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L’âge d’or.
Un chien Andalou Photo Le fantasme d'un âge d'or revient perpétuellement pile poil au moment des grands bouleversements. Dans l'hypothèse que l'Akasha me présente, je manque m'étouffer de rire. Madame X est élue présidente de la république française et c'est la mise en place d'un merveilleux âge d'or. Tout le monde mange Tout le monde dort Personne n'a plus peur de rien. Nous avons été mis en stase. Des somnambules dont les lèvres balbutient parfois des choses incohérentes au fin fond de leur rêve éveillé. "Noir c'est noir il n'y a plus d'espoir hou hou hou tsoin tsoin". Tandis que les sauriens leur charcutent les neurones à coup de simulations virtuelles, de jeux débiles télévisés, et de chansons à l'eau de rose. Retour du feuilleton HEiDI. Tout le monde est beau tout le monde il est gentil. Sauf à peu près tout ce qui n'est pas gaulois. Et de pure souche svp. Sauf les russes évidemment. Ces bons aryens. Entre bon aryens comment ne pas s'entendre ? — Tu as fini de bailler aux corneilles me dit Hildegarde assise près de moi dans le compartiment. On a du boulot à préparer. Et elle ouvre sa petite mallette de voyage dans laquelle j'aperçois bien rangées toute une collection de petites fioles remplies de liquides colorés. —Oh doucement Hilde, tu sais bien que je n'aime pas être réveillé brutalement. — Si tu rêves à ce genre de choses tu crées un portail dans les possibles et l'Akasha enregistre, donc stop tout de suite ce genre de bidule s'il te plait. On a déjà assez de bordel mieux vaut pas en rajouter. — Tu as raison. Cause moi de botanique, le paysage est morne au delà des fenêtres. Je sais prendre Hildegarde par les sentiments. Il suffit de lui causer de plantes pour que je l'observe se trémousser de plaisir sur son siège. — tu te vois plutôt incinéré ou enterré et bouffé par les vers de terre me demande t'elle. — Euh moi je ne vois rien du tout de tout ça, éventuellement ce ne sera que ma dépouille à qui ça arrivera et dont je me tamponnerai comme de mon tout premier haut de chausse. Avec Hildegarde on a une relation fraternelle du genre à se taquiner tout le temps. Elle est un brin bourrue et fait toujours semblant de ne pas supporter les fantaisistes de mon acabit. Mais c'est comme l'huile et le vinaigre entre nous-deux, et s'il n'y a pas de salade à assaisonner, on se rabat l'un sur l'autre pour un rien. — Tu crois à l'âge d'or Hildegarde ? je demande. — tu veux parler de maintenant elle dit, bin oui forcément que j'y crois puisque je le vis. — Oui mais non, je veux dire au paradis Hilde, avec des chérubins tout nus qui soufflent dans des trompettes et des jardins remplis de fleurs fraiches à l'infini ? — t'es rien couillon toi elle dit. Pourquoi pas aussi aux vierges qui des qu'un pauvre bougre se fait exploser la tronche deviennent toutes nymphomanes en l'accueillant à bras ouverts ? Et pourquoi pas à la petite souris et au Père Noël par dessus le marché ? On explose de rire et c'est à ce moment là que la contrôleuse ouvre la porte du compartiment. Une grande blonde athlétique avec des yeux gris bleus souriants. — tiens voilà la première qui arrive, une Walkyrie visiblement dit Pablo en face de nous. Est-ce que le train a déraillé ? on est tous morts et on est arrivé au paradis ? Puis il fait une mimique qui doit ressembler à son avis à une sorte d'hommage, de révérence à la grande blonde en achevant le tout par un clin d'œil salace comme il en a le secret. — Tiens toi donc espèce de paysan dit Salvador, moustaches orientée 10h10. Puis s'adressant à la contrôleuse : Mademoiselle vous illuminez cet instant comment puis je vous honorer ? — La grande blonde prend un air ahuri et dit : bin z'avez qu'à présenter vos billets en polonais et nous ne sommes mêmes pas étonnés tous autant que nous sommes de comprendre la langue. — Moi j'aimerais que mon corps soit momifié qu'il devienne comme un vieux parchemin me confie Hildegarde. Et nous voilà tous à rigoler devant la grande fille qui est un peu rougeaude tout à coup. — Ah je vous l'avais dit que c'en était une. J'ai un 6eme sens pour les repérer. — Rustre ! tu ne penses donc toujours qu'à jouir le tance Salvador en faisant les yeux doux à la femme en uniforme. puis il ajoute qu'il la peindrait bien nue avec de très longues jambes pour qu'elle puisse gambader dans le désert au coté de ses magnifiques éléphants. On rigole. C'est à ce moment là que l'on voit la grande blonde s'élever dans les airs. Son crane traverse le plafond, puis son corps tout entier. Et nous sommes tous soulevés comme des crêpes de nos sièges. Enfin le train déraille comme au ralenti, tous les wagons pénètrent les uns dans les autres. Dire que quelques instants auparavant je rêvais d'un Age d'or. Le quotidien nous rattrape toujours séance tenante. Il y a eu un attentat sur le train Paris Varsovie. Une explosion. Est-ce un hasard ça m'étonnerait bien.|couper{180}
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Qui aime bien châtie bien.
Des insurgés polonais à l’écoute de leur radio. Il y a deux manières de châtier l'autre. Soit par une volonté de lui enseigner quelque chose, soit pour le punir. De nombreux malentendus proviennent de l'ambiguïté de l'intention, comme d'habitude. —Oui oui ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément dit le bon Boileau aussitôt. Je ne m'en fais plus. J'observe tout ça sans m'étonner le moins du monde. Et en même temps que je sirote un café je m'interroge sur le début de ce 14 ème élément. Ce devrait être un nouveau départ une fois le 13 passé. Un recommencement. Pourquoi est-ce qu'aussitôt que je démarre la moindre chose je me retrouve confronté à la notion de châtiment ? Immédiatement suivie par cette interrogation concernant l'intention de l'entité que j'imagine tenir le fouet. Les lézards tiennent le fouet. Mais quelle est vraiment leur intention ? Ne sont-ils pas eux-mêmes les jouets d'une intention supérieure ? Il faut que j'en ai le cœur net. C'est la raison principale que je me donne pour pénétrer en douce chez eux suite à la proposition de Maria. Nous étions installés au Mabillon de retour de notre promenade au jardin. Elle avait reposé son verre de limonade et après avoir tripoté quelques secondes sa paille, Maria avait soudain planté son beau regard dans le mien et m'avait dit : —Tu as exactement le profil, et tu le sais. Comme d'habitude je n'avais montré aucune émotion, j'étais resté parfaitement stoïque. Je commençais à apprendre à me situer dans l'instant et de ne plus être étonné par rien. Enfin je crâne un peu, j'avoue, mieux vaudrais plutôt dire que je m'efforçais de faire de cette attitude une habitude. D'ailleurs Maria éclate aussitôt de rire. — Tu as encore rechuté tu te prends pour Basho ? — Plutôt Tchouang Tseu, mais tu as bien raison, j'ai rechuté dis-je cette fois en souriant. —Justement cet art de te fondre dans tous ces personnages nous intéresse au plus haut point. Les lézards sont dans une agitation terrible, mais on ne sait pas pourquoi, il faut que tu ailles glaner quelques informations. D'après nos derniers renseignements qui datent de plusieurs mois ils tentent d'installer un nouvel ordre mondial et tous les subterfuges y vont bon train pour faire avaler cette nouvelle pilule aux terriens. — tu ne vas pas me dire que tu crois à cette histoire de nouvel ordre mondial Maria ? et je la considérais en méta position pour tenter de voir si elle se moquait de moi. Elle fit un geste pour me ramener à ma place. —Je ne plaisante pas du tout il se passe réellement quelque chose de très grave me souffle t'elle. Les américains et les russes se sont mis d'accord je ne sais comment pour faire naitre un conflit planétaire. Je suivais les événements comme tout le monde évidemment mais je n'avais pas imaginé jusqu'à ce que Maria m'évoque cette possibilité, qu'il puissent être à l'origine d'un gigantesque coup monté pour installer ce vieux fantasme d'ordre mondial. — tu n'es pas en train de prêter à ces gens une intelligence qu'ils n'ont pas ? tentais-je d'opposer. — Justement c'est parce qu'ils sont fragiles que les lézards les manipulent à leur guise. Et puis on dit les américains, les russes, mais il ne s'agit que des peuples qui sont pris dans la tourmente. Il faut porter une attention à leurs chefs, à ceux qui les entourent de près, et surtout aux intentions véritables d'un tel désordre. — L'intention ici bas est toujours plus ou moins la même, l'argent, le profit, le pouvoir, rien de nouveau sous le soleil. — Non cette fois il y a autre chose de plus, une nouvelle tentative comme durant la seconde guerre mondiale. C'est une préparation des cervelles à quelque chose de plus funeste encore que tout ce que nous avons jamais connu. Je regarde Maria. Elle s'est assombrie et les cernes que je ne vois jamais sous ses beaux yeux apparaissent désormais. Elle est fatiguée, éreintée. Soudain elle m'apparait comme une très vieille femme au bout du rouleau. — Tu essaies de m'influencer en te faisant