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procès

Comment ne pas comprendre Kafka. Comment ne pas voir que tu en train de réécrire à ton tour le Procès. Et bien sûr que tu te places d'autorité dans le box des accusés. Tu ne cherches pas même a te faire aider d'un avocat. Au contraire, plus il y aura de charges, plus la partie civile se frottera les mains, plus tu seras enfin rassuré sur ton sort. Le mot édifié tu le regardes passer mais tu ne le touches pas. Surtout pas. Après trouver une Marthe Robert, une autre paire de manches, pas bien d'importance pour un manchot.|couper{180}

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Dure et molle

Afghanistan 1986 Ce sont les deux mots qui te viennent quand tu repenses à la mère de ta mère, à ta mère, à toutes les femmes vers lesquelles ton désir t'aura enjoint d'aller. Celles trop dures tu as laissé tomber, celles trop molles tu ne les a pas rater. Il fallait toujours une proportion très précise de dureté et de mollesse pour que ton cœur s'entrouvre d'une façon que tu imaginais alors sincère, authentique, véritable. Ce rapport, équivalent à un nombre d'or personnel t'aura servi à bâtir de jolis temples avant de les voir s'écrouler comme frappés par un destin souvent incomprehensible. Un destin abscons dans lequel tu n'as toujours eut la sensation désagréable de n'être qu'une marionnette, un acteur. Mais cette recherche insensée du rapport exact entre dure et mou, rien que ça pourrait te servir de levier pour soulever une montagne, et voir soudain tous les insectes, les mille- pattes, les cloportes, soudain s'en échapper frappés d'ahurissement soudain, causé par une lumière trop intense, trop forte.|couper{180}

Dure et molle

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ébauche

une ébauche d'un portrait de Kafka, il est en train de déguster une pêche et un verre de lait dans un grand restaurant et il prend son temps. Tout le monde le regarde faire. Qu'ont-ils donc à me dévisager ainsi se demande t'il... d'après une vidéo short vue ce matin de l'ami François Bon. Et qui me turlupine encore.|couper{180}

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monter et descendre

Escher dessin. Un homme qui monte doit descendre à un moment où a un autre. Et ce quelque soit le moyen qu'il choisira d'emprunter. Ascenseur, escalier, ballon de Montgolfier, fusée. La loi de la pesanteur oblige. Il ne convient pas d'en être à chaque fois surpris ou étonné, ni de s'en plaindre, pas plus que de s'en réjouir. Ensuite quand on le sait ce que l'on en fait... Tu l'as toujours su puisque tu as vécu à la campagne. Tu as vu des hommes monter sur des charrettes de foin et d'autres tomber de haut quand ils s'apercevaient qu'ils étaient cocus ou bourrés comme des coings. Des l'enfance tu t'es trouvée confronté à la loi. Tous ces rêves de vol que tu effectuais de nuit alternent encore dans ta mémoire avec les raclées magistrales qui te jetaient à terre. Une longue répétition servant d'apprentissage comme de vérification de tes premières intuitions. Parfois quand tu y penses tu pleures, d'autres fois tu ris. Les souvenirs, comme les émotions subissent aussi la loi de la pesanteur il ne faut pas croire.|couper{180}

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L’échelle

Encore cette question, pourquoi les anges ont-ils besoin d'une échelle. Et puis d'un seul coup tu penses à un vieux transistor, le genre de ceux qui ont presque totalement disparus et où l'on devait manuellement tourner un bouton pour changer de station. L'aspect matériel de ce bouton sans lequel on resterait prisonnier, figé toujours d'une seule station. L'échelle s'approche peu à peu de ce bouton. C'est un clavier. Et les anges sont les sephiroth, qui en tant qu'énergies créatrices ne peuvent rien sans la présence d'une matière, des "touches" et des lettres associées à celles-ci. Ensuite que ces énergies aillent puiser dans une notion de bas et de haut, de lumière ou d'ombre, de joie ou de tristesse peut désorienter. De même que te désoriente le changement de fréquence, de sujet, de tous tes textes écrits dans l'urgence de ces nuits ces petits matins. Cette urgence à passer d'un niveau l'autre d'une échelle personnelle pour écrire, pour laisser libre cours à ces énergies qui, si tu te le faisais pas, te détruiraient, t'anéantiraient probablement. Pourtant tu es resté 17 ans sans écrire une seule ligne, as tu été anéanti pour autant ? non bien sûr. Tu as juste perdu la mémoire de tout ce que tu as pu faire durant ces années. Tu as juste vécu une vie de somnambule. Mais n'était-il pas voulu que tu t'absentes ainsi si longtemps. Il fallait que tu abandonnes quelque chose, et quand tu y penses c'est justement la prétention de n'avoir pas besoin de bouton ni d'échelle ni de clavier pour te manifester. Une prétention que tu auras confondu avec la modestie, la discrétion, le renoncement.|couper{180}

