import

import

Éblouissement de la mort

Ombre au tableau Certainement un désir encore, que la mort soit l’ultime éblouissement, et que l’on puisse tenir sur le seuil aussi longtemps que possible. Et tout de suite vient l’éblouissement d’une pseudo connaissance qu’on y gagnerait. Une sorte de revanche d’avoir raté la vie en misant sur l’ouverture procurée tout à coup par son achèvement. Avec comme postulat probable que l’achèvement expliquerait tout. Un éblouissement qui en dissimule un autre. Dans le fond un désir de s’évader renouvelé, la jouissance triste des satisfactions passables de ce désir. Passable, vieux mot que je retrouve en marge de vieux carnets scolaires, écrit à l’encre rouge. Plus satisfaisant sont les termes médiocre, mauvais, abruti total. Au moins on est désigné clairement. Mais passable… aucun éblouissement n’en surgit. Peut-être était-ce une mise en garde prophétique, pour mon bien de la part de ces vieilles institutrices, la plupart veuves ou célibataires.|couper{180}

Éblouissement de la mort

import

L’éblouissement

Phryné Attibué au sculpteur Praxiteles 390 av J.C Faire la liste de tous tes éblouissements, afin de remonter à la source, à la cause qui t’aura, par violence, malheur, désespérance, enthousiasme contraint à en franchir négligemment le seuil. Le fameux seuil sur lequel Platon conseille de s’arrêter pour se servir de cet organe sis entre nos deux oreilles. Franchir ce seuil c’est se livrer corps et âme, s’abandonner, et ce faisant n’étant plus qu’une ombre, tourner le dos à la connaissance. En Afrique, dans certains pays, Congo, Gabon, la recrudescence des “maris de nuit” qu’évoque le sociologue Joseph Tonda. Ce sont des entités, mâles ou femelles qui viennent s’accoupler avec les vivant(es). L’incarnation d’un imaginaire qui épuise, achève le vivant, l’être, tant tout ce qui serait nécessaire pour se sentir vivant manque. L’argent en tant que divinité hybride, mélange entre animisme et capitalisme. Refuge dans l’éblouissement ou fuite en avant dans celui-ci, la seule porte de sortie pour les possédé(es) étant l’église. Aucune différence en Europe. L’éblouissement est partout désormais comme interviennent aussi ces “maris de nuit” peut-être pas que la nuit dans les rêves, mais désormais en plein jour. Les images incessantes, le corps-sexe, l’altitude à laquelle s’élève la poussière soufflée de nous par la désespérance. Tout a commencé hier, cette réflexion sur l’éblouissement. Quand soudain au musée archéologique d’Andros, j’ai été pris d’une sorte d’impulsion étrange, je me suis mis à vouloir tout photographier, le moindre petit morceau de poterie, le moindre cartel explicatif, comme si par l’entremise de mon I-phone, je désirais capturer le parcours de l’éblouissement qui commençait à monter. Et qui atteint son climax face à la statue d’Hermes. Me voici devant encore figé face à la version psychopompe du Dieu. L’accompagnateur vers la mort et ses enfers. Ce qui m’aura permis de m’en extirper, l’humour. Le sexe ridicule du dieu, absolument pas à proportion du corps, comme il est souvent d’usage dans la statuaire grecque. Ensuite rêvasserie sur Praxiteles, certainement l’auteur. On en retrouve plusieurs versions de cet Hermès en différents endroits du pays. Sur quoi Praxiteles me conduit à Phryné, soi-disant la première femme nue sculptée. A son procès relaté dans les vies de Plutarque, ou ailleurs, mais peu importe. Le fait que son défenseur à court d’argument la dévêtissent devant l’assemblée des magistrats afin par sa beauté prouver sa vertu… ( et cela a parfaitement bien fonctionné) À l’éblouissement probable du sculpteur antique qui fut aussi l’un de ses nombreux et riches amants. De là à revenir dans mon propre souvenir et à subir une fois encore le même éblouissement lorsque P. laisse tomber sa robe à terre et que je la contemple exactement comme une apparition divine… Éblouissement qui se répète inlassablement à chaque fois qu’une femme se met à nue. Et toujours même manière de franchir le fameux seuil de mon côté toujours. Par cette même avidité mêlée d’impuissance contre une pure image me biffant, nous biffant. Toute la violence du désir, de saisir, de posséder, vénérer et détruire,n’est-ce pas d’une certaine façon la même chose que ces fameux maris de nuit qu’on repousse loin en Afrique. L’âge ne change rien à l’intensité de ces éblouissements, simplement un peu plus de couardise que l’on confond avec sagesse, réserve, maturité et je ne sais plus quelles conneries. Tout cela dans l’espoir de se dédouaner d’une impuissance qu’on découvre congénitale. Impuissance qui n’a pas d’autre raison d’être que de civiliser le barbare. Impuissance aussi de comprendre qu’il ne peut y avoir de civilisation sans barbarie, que l’une a besoin de l’autre pour se jauger. Impuissance aussi liée à un système économique, politique qui nous transforme en choses. Des choses qui ne vivent plus qu’au travers d’autres choses dans un éblouissement qui ne peut conduire qu’à l’ascèse la plus stricte ou à tous les massacres. Hermes psychopomp attribué à Praxiteles musée archéologique d’andros|couper{180}