passer pour une vieille ? je dis , tu veux que je m'apitoies ? N'as tu donc pas suffisamment confiance en moi pour utiliser encore des stratagèmes ? Elle rit et je la retrouve belle comme au premier jour. — Hum bravo tu fais des progrès chaque jour, dit elle d'une voix calme, tu es vraiment tout à fait prêt pour la mission que nous voulons te confier. Nous allons t'envoyer dans la gueule du serpent. Demain tu pars en Pologne avec Pablo, Léo, Salvador et Hildegarde. Une fois arrivés à Varsovie on vous donnera plus ample information. Varsovie ? la ville Phenix ? Varsovie la ville du pécheur et de la sirène ? Pourquoi vais-je me demander pourquoi Varsovie ? Que demander de mieux pour un nouveau commencement, pour un recommencement. Bereshit de Bereshit ! —Oui tu es le pécheur et tu dois te rendre là bas le plus vite possible pour écouter le chant de la sirène sans faillir me dit Maria d'une voix adoucie. Tu aimes tellement ça les sirènes depuis le temps ajoute t'elle et nous voilà à pouffer comme des gamins en train de fomenter un mauvais coup. Qui aime bien châtie bien me dit-elle en se levant soudain. Et je reste là à la regarder s'éloigner, assis à la terrasse du Mabillon bourrée à craquer de chalands qui jouissent du soleil de Mars. Et de nouveau je me souviens cette fois comme si j'étais victime d'une malédiction. En juillet 2019, c'est le futur, une commémoration qui célèbre l'insurrection de la ville pratiquement à la même heure qu'il est à ma montre au moment où Maria me quitte :17h. Le silence soudain qui s'abat sur la ville. Plus aucun klaxon, tout le monde est comme figé. C'est à cet instant que toutes les sirènes de la ville résonnent et que des milliers de passants s'animent à nouveau, des milliers de polonais qui entonnent des chants de gloire et qui applaudissent. En ce mois de juillet je suis là parmi la foule et j'applaudis moi aussi j'ai les larmes aux yeux j'embrasse les gens autour de moi. Il faut se souvenir comment 77 ans plus tôt nous nous en étions sortis alors que tout absolument tout signait notre ruine. Entre les nazis et l'armée rouge il n'y avait guère d'issue. Et pourtant grâce à Vilnius, à Varsovie nous y sommes arrivés. Nous nous sommes battus pour notre indépendance. même si au bout du compte nous avons perdu. Aout 44, 20 000 SS armés jusqu'aux dents contre 50 000 insurgés... le but d'Hitler était de réduire totalement la ville en cendres ce qu'il a pratiquement réussi à faire. Mais nous avons été pécher la force et le courage au fond de notre cœur, de notre âme guidé par le chant totalement incohérent de la sirène que nous nommions la liberté, l'indépendance, la justice. Ce n'est pas le résultat qui compte toujours le plus. Découvrir que nous avons un cœur, une âme vaut mille fois plus que n'importe quelle défaite ou victoire. Posséder enfin la certitude d'avoir une âme. Tant de malheurs à traverser pour enfin être sur de cela. Quelle est la source ? quel type d'amour peut déclencher de tels châtiments pour saisir cela ? A la fin nous n'étions plus rien c'est en janvier 1945 que les rouges sont entrés dans Varsovie presque totalement dévastée. Une nouvelle domination commence pour nous tous les survivants à partir de cette date. Vers quel amour encore faut-il se hâter ? Tout recommence à nouveau. Un éternel recommencement.|couper{180}
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Accélération du temps.
La cène Léonard de vinci. Ecrire ces lignes aujourd'hui m'évoque des images de surfeur. Ne pas tomber de la planche, conserver son équilibre en toutes circonstances et ce quelque soit la puissance de la vague, éprouver la décharge d'adrénaline tout en restant centré sur la joie de la glisse. La mort est là comme une vague gigantesque qui emporte tout sur son passage. Elle est là au même titre que la vie. L'une ne peut exister sans l'autre. La 13 ème lettre de l'alphabet d'ailleurs ne ressemble t'elle pas à une succession de vagues ? Il est nécessaire de revenir encore une fois dans l'Akasha au plus fort de la vague, d'ouvrir ses oreilles et ses yeux non pas sur le visible car beaucoup de chausse-trappes y seront déposés par les peuples du Serpent à l'unique fin de maintenir leur pouvoir. L'Archange Saint-Michel vibre à très haute fréquence et le son de sa vibration a le pouvoir de tous nous élever ensemble vers la connaissance immédiate de la situation. On ne peut pas dire que quelque chose va arriver dans un certain temps. Cette chose est là, elle l'a toujours été et le sera toujours. La prévision est un outil de propagande de l'orgueilleux serpent. C'est par la prévision que les reptiliens manipulent le temps sur de nombreux mondes. C'est par la prévision qu'ils semblent accélérer le temps. Voici l'un des signes les plus évident à ceux qui ont des yeux pour voir, des oreilles pour entendre qu'il s'agit vraiment de la fin d'un cycle. Pas besoin d'une corde à treize nœuds pour enseigner cela aux benêts. Saint-Michel vibre et je plonge dans la vague aussitôt avec tous les autres autour de moi. Je brave les éléments pour me tenir debout sur le fil de mon récit sans m'attarder sur la fierté ou l'étonnement d'y parvenir. La mort est là, elle est continuelle comme la vie. Deux lignes fractales qui s'entremêlent comme les branches d'un brin d'ADN pour former une superbe forme hélicoïdale. — J'en connais un rayon là-dessus me dit Hokusai. Pas pour rien que j'ai peint cette énorme vague. J'espère que t'as repéré l'hélice. Il se fend d'un rapide clignement d'oeil. Je lui souris comme on se sourit en se rasant un jour de baraka. — Remarquable en effet cette vague lorsque j'y repense. Il faut vraiment être bien réveillé pour discerner sa portée. Un coup de génie mon frère ! Hildegarde se pointe soudain. Dès qu'on évoque la mort elle est là. Elle en connait un sacré rayon sur les milles et une façon de pourrir ou de sécher sur pied. —Vous croyez que ça va durer encore longtemps cette réunion ? j'ai plein de mauvaises herbes dans mon jardin elle demande. On rigole tous de concert, c'est de l'humour anglais bien qu'elle soit plutôt teutonne , depuis le temps on la connait. D'ailleurs c'est une des vertus intéressantes du temps terrestre à ce que je sache. On n'arrête pas de se reconnaitre à tout bout de champs ce qui pourrait provoquer l'ennui pour moins que ça. En fait nous sommes des milliers comme je l'ai déjà dit. Des milliers dans l'Akasha avec lesquels ils nous est possible de converser à chaque instant, dans un seul instant et en simultané. Et ce qui est effrayant au début c'est de s'apercevoir à quel point tout est là accessible et en même temps de saisir à quel point l'illusion que nous entretenons d'un temps linéaire est une absurdité. Bien malin qui peut dire à quelle période vraiment appartient tel ou tel événement, telle ou telle mémoire. En tant que scribe Maya je peux faire un cours complet sur la notion du temps et qui sera fort utile à n'importe quel empereur ou paysan. Bien plus pratique cette division nommée Tonalpohualli en vingt treizaines pour honorer toutes les divinités sans en vexer aucune. Et de plus en dehors du Soleil et de la Lune, c'est à dire dans une dimension au delà de l'ordinaire visible. Mais ne sombrons pas dans la nostalgie restons bien campé sur la planche et surfons. — Ainsi soit-il oui me souffle Jésus, rappelle-toi la cène, treize à table et tout le tutti. Jésus apparait comme ça de temps en temps dans l'Akasha, mais aussi à coté de moi lorsque je tente de relater mon aventure. Il est un peu partout sans être véritablement nulle part tout comme moi, je crois qu'on s'entend comme larrons en foire, si j'ose dire. Peu à peu la lumière décline et le son se retire. Saint-Michel se retire doucement pour rejoindre ses hautes sphères. Ici nous ne sommes qu''entre la 4ème et la 5ème dimension, nous parvenons à saisir un peu plus de choses que sur Terre. Saint-Michel certains disent qu'il se situe sur la 11 ème ou 12 ème, personne n'en est véritablement certain. D'ailleurs à quoi cela nous servirait il d'obtenir plus de précisions ? Et lorsque j'y pense ce besoin de précision est un peu comme la prévision, une sorte de poison lent qui aura pénétré dans nos cervelles et grâce auquel l'Ennemi accélère le temps dans lequel nous nous incarnons, que nous inventons sans relâche. — Tu ne peux jamais t'arrêter de plaisanter me dit Maria et j'ai soudain l'impression qu'elle m'adresse un reproche. — Mais Maria c'est ma nature de tout trouver si drôle je réplique. — Ah oui ? es-tu si certain de connaitre ta véritable nature ??? Et là elle se transforme en Monalisa, moi en Léonard et on reste face à face durant un moment indéterminé. Jusqu'à ce que quelqu'un lui peigne des moustaches. Ce qui évidemment me fait éclater de rire. Mais je ris un peu jaune car sous mes pieds les éléments semblent de plus en plus déchainés, la vague est encore plus énorme que jamais... le temps se déploie de façon de plus en plus saccadée.|couper{180}
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11.Avancer à l’aveugle.
