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Silence de la poésie
Huile sur toile 40x40cm 2021 pblanchon J’aurais voulu te dire tout ce que tes poèmes déclenchent au plus profond. A condition que ce que je puisse en dire ne soit pas vain. Et ce ne sera pas la vanité qui me barrera encore cette fois le chemin, mais la beauté de ce silence qu’on ne saurait déranger, de peur qu’il s’évanouisse, pour replonger dans la stupeur d’une hébétude à caresser en égoïste. Le silence qui suit la poésie, l’emprunter pour revenir à ses sources, et puis pas plus aujourd’hui.|couper{180}
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Laisser tomber
Paysage bourbonnais. Deux infinitifs accolés. Laisser tomber. Que l’on puisse renoncer si facilement, presque comme un réflexe, sitôt que la moindre difficulté surgisse, non par peur, non comme victime potentielle, mais tout simplement à raison de cette fatigue inouïe désormais liée à toute forme de volonté de lutter. Fatigue qui naît comme préambule à la solution pour se tenir loin de l’entrave, de l’empêchement. Afin de n’être pas encore plus mélangé dans une confusion d’émotion sans grand intérêt. Laisse tomber, disait-il avant d’enfiler sa veste dans un geste mécanique, de sortir de la maison, le dos un peu plus voûté que d’ordinaire. La maison, une ancienne ferme, ce bien modeste qu’ils avaient acquis dans l’Allier, entre Vallon-en-Sully et Chazemais. À peine un hameau d’une dizaine d’âmes tout autour. Et, que l'enfant, par des voies mystérieuses en ait obtenu, par la puissance des répétitions, une sorte de savoir ésotérique sur la vie et le monde. Et, aussi, surtout, d’en avoir saisi intuitivement la valeur. Une variété de panacée servant à se guérir de la réalité empoisonnée. Un moyen si dérisoire selon tous de faire face à la lente corrosion produite par l’indifférence des autres tout autour. Et, qu'il prît ce modele plutôt qu’un autre. Celui du pauvre type qui paraît lâchement fuir, renoncer devant les obstacles. Laisser tomber. Alors qu’un autre enfant, une génération plus tôt, tout au contraire se sera, lui, évertué à ne jamais suivre ce modèle paternel, à le refuser en bloc sans jamais essayer d’en comprendre les raisons. Et, que cette vision du monde et de soi face au monde se répercute dans le temps en causant tant de malentendus, tant de dégâts. On pourrait y voir, avec un peu d’attention, comme un programme. Une suite d’instructions simultanément logique et terrible menant toujours à la même finalité. Quelque chose de l’ordre de l’implacable, une fatalité, un destin. Et l’ennui qui en ressort comme un vainqueur maculé par toute la boue, le sang, les humeurs des violents combats. L’ennui comme une chape de terre, une colline ronde comme on en trouve par ici alentour, des sépulcres doux et silencieux, ici, dans notre bucolique bourbonnais. L’ennui comme une pierre tombale que l'on y repère au milieu des chants d’oiseaux, des gros nuages prêts à crever, du bruissement des feuilles de marronniers. Si comme par protection, on plissait les yeux pour gommer les détails. Laisser tomber les détails pour mieux voir, se concentrer sur l’essentiel qu’est cet ennui mortel. Et puis encore cette odeur entêtante de terre mouillée de pluie qui nous colle au nez pour toujours. Hier encore, tout est revenu d’un coup, à partir de cette fragrance que l'on croyait avoir oubliée. L’ennui qui ressurgit soudain dans le vaste espace d’un gymnase, du plus profond du brouhaha causé par les annonces au micro, la musique de fanfare et les multiples applaudissements. Et, cette surdité dans laquelle l’enfant se réfugiait, l’excuse rapidement donnée afin d’expliquer que l'on ne peut rien entendre. Accompagné du geste bizarre de saisir son oreille pour placer le pavillon à 45°. Bizarre ou ridicule. Mais, peu importe le ridicule. Comme un refuge aussi. Être cet idiot du village qui ne comprend rien à rien qui vit dans sa bulle de ridicule et que l'on finit par laisser tranquille, laisser tomber. Indécrottable. Ils ont trouvé une astuce pour ne pas payer la somme d’ordinaire allouée chaque fin de mois. Ce salaire. Un salaire de prof, non, pardon, d’animateur. Déjà pour eux tellement congru. 240 euros net. À l’époque de l’embauche, ils avaient fait des pieds et des mains. C’est bien au-dessus des autres, vous savez. On va vous donner une prime de transport pour que ça ne se sache pas, que ça se voit trop que l'on vous paie si cher. Ainsi, ensuite, selon la convention de l’animation, vous serez payé toute l’année. Cependant, voilà les mois d’été, ces deux mois payés pour rien puisque vous n'accordez pas cours, on retire évidemment la fameuse prime. 80 euros de moins tel quel sans rien dire, tout dans l’implicite. Sitôt qu’il a vu ça sur son appli de la BNP, il l’a compris bien sûr. Qu’ils l'avaient couillonné bien comme il faut. Avec le sourire. Bonjour Patrick, alors ces vacances, c'était bien ? Il a bien senti la colère, elle avait même quelque chose de salutaire. Ainsi, il leur aurait bien balancé tout un tas de choses comme sa démission, tel quel d’un coup en plein forum. Micro, fanfare, pluie d’applaudissement. Mais non, au lieu de ça, il a continué à prendre les inscriptions, à jouer son rôle d’animateur, et sa colère a glissé tout doucement dans l’ennui. Il n’y a que ça autour de quoi tourner en rond finalement, il n’a qu’à bien s’appliquer à faire comme tout le monde, se glisser dans l’ennui. Tout autour, il les voit s’activer dans une comédie de bonne humeur, toute cette jovialité forcée à laquelle personne ne semble plus faire attention. Face à laquelle on ne doit surtout pas faire attention. S’y arrêter un quart de seconde, un clignement d’œil pourrait vaporiser l’univers. Leur univers factice constitué de bric et de broc, des bribes de clichés avalés tout rond depuis de si longues années sans ciller. Il écrira un mail poli pour leur montrer plus tard qu’il doit y avoir un oubli, une bévue, cela arrive, il comprend. Pour cet après-midi, il n’y a pas mieux à faire que de laisser tomber.|couper{180}
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Nier l’écriture
Avec la rentrée le retour des ateliers d'écriture, et la première proposition de nier l'écriture, comme nier aussi, si j'ai bien compris l'énoncé, la notion de récit, à partir d'une image photographique notamment. C'est à dire ne pas la décrire, ne pas livrer ses émotions, ne pas se donner comme auteur d'un texte à partir de cette image, se mettant en avant. Mais, plutôt s'attacher à la partie mise en place, la cuisine, les ingrédients : Et créer ainsi comme une sorte d'inventaire des raisons comme des outils utilisés à cette fin. C'est un peu plus compréhensible désormais qu'avant. Encore qu'il me reste quelques relents d'opposition, de révolte, mais que je suppose plus automatiques qu'autre chose. Les dernières défenses, les dernières barrières, peut-être pas. A cette occasion je ne peux que constater ce désir d'arriver toujours à un préambule de fin, une espérance d'en finir avec quelque chose. L'utilisation fréquente du mot dernières. Ce que je comprends c'est qu'on ne peut plus écrire comme Balzac depuis Proust, que l'écriture et l'auteur peuvent se comprendre différemment, que l'écrit fabrique l'auteur plutôt que le contraire. La peur qu'il ne reste presque plus rien de tout ce fantasme d'écriture est un risque