça va passer. Et puis il y a la goutte de trop celle qui fait déborder le vase. Et c'est alors que l'on se réveille, que l'on se dit ça suffit, je n'en peux plus de cette attente ! je n'en peux plus de me plaindre sans arrêt de ne pas voir arriver enfin cette fameuse vague. Que nous reste t'il alors comme possibilité sinon d'agir, d'expérimenter des solutions ? Parfois je crois qu'il faut apprendre à créer ses propres vagues tout seul. C'est ainsi que c'est venu, je veux dire cette idée de créer une page sur patreon, c'est venu deux semaines environ après ma décision d'arrêter de mettre des likes et des commentaires sur les réseaux sociaux, de partager des post que l'algorithme distille au compte goutte si je ne mets pas la main à la poche pour les propulser. C'est venu aussi d'un ras le bol des effets de manches, le fait que la rumeur nous apprenne que du jour au lendemain Facebook et Instagram pourrait fermer le robinet en Europe et ainsi laisser dans un état de délabrement total tous ces créateurs de contenu, de selfies, tous ces influenceurs et leurs abonnés. Je ne joue pas dans cette catégorie là évidemment, j'ai toujours préservé peu ou prou mon coté sauvage, quoiqu'on en pense ou dise. Peut-être que mes capacité d'analyse sont aussi émoussées par l'âge, par l'expérience. Et puis je me rappelle aussi d'un dicton populaire plein de bon sens qui nous dit que tout travail mérite salaire Donc j'ai crée une vague, j'ai crée une page sur patreon qui est une plateforme communautaire sur laquelle chaque créateur peut proposer un contenu à ses contributeurs selon différentes formules d'abonnement. En ce qui me concerne je ne pense pas m'enrichir ce faisant. Mais cela me permettra de mieux échanger avec les personnes qui apprécient mon travail. je veux dire celles qui sont prêtes à s'engager vraiment, pas seulement avec un like ou un commentaire dans l'espoir que je leur rende l'appareil. Je crois que la formule de base est à 3 euros par mois pour soutenir le travail des créateurs de tout acabit, ce n'est pas énorme mais c'est un vrai geste. Que l'on en arrive là est regrettable. J'entends déjà les réflexions des anciens qui disent que le web qu'ils ont connu autrefois, ce rêve de gratuité illimitée n'est hélas qu'un formidable fiasco. Moi même je le regrette aussi évidemment mais c'est aussi se faire une idée de l'humanité qui semble totalement irréaliste, un pur fantasme, une utopie. Il n'y a qu'à observer le jour des soldes la folie furieuse qui s'empare de n'importe quel quidam à l'entrée des grands magasins, à vivre un incendie n'importe où sur la terre pour comprendre que tout le monde ou presque est prêt à marcher sur les autres pour survivre. L'instinct de conservation additionné à l'appât du gain et de la sottise font un mélange détonnant. Là aussi on attend la fameuse vague, on espère que ça va changer, que l'homme devienne enfin bon, ou je ne sais quoi, mais l'homme reste l'homme et rien ne peut vraiment changer cela. Pas même une épidémie mondiale si vous avez bien tout suivi. Donc attendre la vague à ce point des choses c'est comme attendre l'inspiration pour un peintre, c'est de la connerie en barre ni plus ni moins selon ma modeste opinion. Maintenant je dis ça parce que j'oscille sans arrêt et depuis toujours entre déprime et enthousiasme, parce que j'ai du sang slave dans les veines et que je ne rechigne jamais devant un petit verre ou deux de vodka. Voyez vous j'aurais pu dire des choses à la mode, utiliser un mot à la mode comme bipolaire ou je ne sais quoi d'autre, mais je préfère dire que c'est tout simplement génétique, génétique comme une main que l'on obtient aux cartes, destinée ou fatalité peu importe. Quand la déprime se retire soudain sans prévenir elle laisse une plaie fantôme qu'il faut savoir distinguer et surtout cautériser au plus vite pour profiter de la moindre seconde d'enthousiasme qui suivra