L'échelle

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Fêtes.

Aucun attrait pour la fête. L'expression tant entendue autrefois : sale petit con je vais te faire ta fête explique peut-être cela. Des que la fête se construit autour de moi je suis happé par le vide, une tristesse. Je ne comprends pas l'engouement que les gens éprouvent à faire la fête. Si par hasard je tombe sur une fête, je détale et alors j'éprouve en même temps un immense soulagement et le même poids équivalent de regrets. C'est dans les fêtes que j'ai éprouvé le plus de honte, surtout au petit matin si ma mémoire est bonne, quand je découvrais un visage, un corps étrangers dans mon lit. Le souvenir atterrant de la fête au village, lorsque adolescent je les rejoignais sur ce vieux solex. Parfois à plus de 20 km, à Meaulnes ou encore à Saint-Bonnet. Je n'y allais pas pour m'amuser mais pour aider à porter les lourdes plaques qui constituaient le parquet des auto tamponneuses, payé chichement par les forains. À la fin du boulot j'observais le déroulement de la fête. Le bal, les filles assises tout autour de la piste. les garçons rougeauds et empêchés qui les invitaient à danser. un refus menait directement au bistrot, et au blanc limé. Au bout de quelques verres le courage semblait leur venir, ou la colère. Régulièrement cela se terminait à coups de poings, les flics auraient pu chronométrer leur déplacement pour être là pile poil juste avant que ça ne dégénère totalement. Et dans les yeux des filles cette excitation sauvage que tout ce merdier produisait.|couper{180}

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Lectures

Découverte de deux tomes de récits rendant hommage à Lovecraft. Sur les traces de Lovecraft, anthologie 1 et 2collection fractales/fantastique, dirigée par Christelle Camus, éditions Nestiveqnen Aix en Provence. 2018. 18 auteurs proposent des récits dans l'esprit de l'auteur. Me suis fait happer par le tout premier hier soir une autrice inconnue Kéti Touche, cette histoire de photographe qui vient en résidence dans un obscur manoir ( en angleterre, en écosse, ?) tenu par une femme énigmatique, veuve d'un homme nommé Howard, explorateur de son état. Le récit se déploie dans une tempête, une côte sauvage, au bout d'une inquiétante falaise. On y découvre de vieux carnets évoquant des découvertes effroyables qui auront bien sûr eut raison de la santé mentale d'Howard. Donc bien sûr, de nombreux ingrédients que l'on retrouve chez Lovecraft. Lu une cinquantaine de pages puis j'ai bondi ensuite sur Autoportrait d'Edouard Levé. Une suite de phrases en apparence isolées les unes des autres. Amusant, tragique, burlesque. Intéressant quant à la forme. Pour le fond je suis encore mi-figue mi-raisin. Et puis tout de suite après 20 pages j'ai posé le livre, j'ai éteint la lumière et il semble que j'ai dormi d'un sommeil de plomb. Aucun cauchemar dont je puisse me souvenir ce matin. Ce qui me fait penser à ce que j'aimerais vraiment écrire. Tiraillé entre la forme et le fond encore une fois. Et la je me souviens de ce que dit Garouste quand il se trouve confronté au fait que la peinture est morte après Duchamp. Faire le point sur ce que tu veux vraiment. Être un écrivain contemporain ou raconter de bonnes histoires, voilà le noeud. Étonnant que je ne découvre ces livres sur Lovecraft qu'après avoir effectué l'ébauche ce petit portrait le matin même. huile sur toile petit format janvier 2023|couper{180}