à prendre. C'est sans doute même à partir de ce risque que les choses peuvent devenir sérieuses, ou intéressantes. Comment s'y prendre, c'est la question, le reflexe de la question qui revient. Peut-être qu'il ne faut pas s'y prendre justement. Qu'il faille laisser aller les mots en premier lieu leur petit bonhomme de chemin. Puis relire, réécrire à partir de ce chemin, ajouter les idées, les mots, les images qui en naissent de façon transversale, comme on documenterait l'événement d'un premier texte. J'y suis d'autant plus favorable après tout ce parcours de non peinture effectué parallèlement. Et aussi après avoir revisité le travail de Gerhart Richter, suite à la vision du film "l'œuvre sans auteur" que j'ai pu récupérer sur la chaine Arte replay. Le fait d'utiliser des photographies banales et de les peindre telles quelles en les floutant légèrement à la fin. Extirper de cette apparente banalité un tableau qu'on exhibe à la vue du monde, n'est-ce pas ce que je tentais déjà de réaliser dans les années 80 en photographie directement. Prendre des images de la réalité quotidienne, mal cadrées ou plutôt sans décider d'un cadre en amont, en me laissant totalement guider par mon instinct par la rapidité et aussi la sauvagerie de la prise de vue liée à la chose vue. Je ne savais même pas que Richter existait à cette époque . Mais ce devait être des idées du temps. Comme aujourd'hui nier l'écriture doit en être une autre. Se rebeller contre les idées du temps ne sert à rien s'y on ne les comprend pas dans leur profondeur, et tous les liens que cette apparente spontanéité tisse avec l'histoire en général. Un révolte superficielle dans ce cas, caractérielle si j'ose dire, enfantine. Je rapproche cette réflexion de mon regain d'intérêt pour la perspective en dessin. Je reprends les bases et je les étudie d'un autre œil, plus apaisé. On rejette tellement de choses pour se construire finalement, en opposition à des pères qui, si on les regarde d'un peu plus près, ne sont rien d'autre que les maillons d'une chaine à laquelle on ne peut pas faire autrement que d'appartenir. J'imagine que c'est cette inconscience proche de l'ignorance qu'il est utile de pister et qui, souvent, se dissimule derrière des mots valises comme par exemple peinture intuitive, peinture spontanée, peinture abstraite. Dans ce cas on peut bien nier tout autant l'écriture que la peinture, la poésie, la broderie, effectivement, on le doit même, surtout si tout cet emballage qui ne sert qu'à tromper l'autre, pour se mettre en valeur, pour se distinguer, mais qui nous égare finalement car nous nous trompons au même titre ainsi. Socrate n'aimait pas l'écriture. D'une certaine façon il la niait lui attribuant divers maux : il ne voyait dans les mots qu'une matière inerte sans nuance ni profondeur et qui risquait de faire disparaitre la mémoire, un outil essentiel à son époque pour s'approprier la connaissance. Il disait également que les textes ainsi écrits risquaient de se retrouver hors de contrôle de leurs auteurs, susceptibles ainsi d'être interprétés de façon erronée soit par ignorance, soit par malveillance. Le risque que les mots soient utilisés pour ne rien dire, que cette idée remonte du fond des âges pour rejoindre notre modernité dans un atelier d'écriture pose encore une fois le problème du réel, de la définition de ce réel, que ce soit par l'écriture ou par la peinture me concernant plus intimement. De quelle réalité est-il question ? De la réalité subjective d'un auteur, certainement, c'est ce qui caractérise l'artiste en général de nous montrer sa réalité à lui et à nous de confronter tout autant la notre à celle-ci. Mais en même temps ne pas perdre de vue l'émotion qui nous unit tous en un même temps et lieu. C'est peut-être cette peur finalement, celle de perdre l'émotion telle que je comprends ce mot- surement assez mal d'ailleurs-qui m'entraine à résister contre toute velléité mécanique, contre une habileté technique qui outrepasserait ses limites. Maintenant l'étude de la perspective par exemple est une voie pour faire la part des choses entre une habileté fantasmée et une habileté fruit d'un travail. Dans l'écriture aussi il y a autant de travail à effectuer que pour dessiner, c'est souvent un vertige que d'y penser seulement et la meilleure façon de se débarrasser de ce fantasme c'est d'attraper justement la réalité, ou notre incompétence à bras le corps. C'est nier aussi là quelque chose de néfaste d'hostile tout entier enfermé dans l'imaginaire et qui n'est pas heureux de l'être assurément. image mise en avant : Gerhart Richter Peinture, S.mit Kind|couper{180}
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Deux jardins
Photographie Hiroshi Sugimoto L’idée qui s’imprime au réveil, c'est la notion du jardin, chacun le sien, mais mitoyens. Un rêve donc, dans lequel subsiste une connivence, alors qu’aucune parole ne sera vraiment échangée. Une séparation que l’on devine davantage que l'on ne la constate, aucun mur, pas de haie, ni grillage. Une sorte d’arrangement en quinconce. Elle vit sa vie, moi la mienne, deux quotidiens parallèles ; et bien que je ne voie jamais son visage, seulement sa silhouette, et encore, pas dans son entièreté, je sais qu’il s’agit d’elle. Même flou quant à qui je suis réellement dans ce rêve. Il me semble être soudain doué pour une pharmacopée étonnante qui met en jeu les plantes, les décoctions, les tisanes, et qui apaiserait beaucoup et, de plus, avec grand plaisir, ceux qui viennent de fort de loin pour les goûter. Et, pourtant, il me parait soudain être ici, dans ce rêve plus moi-même que jamais.Et en même temps, au réveil, un inconnu. Une silhouette fugace qui s’évanouit sitôt que je veux tenter de la stabiliser dans mon esprit. Ce qui est encore plus étrange, c'est que ne pouvant me rendormir, je me retrouve soudain devant les photographies d'Hiroshi Sugimoto. Ces photographies en noir et blanc prises à la chambre un peu partout sur la planète, mais toujours avec cette même composition. Compositions dans lesquelles on ne voit où ne devine qu’une ligne d’horizon séparant ou marquant la différence à peine entre ciel et eau. Ce qui m’incite à jeter ces quelques notes, c’est la paix éprouvée dans ces deux visions, celle du rêve et celle issue de ces photographies. Comme un dénouement. Comme si je tenais cette fois le dernier mot d’une longue histoire. Comme si ce dernier mot avait rejoint par je ne sais quelle alchimie le pouvoir évocateur rencontré ordinairement avec un premier mot, comme je le pratique désormais mécaniquement. Le fait aussi que cette évocation se produise suite à un rêve, depuis une confusion le nimbant à partir des valeurs de gris des images photographiques, et non plus d’une phrase, d’un mot que je rumine le matin. S’agit-il pour autant d’une réconciliation, non, car les retrouvailles sont devenues impossibles. Et, cette impossibilité justement est compréhensible comme étant la condition, la clef de voûte de cette réconciliation. Comme si tout le réel vécu avait été vaporisé, s’était dissout, et qu’il ne reste plus aujourd’hui comme symbole de toute notre histoire que ces deux jardins mitoyens. Chacun y vaque à ses occupations quotidiennes, continue une sorte d’existence dont la porosité n’échappe pas à l’autre. Comme si l'on savait tout et qu’il ne soit plus important de le savoir par le détail, par le relevé d’indices, de préoccupations, mais plutôt comme provenant de la nature de l’être de chacun. Et, que l’on connaisse si intimement cette nature que l'on en éprouve à sa proximité une sérénité rare.|couper{180}