L'éblouissement

import

Et que rien soit la mort

Escaliers, Chora, Andros, Grèce. Location d’un scooter, être moins dépendant des bus, découvrir autrement. C’est dans un virage entre korthi et Chora, Andros, que l’idée de la mort resurgit. Le ciel bleu, la chaleur, peut-être un moment d’insouciance. Et aussitôt la pensée que ce n’est peut-être pas si grave. Que mourir n’est qu’un moment comme tout autre moment. Que ce n’est rien, que ce rien c’est autant la mort que la vie. Que c’est comme tout. Et pour en finir que rien soit la mort. Écrire permet cela comme peindre. Si l’on dépouille de tout enjeu séculaire ces deux activités on peut pénétrer dans une forme très active du rien. On peut se rendre compte que tout et rien n’a pas de séparation pas de frontière, ni de limite. Que la forme d’une création quelque soit ce qu’on en juge se suffit à elle seule. Qu’en s’achevant elle nous achève. Mais ce mouvement est continu. Et il s’échange d’être à être, peu importe le masque, l’apparence que revêt celui-ci.|couper{180}

Et que rien soit la mort

import

Le point final

Plaque d’égout à Batsi, Andros, Grèce. Comment sais-tu que le texte, le tableau s’achève. On te pose souvent la question pour le tableau, et souvent tu bottes en touche avec une histoire construite à partir de l’inachevé et l’irrémédiable. Ce n’est que partiellement juste. Il faudrait parler sans doute d’un mouvement de la peinture par celui de l’écriture. Comment arrive le point final, de la même façon que la dernière touche. Dans une forme d’éreintement après avoir été habité passagèrement par quelque chose. On apprendrait à tâtons que la touche ou le point serait le dernier acte d’un processus mettant fin à cette étrange possession. On avouerait ainsi en finir avec la toute-puissance qui vient de nous traverser. On reviendrait par un ultime geste à l’humain le plus insignifiant. On se sauverait ainsi en s’achevant. Tout ce qui importe en peinture comme dans l’écrit c’est la première touche, la première phrase voire le premier mot. Ensuite il n’y a plus qu’à dévaler la pente ou s’élancer vers le sommet, peu importe le relief. Ensuite on ne sait pas vraiment ce qui se produit, mais cela vide, cela crève, suivant l’endurance, l’habileté à maintenir plus ou moins longuement cette endurance, et qui se muscle par de longs jours stériles si souvent. Un entraînement aussi à mourir, au début dans une agitation, une panique, ou une euphorie. Cela peu s’améliorer aussi. En revanche le moment juste on doit apprendre à s’en approcher comme on se nourrit. Guetter la satiété comme la fatigue, le sommeil, trouver l’interstice exact, si fin qu’un chas d’aiguille à côté serait une autoroute. Et juste avant le collapse, l’ultime.|couper{180}