inexorablement cette déprime. C'est ce qu'en langage commun on appelle les hauts et les bas. Depuis toujours je cherche une formule qui me permette de les considérer égaux ces hauts comme ces bas, d'y être indifférent. Mais je me trompais évidemment. Il faut vivre ce que ces différences de relief nous offrent, les vivre pleinement. Puis prendre un peu de recul évidemment comme lorsqu'on vient de se jeter sur une toile et observer tout cela à tête reposée. Une chose aussi qui me vient ce matin comme une sorte d'illumination c'est que l'idiotie contient autant d'intelligence que l'intelligence contient d'idiotie. Autant dire match nul sur le terrain de la pensée. On comprend mieux pourquoi les derviches, dont je fais indéniablement partie, prennent ce désir furieux de tourner en rond. Ils ne font jamais autre chose que de donner une figure concrète à cette pensée qui tourne sur elle-même. Ils ont saisi que c'est par la caricature, l'exagération, la danse et le mouvement que l'on pénètre dans la transe, ce couloir qui mène à l'extase, à l'ivresse, à l'orgasme, à la véritable libération, c'est ainsi que l'on fabrique aussi cette fameuse vague et au bout du compte même la planche de surf est dérisoire une fois que l'on sait que l'on peut marcher sur l'eau comme devenir épave sous marine échouée sur un banc de sable au fin fond des abysses. Pour le moment il n'y a pas grand chose sur cette page patreon, juste une bafouille, une photo, et un lien vers une vidéo YouTube. je ne mets donc pas le lien. Je verrai si demain et les jours suivants je suis toujours partant ou bien si l'à quoi bon frappe encore en traitre comme d'habitude en traitre ou en ami car il n'y a pas de fumée sans feu pas de tourbillon sans vent, et bien sur pas d'extase sans transe.|couper{180}
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J’enchaîne.
Pour ne rien reprendre, ignorer les jugements, les auto critiques, j’enchaîne toile après toile. Des visages imaginaires qui surgissent, des femmes la plupart du temps. Les élèves me disent on te reconnaît tout de suite quand tu dessines un visage. Ce qui est ambiguë… est-ce la manière qui leur sert à faire le lien ou bien est-ce parce qu’on dessine toujours plus ou moins dès auto portraits … Visage acrylique et fusain 70x70cm 2022|couper{180}
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Bilan d’une exposition
Il n'y a pas de petite exposition même si parfois suivant le temps, la température, la digestion, l'abus de cigarettes, il m'arrive de l'oublier. J'avais déjà écrit un billet en mai 2019 que j'ai relu tout en réfléchissant à cette exposition qui vient de s'achever ce weekend dans le village où j'habite. C'est vrai qu'à priori je n'accordais pas vraiment d'importance à cette exposition qui ne nécessitait pas d'effort exagéré. Et dont je pensais aussi qu'elle n'attirerait pas vraiment de public dans ce coin perdu de l'Isère. J'avais simplement fait une sélection des œuvres de Voyages Intérieurs encore une fois, plus ramassée car le local est de taille modeste. Il y avait aussi un impératif de luminosité interne des toiles que j'avais pris en compte en remarquant l'éclairage, car celui-ci était chiche, diffusé par des spots encastrés dans le faux plafond. J'ai donc choisi tout de même, de prendre ou de rejeter en fonction de ces critères principalement. Sinon la logistique est déjà en place. Textes, blablas, cv, documents PDF divers et mon livre Propos sur la peinture dont le stock s'écoule doucement, sans précipitation exagérée non plus. ( je mets un lien pour les curieux(ses) on ne sait jamais ça ne mange pas de pain) Bref je suis encore d'accord avec moi-même sur le fait qu'il n'y a pas de "petite" exposition car j'ai été agréablement surpris par la qualité des échanges avec les visiteurs lors des quelques permanences que mon emploi du temps chargé m'a permis d'assurer. Du coté de mon épouse le bilan