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Conserver l’énergie
La notion de satiété est difficile à comprendre pour qui a toujours eu l’impression de manquer de tout. Encore une fois une transmission familiale s’effectue. C'est un ensemble de codes que l’on absorbe jeune sans y penser. La nourriture représente pour les classes les plus modestes un objet souvent primordial, une priorité. Et, cela ne change pas quand une famille évolue de la pauvreté vers un peu plus de confort. Du moins c’est cette réflexion qui me vient à partir des repas de famille auxquels j’aurais participé dans mon enfance. Du côté paternel notamment. En m’appuyant sur les recherches généalogiques effectuées par ma mère, une longue tradition de journaliers s’offrant à travailler dans les fermes, ne disposant pas de logis fixe. Ce que représentait la nourriture alors devait être avec le sommeil une valeur fondamentale, hormis bien sûr le travail. Tous les désirs se rassemblaient autour de l’écuelle, du trou dans la table, de l’assiette. Enfin, lorsque les conditions furent plus favorables, je ne peux le constater qu’avec mon souvenir de mes grand-parents, l’obsession de la nourriture comme réceptacle qui demeure. Et, aussi plus tard, dans notre propre cellule familiale. Avec le désir plus ou moins confus de rivaliser avec les tables des plus fortunés. Les entrées copieuses, les deux plats de résistance, un de viande, l’autre de poisson, la salade verte pour faire passer, le plateau de fromage et l’entremet sucré, sans oublier la corbeille de fruits. Autant de symboles indispensables alors permettant d’imaginer que l’on s’est élevé, que peut-être la vision d’une abondance alimentaire libère enfin de nombre de frustrations, certainement inconscientes la plupart du temps. Du côté maternel en revanche, ce sont d’autres codes fondés sur la frugalité. Il eut été vulgaire de s’empiffrer. Le désir devait être tempéré afin qu’il y en ait encore pour les autres jours. Que l’on ne s’assoupisse pas dans un contentement qui eut étouffé la flamme vacillante de ce désir. Que de disputes à propos du budget… D’un côté, le père, la nourriture, l’opulence affichée, de l’autre, la mère économisant sans relâche afin de pouvoir acheter du tissu pour nous confectionner des habits, remplacer un rideau, enjoliver notre intérieur d’un bouquet de fleurs. L’idée que l’environnement nourrisse l’âme et le cœur tout autant que les denrées éphémères et périssables englouties en un rien de temps. Là aussi inconsciemment, l’enfant se doit d’effectuer un choix. Sera-t-il ce glouton insatiable, autrement dit un bon vivant, ou au contraire un bec délicat, un de ces convives appliqués qui n’avale pas tout et tout rond, sans prendre le temps de savourer ? Dès le début, le paradoxe est présent. Et je me souviens d’avoir été longtemps rétif contre la nourriture dans son ensemble. Que de crises pour avaler la moindre bouchée la moindre cuillerée ! J’imagine une sorte de recours ainsi trouvé pour ne pas avoir à effectuer justement… Tout refuser en bloc. Et, donc me mettre à dos les deux parties. Mais, agissant ainsi, me délectant secrètement sans doute de constater cette association soudaine de ces deux parties si opposées, une communion de la violence qu’à l’époque on nommait amour. Et, déjà, le fait de m’extraire de l’obligation d’épouser un parti, d’effectuer un choix, me donnait l’impression d’économiser quelque chose de très précieux. Une énergie pour jouer, rêver, imaginer que je craignais de dilapider justement dans toutes ces guerres autour de la satiété, de la frugalité organisées autour de la nourriture.|couper{180}
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Ressources
Photo de famille années 1960. Longtemps le manque de ressources oriente le désir d’en chercher à l’extérieur. Mais, ce qu’il faut donner en échange, pour obtenir souvent peu, est décevant au regard des espérances que l’on place dans cette quête. Pour certaines personnes, c'est ainsi. L’insatisfaction l’emportera toujours. Et, fréquemment, on se retourne vers le besoin, le questionnant, tentant de se raisonner, dans l’espoir de se tenir prêt au bout du compte à y renoncer. Ce sont des mécanismes appris dans l’enfance la plupart du temps. Cependant, ce à quoi l'on renonce par raison laisse un goût amer. La tristesse, la résignation, parfois mènent au ressentiment quand ce n’est pas à la rage, à la colère. Quel que soit le raisonnement que l'on peut entretenir avec ces états qui nous traversent, on s'aperçoit qu’il est habituellement vain. L’émotion négative l’emporte contre les meilleures raisons chez certaines personnes dont je dois avouer, faire partie. Des individus non préparés par leur milieu, leur éducation, leur héritage génétique. Comme un rat de laboratoire, on cherche alors une issue au labyrinthe. On invente des solutions possibles. Comme par exemple créer une émotion susceptible de contrecarrer celle, quasi automatique, du ressentiment. Il est difficile d’aller contre un réflexe. De modifier une habitude. On sent bien au fond qu’il ne s’agit que d’un placebo, la tentative dérisoire d’élaboration d’un plan B. On imagine un plan B à l’abandon d’un absolu. Parce que c’est toujours une idée d’absolu qui nous installe dans un tel état. Les choses n’étant jamais ce que l'on croit qu’elles sont dans une telle confusion. Dérisoire n’est pas assez fort pour qualifier le subterfuge. D’autant que quelle que soit cette émotion fabriquée, la raison y trouvera toujours quelque chose à y redire. Le guingois ne peut pas lui échapper. La lucidité, cette appétence géométrique, éveillera l’attention. Dans un tel cas de figure, cet élan vers le pire, on est souvent bien plus doué que vers le meilleur. Ainsi, on se focalisera sur le travers afin de détecter toutes les ficelles de la supercherie. Et, une fois calmé étrangement par l’évidence de cette escroquerie découverte, c’est un nouveau pan du rêve qui s’écroulera. Ce vide ajouté à la somme du manque se paiera de tristesse, de résignation encore plus solide. Solide comme un rocher auquel le naufrage nous contraint à nous accrocher. Solide, comme l’ensemble des fondations que l'on ignorait précisément jusque-là. La solution de créer alors ses propres ressources soi-même est séduisante. Mais, la créativité ne vaut que si l'on ne réfléchit pas pendant que l'on crée. Ensuite le jugement s’abat sur le résultat, le pèse, le jauge, le met en cause, on peut parler de réaction ou de réflexe. De défense ou de protection. Et, encore, du sentiment de malaise procuré par la sensation d’avoir franchi des limites infranchissables, pour les mêmes causes évoquées : le milieu, l’éducation, l’héritage. C’est que l'on souhaiterait s’élever et simultanément ne pas abandonner quelque chose de tout ce qui nous fonde. S’élever ou s’en évader, le fuir, oblige à buter contre quelque chose régulièrement, souvent inconsciemment. C’est encore par la vigilance, une attention soutenue à cette entrave, que l’on sentira de plus en plus l’existence de ces limites imposées tacitement. Elles sont réelles aussi longtemps que le sera