Le point final

import

Thèmes et sujets

Plage près de l’ancienne forteresse vénitienne de Chora, Andros, Grèce. Un tableau, un livre, tu te casses la tête en amont pour savoir de quoi ça va parler, quel thème, quel sujet, mais en définitive, il ne s’agit souvent que d’un prétexte pour ne pas affronter le moment. Ce dans quoi tu devrais faire confiance, c’est l’écriture et la peinture. Ces deux là savent toujours bien mieux que toi où elles veulent t’emmener. Mais c’est peut-être là ta résistance, ne pas savoir où tu seras conduit ou éconduit. Le féminin de ces deux mots, une incertitude. Une absence de confiance souvent dans ce féminin, mais pas plus pas moins que dans le masculin. Sans doute un manque de confiance sans autre. En tout genre, tout azimut. Un manque. Cette fascination mêlée d’effroi en observant les familles grecques à la plage et plus tard au restaurant. L’enfant roi. Que d’attention, d’encouragements, de bravos. Tellement qu’à un moment apparaît quelque chose de purement animal. Comme de l’instinct, de l’inné, un programme ancré profondément dans l’ADN. Le summum, cette silhouette de gros homme dans l’eau à contre-jour jetant vers le ciel une toute petite fille. Il l’a lancée et reçue dans ses bras maintes fois. Des rires, pas un seul sanglot, des cris de joie. Héberlué par la scène, tu t’es souvenu de tes premiers contacts avec l’eau, ton père qui t’emporte à cet endroit où tu n’as pas pied et qui te lâche là en te disant débrouille-toi. Ta panique de te retrouver seul sans savoir encore nager. C’était la façon d’enseigner de toute une génération. Débrouille-toi. Sans doute parce qu’il avait dû passer par là, et qu’il imaginait encore vers la trentaine que ça lui avait plutôt réussi. La Corée, l’Algérie. Cette arrogance, ce ton sans appel, ces jugements à l’emporte-pièce, autant d’outils confectionnés seul dans son coin pour se donner confiance. Ou renforcer, dissimuler une sensation gênante de faiblesse. Ne fais pas ta femmelette. Le recours au féminin après avoir goûté de ce masculin là, tu peux le comprendre intellectuellement désormais. Ce fantasme d’être sauvé par le féminin. D’où sa sublimation. Les magnifiques yeux gris-bleu. Rarement de retour. Presque aucun regard en retour qui ne soit un regard à la surface d’un miroir. Un reflet. Cette solitude. Ces solitudes. Et cette colère de ressentir si tôt ces choses. De ne pas être en mesure de les dépasser par amour, par confiance. Ce serait être en mesure. D’où la difficulté rencontrée face au thème, au sujet. C’est à dire croire en l’apparence des buts. Que les êtres que tu as côtoyés puissent avoir un but différent que celui de suivre leur pente naturelle. Ils auraient sans doute eu des rêves, mais les circonstances, mais le quotidien. Ils auraient abandonné jusqu’à l’idée du rêve pour faire face. Tu cherches encore à vouloir atténuer les faits par leurs circonstances. Perpétuelle hésitation. Trancher demande autre chose que tu ne peux convoquer facilement. Sans doute un égoïsme, une méchanceté, voire une saine cruauté. Ou un refus de lâcher cette image fabriquée de toi par toi, cette apparente générosité ou humanité. Cette Soi disant gentillesse. Il te faudrait l’indifférence d’un tueur à gages, te ficher en gros de tout et ne songer qu’à avancer vers tes rêves. Mais quels sont-ils ces rêves désormais, ne sont-ils pas un pur fantasme de rêve. Une carotte totalement fictive qui ne te sert qu’à atténuer la désespérance. Ces familles grecques au bord de la mer, ces enfants vers qui toutes les attentions se renouvellent au rythme des vagues venant mourir sur le sable, au final, tu n’y vois que de l’instinct, soutenu par une longue tradition de savoir installer la confiance en l’autre. C’est tellement ancré qu’on n’y pense même plus, c’est de l’acquis. Il faut voir ensuite les ports de tête. Cette fierté, cette suffisance, ce qu’on nomme la confiance en soi. Mais qui n’en n’est qu’un ersatz évidemment. Car à la première dérobade, le moindre échec, sans la communauté pour expliquer, soutenir, atténuer, panser, la violence se retrouvera libérée de sa gangue. Le noyau donnera de toutes façons son fruit. Comme l’écriture, la peinture, donnent également des textes, des tableaux. Les thèmes et les sujets, il n’y aura qu’à regarder ensuite le résultat pour en décider ou pas.|couper{180}