Photo de UskaleGo sur Pexels.com —L'évidence est souvent ce que nous ne voyons pas. je sais déjà que tu vas me dire que c'est une réflexion banale, mais réfléchis un peu sur ce que tu appelles banal. Comment tu te dépêches surtout à vouloir toujours tout rendre banal. Car la banalité est un manque d'attention, un manque d'approfondissement de la notion de banal telle que toi tu as décidé de considérer de ce qu'elle devait être. C'est la volonté de toujours s'élancer vers du nouveau, vers de l'original qui finit par rendre banal les êtres et les choses. Plus précisément c'est un déséquilibre dans le temps et l'espace, crée d'ailleurs à cet escient. C'est par ta non-résistance, ta non-opposition à l'incarcération dans l'espace-temps que tu deviens la proie de l'ennui, de ce sentiment de répétition, de la dépression et que tu finis par te résoudre à trouver cette prison banale. La plupart des gens nomment cette prison leur vie, ou le quotidien. Cela fait partie du programme implanté. Au début de ton existence tu as la sensation de vivre un miracle, et puis celui-ci s'évanouit et tu passes ta vie ensuite à vouloir retrouver par tous les moyens le souvenir de ce miracle, tu imagines pouvoir le récupérer intact, et l'entretenir comme une braise, Cependant tu ne te rends pas compte à quel point tu le dénature à quel point tu le recouvres de nostalgie, et de regrets. Tu sens bien que tu te laisses aspirer par quelque chose de glacé et d'indifférent. Et surtout tu acceptes de penser que tu ne peux plus rien y faire. C'est comme un mauvais rêve dans lequel on s'enfonce progressivement. Les lieux et les temps alors se superposent, se mélangent, cela finit par faire de la boue. Et de cette boue surgit un golem, une chose dépourvue d'âme, un objet de vengeance que d'autres que toi et même toi, utiliseront à leurs propres fins. — Mais qui sont ces autres dont tu parles ? demandai-je à Maria non sans un certain malaise, car j'avais formé la certitude qu'elle était complètement folle frappée désormais par une paranoïa aigue. — Tu crois que je délire me dit-elle alors comme si elle pouvait lire dans mes pensées. Puis elle se mis à sourire et je vis la femme que j'avais toujours eu envie de voir et je me mis à sourire moi aussi. Ce jour là nous marchâmes longtemps au bord du fleuve. C'était le début de l'automne 1978, l'année de mes 18 ans. Je ne sais plus si j'étais animé par le désir ou par des sentiments plus profonds mais, me connaissant, j'opterais pour cette obsession de vouloir toujours combler le vide et le manque. Et bien sur, lorsque je veux m'en souvenir , j'éprouve toute une galaxie de sentiments confus encore aujourd'hui. Une galaxie qui tourne autour de la honte, de la culpabilité, du manque de confiance en moi, cet amalgame qui constitue le soleil noir de ma jeunesse. — Il te suffira d'écouter ton cœur, m'avait soufflé Maria lorsque je m'étais ouvert à elle, ce jour là, lorsque j'avais osé lui parler avec confiance de mes plus grandes craintes. J'avais alors eu cette impression de me livrer à elle pieds et poings liés je m'en souviens très bien. Mais l'intention n'était vraiment pas si noble que je voulais qu'elle soit. En fait ce n'était rien d'autre qu'un test. Car pouvais-je réellement faire confiance vraiment à qui que ce soit ? "Il te suffira d'écouter ton cœur" Comme cette phrase alors m'avait parue banale, insignifiante, comme une rengaine automatique déjà entendue mille fois. J'avais hoché la tête en me disant : Ainsi donc elle aussi me parle de ce cœur qu'il s'agit d'écouter pour que le miracle advienne ? ce miracle que je ne vois jamais. j'avais été déçu car cela ne me disait rien, ne me livrait aucune clef. Je crois même qu'une fois cette phrase prononcée par la seule femme avec laquelle j'étais heureux de me sentir bien, je retrouvais aussitôt toute l'étendue de ma solitude, ce cachot dans lequel on contraint les récalcitrants à s'enfermer eux-mêmes au sein même de l'établissement pénitencier que représente le monde d'ici-bas. Poupée russes. Cette sensation soudaine provenait du doute. A 18 ans je doutais déjà de tout comme je doutais de moi-même. Le monde tout entier était le miroir de ce doute que je ne cessais de trimbaler comme un caniche au travers mes perpétuelles errances. L'errance n'a t'elle jamais servi à autre chose vraiment qu'à me fatiguer, à éreinter mon corps et mes pensées et ce fameux cœur dans les rues de la ville ? Maria disparut à l'instant même où le doute m'entrainait à formuler les pires hypothèses parmi lesquelles la folie, ma propre folie n'était pas à exclure. La nuit tomba brutalement à cet instant précisément où je me retrouvais seul sur les berges du fleuve. Je me pinçais pour éprouver la douleur réelle d'être vraiment là, mais j'étais déjà trop habitué à celle-ci. Le doute persista, et je ne savais plus si j'avais tout inventé ou si un détail si infime fut-il put être relevé pour me conduire à me rassurer quant à la réalité du monde et de moi-même. Au début je ne fais pas attention à la nuit qui tombe ainsi comme un couperet. C'est tellement banal qu'elle tombe ainsi, sans même qu'on y prenne garde tant nous sommes tout entier dans nos pensées. Pourtant quelque chose me semble étrange tout à coup. Je me retrouve dans une obscurité absolument totale. La ville lumière elle-même s'est évanouie. Je me demande s'il ne s'agit pas d'une panne d'électricité générale. Mais en tendant l'oreille j'entends les pas des passants,, leurs rires, leurs paroles, leurs disputes lorsqu'ils passent près de moi. Comment peuvent-ils donc être joyeux et querelleurs dans cette obscurité totale ? C'est à ce moment que je comprends aussi que je devenu aveugle soudainement. Je tâtonne pour m'asseoir pris d'un vertige et reste ainsi un long moment à écouter le bruit du monde, à renifler son odeur. Une odeur de pourriture monte du fleuve devant moi. Puis tout à coup en levant la tête je vois des lueurs au début imprécises, des milliards d'étoiles scintillent, je ne peux voir que cela. Et c'est étrange car normalement les lumières de la ville nous l'interdisent. Je ferme les yeux puis les ouvre à nouveau, les étoiles sont toujours là, je jurerais qu'elles sont "vivantes" et qu'une relation tente de s'effectuer entre elles et moi. Je me laisse aller, je ne résiste pas. Je me sens tellement démuni par mes doutes et l'idée affreuse d'être devenu totalement cinglé. Et là je décolle. Quelque chose m'emporte et je recouvre la vue comme auparavant. Paris sous moi devient comme un bijou scintillant dans son écrin, puis ce n'est plus qu'une pâle lueur sur la Terre. Je continue à m'élever encore plus haut, l'altitude doit être inouïe car je vois désormais notre planète réduite à la taille d'un calot puis d'une bille. Je me demande si je suis en train de mourir. Et au moment où je me pose cette question j'entends une musique merveilleuse qui se rapproche de moi, qui m'enveloppe et je crois reconnaitre alors la voix de la soliste qui surnage dans celle-ci. C'est la voix de Maria. Je la cherche, mais ne la trouve nulle part, je ne vois toujours que des milliards et des milliards d'étoiles tout autour de moi et au delà. Et elles semblent de plus en plus "vivantes" et chose extraordinaire c'est que plus je me rends compte de leur vitalité plus je découvre la mienne comme si un voile se déchirait et que toutes les mémoires que j'avais oubliées me revenaient toutes en même temps. A cet instant changement de son, comme un tambour qui se met soudain en branle. Et très vite, dans un même temps comme s'il s'agissait d'une seul instant présent de toute éternité, j'éprouve alors une joie sauvage, une vigueur formidable car je reconnais le son, la voix de mon propre cœur.|couper{180}
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10.Détail 1-35327