la confusion à cet instant où on les franchit. On croit aujourd’hui vivre dans un monde différent de celui de nos parents, nos grands-parents, un monde moderne, un monde nouveau. Après la traversée frénétique de tous les termes en isme. Socialisme, communisme, capitalisme, anarchisme, maoïsme, christianisme, islamisme, bouddhisme... (la liste est longue, vous pouvez la compléter vous-mêmes pour passer le temps si ça vous chante). Après tous ces ismes donc, voici l’océan faussement pacifique qui tombe encore le masque. La guerre. La crise. La survie. Les cartes sont rebattues une fois de plus devant nos yeux las. Les guignols refont leur apparition. Politicards, folliculaires, experts, pour nous vendre de nouveau la même lessive qui lavera plus blanc, la même soupe à la grimace. Et, nous restons là à les regarder comme s’il s’agissait d’un mythe qui n’aurait de sens que de nous réunir dans une éternelle fatalité. La fatalité qu’éprouve le faible devant le fort. Surtout désormais sachant combien révolte, révolution, ces mots, ont perdu de leur prestige, de leur panache, et toute l’espérance qui les avait conçus. La solution collective se dirige dorénavant vers l’ordre, une obéissance à un sens commun, une pensée unique, une déshumanisation qui consiste à gommer les opinions personnelles, les différences, sources de confusion et de trouble. Une colonie gigantesque d’insectes. Avec un groupe dominant constitué de clones du Père Ubu. Comme si l’humain devait traverser tout le grotesque, l’obscène, encore une fois, y perdant toute son humanité, jugée inutile pour ceux qui se targuent de dominer le monde. Que peut-on faire à une échelle individuelle pour lutter contre cette abjection ? Se tenir calmement au beau milieu du chaos. Cette réflexion d’origine taoïste m’avait grandement séduit autrefois. S’abandonner au mouvement général du monde sans s’y opposer de quelques façons que ce soit fut durant un temps une libération. Avant que je finisse par la considérer comme le summum de l’esprit petit bourgeois. Comme la sublimation d’un égoïsme prôné par toute une époque- étrangement dans les années 1980- alors que nous venions enfin d’élire un socialiste aux affaires. Taoïsme, cynisme, toute une philosophie se sera développée dans ma cervelle embrumée de 1980 à 2000. Soit 20 ans ! Et, ce qui est drôle, c'est que je pensais dur comme fer que toutes les pensées, les idées étaient miennes. Même si, en vérité, elles n’étaient qu’une ligne éditoriale conçue par de tièdes intellectuels parisiens. Les mêmes qui, aujourd’hui, proposent de penser que la dictature est la solution la plus propice à apporter le calme, le bonheur à huit milliards d’êtres humains. Ce qui finalement me renvoie à des réflexions paternelles peu amènes contre les intellectuels en général. Et, donc, assez peu bienveillantes sur moi-même qui, que je le veuille ou pas, suis un intellectuel à ma façon. Ce qui finalement crée une boucle, rejoint mon propos de départ sur la notion de ressource. Venant d’un milieu dans lequel toute notion de bavardage s’associe à la culture, à l’art, à l’intellect et découvrant la gêne qui en avait été à la source, j’ai voulu comprendre cette gêne par mes propres moyens. Comprendre le bavardage dans son ensemble. Me l’expliquer par ailleurs pour mieux m’expliquer le milieu dont je suis issu, le combattre pour commencer pour me construire, puis une fois seul, y revenir doucement afin de nuancer les choses, apaiser le ressentiment. Peut-être aussi faire quelque chose d’autre que de la systématique provenant d’un tel ressentiment. Je vais bientôt avoir 63 ans, en janvier. Ainsi, je m'aperçois que rien n’est vraiment réglé encore quant à ce ressentiment hérité. Non seulement je ne me suis pas sauvé, mais pire, je n’ai sauvé personne. L’idée de défaite ne me lâche pas. Hier encore, je lisais les 113 pages du récit d'Annie Ernaux, “La place” qui évoque la vie de son père. Soudain, j'ai refermé le livre puis l’ai rouvert afin de trouver cette phrase mise en exergue, une phrase de Jean Genet : “je hasarde une explication : écrire, c’est le dernier recours quand on a trahi.”|couper{180}
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Changer
https://youtu.be/rko9vgHUUl4 Dans une ballade de Stéphan Eicher, probablement écrite par Philippe Djian, il y a cette phrase : on ne change pas sa vie, on continue seulement Cela semble assez juste. Tout simplement parce que l'on ne peut devenir autre que ce que l’on est depuis toujours. Sauf à débroussailler la confusion, le chaos provoqués par la friction permanente de l’immuable avec l’éphémère, le mouvant. Et, ainsi, comprendre progressivement que l’on n’y voyait pas bien clair, que l’on avançait à tâtons, en aveugle. Qu’enfin cette vision peut s’affiner. À condition qu’on l’accepte. Ou que les circonstances, malgré parfois l’apparence pénible que celles-ci revêtent, nous y entraînerons. Se figer dans le désir de changer n’est pas rare. Se figer dans une lubie, une obsession, un fantasme, est certainement une expérience que l’on vit pour épuiser cette volonté de changement. Le pire serait alors de ne pas la poursuivre jusqu’à son but réel, qui est tout simplement d’en découvrir l’ineptie. Cette ineptie dont beaucoup abusent, profitent, en martelant leur réclame incessante. Toutefois, c’est bien leur rôle, d’entraîner ainsi les dubitatifs, les indécis, les tièdes ou les désespérés tout entiers tournés vers une fausse idée de providence. Comprendre que cette providence peut aussi se manifester en usant du mensonge, du désagréable, de l’odieux, de l’abject tant que ce que l’on voudra en tirer n’est qu’une vanité, une mode, une velléité. Ce trajet prend potentiellement du temps, de l’énergie, de l’argent, autant de ressources que l'on peut imaginer ou pas, infinies, illimitées. Cela mène à l’épuisement, comme l’exploitation inconsidérée des sols. Puis, de cet épuisement, un renoncement naît souvent simultanément. On renonce essentiellement à l'extérieur. Le désir tourne à vide sur lui-même. Comme au Carmel, les nonnes doivent traverser tout l’ennui du monde et même renoncer à toutes les idées saugrenues de grâce qu’elles aient jamais pu imaginer ou fantasmer. Par la suite, le fruit est mûr, se détache, tombe à terre et sa gangue éclate. Alors, on voit le noyau, l’éternité d’un simple noyau.|couper{180}
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L’or