Thèmes et sujets

import

Femme de ménage, ménagère

Sophia Lauren dans mariage à l’italienne de Vittorio De Sica 1964 Un port hautain, un regard sombre, une chevelure ébouriffée mais pas trop. Un peignoir, une robe de chambre, une blouse en nylon. Peut-être en observant encore plus attentivement, le frémissement des narines, l’arc formé par la lèvre supérieure, la suggestion d’une boucle d’oreille, le pendentif, peut-être une image de sainte ou de saint au dessus du satin blanc d’une nuisette de satin-blanc- La posture de défi, paumes appuyées sur les hanches, le bassin, un bracelet de type oriental, qui ressemble à un bracelet de force au poignet d’un lutteur. Quant au décor, la probabilité d’un pan de mur en papier peint, un angle, le personnage acculé dans cet angle, mais qui, résigné, semble résister dans une attente. Résignation et fierté qui, normalement, devrait stopper l’attrait du protagoniste, du regardeur, mais qui semble provoquer tout le contraire. Qui semble faire appel à une vérité du spectateur, ou de l’acteur masculin, notamment la valeur donnée à son courage, son audace, sa virilité tout autant qu’à une raison, une politesse bien au delà d’une politesse de convenance. Dans ce film, Filomena Marturano est avant tout une prostituée que rencontre Domenico Soriano ( Marcello Mastroianni) et à qui il propose de vivre avec lui, surtout dans le but de s’occuper de sa mère souffrante et de la maison durant ses absences. Fantasme assez banal finalement. Remplacer la mère, une énigme contre une autre. Ensuite, 22 ans de mariage, Filomena tombe malade, à l’article de la mort. Un prêtre propose à Domenico de l’épouser, mais aussitôt fait la belle se relève dévoilant ainsi son stratagème et apprend à son mari qu’elle a eut trois fils dont un seul est le sien sans lui donner plus de précision. Soriano annule le mariage, Filomena quite la maison. Ce n’est que lorsque elle le quitte que Domenico découvre qu’il aime Filomena, il l’a retrouve et l’épouse à nouveau, et il découvre qu’il est le père des trois enfants. Dans ce portrait de l’actrice Sophia Lauren tout est dit. L’ambiguïté entre la femme libre et la ménagère. Une représentation de l’objet du désir masculin qui renvoie à une interrogation sur la nature profonde de celui-ci ci, la possession, l’amour, la fierté. Et aussi ce que la femme, l’être, doit déployer de résistance comme de ruse afin d’exister. Est-ce que cette histoire finit bien, est-ce que le mariage et la paternité sont suffisants pour absorber le choc… rien n’est moins sûr. N’est-ce pas plus de l’ordre de la résignation, le film ne le dit pas et semble s’achever en happy-end alors qu’au bout du compte tout concourt à faire songer à la mort des deux protagonistes. Il y a aussi présence de la mort dans cette photographie, au-delà des apparences, du désir et de la répulsion qu’elle inspire, une fatalité se tient là comme une araignée sur sa toile. Une cerise sur le gâteau.|couper{180}