L'un des Détails de Roman Opalka, dont chacun constitue une partie de l'œuvre OPALKA 1965 / 1 - ∞ Archiver le présent La seule chose vraiment importante dans la vie ce n'est pas de vouloir faire quelque chose pour devenir quelqu'un, mais de se souvenir pourquoi nous avons décidé de naitre plutôt que de résider dans l'inexistence d'une conscience en route vers un rêve d'infini qui ne peut se réaliser, qui ne se réalisera jamais. Maria est une femme mure à la peau douce mais son cœur est de diamant. Elle ne me fait aucune concession et j'aime ça. Car si moi je ne sais pas encore qui je suis elle le sait quant à elle bien avant que je ne vienne dans ce monde. Elle connait mon futur, mes forces, mes faiblesses et elle sait aussi que la seule façon d'obtenir ma confiance vraiment passe par le don total de soi. Elle sait aussi à quel point je me leurre quant à la notion de confiance , de don et du Soi que je ne cesse de confondre encore avec moi. — Viens me dit-elle je veux te faire connaitre quelqu'un. Et c'est ainsi qu'elle me conduit à la galerie Yvon Lambert à Paris, où je me retrouve devant les toiles du peintre Roman Opalka qui à priori ne me parlent pas. — Regarde voici un homme qui est venu parmi nous avec un but dont il est parvenu à se souvenir. Je me sens mal à l'aise car je ne vois que des nombres plus ou moins gris et ça ne me parle vraiment pas. Je ne comprends rien de ce que Maria essaie de me dire. D'ailleurs je lui dis : Pourquoi m'as tu amené là je trouve ces toiles vraiment trop moches, sortons d'ici allons nous balader, boire un verre à la terrasse d'un café, il fait si beau profitons-en. Mais Maria ne l'entend pas ainsi. Elle a toujours un but précis et s'amuse de me voir à chaque fois m'esquiver. — Tu ne peux pas perdre autant de temps que tu le fais, cesse donc de te réfugier dans l'hédonisme, d'ailleurs regarde-toi dans la glace, tu as l'air de quoi ? Et soudain j'aperçois mon reflet dans un des miroirs qu'elle m'indique et je vois un type que je ne reconnais pas. Nous sommes arrivés en 2010 et j'ai cinquante ans alors qu'un instant auparavant je n'étais qu'un jeune homme. Maria pourtant est toujours Maria, elle n'a pas changé d'un iota. On dirait que le temps ne laisse plus aucune trace sur son beau visage. Je suis pris de panique, je suffoque en observant le visage du type que je suis devenu à la surface du miroir. Je crois que je vais tourner de l'œil. Maria en profite pour m'entrainer vers un siège, elle s'assoit près de moi et me raconte l'histoire de ce peintre, Roman Opalka. Il fait aussi partie de l'équipe au sol me dit-elle c'est ton frère. Il va bientôt achever sa mission, et ce que tu peux voir sur ces tableaux n'est qu'une toute petite partie de tout ce qu'il a accompli. Je ne comprends toujours pas. Je demande alors à Maria de m'expliquer la raison de ces nombres qui s'enchainent ainsi dans des valeurs de gris différents. Pourquoi faire ce genre de chose c'est totalement inutile, et ce n'est même pas beau à proprement parler. — Je comprends ta trouille me dit Maria. Et tu sais Roman aussi a eu peur, il a même du se rendre à l'hôpital une fois qu'il a compris dans quel projet il allait devoir s'engager pour le restant de sa vie dans cette dimension. Son cœur s'est affolé. Mais il a tenu bon exactement comme toi tu le feras. Au moment où elle achevait sa phrase je sentis qu'une présence hostile avait envahi la grande salle d'exposition. J'eus un flash dans lequel je voyais la verrière au plafond voler en éclat et des formes sombres gigantesques descendre à une rapidité hallucinante. — cours me dit Maria il ne faut pas qu'ils nous voient ensemble. Je m'exécute. Mais au moment d'atteindre la porte je me retourne pour voir si Maria me suit, je ne vois plus rien. La pièce est vide, la verrière au plafond est intacte. Seuls les grandes toiles du peintre Opalka sont là, silencieuses comme si elles étaient depuis toujours dans l'attente de mon attention. Alors malgré mon cœur qui bat la chamade, malgré toute l'incompréhension de la scène que je viens de traverser je retourne m'asseoir pour mieux les regarder à nouveau.|couper{180}
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8.A chacun sa vérité.
La vérité et le mensonge sont les mots que nous utilisons dans cette dimension. Cependant ces deux mots nous éloignent souvent de ce point particulier dans lequel nous pouvons demeurer en paix si on reste silencieux, si on ne pense pas avec des mots. Si nous sommes vraiment attentif à ce qui se produit maintenant, tout ce que nous pouvons percevoir n'a rien à voir avec la vérité et le mensonge tels qu'on nous les a appris. Dire sa vérité doucement, en commençant par la laisser venir à soi-même est le début d'une aventure incroyable. Mon erreur fut sans doute de la dire trop haut à de nombreuses personnes qui ne désiraient pas l'entendre. Et je profite donc cet l'instant pour leur offrir de me pardonner si elles estiment encore que je les ai blessées. Ce qui me guide depuis le début est une aversion viscérale pour l'injustice et celle-ci n'a pas besoin de passer par le raisonnement. Au contraire je dirais que le fait de raisonner chaque fois m'égare quant à mes intuitions premières vis à vis de ce qui est juste ou ne l'est pas. Je ne saurais dire d'où me vient cette sensation. Elle est là depuis le début. Et parfois je dirais même qu'elle est là bien avant le début de ma vie, qu'elle appartient à l'être que je suis avant qu'il ne se confonde avec ce que je suis bien obligé de considérer comme un avatar. L'intuition n'est pas un pouvoir magique. Elle est toujours le fruit d'une somme d'expériences vécues. Lorsque l'être a tellement vécu et explorer de probabilités dans les domaines du possible comme de l'impossible. Lorsque l'être n'a plus besoin de l'apparente sécurité de la certitude et du doute. Lorsque l'être saisit qu'il provient d'un espace-temps multi dimensionnel, qu'il se souvient de toute une gamme de fréquences des plus hautes aux plus basses que ses périples lui aura donné la chance de visiter. Ce fut toujours important de me mettre en retrait du monde des autres pour retrouver une certaine fréquence comme on peut tourner le bouton d'un transistor pour écouter une émission favorite. Cette fréquence c'est ce qu'ici bas on peut appeler une vérité et que souvent lorsque je m'en suis ouvert fut traitée comme un mensonge. C'est aussi par cette friction entre deux termes employés pour définir la réalité que la plupart du temps j'ai éprouvé ce sentiment d'injustice. Cela fait sans doute partie des choses que j'ai décidées d' élucider en venant au monde, C'est ma feuille de route si l'on veut. Pour ce faire j'ai choisi une configuration où l'injustice règne pratiquement à chaque instant. Ce qui m'étonne aujourd'hui en écrivant ces lignes c'est d'avoir survécu à toutes ces épreuves. Et si j'ai survécu c'est probablement parce que j'ai toujours deviné que ces épreuves n'étaient dans le fond que les étapes d'un plan. Parce qu'intuitivement j'ai toujours su qu'au delà de la sphère de préoccupations de mon avatar, l'être avait choisi de s'entrainer lui -même pour apprendre à aimer encore plus profondément la nature de la réalité. Evidemment il m'était difficile enfant d'expliquer ces choses ce qui causait parfois des colères à la fois chez mes proches qui ne comprenaient pas mes agissements, et en mon avatar qui était doté de toute la sottise de cette espèce à laquelle nous appartenons. La sottise c'est de croire au temps, au besoin d'obtenir tout un tas de choses sur lesquelles je focalisais le manque. Et bien sur j'attribuais à ce manque des responsables, en première ligne mes parents. Aveuglé par les conséquences, par les objectifs bien plus que sur la cause véritable de ce manque je me suis enfoncé progressivement dans les plus basses vibrations de ce monde. J'ai connu la colère, l'envie, la jalousie, la fourberie, autant de termes provenant de la communauté que j'ai fini par laisser pénétrer dans l'esprit de mon avatar. Cela faisait bien sur partie du plan aussi. Il fallait bien que je sache dans le détail tout ce qui constituait le juste comme l'injuste et surtout la raison d'une telle séparation entre ces deux concepts ici-bas. Et donc j'étais seul, du moins je l'ai longtemps cru. Cela aussi faisait partie du plan, je veux parler de cette solitude incroyable dont je peux encore me souvenir avec étonnement désormais. Explorer la solitude fut une de mes plus belles difficultés. Je m'y repris à de nombreuses fois pour amadouer la souffrance, le