est assez positif d'après ce qu'elle m'a remonté. Peut-être de nouvelles inscriptions aux cours notamment. Des propositions d'expositions également dans d'autres lieux de la région. Et puis tout de même quelques toiles vendues, principalement de petits formats. J'avais même posé quelques vieux tableaux en solde en indiquant avec une pancarte "vide atelier" à moindre prix, mais personne ne s'est rué sur ceux-ci. Comme quoi proposer des soldes est aussi un bon indicateur du type de public qui passe. Un ami m'a même dit que j'avais mis des prix tellement bas qu'il n'en avait pas acheté pour que je puisse ne pas m'en séparer et revenir sur ma position dans d'autres lieux à venir. Ce qui évidemment me fait revenir sur le problème du prix des œuvres. Enfin problème qui n'en est plus un vraiment désormais. Car mes prix sont fixés sur l'indice de ma frustration à voir partir les toiles susdites. Pour certaines j'ai tellement peu de frustration qu'il ne me reste juste la notion du temps passé et du matériel pour ne pas les donner. Gaston est venu et m'a encore parlé de ses maladies pendant un bon moment et de ses séances d'auto hypnose que j'appellerais plutôt une méthode Coué. Il m'a pris deux petites toiles ce qui fera donc trois œuvres en tout puisque nous avons échangé l'une avec un de ses collages qui m'avait bien plus dans sa dernière expo. Ces amis peintres, des localités voisines de la mienne, ne se prennent pas la tête. Ils sont en retraite pour la plupart et ce n'est donc pas l'argent qui les fait courir les lieux d'expos. Ce que je trouve très sain à les fréquenter. Ils ne pratiquent pas des prix exorbitants, échangent entre eux de bons plans, donnent parfois des avis critiques des uns sur les autres mais tout cela reste globalement bon enfant, pas méchant pour deux ronds. Depuis que j'ai lâché Facebook et Instagram, je me suis rapproché d'eux je crois. Car le bon sens veut qu'il semble inutile de vouloir constituer un réseau virtuel lorsqu'on n'est même pas fichu d'en constituer un réel, authentique avec de vrais gens. J'ai de moins en moins envie de fournir d'efforts pour faire des courbettes et des ronds de jambes. Du coup, je me rends rarement dans les manifestions autour de chez moi, je reviens à l'état quasi sauvage. Je ne peux pas dire que je n'apprécie pas les gens, ce n'est pas cela. S'ils se taisent la plupart du temps ça se passe très bien. D'ailleurs moi-même vis à vis de moi-même je remarque aussi cela. Quand je ne me parle pas trop ça va nettement mieux. Je ne sais pas si c'est conjoncturel ou bien si j'ai pris un nouveau tournant réellement, celui de l'économie de paroles pour me diriger vers plus d'action, plus de faire dans mon atelier principalement. En tous cas je tiens le siège, je l'occupe toute la journée sans broncher. Parfois je peins, d'autres fois je balaie, d'autres fois encore j'effectue des recherches dans mes innombrables boites et cartons, pour faire du tri surtout, encore que je ne jette jamais rien, mais je les mets de coté je fabrique des tas dans les tas , j'étudie ma frustration à les imaginer hors de l'atelier, je place des prix à mon temps passé que je considère souvent comme autant de temps perdu, certainement à tort pour garder tout de même en moi une vraie douleur lorsque toutes les autres se seront dissipées et que je me croirai sage, tiré d'affaire ou sur mon lit de mort. La température semble remonter légèrement, ce qui me fait parfois penser au printemps surtout le matin lorsque j'entends les premiers oiseaux chanter et le coq au loin. Des déchirures de temps, soudaines qui me replongent dans une sorte de bain de jouvence même si j'ai passé une nuit blanche. Le printemps, chaque année supplémentaire qui passe renforce l'espoir d'y parvenir en pas trop mauvais état, d'en profiter encore éperdument.|couper{180}
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S’acharner ou pas ?