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Du bel objet

A Knossos en Crete des jeunes gens sautent par dessus un immense taureau. Rien à voir avec la corrida actuelle. Même si tu es en mesure d'imaginer à toute fin, pour l'animal, un sort funeste identique. L'aspect joyeux de la mosaïque, cet instantané capturé par un artiste anonyme, évoque la vie, la joie, la danse, l'harmonie, et n'incite pas à penser la mort. Et si tu te souviens de ton étonnement quand tu comprends que la civilisation minoenne, à cette époque, avait déjà compris la nécessité d'expulser hors de son habitat ses miasmes, ses déchets grâce à un ingénieux système d'égouts qui sillonne toute la ville, ces deux éléments suffisent pour t'inventer une nostalgie, celle d'un temps où l'être humain était encore digne de ce nom. Toujours le fantasme d'un paradis perdu. Ce genre de pensée qui n'a pour fonction que celle de vouloir toujours t'aider à t'enfuir du présent, d'une réalité qui ne te convient pas. Et si tu réfléchis encore un peu, que tu te souviennes des tragédies grecques, des récits d'Homére, de toute cette hémoglobine qui ,en filigrane, y coule à grands flots, le doute, quand à l'idée d'un tel paradis, se dissipe aussitôt. La brutalité d'autrefois est bien semblable à celle d'aujourd'hui. Cependant que tu te complais encore, de temps en temps, à imaginer qu'elle ne se manifeste pas de la même façon. Une brutalité innocente, joyeuse, contre une brutalité consciente, d'une tristesse infinie. La fin justifie désormais plus que jamais les moyens. Est-ce que cette finalité est si différente aujourd'hui ? Probablement pas. Le pouvoir sur autrui, la réussite, la célébrité, le profit, l'intérêt, voici les fins pour une majorité et qui se déclinent sous tant de masques, de comédies, désormais grotesques. Et si jadis tu pensais que ces buts ne relevaient que des préoccupations d'une minorité, aujourd'hui tu sais que même un misérable est en droit de s'en illusionner au même titre qu'un magnat de l'industrie pharmaceutique. S'il ne peut régner sur un empire il le fera depuis son angle de rue par tout moyen possible. Les buts à la con se sont emparés de la plupart des cervelles. Et même toi, tu y auras succombé comme tout à chacun. L'art naît ensuite tout au bout de ce constat. Et si enfant tu n'étais pas aussi lucide quant à ce que tu viens d'écrire, ton instinct réagissait immédiatement face au beaux objets dont tu n'avais qu'une envie, celle de les détruire. La plupart du temps quand tu relevais un manque, que la colère t'emportait vers les zones les plus obscures de toi. La destruction des objets, pas n'importe lesquels, surtout ceux qui étaient le fruit de sacrifices, de temps passé à économiser pour se les offrir ou les créer, étaient ta cible prioritaire. A quoi donc pensais-tu lorsque tu t'emparas d'un cutter pour l'enfoncer dans une des toiles réalisée par ta mère et qu'elle avait accrochée à l'un des murs de la chambre ? Que voulais-tu anéantir sinon toute la fausseté que tu imaginais alors comme seule responsable de ton malheur enfantin ? Et que savais-tu de l'intention qui l'avait menée à peindre ces chefs d'œuvre familiaux entre quelques heures de ménages, de repassage, le dépeçage d'un lapin, l'engorgement d'une poule, dont tu conserves encore les souvenirs ensanglantés accrochés à l'un des poiriers du jardin. Et ce que tu considérais comme manque, il te fallait au moins une culpabilité à sa mesure, voire la dépassant pour que tu puisses l'oublier, t'en défaire afin d'être responsable, de te procurer ce vertige - cette illusion de contrôle de maîtrise qu'offre en creux une telle responsabilité. Maintenant tu t'agaces de la même façon à la lecture de certaines phrases assénées par des membres du groupe de l'atelier d'écriture sur la bonne pratique de l'écriture, la relecture, le polissage des textes. Toute cette peine que d'aucuns mettent en avant pour désigner un texte remarquable, bien écrit ou qui tombe bien comme un vêtement. Mais dont le fond est d'une indigence à hurler. Ta colère n'a pas vraiment changée. Elle est toujours aussi intacte. Sauf que tu n'utilises plus de cutter. Tu coupes autrement dans le vif. Tu tournes les talons, tu rejoins le silence.|couper{180}