désespoir, la perte d'estime de soi que devait traverser mon avatar pour retrouver le calme, et surtout l'intelligence du cœur appartenant à cet être. Mon avatar était traversé parfois par d'étranges moments de transe et de grâce qui devaient sans doute l'aider à tenir, à patienter dans l'attente de saisir le but pour lequel, une nouvelle fois, il avait effectué cet acte héroïque de revenir sur la Terre. Lorsque mon avatar atteint ses 18 ans, la mode sur Terre dans ce pays, à Paris, était de s'intéresser à la spiritualité pour beaucoup de jeunes gens oisifs qui ne savaient pas vraiment ce qu'ils voulaient faire de leurs vies. L'oisiveté comme on le dit aussi est la mère de bien des vices. Donc je me concentrais sur ces vices de bon cœur. Je ne me rendais pas compte cependant que j'établissais une sorte d'inventaire pratiquement exhaustifs de toutes les vicissitudes et turpitudes humaines. Notamment le sexe prit énormément de place dans la cervelle de mon pauvre avatar. Et les choses étant arrivées à un tel point de pollution dans sa cervelle qu'il se jeta à corps perdu dans l'étude de la philosophie, de la religion, en n'ayant plus qu'un seul but : être sauvé, ou parvenir à se détacher de ce qu'il nommait encore à cet époque l'égo. J'en ris aujourd'hui. Un avatar qui veut se détacher de son égo... il y a vraiment de quoi rire. Mais bon, ainsi qu'il est ici coutume de le dire : "Les chemins de l'Etre sont impénétrables." A la vérité, et je le dis le plus doucement possible pour ne heurter personne, l'attirance pour le sexe comme pour le détachement par la suite et notamment le bouddhisme, ne provient que des ondes crées par les milles avatars que l'être s'invente pour explorer en même temps toute les facettes d'une seule et même conscience. Et bien sur au delà de cette conscience qui probablement n'appartient elle-même qu'à une certaine fréquence sur la bande FM de l'univers se tient la nuit, les étoiles et l'amour infini qui maintiennent à la fois la cohérence et l'incohérence de l'univers. Une respiration qui se tient à la fois ici et là, ici et maintenant depuis toujours et à jamais. Qu'un amour puisse être tellement présent à chaque instant et que nous restions dans l'ignorance de cet amour, ne relève pas l'intelligence de l'espèce humaine en général pas plus que celle de mon avatar. Je me suis souvent demander pourquoi. Pourquoi ne voit-on pas clairement l'amour qui ne cesse d'être là tout le temps ? Pourquoi nous enfonçons nous dans de si basses vibrations avec toute cette collection de mots pour nous justifier ensuite ou pas ? Cette vérité que je tente de dire depuis toujours c'est que nous sommes tous les manifestations de cet amour sans aucune exception. Que mêmes les injustices ont leur raison d'être comme les massacres et leurs auteurs. Rien ici-bas comme tout en haut ne peut être sans amour. Mais que croyons-nous vraiment savoir de l'amour ? Nous n'en sommes qu'au tout début. De grandes choses se préparent qui nous aideront probablement à mieux comprendre celui-ci. Cette nuit j'ai encore fait ce rêve où d'immenses vaisseaux extra terrestre arrivaient en silence et stationnaient au dessus de notre Terre. Je ne les sens pas hostiles. J'ai même eu la possibilité de visiter l'un de ces vaisseaux où j'ai retrouvé des amis que je n'avais pas revus depuis très longtemps. A cette occasion j'ai manifesté une bouteille de Dom Pérignon. En ôtant le bouchon il y a eut un plop ! qui a fait rapetisser toute l'assemblée à la taille d'un dé à coudre. Puis tout est revenu à la normal et on s'est échangé des nouvelles de l'univers. — Tchin a dit Picasso, Léonard paraissait soucieux, et se grattait le crane. Par contre Hokusai s'était déjà allongé sur une banquette dans la vaste pièce et griffonnait comme a son habitude des fractales à n'en plus finir. Terri Broughton Waiting in the wings|couper{180}
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Le visible et l’invisible.
Tout ce dont j'ai conscience est le visible. L'invisible c'est le reste. Et ce reste est comme la partie submergée d'un iceberg. Enorme, immense, gigantesque. Lorsque ce jour de mars 1968 Philippe me confie que je n'ai qu'à penser très fort à une certaine fille pour "l'avoir", ma première réaction est d'observer le doute monter en moi concernant la santé d'esprit de mon ami. J'y repense aujourd'hui car c'est la première fois que je me suis retrouvé confronté au pouvoir de la pensée, relaté par un de mes congénères. Du coup j'ai essayé évidemment. J'ai pensé très fort à certaines filles. D'autant qu'il avait ajouté qu'à l'aide de ce stratagème aucune limite ne pouvait exister, qu'on pouvait toutes les avoir. Je n'étais pourtant pas certain que nous parlions de la même chose au travers de cet auxiliaire. Malgré ma tentative les choses restèrent exactement dans le même état globalement. C'est à dire que ces filles ne me regardaient pas plus qu'avant. — C'est parce que tu n'y crois pas assez fort ajouta Philippe lorsque je fis le point avec lui une semaine plus tard. Puis il enclancha sur ma mère et m'avoua que lui, il rêvait d'elle avec succès tous les soirs. Ce qui mit fin à notre relation le même jour. Cette déception est à marquer d'une pierre blanche quant à la confiance que j'éprouvais désormais pour l'amitié avec les êtres humains, notamment les individus mâles. Et du coup je reportais durant un temps mon attention sur les filles. Elles représentaient je crois un accès à beaucoup de ces choses dont je n'avais pas conscience. Des choses que je situais à l'extérieur de ma pensée de ma conscience. Mais qui se trouvaient également dans une partie de moi que j'ignorais, où alors je me trompais de mot pour qualifier ce genre de choses. Si je devais trouver un mot qui se rapproche aujourd'hui le plus de ce que ressentais alors, je choisirais l'imprévisible. Quoique je puisse imaginer quant à une situation, quelque que soit mon espoir, elles trouvaient toujours le moyen de me renvoyer dans les goals comme on dit. Ce qui au bout du compte m'entraina à ne plus avoir d'idée arrêtée sur quelque but que ce soit. Ce qui déclencha encore quelque chose de perturbant : Un amour infini dont je ne savais quoi faire. Je crois que je pouvais tomber amoureux aussi rapidement que l'on attrape des poux à cet âge là. Ce qui était d'autant plus confortable que j'avais fini par ne plus m'attendre à rien en retour. Tout ce passait dans ma tête ou mon cœur, peut-être les deux. Donc d'une certaine manière j'étais parvenu à mes fins. C'est à dire comprendre cette perturbation qu'avait provoqué mon ami Philippe lorsqu'il disait qu'en pensée rien n'était impossible, que l'on pouvait "toutes les avoir". Cela collant parfaitement en plus avec mon naturel sauvage. Cela ne dérangeant pas ma solitude et mes longues rêveries. Et si par hasard je me retrouvais confronté avec une réalité quelconque je me hâtais de lui trouver un maximum de défauts, d'agacement, afin de ne pas m'attacher à celle-ci. Ainsi par exemple Anne-Marie, la fille du restaurateur qui habitait à deux pas et qui chaque jeudi s'amenait devant le portail pour que nous jouions à la dinette ou je ne sais quoi. C'était une petite grosse comme moi, ce qui devait lui faire imaginer qu'on pu être fait l'un pour l'autre comme on dit. Néanmoins puisque l'habitude de nous fréquenter s'installa je finis par la considérer comme un élément de ma vie à cette époque au même titre que ces interminables journées d'école, des roustes de mon père, des corvées pour ranger les stères de bois au fond du jardin. Je n'étais pas amoureux d'Anne-Marie car elle me ressemblait trop. Elle était visible comme le nez au milieu de mon visage. Michèle en revanche ne venait que durant les vacances scolaires. Son absence créait le manque suffisant pour que mon esprit puisse vagabonder à loisir. De plus elle était d'une cruauté mesurée, alternant savamment les caresses les baisers avec autant d'entourloupettes, de mensonges, de trahisons. Elle représentait un mystère que je n'avais de cesse de vouloir élucider et qui à chaque fois se soldait par un échec. Sa méchanceté était l'obstacle que je devais dépasser pour prouver l'amour, la