Femme de ménage, ménagère

import

Assomption

Couronnement de la Vierge, le Greco Une feuille blanche et les touches d’un clavier virtuel. Sommes nous si loin de Marie et Gabriel. Cela pourrait ressembler à une boutade, mais il n’en est rien. Une feuille vierge, un peu de caractères et quelques lignes qui sortent d’on ne sait où. Reste à savoir si le fruit durera, on ne lui en demande pas tant évidemment.|couper{180}

Assomption

import

Idiosyncrasie

Ne pas confondre ce qui soudain donne vie à la mort avec un rabe de satisfaction facile. Une poignée de frites, un verre de vin gratis en sus. Ne pas oublier la vocation première du partage. Pourtant la tentation est toujours présente de vouloir s’évader ainsi. De jouir égoïstement de ce qu’on va vite à considérer comme un truc, une martingale. D’autant plus que dans l’apparence ceux-ci fonctionnent. L’idiosyncrasie si séduisante soit-elle, ne vaut pas plus que la préciosité qui la façonne. Remonter à la source de cette préciosité, comprendre qu’elle n’est qu’une faille offerte par la facilité. Une béance confortable dans laquelle s’engouffrer quand la peur de ne pas exister gît, en compagnie du désir de reconnaissance, de l’ignorance. Retrouver confiance dans le partage, s’y encourager.|couper{180}

Idiosyncrasie

import

L’Instant.

Baignade, dessin sur tablette. De même qu’il n’y aurait plus ni vrai ni faux ni réel ni imaginaire, pas plus d’ancien que de nouveau, alors ce serait le moment propice. La balance dans une immobilité telle qu’elle créerait inévitablement le mouvement. Ce serait l’instant. L’instant d’écrire, de peindre, de labourer un champs, de sortir du port, pour s’en aller vers le mystère des moissons. Il est difficile de convoquer un tel instant sans être mort au monde qu’on s’est imaginé. Il convient peut-être de devenir cet être impersonnel dont l’unique possible est de se laisser envahir, habiter par quelque chose. Ce quelque chose qui ne peut naître qu’à partir du rien. C’est un mystère qui pour être de tout temps doit rester mystère. Fugitivement tout cela et rien dans l’Instant.|couper{180}

L'Instant.

import

Du bref et du simple

Visite de l’église orthodoxe de Batsi. Mon Dieu toutes ces peintures de personnages. De parfaits inconnus pour moi. Cela m’a fait penser aux vies minuscules de Pierre Michon. Et aussi à tous ces saints qui apparaissent dans la Légende Dorée de Jacques de Voragine. Le lien quel est-il. Une efficacité simple pour témoigner du passage d’un être humain. Que ce soit au fin fond de la Creuse, ou bien dans les arènes de Rome, n’a pas d’importance. On extraie une substance. Une brièveté et une efficacité pour dire l’essentiel de l’homme, du paysan, du martyr, et du saint. Sans chichi et sans artifice qui, par la digression, trahirait le but simple de témoigner de ce passage. Et puis ensuite on peut penser évidemment à une vie décrite par Flaubert dans un coeur simple. Et on voit tout de suite l’hérésie dans le perroquet empaillé en fin de partie. Ce qui me conduit une fois de plus vers le mystère, les muses, l’inspiration et l’idée de la formule. Il y a une grande différence de profondeur entre une phrase qui provient de ce lieu et une autre qui proviendrait que de la simple analyse et synthèse. Uniquement de la tête. Ensuite trouver la forme pour sertir le mystère est une autre paire de manche. C’est tout le problème du choix, de la sélection, de l’organisation, pour réaliser un recueil par exemple. Et peut-être qu’on se casse beaucoup la tête pour pas grand chose au final puisque le lecteur lira bien dans l’ordre qui lui conviendra, selon sa propre inspiration du moment. Comme moi dans cette église je me serais intéressé que de façon parcellaire à certains personnages plus qu’à d’autres, à la façon dont le peintre les avait évoqués, et même encore là qu’est-ce qui m’a vraiment attiré, la simplicité d’un drapé, une gamme réduite de couleurs… peu de chose en apparence. Sauf que non, il y a dans ces peintures une rigueur, proche de celle des icônes, il y a une ferveur a vouloir respecter la continuité d’une forme. Nous avions cela autrefois en poésie avec le sonnet par exemple. Aujourd’hui nous assistons à une libération soit-disant de la peinture, de la poésie, et j’y adhère bien sûr, mais quelque chose me dit que trop de liberté ne mène peut-être pas si loin qu’on l’imagine. Il faut un minimum de rigueur, voire plus si on est courageux, mieux, on peut acquérir le courage exactement ainsi en s’appuyant sur de plus en plus de rigueur. Par contre c’est un domaine qui excède mes compétences. Mon inspiration devra donc me déposer là pour faire le reste de la route à pied.|couper{180}