Voici un second tableau peinture et fusain. Finalement j’aime bien le rendu et je ne pense pas peindre plus que ça sur ces tableaux. Encore une fois je me rends compte que l’on a toujours une petite gêne lorsqu’on obtient un résultat rapidement… on se dit oh non ce n’est pas assez il faudra en rajouter… Au bout de 50 ans de peinture j’ai toujours cette difficulté à accepter que les choses soient justes du premier coup. Ce qui est d’autant plus étonnant que je n’arrête pas de faire référence à cette fameuse justesse… Visage acrylique et fusain sur toile 70x70cm|couper{180}
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Revenons à nos pinceaux
Fleurs travail d'élève Si l'au-delà est strictement pareil à l'ici, alors il faut peaufiner l'ici, en attendant d'être au-delà. Je me suis dit que je recommençais encore et toujours les mêmes erreurs en écrivant tout azimut, en publiant comme un dératé tout et n'importe quoi. Comme s'il ne s'était strictement rien passé, et que je ne tirais aucune leçon de ma décision subite d'arrêter ce blog et de mon passage à l'acte qui s'étend sur une petite dizaine de jours à peine. Tentons donc de canaliser un peu plus les choses. Ne fatiguons pas la lectrice, le lecteur... Cantonnons nous à la peinture. Du moins autant qu'il sera humainement possible de s'y atteler. Donc, nous avons fini de peindre des nuages et nous sommes attelés aux fleurs. C'est ce que je voulais dire surtout et puis j'ai oublié, j'ai dérivé, j'ai erré comme d'habitude. Les fleurs, il faut voir la tête de mes élèves... ça ne les emballe pas spécialement et ça se voit, ils ont peine à le dissimuler. Pourquoi les fleurs d'ailleurs ? A cause de la délicatesse qui sera une marche supplémentaire à gravir pour continuer vers une idée de l'érotisme en peinture comme je l'avais proposé il y a de cela quelques semaines. Les nuages c'était la notion de légèreté, nous avons vu à quel point l'interaction du ciel et des nuages était importante dans le rapport des valeurs qu'on y installe. C'est un peu la même chose avec les fleurs, c'est d'ailleurs la même chose toujours entre le sujet et le fond. —Dessinez-moi d'abord une fleur toute simple, revenez à vos 5 ans et ne vous censurez pas ! —...? — Non Madeleine, tu n'as pas 5 ans lorsque tu dessines cette fleur, tu dois être âgée entre 10 et 15 ans, revois ta copie je te prie. — Super Simone, là je vois que c'est toi à 5 ans et si tu le permets je vais montrer ce que tu as fait à tout le monde. Regardez la fleur de Simone, c'est une vraie fleur d'enfant de 5 ans, une fleur minuscule dans un petit coin de la grande feuille. Alors que toi Madeleine la tienne occupe tout l'espace de la feuille, et que ton dessin est déjà très structuré. Rappelez-vous : on se fiche que ça soit beau et bien fait ce n'est pas ce qui nous intéresse dans cette première peinture . Il faut juste que ça soit "juste" pour vous. fleur travail d'élève — Mais moi à mon âge j'ai oublié mes 5 ans me dit Madeleine. — Ah bon ? Tu crois ça vraiment ? tu ne te souviens de rien ? Rappelle toi l'odeur de la classe, celle de l'encre violette, l'écorce des platanes dans la cour, les moment d'averse où tout le monde se réfugie sous le préau et l'odeur de chien mouillé, rappelle-toi aussi du gout du pain frais, et celui des Roudoudous. — Ah oui je me souviens aussi des doryphores dans les patates, et aussi le poids d'une cerise dans la main, de celle qu'on chipe chez les voisins ajoute Simone, qui a l'air véritablement emballée. — On n'oublie pas son enfance Madeleine, même quand celle-ci s'est bien passée. Allez un petit effort de laisser-aller enfantin, essaie tu verras bien ! Le second exercice sera de réaliser une fleur en noir et blanc avec seulement trois valeurs de gris. Le dernier exercice sera de tirer partie des deux autres peintures pour réaliser un tableau abstrait. Et pour corser le tout car je dois partir vraiment pile poil à l'heure aujourd'hui je vous donne une contrainte supplémentaire : le temps, on va dire 10 minutes pour la fleur naïve, 25 minutes pour le noir et blanc et il restera donc environ 20 minutes aussi pour l'abstraction. Ensuite comme d'habitude on aligne tout et on commente. A vos pinceaux, partez ! Fleur travail d'élève|couper{180}