compassion que je lui portais. Jamais elle ne me le demanda d'ailleurs, le contrat fut immédiatement tacite. Sans doute aujourd'hui suis-je mieux enclin à accepter que j' étais l'unique signataire d'un tel contrat. L'amour, l'imagination, la pensée et cette obsession perpétuelle de vouloir m'approcher au plus près du mystère, le pénétrer, découlent certainement de mes lectures. J'avalais des forets entières d'ouvrages, de contes et légendes, des romans de chevalerie. Ce n'eut été que billevesées si au delà des intrigues, des personnages, je n'avais toujours détecté intuitivement de grandes vérités sur les forces invisibles qui manipulent les êtres. Je possédais ou j'étais possédé déjà, je me souviens, par ce genre de lucidité encombrante pour un gamin de 7 ans. L'intuition que tout ne se joue pas uniquement dans le visible mais bien plutôt à de multiples dimensions de l'invisible. C'est à cette période, cherchant des solutions pour avoir accès un peu plus à ces territoires dissimulés que je portais mon attention sur le notion de but et de cible et sur le paradoxe. Si tout le monde autour de moi semblait malheureux perpétuellement de ne jamais pouvoir atteindre leur but, si les buts s'évanouissaient au fur et à mesure qu'on s'en approchait de trop près, un peu comme les filles, alors il était temps de découvrir de nouvelles stratégies. Ce fut grâce au tir à l'arc que je fis des progrès dans le domaine de l'invisible. Si je voulais atteindre une cible en la visant, cela ne fonctionnait pas à 100% Le hasard semblait participer à l'action en grande partie alors qu'on s'obstine généralement à tout mettre en œuvre pour qu'il n'y ait pas de hasard justement. On choisit le bon morceau de bois, la bonne ficelle, on apprend quelques rudiments d'aérodynamisme pour tailler correctement l'empennage des flèches dans des plumes de poules. On essaie de tout prévoir jusqu'à la force du vent. Mais malgré cela on n'atteint pas les 100% de coups réussis. Bientôt une nouvelle obsession m'occupa l'esprit. Obtenir ces fameux 100% d'une autre façon, inédite que toutes celles que je connaissais jusque là. Je découvris que si je ne regardais pas la cible et que je déclenchais mon tir j'avais quasiment le même nombre de chances de toucher au but que si je mettais tout en œuvre scrupuleusement pour tenter d'y parvenir. Et sans doute aurais je pu y parvenir. Sans doute étais-je vraiment à deux doigts de pouvoir y parvenir si je ne m'étais pas tant accroché justement à ce but d'atteindre les 100%. Ce fut en plein entrainement au tir à l'arc, et alors que je jubilais de parvenir au but que mon père obtenu sa mutation en région parisienne et que nous dûmes quitter l'Allier et le Cher pour rejoindre l'Oise et ses berges polluées. L'invisible avait donc décidé qu'il était grand temps que je m'éloigne de lui pour étudier le visible d'un peu plus près. https://youtu.be/hmRPECd9Yig|couper{180}
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Le travail et l’argent
Combien coûte ceci combien coûte cela ? Et on marchande, on négocie avec comme objectif, comme idée fixe de remporter une “bonne affaire”. Depuis l’arrivée du Covid j’ai pris l’habitude de faire payer les élèves au mois. Afin de ne pas les léser en cas de nouveau confinement car ils payaient au trimestre avant cela. Mais pour le coup je me rends compte des dérives que je n’ai bien sûr pas prévues. Ainsi un tel arrête de venir car son jour de télétravail a changé une autre ne viendra pas pendant trois semaines car elle va en vacances au Mexique, une autre ne peut pas venir tous les cours du moi d’avril et mai et ne veut plus payer qu’un seul mois… Bref me voici devant les conséquences malencontreuses d’avoir voulu bien faire. Qu’à cela ne tienne je l’assume. Cependant l’année prochaine non seulement mes tarifs augmenteront mais en plus je ferai payer d’avance toute l’année ! Je ne vais pas me justifier encore en expliquant par le menu que moi je paie les memes charges toute l’année et que je calcule un tarif horaire en conséquent. Je l’ai déjà fait, ça ne sert strictement à rien. Et puis ma foi si j’ai moins d’élèves l’année prochaine cela me donnera l’occasion de faire autre chose je ne vais pas m’inquiéter. C’est tout à fait face à ce genre de situation que l’on comprend comment les choses peuvent changer et s’améliorer même. En faisant confiance y compris à son sentiment d’injustice et d’agacement.|couper{180}
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4.Tu ne jugeras pas
Et charité bien ordonnée commence par soi-même. C'est à dire que ce jugement qui te conduit sans relâche dans les plus basses vibrations de l'énergie, tu apprendras à t'en défaire, à t'en libérer. Tache ardue. Surtout si on considère que l'on est perpétuellement installé sur le banc des accusés. Dans un procès sans appel, avec le pressentiment que les choses finiront mal. Que reste t'il alors pour s'orienter ? La méditation et l'observation furent des clefs. Et aussi cette sensation perpétuelle de ne pas appartenir à ce monde dès mon plus jeune âge. Malheureusement le jugement m'attrapa très tôt, il m'extirpa de l'enfance en me scindant en deux parties distinctes. Probablement pour que je parvienne à comprendre sa raison d'être, ses tenants et aboutissants. C'est à dire la séparation, l'oubli, l'aveuglement. Il faut juste se souvenir. Se souvenir que rien ne surgit par hasard. Que tout est toujours là exactement au bon moment. Ainsi cette volonté soudaine de rejoindre la classe de catéchisme du petit village où j'habitais me tenaillait depuis des semaines lorsque soudain je décidais de m'en ouvrir à ma mère. Mon père ne voulait pas que j'aille au catéchisme, toute idée d'église lui hérissait le poil sans que je ne comprenne pourquoi. Peut-être voulait-il que la responsabilité, le choix ne vienne que de moi-même. Peut-être ne voulait-t 'il pas m'imposer une religion ainsi qu'il est d'usage dans notre campagne. C'est à dire reproduire par habitude, par tradition, et peut-être aussi dans un soucis de conformité. Il avait dit que je pourrai bien choisir la religion qui me plaira le jour où j'aurai suffisamment de jugeotte pour le faire. Ce qui projetait mon désir, ou ma curiosité de la chose religieuse dans une temporalité qui m'obligeait à patienter. Or la patience en tant qu'enfant n'a jamais été mon fort. La patience était ce mot que l'on interposait toujours entre l'envie et la satisfaction de l'envie. La patience créait le temps. Et je trouvais toujours le temps beaucoup trop long en tout. Et bien sur dans cette sensation d'ennui que le temps interminable me procurait pour atteindre n'importe quel but, j'avais recours à cette nouvelle propriété de mon esprit qui était le jugement. Je crois que je me suis mis à juger à peu près tout et n'importe quoi, n'importe qui par pur ennui. Mais à l'époque je ne me rendais pas compte à quel point ce jugement s'insinuait en moi comme un poison et dévastait mon cœur. Le jugement était le petit morceau de glace que je me fourrais tout seul dans l'œil pour ne plus percevoir qu'un monde désenchanté. Et probablement que le but caché de ce mouvement était de rencontrer la reine des Neiges, ce personnage dont j'avais fait connaissance dans ces livres de contes que je ne cessais de dévorer. Je suis passé ainsi en un claquement de doigt de l'unité à la séparation en laissant pénétrer en moi la notion de jugement pour tromper mon ennui, parce que j'ignorais tout des raisons de la patience et du désir. Le monde s'obscurcit aussitôt. Je revois défiler toutes ces scènes dans une grisaille quasi permanente. Même les moments que je considérais jadis comme des pauses, des récréations, des moments où l'on peut reprendre sa respiration après un long moment en apnée, me semble teintés de gris aujourd'hui. C'est à dire que l'aura de beauté, de poésie, dont je me suis servi pour les conserver durant de nombreuses années s'est évanouie. Elle ne semble plus avoir de raison d'être puisqu'elle fut créé en miroir de ce sentiment d'ennui, de désolation qui s'évanouit désormais. Je me dis que ça ne doit pas être facile d'écrire simplement les choses sans jugement. Que probablement