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baiser ou parler

Souvent, l'élan vers l'autre s'arrête net quand surgit la parole. La sienne la tienne. Autrefois la solution que tu avais trouvée, précaire mais à défaut servant de possible. Baiser plutôt que parler. Rares furent les rires mais il y en eut. Puis des sourires aussi. Mais pas de nostalgie pour autant, ni de remords ni de regrets. Juste le souvenir d'un regard silencieux d'un sourire, celui de l'autre, le tien ?|couper{180}

baiser ou parler

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des actes manqués

tache jaune sur fond bleu, collection privée Tu intègres les actes manqués comme des actes au même niveau de tous les autres. C'est à dire une ruse encore qui provient de ton unité cachée. Parler de l'inconscient est trop facile à ce point donné du parcours. Ainsi hier tu oublies complètement la réunion zoom où doit s'exprimer Laurent Mauvignier. Peut-être que si tu y penses aujourd'hui et que tu en cherches la raison c'est affaire de trop grande proximité. Une inquiétude qui en découle aussitôt que l'on s'imagine cette proximité. Mais ce n'est pas une première fois. Toutes les occasions où se reconstruit l'idée du danger d'une telle proximité tu pourrais les récapituler et les lister. Une énergie est bloquée là. Et il semble qu'une volonté obscure exige qu'elle le reste. Volonté à laquelle tu as pris d'instinct l'habitude d'obéir. Obéissance que tu peux mettre en parallèle avec ton obstination à n'être toujours qu'un débutant en toute chose.|couper{180}

des actes manqués

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lieux dans lesquels je parle ou pas.

train vers Lahore 1986 A l'église quand tu y allais tu ne parlais pas. Tu chantais quand il fallait chanter. Mais en pension à Saint-Stanislas, et bien que tu chantas la plupart du temps assez correctement, tu te mis alors à chanter faux. Tu voulais déranger quelque chose. Et cela tu t'en souviens n'était pas pour te faire remarquer c'était plus profond que ça. Viscéral A la cérémonie funèbre de ta mère, quelques minutes avant l'incinération, on t'a proposé de parler, de dire quelques mots mais il n'y avait que ton épouse ton père et ton frère plus les employés des pompes funèbres. Tu as décidé que c'était grotesque juste à l'instant d'essayer d'ouvrir la bouche quand tu fus monté sur la petite estrade face au microphone. Tu as regardé l'assemblée puis tu as baissé la tête, tu as capitulé vaincu par le ridicule. Une des seules fois dans ta vie où tu n'auras pas osé y plonger tout entier. Sur ta chaîne Youtube tu as beaucoup parlé mais avec le recul tu n'as jamais pris le temps de réécouter ce que tu as dit. Sans doute parce que toute parole est liée à un instant et qu'une fois l'instant passé cette parole devient morte, qu'il n'y a plus de raison valable de s'y intéresser. Comme si cette parole dans le fond n'avait fait que te traverser qu'elle ne t'appartenait pas. Par contre tu aimes écouter les vidéos de François Bon, tu les réécoutes avec plaisir. Et surtout tu y découvres au fur et à mesure des informations que tu n'avais semble t'il pas entendues à la première écoute. Il y a ainsi des émissions que tu écoutes en boucle et d'autres réalisées par d'autres créateurs de contenu dont les bras t'en tombent des les premiers minutes. Est-ce que commenter c'est parler. Peut-être. Tu ne parviens plus à commenter dans certains lieux et dans d'autres oui. L'interruption des commentaires a commencé quand tu as fait une recherche sur ton nom sur ce moteur de recherche. Le nombre de commentaires qui te sont apparus idiots, inutiles t'a aussitôt sauté aux yeux. Rédiger un commentaire t'oblige presque aussitôt à affronter le ridicule puis a le vaincre ou à te laisser à l'a quoi bon. Quand tu te dis ça ne changera pas la face du monde, qui es tu donc pour t'autoriser ainsi à commenter, à apparaître. Le fait que ça puisse encourager l'autre tu t'en dispense désormais car d'une certaine façon c'était aussi une image trouble. cette pensée d'encourager l'autre dans une réflexivité, d'ailleurs les réseaux sociaux fonctionnent sur cette réflexivité la plupart du temps. Le fait qu'elle te gêne jusqu'à l'insupportable est corollé à tes états de fatigue, d'humeur, ou de lucidité. De la chimie. Tu préfères alors te taire devant cette réalité chimique quand tu ne peux faire autrement que de la voir comme un nez au milieu d'une figure. Parler c'est faire signe avant tout. Mais pourquoi faire signe on en revient toujours à la question. Faire signe, designer, dessiner non pour obtenir quelque chose ni pour dire tu as vu je te fais signe, je te signifie quelque chose. La fatigue de tout ça dû au poids de l'âge imagine-tu parfois, mais surtout au sentiment de ta propre insignifiance. Il y a des jours où l'insignifiance est ce refuge préférable à tout autre. Tu es capable de rester silencieux envers certaines personnes durant un laps de temps considérable. Tu n'as pas vu tes parents pendant 10 ans autrefois. Aucune parole échangée en 10 ans avec M. et aussi avec D. Cependant la conversation reprend exactement la où elle s'est arrêtée dans le temps comme si pour toi il n'y avait pas de temps. L'expression être de parole, tenir sa promesse, tu peux la comprendre bien sûr. Mais de quelle parole s'agit-t'il ce cas, la question reste en suspens. Se fier à sa propre parole, d'expérience te semble toujours suspect, tout comme se fier à n'importe quelle parole. La parole c'est du vent la plupart du temps et donc c'est l'esprit. Qui serait assez cinglé pour confondre l'esprit et soi-même. L'indomptable esprit comme disent les bouddhistes. Non il faut s'asseoir l'observer agir, parler, ne pas vouloir l'enfermer dans une clôture c'est ainsi que l'on s'en libere au mieux. Ce qui reste ensuite on l'ignore. Un silence éloquent.|couper{180}