Du bref et du simple

import

Diverses tentatives pour attirer les muses

Ménagère des sixties. Je me demande si on ne pourrait pas compresser le temps d’attente comme la patience, afin d’en extraire juste une essence. Trouver un raccourci à l’inspiration. Attirer les muses. Féminines elles ne sont sans doute pas si différentes des autres femmes. Il suffirait d’un éclat de pacotille, d’un bon mot, et d’un peu de mystère pour capturer leur attention, oh pas longtemps, juste le temps d’être enfin envoûté en retour. Et à partir de là se trouver heureusement en mesure de lâcher une ligne ou deux. Un paragraphe flirterait trop avec l’exagération. Défaut presque toujours honnit par les ménagères en général tant celui-ci touche leur intimité profonde. Possible que l’archétype de la ménagère comme on pouvait encore le rencontrer dans les années 60 n’existe plus aujourd’hui que dans les entreprises de sondages. Peut-être aussi qu’en abandonnant ce statut, la femme y ait aussi beaucoup perdu en croyant y gagner. Car l’irréalité de la ménagère, ce double inversé des chimères masculines aura probablement beaucoup participé à repeupler les pays dévastés par deux guerres mondiales. Et étrangement après les 30 glorieuses, l’avènement du féminisme et la disparition progressive des ménagères semble bien coïncider avec le déclin démographique, comme le désir sexuel en général. Cette perte de désir amène de toute évidence à l’exagération, à fantasmer le sexe, et à l’industrie pornographique. Et, cerise sur le gâteau, avec la fin de la prostitution. Ce qui pousse des populations entières de mâles déçus ou frustrés à chercher un paradis sexuel au delà des frontières de l’hexagone, ou bien à s’enfermer dans leur bureau ligotés à leurs écrans. Il doit y avoir un lien entre la disparition des muses et celle des ménagères. Même si pour l’instant je n’arrive pas vraiment à le formuler. C’est là qu’il convient de s’arrêter d’écrire justement. Afin de ne pas entrer dans l’exagération.|couper{180}

Diverses tentatives pour attirer les muses

import

L’artificiel comme donnée naturelle

Mob bleue. Une fois je me suis posé la question. Cette mobylette dont le bruit de pétarade extrêmement agaçant qui passe sous tes fenêtres est-ce naturel ou artificiel. Et là j’ai vu s’ouvrir un gouffre. Qu’est-ce qui est naturel et qu’est-ce qui est artificiel.. jusque là j’avais toujours eu une position assez tranchée. Il m’avait toujours paru simple d’effectuer la différence. Et puis le doute s’est immiscé. Quand un bousier balade sa boulette devant lui on se dit voilà une chose si naturelle. Quand une mobylette bruyante passe sous nos fenêtres on regrette qu’un tel objet eut pu être inventé, on se rabat sur une haine envers l’artificiel. Mais dans le fond des choses, d’un point de vue universel, quelle différence entre la boulette du bousier et la mob de Gérard… aucune. C’est pourquoi fort de cette conclusion je me suis appliqué depuis à considérer l’artificiel comme une donnée naturelle de ce monde qui m’entoure. Je ne m’en porte ni mieux ni plus mal. J’ai juste éliminé une tension agaçante.|couper{180}

L'artificiel comme donnée naturelle