Que ce que chacun creuse plus ou moins patiemment en son trou ne dispose que de l’humble dimension des timbres-poste. Le monde entier ne s’en ressentit-il pas ? Et, ce, tout autant dans son avenir que dans son passé, si soudain, on saisit, foudroyé par ce saisissement, la valeur du présent… Et, que toute cette violence soit ainsi canalisée, exploitée, partagée. Et, ce à des fins purement créatives. N’y découvre-t-on pas alors une énergie inépuisable. C’est par quoi l'on est surpris, après avoir ouvert et parcouru certains livres. C’est ce dont on peut se souvenir de, après avoir arpenté, tant et tant, les allées des bibliothèques. C’est ce qui nous inspire encore, lorsqu'on ose pousser la porte d’une galerie, d’un musée. N'est-ce pas également ce sur quoi l'on mise, intuitivement ou pas, en choisissant une œuvre de Mozart, de Satie, de Schubert ou de Nirvâna, pour se donner un peu d’allant au matin ? N’est-ce pas incroyable quand on y pense vraiment ? Que l’immensité puisse être contenue tout entière dans un objet à portée de main ? Et, qu'importe, que ce soit un roman, un essai, un recueil de poèmes, ou bien encore un disque de vinyle, un Cd, un DVD, un diaporama, une visite réelle contenue dans un temps et un lieu déterminés. Que ce soit un théâtre de rue, un cabaret, un Palais-Royal, quelle importance. Et, quand bien même faudrait-il faire cet effort de se déplacer... qu'est-ce que la taille du plus grand musée, de la plus grande salle de concert, du plus monstrueux cinéma, au regard des dimensions vertigineuses de l’infini qu’ils recèlent. J’écris ces mots sans y penser de trop, de peur qu’ils ne s’enfuient bientôt, rapidement, avec l’accélération due à la rentrée. Encore quelques heures, quelques jours de répit. Puis, il sera requis de replonger dans le fil des jours, le quotidien. Dans l’oubli obligé qu’impose la contingence. Je freine toujours des deux pieds d’imagination. Cette imagination qui s’obstine souvent vers la peur, le pire, l'avenir, tous les extrêmes y compris l’ultime. Ensuite, je fais comme tout le monde. Les factures sont des maîtresses nageuses, mains sur les hanches, et qui attendent, autour de la piscine trop bleue, que je plonge. Le quotidien possède des vertus chirurgicales, tellement apte à lobotomiser les plus récalcitrants dont, bien sûr, je m’obstine encore à m’enorgueillir de vouloir faire partie. C’est une erreur d’appréciation de séparer ce qui pourrait ainsi être et ce qui est. La marque d’une ignorance due à cette tendance d’imaginer que d'abord, il y aurait la culture, et après la friche, la jachère. Il faudrait toujours se souvenir que cultiver des pommes de terre et se cultiver soi-même ,c’est pareil. Et, que ce mépris n’est que la tentative de réinstaller un territoire, une propriété. Que ce mépris provienne du paysan comme des intellectuels, des esthètes c’est un faux débat. Chacun creuse son trou à sa façon, fore le réel, y compris quand ce réel se revêt des oripeaux de l’ennui, de la contingence, de l’insipide. Chacun peut extraire son or de la boue et y trouver sa richesse.|couper{180}
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Visages imaginaires
L’empêchement est un boulet au pied. Mais tout de même, parfois une apesanteur, un répit. Alors on peut se déplacer jusqu’au chevalet, et se dire aller… et dans le mouvement impulsé ne pas lâcher. Deux toiles aujourd’hui format 60x80 cm. En partant d’un fond noir. Les formes les couleurs sont posées à la peinture acrylique. Un travail de patience car le noir boit les intensités. Mais la douceur qui en ressort me plaît assez. Peut-être que la finition à l’huile apporterait quelque chose de plus, ou bien tout basculera dans l’insipide. Un risque. À suivre… Visage imaginaire 1 60x80cm pblanchon 2022.Visage imaginaire 2 60x80cm pblanchon 2022.|couper{180}
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L’attente
Peinture de Marc Chagall Certains jours, rien ne vient. Et, ce qui est désolant, on ne prend pas ce malaise autant en considération qu’il le faudrait. On éprouve un vide, un manque, un mal-être, mais on souhaiterait passer outre. On se cravache, cheval et jockey, tout en refusant de vouloir remonter à la ligne de départ, du faux départ, du premier fichu point d’où sort cette ligne. Parce que l'on se dit que c’est une ligne fictive. Imagination. Ainsi, on se dit, n’écoute pas, va de l’avant, va plus vite, plus fort, encore plus fort, courage, parfois, c'est ainsi, marche ou crève. Évidemment, on se fatigue. Au bout du compte la lassitude s’installe dans son fauteuil crapaud d’à quoi bon. Se pose-t-on jamais cette question vraiment ; Pourquoi les choses viendraient-elles d’elles-mêmes naturellement ? Sont-elles obligées de venir et par qui ou par quoi ? Faudrait-il de ce fait rester ainsi bras ballants comme un idiot en attendant qu’elles daignent enfin venir ces choses ? Que comprendre alors de cette attente, si toutefois on accepte de s’y plier ? Que pourrait-on en retirer comme leçon ? Ne faut-il pas tirer parti de tout ? Apprendre ? Dominer ? Remonter à la ligne de départ doucement, lentement, en essayant de ne manquer aucune étape, aucun faux pas. Autrefois, j'ai attendu de longues heures une fille à Montluçon. J’attendais parce que j’étais amoureux, du moins c’est ce que j’imaginais. Ainsi, il faut donc une raison pour attendre, réelle ou purement fictive, cela n’est sans doute pas très important. J’attendais là sur ce banc pas très loin de la gare de Montluçon, je m’en souviens avec une clarté incroyable, comme si je zoomais sur la moindre feuille de platane, le moindre passant anonyme s’agitant en cette fin d’après-midi d’août. J’attendais comme on fournit une preuve parce que l’amour se mérite. Et j'estimais cela injuste bien sûr. Comme si l'on te devait l’amour pour service rendu… Pourquoi ai-je attendu cette fille si longtemps ? J’ai toujours eu une gêne, même une honte, disons-le, à parler de ce genre d’attente. J’ai pris le parti de garder cela pour moi honteusement, vous voyez… Comme si l'on devait s’acharner, comme si l'on devait au moins essayer de forcer quelque chose dans cette attente. Peut-être pour briser cette enveloppe, cet emballage qu’est la patience. Alors, on dit patience pour ne pas tomber sur le pot aux roses trop rapidement. On dit patience pour reculer davantage au loin, l’arrivée du pire. Tandis que tous les indicateurs sont dans le rouge et ne cessent de te prévenir par d’autres voies que les pensées, on se réfugie sagement dans cette patience étrange. Comme une brebis rentre en son étable en se persuadant de la sécurité de celle-ci et déjà que sécurité et bonheur sont pareils. Pour au bout ne trouver que cette défaite. Je me souviens d’avoir été ridicule lorsque je me languissais ainsi en attendant ses lettres chaque jour. Ce ridicule, je ne pouvais pas non plus m’y arrêter, il ne pouvait pas me convaincre vraiment, ce ridicule était encore un nouveau stratagème pour me faire lâcher prise à l’attente. Par ailleurs, je ne pouvais rien dire à quiconque. Ni autrefois à Montluçon ni plus tard en pension. J’étais complètement seul au monde dans cette attente. Et, aussi, comment il m’aurait été alors impossible de vouloir en sortir, de m’intéresser à autre chose qu’à celle-ci. Ou, comme il m’aurait été tout aussi détestable de ne pas conserver cette ferveur de l’attente. Par ailleurs, il y avait ce refus de vouloir trahir cette ferveur, ce véritable don du ciel -pensais-je- en me dispersant tout entier dans d’autres activités que je jugeais subalternes, méprisables. Rien d’autre n’avait cette puissance, cette force d’attractivité que cette attente. Un trou noir éventuellement. Mais, certainement pas le programme scolaire, certainement pas, non plus ces repas de famille qu’il fallait affronter les rares fois où je revenais à la maison. Ma volonté d’attendre était d’une détermination sans bornes. Je ne pouvais et voulais me concentrer qu’uniquement sur celle-ci. Parfois cela devenait si intenable, tellement intolérable de rester figé ainsi que mon corps réagissait. Alors, il me demandait de bouger. Ensuite, je gesticulais beaucoup, allant et venant, tentant de l’éreinter, ce corps réclamant, dans de longues marches. Puis un jour, peu après mon arrivée à Saint-Stanislas, j’ai découvert la barre fixe au beau