ça n'intéressera pas beaucoup de personnes. Si je juge utile de publier ces textes c'est avant tout pour moi, pour réparer un malentendu. Le fait d'appuyer ensuite sur le bouton publier n'est peut-être pas grand chose d'autre qu'un symbole lorsque je considère la naïveté enfantine qui ne m'a jamais quitté tout à fait. Comme je le dis à mes élèves, je ne cherche pas à réaliser un chef d'œuvre littéraire, je me concentre plutôt sur le fait de parvenir à effectuer un bon exercice. Et puis pourquoi avoir encore besoin de justifier les choses comme pour s'excuser de faire quoi que ce soit ? Sans doute parce que cette part de moi qui est à l'œuvre chaque jour et qui écrit ces lignes ne connait pas de frontière, ni de séparation. Elle s'aventure sur tous les plans de l'être et récupère le ton de chacun d'eux, le restitue sans jugement. Sans jugement véritable malgré tout ce que moi je peux en juger. C'est aussi une sorte de foi dans le pouvoir des mots que j'ai depuis toujours. Pas tellement les mots que l'on prononce mais ceux qui restent noirs sur blanc dans les livres. C'est mon aspect maya dont il faudra bien que je parle un jour ou l'autre, et de cette part intime dont progressivement je me souviens grâce à l'écriture, grâce aux mots. La fonction de scribe revient de façon lancinante tout au long de ma vie. Et mon intérêt pour les rébus, les charades, me fait désormais me souvenir avec nostalgie d'une dextérité que j'ai perdue ou que je considère incomplète, que je juge incomplète. Que je juge incomplète comme pour mieux m'interdire de m'en souvenir réellement. L'art de manier les glyphes. De les assembler avec la plus haute élégance dans des dédicaces éblouissantes. Mais je n'ai guère que des flashs, je me revois assis sur ce que je crois être un lit luxueux entouré de serviteurs et d'amis qui tous sont suspendus dans l'attente de ma prochaine combinaison de signes et de sons. Et si le jugement vient interrompre tout à coup le flot de ces images ce n'est certainement pas du au hasard pas plus qu'à la peur au désir ni à l'ennui. C'est seulement pour éviter de pénétrer trop avant dans une digression dont je suis trop souvent coutumier. Lorsque je me souviens de toutes ces années emprisonné dans le jugement je peux aussi bien penser à Merlin l'enchanteur emprisonné par celle qu'il aime la belle Viviane à l'intérieur d'un rocher. Viviane n'est pas à maudire ni plus qu'à révérer. C'est là justement que se loge toute la beauté que je découvre peu à peu à mon histoire. Doucement les voiles frissonnent sur la peau de la nuit nue. Et cependant une image surgit lumineuse. C'est celle où je suis en train de jouer avec la boue dans un jardin, je crée des villes au bord de fleuves et j'imagine la vie de leurs habitants . Lorsque soudain j'aperçois un fil de vierge qui traverse le jour ou la nuit. Un fil de Vierge léger et lumineux Alors j'interromps tout, je ne peux faire autrement que de le suivre et qu'importe où il me mène, qu'importe tout ce que je dois laisser à nouveau derrière moi pour le suivre. A ce moment précis où je me lève et le suis j'ai perdu le jugement comme on le dit aussi des fous. Encre et chocolat les doux plaisirs d'une ancienne vie de scribe.|couper{180}
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Que la lumière soit
Rêve ou réalité ? C'est la nuit, la maison est tranquille. Je viens de descendre à l'atelier pour fumer une cigarette et je contemple le désordre dont je me suis entouré comme d'habitude. Depuis quelques jours ce désordre m'est incompréhensible, il ne me semble plus nécessaire comme avant. Je peux imaginer un espace désormais totalement différent, un lieu où à chaque fois que j'aurais besoin de quelque chose je saurais immédiatement à quel endroit le trouver. J'avoue avoir fait de nombreuses fois l'inventaire des solutions qui pouvaient s'offrir pour créer la clarté. Aucune n'a tenue plus de quelques jours. Aujourd'hui je crois comprendre la raison véritable pour laquelle le désordre revient sans relâche. Il me sert à la fois d'entrave et de protection. Il est cette habitude que j'ai installée faute de mieux, tout simplement parce que je ne sais pas demander d'aide. Parce que depuis toujours je me considère comme l'unique responsable de mon désordre. Et donc par cette même logique je pense être aussi le seul qui puisse être apte à créer l'ordre, à réparer ce que je nomme le laisser-aller, le désordre de ma vie comme de mon atelier. Cette tentation de créer un ordre, je sais déjà à quel point elle sera vouée à l'échec si je ne compte que sur mes seules ressources. Si je continue à vouloir être ce vieux con orgueilleux et soi disant savant dont je ne cesse d'entretenir l'image à mon propre regard. Hier en me rasant durant un bref instant j'ai aperçu mon reflet vaciller à la surface du miroir. J'ai soudain vu un jeune homme en pleine vigueur qui me souriait. une Image loufoque que j'ai immédiatement chassée de mon esprit en me traitant de benêt. J'ai répété ce mantra de la vieillesse , avec plusieurs références aux trains qui déraillent, à des choses qui autrefois étaient sensées tourner rond muées par de pauvres vues d'esprit. Je fume ma cigarette en repensant à cette lassitude qui s'est emparée de moi et qui a répudié les rêves. Je fume ma cigarette en observant méthodiquement chaque ilot du désordre. Je ne fais qu'observer, rien d'autre, je me dis que ce n'est même plus la peine de m'accabler. Les carottes sont cuites, tu te diriges vers la fin accepte le et observe. Voilà ce que je me dis. C'est à ce moment là que je me suis senti soudain totalement différent. D'un seul coup j'ai trouvé le gout de la cigarette absolument immonde et j'ai écrasé celle-ci dans un cendrier plein déjà à ras-bord. J'ai regardé le grand mur blanc face à moi sur lequel j'ai peint un carré de toile 70 x70. J'ai éprouvé une envie de rire soudaine. Et le rire qui m'a soudain secoué a du produire quelque chose. Je n'avais plus aucune douleur nulle part soudainement. Je me suis même senti joyeux tout à coup sans raison. Un jeune homme. —Je suis un jeune homme j'ai dit tout haut. La chatte a dressé une oreille et s'est retournée, elle semblait acquiescer en miaulant. Et puis j'ai eu soudain cette intuition qu'il suffisait peut-être de prononcer tout haut ce que l'on voulait pour créer quoique ce soit. Chose que je me suis toujours interdit de faire étonnement en cette vie. Je me suis bien sur demandé si j'étais en train de devenir complètement maboul. Etais-je en train de rêver tout bonnement, un de ces rêves gris et stupides comme j'en traverse tant en tant que jeune vieillard ? Et tout à coup j'ai entendu cette phrase que j'avais apprise sur les bancs du catéchisme. — Que la lumière soit ! Qui n'est dans le fond qu'une demande effectuée à haute voix par le Verbe lui-même. Une prière à mon humble niveau désormais alors que longtemps j'ai pensé qu'il s'agissait d'un commandement. Ce qui change tout. Ce qui permet de passer d'un cauchemar au rêve et du rêve à la réalité que l'on désire finalement. Que la lumière soit c'est bête quand on y pense, surtout dans cette époque de boutons poussoir où on allume et éteint des pièces et des villes sans y penser. Je me suis dit que j'étais peut-être prêt, enfin, à demander vraiment quelque chose désormais. Et c'est paradoxal d'avoir ce genre de pensée au moment même où je sens que je n'ai plus vraiment besoin de grand chose, à part un peu de clarté et cette envie de voir disparaitre le désordre. Enfin, après avoir relaté cette petite expérience qui m'a bousculé dans toutes mes certitudes, j'ai décidé d'aller me coucher et de m'endormir sur une nouvelle demande. Plusieurs fois j'ai murmuré tout bas : —Qui suis-je ? Avec cette étrange confiance que je remarque m'envahir en prononçant ces mots, une confiance proche de la plus folle des certitudes. Mais cette fois je balaie mon envie de rire. Je me sens tellement paisible. Et voilà exactement comment je me suis endormi comme un petit enfant certain du lendemain. Photographie de mon atelier vu au travers de vitres embuées.|couper{180}
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Abolir le hasard en peinture.