lieux dans lesquels je parle ou pas.

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se déplacer d’un point à un autre

Sortir de la quadrature du cercle 2019 collection privée. Ainsi pour que l'illusion soit complète, qu'elle se referme sur elle-même comme un cercle, il serait nécessaire de désigner deux points distincts mentalement , disons A et B, deux point choisis parmis une infinité. Tu le fais chaque jour, plusieurs fois par jour, la plupart du temps en prenant un crayon. Tu traces une ligne pour dessiner mais depuis quel point de départ, quelle origine. Tu peux dire n'importe quel point de départ fera bien l'affaire. Mais c'est botter en touche. Ce n'est pas cette origine là qui importe mais celle qui t'a conduit au travers de milliers et de milliers de possibles à cet instant présent à t'asseoir, à prendre ce crayon et à tracer cette ligne. Que matérialise pour toi véritablement une telle ligne qui s'élance d'un point à un autre, qui avec toi se déplace dans l'espace et le temps sur le lieu de la feuille. Et si tu te mettais à y songer vraiment, si tu imaginais que cette ligne contient tout ce que tu as vécu depuis ta propre origine jusqu'à présent est-ce que ça changerait quelque chose à l'action de dessiner ? probable voire certain que c'est justement à ce genre de connerie qu'il ne faut pas penser pour dessiner. Donc quand tu te déplaces tu sais peut-être d'où tu pars mais la plupart du temps tu te fiches de l'arrivée. Ou tu ne veux pas y penser pour pouvoir ainsi continuer à dessiner. Tu te déplaces sur la feuille de papier comme dans ta vie. Tu sais qu'il n'y a en fin de compte qu'une seule arrivée réelle et qu'il ne sert à rien de t'y intéresser de trop près de peur d'être tétanisé par la peur ou par l'espoir- la joie ? La confiance ? et au final de te retrouver dans une impossibilité de faire quoique ce soit. D'une certaine façon tu pourrais te ranger dans le mouvement de l'art pauvre, celui qui s'intéresse plus spécifiquement à l'origine des matériaux, à une origine tout court pour lutter contre l'obsession des buts qui ne sont que des ersatz. Sauf que toi tu veux peindre des tableaux, tu es anachronique et tu te bouches les oreilles quand on te parle de Marcel Duchamp Il faut aussi se foutre de Marcel Duchamp comme de Dieu.|couper{180}

se déplacer d'un point à un autre