milieu du parc de la pension. Et, je me suis mis à observer également, à admirer les anciens. Quelle prestance, quelle élégance, on ne voyait rien de l’effort, ils tournaient autour de cet axe horizontal en défiant les lois de la pesanteur, de l’ennui. N’avaient-ils pas découvert une façon de reporter leur attente sur un objet concret ? Et, grâce à cette translation de l’attente en effort autour de cet axe métallique et froid, immuable, n’avaient-ils pas découvert une voie, un moyen non pas pour s’évader, mais au contraire pour creuser l’attente... au moins vers la liberté du corps, et peut-être aussi de l’esprit ? Cette métaphore se trouvait fort proche de ce vide auquel duquel que je ne cessais de tourner en le remplissant de mon attente. Même effort. Cela me convenait de voir que l'on pouvait faire quelque chose d’autre que rien à partir de cette attente. Cela me rassurait. Avais-je vraiment besoin de temps à autre d’être rassuré ? Sans doute. Surtout, je remarquais qu’en m’exerçant ainsi sans relâche à la barre fixe, on mesurait potentiellement un progrès jour après jour. On ne pouvait notamment pas douter du progrès, chose impossible quand on ne fait qu’attendre sans rien faire d’autre. Alors, je me suis contraint à étudier l’attente d’une autre façon, sans doute en m’exerçant à la barre fixe installée au beau milieu du parc de l’Institution. Ici encore, que d’efforts acharnés pour parvenir à effectuer la première traction, le premier rétablissement, le premier soleil... et je me récitais de vieilles comptines enfantines pour m’égayer. Si tu es patient, si tu es sage, tu auras un bonbon, un bon point, une image, tu seras reconnu et aimé. C’était cela l’éducation de mon enfance, une sorte de chantage finalement, je m’en souviens, les choses n’ont d’ailleurs guère changé. Finalement, tout tournait déjà autour de cette idée d’être apprécié. D’être enfin accepté, d’être reconnu. Comme moi, je tournais de plus en plus adroitement autour de la barre fixe et que le public formé pas les nouveaux désormais m’applaudissait. Je n’attendais pour autant rien de la barre fixe en elle-même. Elle ne m’avait rien promis cette barre froide de métal, il n’y a que moi-même qui m’étais fait la promesse de parvenir à y grimper et m’y améliorer... que moi seul qui m’étais promis à moi-même d’y arriver. Le but, quel était-il sinon enfin parvenir à effectuer un soleil impeccable. Était-ce vraiment l’unique but ? Bien sûr que non. Apprendre à me faire un peu confiance, être enfin vu, aimé, admiré peut-être à mon tour… Ils ne sont pas si nombreux qu’on les imagine ces buts. Mais il y a aussi des limites à cette patience lorsque le résultat est atteint, ou quand il se fait trop attendre. Qu’il ne vient jamais. Quand tout le monde autour de toi a oublié les promesses, oublié tous les efforts que tu as effectués pour obtenir le résultat. Y compris te propres promesses que tu t’es fait à toi-même. Et oui, il ne faudrait pas oublier celles-ci non plus. Puisque, au bout de toutes ces promesses non tenues, tout te semble si vain, si vaniteux. Ainsi, tu auras été patient pour simplement passer le temps en étudiant toute la vanité au fond de toi-même, et, ce faisant, il ne reste guère que l’amertume d’avoir perdu ces minutes, ces heures, ces mois, ces années. Tu n’as rien obtenu de ce qui avait été promis. Donc, tu t’es fait rouler, tu t’es floué tout seul, avoue-le. Tu n’as donc été patient que dans une attente d’une chose implicitement promise qui n’est jamais venue. Parallèlement à cela, tu as aussi voulu faire tienne cette idée, élever l’action à la hauteur d’un sacerdoce. On imagine facilement que l’agir sauve de l’attente. C’est peu vrai. À vrai dire, on continue plus ou moins à passer le temps pour atteindre des buts qui finalement sont dérisoires, presque mesquins. On peut agir et finalement ne rien faire vraiment ou faire à côté. Peut-être que ce qui est attendu au-delà de ta propre mascarade est une tout autre chose sur laquelle tu n’as jamais voulu te pencher, car elle te semble encore plus incroyable ou dérisoire que tout le reste. Un espace sacré, un lieu sanctifié au-delà. Celui de l’âme ou de l’être, tu ne le sais pas très bien. Probablement le lieu dans lequel agir et être enfin est enfin circonstance propice au concert. On attend la grâce, comme on attend l’amour, la mort. C’est plus ou moins toujours la même attente, le même schéma, on espère, que ça nous tombe dessus comme finalement la chance, la reconnaissance, la fortune, certains même, évoquent des poulets célestes et rôtis. Attendre donc. Non pas dans une obligation quelconque que l’on se donnerait, mais plutôt en se laissant emporter dans un instant de grâce. L’inspiration serait peut-être plus un relâchement, après une ténacité longtemps main tenue dans une longue durée, une durée qui paraît interminable, toutefois dont la récompense unique serait de toucher les parois d’un tel lieu. Que ce soit un instant éphémère ne possède pas d'importance. On ne peut se dire non plus tout ça pour ça. C’est un moment, c'est ce moment-là, on ne peut s’y tromper, on ne le doit à rien ni à personne, pas plus qu’à soi-même. Et, pourtant, certains l’attendent toute leur vie sans pour autant y parvenir. C’est ce point central. Cette peur qui attire comme le désir. J’ai mis longtemps à ne plus rien attendre de l’extérieur vraiment. Tout ce qu’il m’était possible de faire à partir de cette intuition, on ne peut pas réellement parler de pensée structurée. Cependant, j'ai tenté de le mettre en pratique, que ce soit dans les boulots alimentaires que je choisissais d’effectuer, dans les relations que j’entretenais avec autrui, et bien sûr au travers de la peinture et de l’écriture. C’est comme si je me suis toujours tenu face à cette barre fixe de mon adolescence. Sans honte de peiner, d’être maladroit, en hissant ce corps si lourd, au début, pour l’amener vers le soleil. Parfois, j'y suis parvenu. Mais, rien n’est jamais acquis, et pire, une fois que quelque chose est acquise, on rêve toujours d’aller encore plus avant. On recommence sans relâche, car ce n’est jamais totalement satisfaisant. C’est de l’humilité dissimule derrière l’orgueil sans doute, on se persuade que nous ne valons jamais autant que cet absolu que l'on devine, à vrai dire, simultanément en soi et en dehors de nous. Alors, on continue à cravacher cheval et jockey, attente ou pas. Certains jours rien ne vient, on se déprime, on s’angoisse, on se désespère, on rejoue toute la comédie humaine de qui nous sommes . Il faut donc aussi accepter ces passages, je crois, ne pas les prendre trop au tragique, cela tournerait rapidement au grotesque, au burlesque de le faire. Cependant, si on en éprouve également la nécessité, le besoin, pourquoi reculer devant l’obstacle... être humain, je suppose que c’est tout cela et le travail n’est-ce pas d’explorer tout cela, d’explorer tous les recoins parfois jusqu’aux plus honteux, les plus nauséabonds les plus désolants. c’est aussi ce que j’ai toujours cru ou espéré sans doute. Comprendre l’être humain que je suis, et par là comprendre tous les autres. L’écriture, sans doute, le vermet d’explorer cette partie. La peinture, c'est autre chose, c’est certainement explorer ce qui relie l’humain à tout le reste, à l’univers dans son ensemble. La peinture telle que je la perçois me demande