Quand la science moderne évoque le hasard c'est toujours parce qu'elle se trouve face à une impasse qui lui demande de reconsidérer ses hypothèses de départ. On pourrait dire qu'elle botte en touche ainsi, comme les sèches elle se carapate en projetant un nuage d'encre pour tenter de brouiller les pistes à tous les adeptes du bon sens. Quand on accepte que le hasard n'existe pas la vie est beaucoup plus simple. Mieux, tout prend un sens. Encore faut-il ne pas se tromper de sens en confondant son bon vouloir avec la réalité. Réalité dont à priori nous ne savons rien à part pour les plus futés qu'elle existe, qu'elle est présente, qu'elle brille par la présence si je puis dire de sa perpétuelle absence. Car chaque fois que l'on s'accroche un peu trop à une réalité il est de bon ton qu'elle s'évanouisse. Comme pour nous dire justement : "doucement je ne suis pas une fille facile". Et c'est sans doute pour cela que l'on confond souvent les femmes et la réalité. En les sublimant dans un premier temps, puis en les conspuant lorsqu'on se trouve confronté à nos propres déceptions. Le respect est primordial ici . Respecter la réalité c'est aussi respecter l'idée de l'instant présent, d'accepter tout ce qu'il nous présente, y compris le hasard en tant que présent. Aussi abolir le hasard ce n'est pas le répudier dans la catégorie insensée des aléas. En peinture non plus on ne joue pas aux dés. La seule raison qui reste en tant qu'obstacle est simplement le saut à effectuer qui transmute la peur en foi. Je ne donne pas de recette pour effectuer ce saut. Il est propre à chacun d'effectuer le sien selon sa nature, et surtout ses intentions d'origine. A ne pas confondre avec les petits désiderata du quotidien. On ne se sert pas du hasard pour briller, pour paraitre, pour vendre quoique ce soit. Ce n'est pas prévu comme ça. Par contre pour peindre oui, c'est à dire comprendre l'équilibre, l'harmonie, les lignes de force, l'ombre et la lumière, appréhender une unité dissimulée sous les contraires, les opposés en chevauchant la vitesse des paradoxes. Oui vraiment, c'est à cet instant que le hasard est un allié, le meilleur de tous sans aucun doute. Cependant que pour ce faire la conscience doit s'élargir. On doit sortir d'une habitude de voir uniquement ce que l'on veut toujours voir. De ce programme installé comme une routine qui nous porte à toujours voir les mêmes choses tout en ignorant toutes les autres. Comment y parvenir ? Il n'y a pas de technique pour cela, et après de nombreuses années de réflexions semblables à autant de petits chocs qu'une mouche subit en se heurtant à la surface de la vitre pour trouver la sortie, je dirais qu'il faut vivre. D'abord en toute inconscience. Puis une fois que l'on s'en lasse pour telle ou telle raison, s'éloigner de la répétition. S'asseoir et observer. Car rien n'est fait pour rien. Et l'erreur est la brique de toute dextérité à venir une fois qu'on accepte de la considérer pour ce qu'elle est. C'est à dire tout sauf un hasard. Esquisse fusain au hasard 2022|couper{180}
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Le personnage de l’éveillé revient au printemps.
Il faut énormément d'énergie pour maintenir la moindre illusion. C'est cette phrase qui me réveille en pleine nuit. Et bien que je ne comprenne pas pourquoi elle surgit ainsi, je décide de faire confiance. Toujours faire confiance dans l'à propos. Et déjà, par cette confiance dans ce que n'importe qui d'autre que moi nommerait le hasard, j'économise une énergie précieuse en ne m'y opposant pas par le doute. L'énergie est un des leitmotiv de mon existence. Un sujet de réflexion permanent. Une obsession. Certains se demandent combien d'argent coute telle ou telle chose. Moi je m'interroge sur la quantité d'énergie à dépenser pour parvenir à comprendre l'absurdité de mes prétendus besoins ou désirs. Quelle énergie va me couter le fait de dire la vérité ? La mienne surtout. Car, c'est une intuition aussi, dans tout l'univers, l'énergie dont je parle est le bien le plus précieux. Celui pour qui on ment, on assassine, on assujetti des mondes, ici et partout, en tous temps et en tous lieux. c'est à dire maintenant. C'est par le grapin de l'attention sans relâche, cette attention que l'on on exige de chacun de nous, que cette énergie nous est dérobée. Evidemment cet esclavage est tellement présent depuis ce que nous imaginons être des milliers d'années, l'habitude de le considérer comme étant "normal" est tellement bien ancré dans nos cervelles que nous ne nous rendons plus compte de cet esclavage. Mais imagineriez-vous un seul instant que ce vous voyiez dans votre vie de tous les jours, tout ce que vous considérez comme vrai ou faux, que tout cela n'est qu'une gigantesque illusion ? Et que vous participez grâce à l'énergie que vous paraissez donner de vous-mêmes, à maintenir ce mensonge collectif ? Que feriez-vous dans un tel cas ? J'observe la résistance en Ukraine. Comment une si petite armée peut-elle résister à l'envahisseur, lui donner autant de fil à retordre. Couper les ponts est la meilleure stratégie pour empêcher la progression des chars, voilà ce que je désire sélectionner comme information utile du film que l'on me projette, et peu importe les raisons pour lesquelles on me le projette, peu importe les raisons pour lesquelles j'ai choisi d'être spectateur. C'est aussi ce que j'ai fait durant toutes ces années. Je n'ai fait que couper les ponts avec ceux qui désiraient me dérober mon énergie. Soit l'entreprise avec son univers où l'on doit marcher sur la tête. Soit les femmes que j'ai fréquentées, toujours le même genre de femme, comme si on avait deviné mes gouts, à moins que l'on ne m'ait programmé secrètement ces gouts et que l'on m'avait " par hasard" toujours mis en présence de celles-ci. Soit mes désirs et ce fut le plus difficile que de remonter à leur source véritable pour m'apercevoir enfin qu'ils n'étaient comme tout le reste, un placage et rien d'autre. Ce que je pensais être mes désirs n'était rien d'autre qu'une installation de derricks à perte de vue pour exploiter et à mon insu, une grande part de mon énergie. Les mots utilisés pour me faire réagir la plupart du temps pour je ne sais quelle raison n'ont jamais fonctionné. On m'a dit que j'étais paresseux, velléitaire, dispersé, dépourvu de ténacité, impuissant, lâche, ridicule, paranoïaque. On me l'a dit tant de fois que j'ai fini par les intégrer peu à peu ces opinions comme des vérités. Et le résultat fut ce sentiment de honte contre lequel je n'ai eu de cesse de lutter. Mais voyez-vous, même cette réaction à la honte fait partie du programme implémenté. Toute révolte visible ou invisible est déjà prévue et de longue date. Se révolter contre sa propre honte est le dernier pont que j'ai coupé avec l'illusion. Aujourd'hui, je me suis réveillé en pleine nuit ainsi que je le fais désormais depuis des mois et c'est cette phrase qui soudain a surgit. Et je me souviens tout à coup que c'est une réponse à quelque chose que j'ai pour la première fois oser demander. C'est cette question qui parait si inutile si souvent que j'ai osé demander en silence, c'était ma prière. —Qui suis-je ? Le monde que j'ai connu ne sera plus jamais le même. Moi-même je ne serai plus ce que j'ai toujours cru être. C'est comme si une nouvelle présence , un nouveau point de contact avec la réalité de l'univers s'était soudainement établi. Beaucoup plus intense que tout ce que jusque là j'appelais être présent. Car non seulement je découvre cette présence mais je m'aperçois qu'elle a toujours été là, dissimulée au fond de moi, au fond de ma poitrine, dans le tréfond de cet organe physique qu'on nomme le cœur. Tout m'arrive par flots désormais, je peux me souvenir de tout mon saoul, sans rien réenfouir dans l'urgence que nécessite le paraitre. Et ce dont je me souviens si délirant cela soit-il je sens que ce n'est pas une nouvelle illusion. Car la joie est si intense et à la fois si paisible que je dépose à ses pieds tous mes doutes, toutes mes antiques failles, et je recouvre tout ce que j'avais cru perdu à jamais. Toute l'énergie est là à nouveau comme au tout premier jour. Et je pourrais, si je le désirais, effectuer une nouvelle pirouette, attribuer tout cela à l'arrivée du printemps que ça n'y changerait rien. Simon Hantaï Peinture qui représente les plis de tous les plis traversés.|couper{180}