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Visage au fusain sur format carré
C’est un format 70x70 cm sur toile non montée encore sur châssis sur lequel j’ai préparé un fond au Gesso puis à l’acrylique. Ensuite un dessin préparatoire au fusain. Ce n’est pas un visage réaliste mais je crois qu’il dégage une expression intéressante… Reste à savoir si peindre par dessus ne détruira pas l’ensemble, c’est souvent le cas j’ai remarqué. Mais si on ne prend pas de risque quel intérêt ?|couper{180}
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Etre joyeux et con à la fois
https://youtu.be/EFG1QLCzICc J'y arrive sans problème. Il suffit d'appuyer sur le bouton, de claquer la porte derrière moi et de démarrer la voiture sans qu'elle ne cale immédiatement. J'effectue le trajet en écoutant la voix radiophonique du traducteur d'Eckhart Tollé, qui en anglais possède la voix de Donald Duck. Et voilà, je me retrouve dans la peau de ce personnage, je m'entraine depuis des années à épouser le rôle, me voici super entrainé, joyeux et con à la fois. C'est juste un moyen de conserver mon énergie cependant. Quelque chose de réfléchi puissamment. Comme par exemple cette découverte après de multiples analyses que le temps passe 10 fois plus vite comme ça qu'en étant intelligent et triste, cet autre rôle expérimenté, désormais parfaitement rodé aussi mais super fatiguant. Et puis surtout j'ai à faire à des enfants la plupart du temps, ils m'adorent lorsque je suis con et joyeux. Par contre avec les ados j'ai plus de difficulté, je suis nettement plus con que joyeux. C'est une affaire de miroir je crois. Et puis le soir les adultes arrivent, j'ajoute un peu de clownerie comme épice, ça ne mange pas de pain. Quand j'ai terminé mon show, que je remonte dans ma voiture pour revenir chez moi, j'appuie sur l'abonnement "André Dubois, du blog Traficmania sur sa chaine Youtube. Et là j'écoute religieusement tous les conseils qu'il dispense pour construire un blog intelligent, un blog qui rapporte de l'argent. Conseils que je ne suivrai probablement jamais évidemment car je sais pertinemment que cette partie de mon intérêt n'est là que pour revenir à l'essence de ma désespérance. C'est à dire au fait qu'en tant qu'artiste on puisse espérer gagner de l'argent sans trop se fatiguer et en prenant les gens pour des nigauds. Je sais que certains y parviennent sans trop d'efforts ni de scrupules, il suffit de peu de chose finalement pour que ça fonctionne comme sur des roulettes, et accessoirement fricoter avec le diable. C'est une affaire contractuelle avec soi-même. Car finalement il n'y a de diablerie que là. Etre con et joyeux à un moment de la journée puis s'imaginer intelligent, riche et beau à un autre moment pour terminer à la fin du jour en posant sa tête sur l'oreiller et se demander : —merde qui suis-je donc vraiment ?|couper{180}
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Les descriptions en littérature m’ennuient généralement.
Sonnette intelligente photo trouvée sur internet... Et cela m'ennuie d'être ennuyé par si peu. Mais il est vrai que sitôt que l'on commence à me décrire un personnage, un lieu, un bouquet de fleurs, et même une scène de cul, je baille désormais. Le bâillement est une chose formidable dont on ne parle presque jamais de la bonne façon, c'est à dire pour en constater et en relever les vertus. Plus je vais vers la fin plus je fais attention à mes bâillements. Plus je m'y fie. Et qu'on ne vienne pas me dire que c'est un phénomène digestif, je vous en prie, pas d'enfantillage. D'ailleurs même si ce n'était que cela, et puisque désormais l'intestin est considéré comme notre véritable cerveau, tout bâillement devrait appartenir à la sémantique du colon, à son vocabulaire, et sa syntaxe. Je trouve que flanquer des descriptions dans une histoire c'est tricher et se moquer des lecteurs. C'est les prendre par la main en disant viens voir par là je vais t'en narrer une bonne que tu vas en rester bouche bée durant 300 pages, alors qu'en vrai 50 auraient largement suffit pour énoncer cette somme de stupidités. Sans compter évidemment ce désastre écologique dû à la description. Toutes ces forets dévorées par des bavardages débiles si souvent. Je me demande si quelque part on ne pourrait pas parler de masturbation collective qui s'effectuerait ainsi en douce et à la barbe de l'Eglise via la littérature descriptive. Il faut être deux pour danser le tango bien sur, l'auteur et sa lectrice, l'autrice et sa lectrice les auteurs et leurs lecteurs. Mais on a déjà la télévision pour cela me semble t'il. Je veux dire pour sombrer dans l'onanisme en fin de journée en avalant des chips et des cacahuètes, faut-il vraiment en rajouter ?|couper{180}