davantage. Elle me demande de devenir inhumain très souvent. C’est une relation à la matière, à la couleur, a la nature, à une base fondamentale dont nous sommes issus comme une possibilité, mais non comme finalité. La peinture, c'est un hommage, une reconnaissance, une rétribution, une offrande. Alors, je peins parce que je n’attends rien vraiment sauf de me montrer vraiment digne, à la hauteur d’exister. Certains jours, je sens que ce n’est pas cela, que je me suis égaré, que je suis redevenu trop humain. La peur et le désir m’empoignent et c’est cette résistance à ne pas y succomber qui me place dans l’immobile, dans cette espace, ce lieu, cette antichambre que je nomme l’attente. Comme une carte postale oblitérée par l’attente. À qui l’envoie-t-on ? Peut-être uniquement à soi-même. Et, on imagine ainsi, au travers de l’épaisseur de notre incompréhension, de notre ignorance, autant de termes utiles pour créer un espace, une distance, un expéditeur, un trajet, une durée qu’elle parviendra, cette carte, dans les mains d’un destinataire. Qu’importe l’adresse, la maladresse, l’important est de l’écrire puis d’envoyer cette carte postale, pour se rappeler au souvenir . Pour dire, je pense à toi. Même si l'on ne sait plus vraiment qui est ce toi. D’autant plus encore si à un moment, par habitude, on a cru le savoir, puisque l’on s’est rendu compte qu’en réalité, on ne sait rien du tout. Ce pourrait être un point de départ que cette acceptation de l’ignorance. Que l'on n’en sache pas plus sur l’autre que sur soi. Que nous sommes baignés dans une fausse lueur de familiarité, et que nous dormons ainsi, dans un sommeil plus ou moins tranquille, plus ou moins agité, dans l’attente de nous réveiller à une nouvelle journée ? Mais, certains jours, malgré toute la bonne volonté, rien ne vient. On ne sait que dire, quoi écrire, ni peindre. On se trouve empêché pour tout. On ignore ce qui nous arrive, surtout les jours de beau temps. C’est désolant. Pourtant, ce qui est plus désolant encore, c'est cette habitude de subir l’empêchement comme une fatalité. Comme on subirait la vision d’un nuage lourd qui surgirait dans le ciel bleu annonçant le mauvais temps. Que peut-on faire contre le mauvais temps, comme contre mauvaise fortune ? Certains disent bon cœur. C’est peut-être une solution. Si l'on ne s’arrête pas trop sur la définition des mots. Ou si au contraire, on a pris l’habitude de peser chaque mot avec énormément de scrupules. Bon cœur, je n’ai jamais vraiment compris ce que ça signifiait pour la plupart des personnes qui me l’évoquaient. Avoir bon cœur, le cœur sur la main, être ce bon petit cheval blanc du poème de Paul Fort. J’aurais aimé le croire, parfois, je suppose même y avoir effectivement cru, enfant. Et, encore, mon souvenir est-il perclus de doutes quant à l’authenticité réelle de cette croyance. C’était probablement pur mimétisme. Mais, l'histoire du cheval blanc finie mal. J’aurais préféré qu’elle finisse mieux. Derrière la queue du petit cheval, j’ai saisi simultanément l’énoncé d’un pire dit à mi-voix. Aller vers la mort, bon cœur ou pas, ça ne doit pas changer extrêmement quelque chose au résultat final. Et, simultanément, cette histoire de bon cœur me tenaille encore tant et tant. Je ne peux pas le nier. Pour l’image surtout, à projeter. Tout ce cinema. Comme si c’était une obligation que l’on m’avait fourrée dans le crâne tacitement. Que tout se résoudrait avec bon cœur ou encore si je daignais abandonner ma fierté, mon orgueil, pour me mettre à genoux et prier le Bon Dieu ? Je n’avais pas suffisamment la foi, j’ai toujours beaucoup trop réfléchi, en résumé trop souvent pesé le pour et le contre. Par ailleurs, je viens d’une famille où peser, calculer sont des mots importants, essentiels. Le fléau de la balance m’est familier, la notion de scrupule n’est pas associée à l’honnêteté, mais plutôt à celle de l’équité, de la justice. Et, davantage, à celle de l’intérêt. De la survie des affaires. Cependant, ce qui paraîtra juste pour l’un sera généralement injuste pour l’autre. Les affaires exigent d’être concrètes, pragmatique, on ne peut pas se laisser attendrir par des états d’âme. On les repousse même comme des intrus. Ainsi, on finit par les bannir tant que l'on évalue si l’état d’âme existe vraiment, si ce n’est pas plutôt un mensonge, une pure fiction inventée par quelque paresseux. Mon père détestait les états d’âme, ma mère se noyait dedans. J’avais donc tout loisir d’étudier l’état d’âme à loisir. Un véritable sujet. Peser le pour et le contre également. Personne n’a tort, personne n’a raison, ou alors tout le monde. Voici comment la vie passe avec ses nuances, comme peintre, on ne peut pas se laisser berner trop longtemps par l’émotion, sinon on finit par se retrouver face à de la boue. L’émotion n’est qu’un point de départ, ensuite autre chose doit entrer en jeu. Tout est important, on ne peut rien rejeter. On continue bien sûr à peser, à calculer, mais différemment. Ainsi, il ne s’agit plus d’être épicier, deviens alchimiste. C’est une expérience dans laquelle l’observateur fait partie intégrante de l’expérience. L'observateur, ses observations, au même titre que la balance qu’il utilise pour peser les ingrédients, émotions et pigments. Certains jours, on oublie toutes ces choses. On ne comprend pas pourquoi, c’est ainsi. Certains jours, rien ne vient. C’est ennuyeux, désolant. À se taper la tête contre les murs. Une véritable panique, de se retrouver une fois encore rejeté en marge. En marge de quoi, mais du monde forcément. Ainsi, on se retrouve seul et désespéré comme un gamin qui regarderait le monde continuer de tourner sans lui, voilà ce que c'est, ce rien ne vient. Ni plus ni moins. C’est un événement, on pourrait même ajouter climatique, pour bien enfoncer le clou. Cela octroie la possibilité de subir mieux encore l’événement. Moins frontalement. Mais, un nuage n’arrive pas ainsi. Pour rien. Il y a des raisons, une histoire de vapeur, de chaleur, de limites, d’électricité et pour finir quelque chose qui ne peut plus se contenir, et qui crève là-haut en provoquant la pluie. De plus, on aimerait tant que tout soit explicable et raisonnable. Certains jours, quand rien ne vient, on omet cette possibilité-là. Il y a une sorte d’attirance magique pour ce genre d'événement, qu’on le veuille ou non. Cela doit provenir d’une partie très enfouie au fond de nous-mêmes. Sans doute cette part enfouie dans un temps préhistorique où le moindre éclair était parfaitement audible simultanément que visible. Quand aucune séparation ne s’effectuait entre l’ouïe, l’œil et la flagrance, le goût ? Quand n’importe quel événement était absorbé dans sa nature ontologique et la nôtre ? Saisie dans sa fulgurance, la réaction alors se devait d’être tout aussi fulgurante. On n’avait pas le temps de peser, soupeser, négocier. Par ailleurs, il fallait courir vite, ou bien se défendre. La survie, voilà tout. Aujourd’hui, on souhaiterait vivre, exister... mais ces mots ne servent finalement qu’à des vendeurs de soupe. Qu’on le veuille ou pas, tout le luxe, le confort, l’illusion de sécurité que l’on accole à ces mots, le bonheur... ne sont souvent que des arguments marketing. Le bonheur n’a rien à voir avec tout cela. Le bonheur est pour chacun ce qu’il se fabrique comme équilibre en acceptant les déséquilibres dont il se sert pour y parvenir. Certains le comprennent intuitivement. D’autres peinent toute une vie pour abandonner la réthorique, entrer enfin en poésie. J’imagine appartenir hélas à cette seconde population. Il me paraît impossible de ne pas utiliser la réthorique dans l’attente de ce qui ne vient pas. Elle m’aide ainsi à saisir la vanité de ce qu’elle est , de ce qu’elle a toujours été. Un nuage d’encre sans doute. Ensuite je pourrais questionner cette volonté de partager mon charabia, de publier un tel texte. D’exhiber cette part si ridicule de moi-même. Et tout ce que je trouve comme argument c’est que je ne peux rien faire d’autre que cela en ce moment, exhiber cette facette ridicule autant que j’ai jadis tenté de la masquer aux autres comme à moi-même. Peut-être qu’ainsi ayant atteint sa finalité, me flanquera t’elle enfin la paix, et que je pourrais alors me remettre à peindre de la façon la plus inhumaine qu’il me sera donnée de le faire.|couper{180}
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Charles Brunet
Betty, au regard bleu. Huile sur toile. 2020. Charles Brunet est un homme grand. Lorsqu’il se déplie se levant de sa chaise, après la matinée qu’il vient de passer, attablé devant la page des mots-croises de La Montagne c’est le premier mot qui surgit plus de soixante années plus tard à mon esprit. Grand. Ses cheveux blancs en bataille ressemblent à ces nuages qui planent au ralenti dans les images de l’Everest ou du mont Fuji Yama. Grand et sec. Et j’ai peine malgré cela, au travers de cette première impression, à retrouver son regard. Quel regard mon aïeul pouvait-il poser sur l’enfant que j’étais. Peut-être en me rendant dans la pièce attenante, dans la chambre à coucher, le souvenir remontera t’il. Se diriger vers la table de nuit, apercevoir la boîte de pastilles Vichy, ou encore Pulmoll, l’ouvrir sans bruit et dérober ces petits bonbons carrés de réglisse qui, rares, au milieu des autres sucreries, ont si bon goût... le goût du chapardage surtout. Voilà ! avec le souvenir du goût revient tout le reste. Il avait les yeux bleu, un de ces bleu froid qui ne laisse pas facilement passer l’émotion. Légèrement cernés de rouge comme ceux des gens qui lisent beaucoup. Un regard de lecteur au-delà des carreaux de lunettes, dont il prenait grand soin en les remisant avant de se lever, dans un étui de cuir ordinaire. Lorsqu’il se dépliait de toute sa stature, je me sentais encore plus petit que je ne l’étais. Il m’impressionnait terriblement. Et en même temps c’était le personnage, de tous, le plus solide de la maison dans laquelle nous vivions. Et pourtant une image se superpose à toutes les précédentes, les rend tremblantes, comme si toutes ces images, ce que je nomme mes souvenirs de Charles Brunet ne provenaient que de ma rêverie. Elles ne sont sans doute pas autre chose. Une reconstruction, une interprétation, une illusion, un mensonge. C’est l’image de ce grand corps allongé sur le lit qui est devenue désormais obsédante. Et qui occulte toutes les autres. Ma mère m’avait poussé dans le dos pour que j’aille embrasser son cadavre une derniere fois et, comme un somnambule, j’avais vécu cet instant comme si j’étais un autre. Voir ce grand corps sans vie, constater la peur restée figée dans un dernier rictus, m’avait d’une part hautement impressionné, d’autre part avait causé un grand effondrement silencieux. Quelque chose à cet instant précis me sépara en deux lorsque le dû poser les lèvres sur la chair froide d’un inconnu. Car un mort passe ainsi dans l’inconnaissable tout aussi brutalement. Il est donc plausible alors de prendre appui sur à la logique, la raison pour comprendre que ma personnalité se modifia dès cet instant. Elle se sépara tout aussi naturellement que l’événement Charles Brunet. D’un côté le connu, de l’autre l’inconnaissable.. C’est à partir de la mort de Charles Brunet qui disait-t’on connaissait le dictionnaire par coeur que mon étrange double pénétra dans ma vie. Ce fut aussi au même moment que j’ai commencé à me réfugier dans la lecture, le plus souvent possible. Et, lorsque je ne lisais pas, lorsque pour une raison ou une autre, école, corvée, repas de famille, je tentais toujours de m’enfuir en allant me réfugier sur les hautes branches du cerisier du jardin, ou bien dans un trou sous la maison. Alors c.était ce double étrange qui semblait prendre ma place et s’asseoir là. Et je pouvais néanmoins comprendre qu’il observait tout ce qui se passait en dehors ou en dedans de nous. Il ne se laissait pas envahir par les émotions tout au contraire de moi. D’une froideur implacable son regard bleu croisait parfois le mien dans le miroir de la salle de bain. Ce regard aussi aussi était un peu cerné de rouge. Mais, à bien y réfléchir, ce devait être dû bien plus à la fureur qu’il tentait de dissimuler qu’à la lecture.|couper{180}
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The trooper
https://youtu.be/X4bgXH3sJ2Q The Trooper est un morceau du groupe de heavy metal britannique Iron Maiden, extrait de leur album Piece of Mind, paru en 1983. Il est paru en 45 tours le 20 juin 1983 et a atteint la douzième place des classements britanniques. Le morceau est inspiré du poème de Lord Alfred Tennyson, La Charge de la brigade légère, lui-même inspiré d'un fait historique, à savoir une désastreuse charge de la cavalerie britannique pendant la bataille de Balaklava, en 1854, lors de la guerre de Crimée. Les paroles retranscrivent le point de vue d'un soldat mort au combat et les guitares de l'introduction évoquent le galop des chevaux. Le chanteur Bruce Dickinson introduit souvent le morceau, l'un des favoris du groupe en concert, par cette citation de Tennyson : « Into the valley of death rode the six hundred. Cannon to right of them, cannon to left of them, volleyed and thundered, 'The Trooper.” Dans la vallée de la mort chevauchèrent les six cents. Le canon à droite d'eux, le canon à gauche d'eux, ont volé et tonné, “Le soldat”. La face B du 45 tours est occupée par une reprise de Cross-Eyed Mary, un titre du groupe Jethro Tull composé par Ian Anderson et paru sur l'album Aqualung en 1971. https://youtu.be/SNHVlvmGeio Cette chanson est une reprise, interprétée à l'origine par Jethro Tull sur l'album Aqualung de 1971. C'était la chanson en face B du single de The Trooper. Cross-Eyed Mary est une chanson sur une autre forme de fatalité, mais plus humoristique. Il s'agit d'une écolière prostituée mais pas en termes aussi grossiers. Elle va avec des vieux salauds parce qu’elle leur rend service, donnant aux gens ce qu’ils veulent parce que cela les rend heureux. C'est une chanson amusante. -Ian Anderson Entre ces deux titres j’ai lu la préface de Mademoiselle de Maupin, de Théophile Gauthier, manifeste Parnassien, refus de la morale comme du lyrisme. Drôle d’histoire que celle de la beauté et de tous ces déguisements des personnages. Drôle de modernité aussi concernant les genres. Drôle d’actualité aussi quant aux propos tenus sur un journalisme de bon ton prônant la vertu, la morale, mais connaissant par cœur ou plutôt sur le bout des doigts tous les textes licencieux. Se rendre mi -19 ème ou ailleurs, montre bien que si tout à l’air de changer, rien ne change vraiment. Le plus vieux métier du monde et l’art me semblent aujourd’huiétroitement liés de tous temps.|couper{180}