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Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Artedot.com Tableau de Van Gogh les pommes de terre — Vous-y comprenez quelque chose à ce formulaire administratif ? Elle me demande. — Pas un traitre mot je réponds. De toutes façons y a longtemps que j'ai laissé tomber, désormais plus je perds de dents plus j'aime la purée. Méthode Coué ! — Comment ça ? n'avez donc pas de couverture santé ? n'avez pas la CMU ? — Non je travaille, j'ai la sécu, et même une mutuelle que je paie bonbon , mais à chaque fois que je reçois un imprimé de leur part je ne le lis pas, j'y comprends rien. Et puis de toutes façon il n'y a même plus de toubibs dans mon coin. — c'est peut-être bien fait exprès tout ça , elle dit d'un coup. — bah oui et j'accompagne mon hochement de tête d'un clignement de l'œil, histoire d'abouler dans son sens. Les formulaires administratifs de tout poil sont rédigés par des ronds de cuir martiens, j'ajoute. Quand on dit que les extraterrestres n'existent pas on se gourre. Ces gens là en sont, c'est certain. Ils ne peuvent absolument rien écrire de simple. — Pensez-vous que c'est pour qu'on se sente con ajoute t'elle soudain avec un regard illuminé à la Jane Birkin ce qui me rend illico Serge. — z'avez raison je lui dis, et en plus, ça marche vachement bien. Moi par exemple je me sens totalement con devant un formulaire administratif. Mais ça ne me dérange pas plus que ça, manquerait plus que je respecte ces gens qui ne me respectent pas en m'interpellant en chinois alors que je suis français moi madame ! —Et dire qu'on paie des types à rédiger des trucs comme ça, et que ça sort de nos poches en plus... — et oui ma brave dame, dans le fond pas grand chose de changé avec la révolution française... avant il fallait montrer patte blanche pour aller faire ses besoins dans des cabinets en faïence, désormais il faut apprendre à causer le martien chinois pour se faire plomber une dent. Le pire c'est que pas grand monde ne dit quoi que ce soit , par fierté ou par peur d'être con sans doute. S'il y avait une vraie révolution à mener, utile celle-là, ce serait d'appeler un chou un chou tu ne trouves pas dis-je en passant au tutoiement. — ah mais on se dit tu alors ? remarque t'elle tout de même... — oui y a qu'à commencer par être simples nous deux peut-être que ça se propagera, on ne sait jamais. Tu viens chez moi ou je vais chez toi ? j'ai juste envie d'être avec toi un petit moment si tu n'y vois pas d'inconvénient évidemment. — Oh mais tu ne trouves pas que ça va un peu vite, on pourrait peut-être y mettre les formes quand même, geint-elle en minaudant. — Et bien voilà, tout à recommencer je lui lance sans me retourner en marchant vers mon destin qui est comme je l'ai prévu en me levant de bon matin d'aller acheter de la purée mousseline au supermarché d'à côté. Il y a des jours où il serait bon de ne parler à personne car en général tout est assez mal compris même en français, et même quand on l'énonce le plus simplement du monde je me dis en écoutant le petit bip de la scannette et en remarquant la figure renfrognée de la caissière quelques minutes plus tard. D'ailleurs c'est la même fille je crois bien. Elle ne m'a même pas reconnu. Drôle de vie, drôle de monde... je crois qu'on est envahi par les martiens, ils se sont infiltrés partout désormais et il faut que je me pince plusieurs fois par jour pour être sur que je n'en suis pas devenu un moi-même... Pourquoi donc tenter de ressembler à un humain quand on est sans doute devenu soi-même un martien comme tout le monde ? je me le demande et je ne trouve pas.|couper{180}
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Doit-on croire encore à la gentillesse ?
Des petits oiseaux acrylique sur papier , travail d’élève Des gens s’avancent mains tendues, tout sourire. A priori on dirait bien de la gentillesse. Et puis vient soudain la pique qui s’insinue dans le cœur du cœur, la bévue, la maladresse des benêts ou l’habileté des âmes tortueuses. Je me suis souvent dit que ces gentillesses là portent tellement de préjudice à mon vieux rêve de gentillesse qu’il vaut mieux y renoncer. Surtout si je me surprends moi-même dans un reflet, une vitre, une glace, main tendue tout sourire mais que le cœur n’y est pas. Donc, peut-être que croire à la gentillesse est révolu, et que pour s’en préserver il faille renouer avec un savoir-vivre presque oublié, quelque chose qu’autrefois on nommait la politesse. Ce qui mériterait sûrement encore de se pencher sur le sujet. Les gens polis excessivement m’emmerdent évidemment aussi. Ils me rappellent simplement mes inaptitudes chroniques à lire le moindre mode d’emploi. Car dans la vie de tous les jours je suis souvent bien trop poli pour être honnête. Cependant je ne dévalise personne, je cherche seulement à ne pas heurter, blesser, jusqu’à ce que cela me crève et que soudain j’explose en quelques bons vieux jurons de derrière les fagots. Du coup cela m’énerve évidemment et je finis par ne plus voir quiconque, je me cloître afin de me donner tranquillement et sans vergogne tout un tas de petits noms d’oiseaux. Ma femme se moque, j’adore ça. Car c’est une réaction saine. Elle me désamorce comme ces démineurs de plages Normandes avec un timing d’une précision inouïe. Au millième de seconde elle prévient tout bang et boum. Du coup elle rit, je ris à mon tour et nous revenons à nos moutons le plus aimablement du monde. A noter qu’être aimable n’a pas grand chose à voir toujours avec la gentillesse ni d’ailleurs avec la politesse.|couper{180}
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Là où il n’y a pas d’âge.
Annales akashiques, huile sur toile Patrick Blanchon 2018 C'est par hasard que le discours s'interrompt pour faire place au silence. Par hasard car à cet instant la volonté n'y est pour rien. Par hasard car on ne peut vouloir ce silence là,, on ne sait même pas qu'il existe. Disons donc par hasard. Je ne voulais plus discourir ainsi et un gouffre s'est ouvert en moi. Je ne voulais plus peindre ainsi et la toile soudainement s'est déchirée, par hasard, ou providentiellement. C'est à dire que dans cette déchirure le contenu n'a plus de sens, il ne reste plus que la forme floue à peine distinguable, un quelque chose. Ce flou provient à la fois de l'œil comme de l'ouïe. Ce flou est le sujet et le sujet c'est à nouveau le peintre. Qu'il peigne des nuages, des fleurs, son visage, un assemblage chaotique de taches, c'est exactement la même chose toujours. Le sujet est immortel, on aurait tort de croire que l'interruption, la pause, en marquerait un début comme une fin. La mort véritable elle-même n'y peut pas grand-chose. Le sujet s'auto- transmet comme un bâton qui court seul sa longue course de relais La forme en revanche est individuelle, unique. C'est la ressemblance qui aveugle le plus et interdit ainsi le passage. La structure du discours est unique si le contenu est bateau pour se diriger vers l'inconnu, errer. Ainsi Nadja. Ce livre bien complexe quand on tombe dessus sans filet. Ulysse-Breton accroché à son mat intellectuel est bien moins solide finalement que l'authenticité de cet amour qu'une soi-disant timbrée lui porte. Timbrée et prophétesse, tout pour plaire pourtant ... Mais non. C'est à dire que c'est pareil pour le chant des sirènes, cette incohérence qui fonde tout le chant, tout le langage, il faut s'accrocher pour le regarder vraiment telle qu'elle est sans ciller. Ce que dit Homère dans son récit est une chose, ce que fait Breton en est une autre, si proche mais tellement différente. Il se barre sans retour pour conserver sa tête, pour ce que ça lui sert, la belle affaire... Ce qui se jette dans l'amer d'être découvert ce n'est pas la sirène. Ce ne sera jamais elle. Ce qui se jette dans le néant c'est cette part enfantine en nous qui soudain comprend à quel point le babil général qu'elle tente d'imiter est vain. Cependant si on tient un peu plus loin, si on slalome entre les catégories, celles du courage et de la lâcheté, le silence bruit intensément, et le néant s'ouvre sur les grandioses fêtes foraines Akashiques. Le temps s'écroule sur lui-même et sitôt l'incohérence traversée, dépassée on en revient à ce pays natal, Là où il n'y a pas d'âge.|couper{180}
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Phoenix
« La résurrection de Lazare » par Le Caravage, musée régional de Messine (1609) Durant quelques jours il s’absente. On le cherche partout mais nul ne le trouve et on finit par l’oublier. Car voyez-vous la vie est faite ainsi, lorsqu’on ne trouve pas ce que l’on cherche on finit par oublier ce que l’on cherchait. Il n’y a pas de raison particulière à cela, c’est une sorte de constante sans laquelle la vie elle-même ne parviendrait pas à s’y retrouver. Un matin il baille et se lève du pied droit, dehors tout indique déjà l’arrivée du beau temps, peut-être même du printemps. Mais n’anticipons pas ! Restons là au présent. Quelques jours s’écoulent comme de l’eau qui s’évapore. Le sol de l’atelier est sec. Froid et sec, idéal pour y marcher nu-pied et retrouver ainsi le contact avec la réalité. Récapitulons. Le personnage principal de cette histoire est un peintre qui raconte sa vie de peintre. Ne nous égarons pas au-delà de ce périmètre. Même si le peintre en question possède des velléités d’écrivain, ou de chanteur, de coureur à pied, de cuisinier, de collectionneur de mignonnettes, de porte-clefs, de papillons, et qu’il pratique en douce l’art difficile de créer des herbiers, qu’il ne rechigne nullement à s’enfoncer des après-midi entières dans des puzzle, à relire des dictionnaires, des encyclopédies, principalement médicales, même si le peintre s’éparpille en confection de sauces, de ragouts, dans la quête effrénée du meilleur tandori, ou bien les mille et une versions de la crêpe Suzette, soyons généreux et bon avec le lecteur, ne l’égarons pas, retenons son attention de poisson rouge et repartons d’un bon pied, le droit comme je le précise encore et effectuons ce petit pas de côté. Dansons joue contre joue. Non zut, désolé c’est venu comme ça. Il suffit qu’on pose des limites pour que certaines personnes s’acharnent à ne pas les respecter. L’auteur notamment. Ou son personnage… Lequel des deux ? Mystère et esquimau. —Et donc t’es mourus ou pas ? S’interroge le lecteur qui se pince comme pour se demander si lui-même ne rêve pas, s’il est bien là en ce moment même en train d’assister à la renaissance d’un Phoenix, et en direct je vous prie. N’est-ce pas encore une tromperie, une trahison, un coup fourré, bref quelque chose de totalement scandaleux de voir un mort se relever comme Lazare de Béthanie et se remettre en branle comme si de rien n’était ? —Où donc est Jésus bordel sans qui rien de ce genre ne peut exister ? La chatte roupille sur son coussin et lâche un pet dans son rêve de chatte. Jésus par Minou. Le peintre ouvre les yeux, il se tâte, les couilles évidemment c’est la partie la plus centrale de l’homme. Tout est là, bien en place. Mystère et esquimau. Le peintre prend une nouvelle toile, essuie ses pinceaux, il prépare de nouvelles couleurs sur sa palette. Le voici parcouru d’un léger frisson, il a froid aux pieds. Alors Il se dit qu’il faut bouger pour se réchauffer, peut-être même danser, sautiller, peindre vite, très vite entre deux pensées L’auteur aussi sent soudain ses pieds se réchauffer. Et il écrit : sentir mais pas que des pieds. Comme c’est bizarre tout cela, qu’il suffise de laisser s’exprimer son personnage pour en vivre les sensations. Car l’auteur en général évidemment n’a pas du tout de sensation. Il s’adapte à tous les temps, à toutes les températures, à tous les climats. On ne sait même pas si l’auteur est un être vivant. On serait bien en peine de le dire. Donc, tout ce que l’on peut imaginer, car il ne reste que l'imagination, c’est qu’il n’est pas mort non plus. Tout le monde sait pertinemment que les morts n’ont rien à dire. D’ailleurs ils n’en ont pas besoin, puisque les vivants comme les personnages, sont exactement crées pour cela.|couper{180}