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Voguer vers l’incohérence

Ulysse dit attachez-moi à ce putain de mat je veux aller jusqu'au bout, entendre le chant de ces putains de sirènes. Genre héros de chez héros y a pas mieux ou pire. Je m'attache à mon pinceaux tout seul, j'ai perdu l'équipage quelque part sur une côte de Papouasie ou dans un désert Mongol. Y plus que mon épouse, ma chatte et mes pinceaux C'est pas l'arche de Noé non plus. Et on vogue doucement mais surement vers la plus belle des sources l'incohérence. On allume la télé ça nous fait pareil qu'entendre les piafs chanter tout se mélange on s'en fout Peut-être qu'au bout de tout ça tous ces beaux parleurs ces menteurs découverts pour ce qu'ils sont se jetteront par dépit du haut des falaises A vrai dire on s'en fout Le blabla reviendra d'une façon ou l'autre Le blabla est le joli masque que porte l'incohérence Voguons voguons comme disait Fellini et tant pis pour les galères. huile sur toile 46x55 cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Voguer vers l'incohérence

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Le joyeux bordel

Malgré tout il y a la joie. Indéboulonnable. Je peux sombrer autant de fois que je le veux, ou pas, c'est toujours elle qui gagne. La joie de quoi ? peu importe ce que l'on peut bien lui accoler. Je flanque le bordel sur mes toiles avec joie. Surtout quand je parviens à les terminer, que j'ai franchi des nuées d'hésitations et de doutes et que je me retrouve encore une fois à la fin avec pour seule compagne cette joie finalement. Est ce que les gens éprouveront cette joie en voyant mes tableaux ? C'est une question qui revient sans cesse. Personne ne me répond ce que j'ai envie d'entendre. On me dit c'est beau c'est intéressant Parfois il y en a même qui achètent. Mais personne ne me parle de la joie que j'ai réussi à capturer là, personne n'ose le dire ou personne ne la voit je ne sais pas. Est ce que ça suffit à ces messieurs dames des hautes sphères de l'art que ma seule thématique soit de trouver la joie dans le bordel ? De la trouver et de tenter de la partager. Ce sera court mon vieux. Et bien tant pis j'ai envie de dire. Moi c'est la seule chose qui me fasse vraiment tenir après en avoir essayé toute une panoplie. Je me réveille le matin et je me dis : allons z'y encore une fois flanquons donc un joyeux bordel et puis c'est tout. Huile sur toile 50x50 cm 2021 Patrick Blanchon|couper{180}

Le joyeux bordel

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Le vide et le plein

Quelques semaines que je me cantonne à la réalisation de petits formats. Comme il faut quelques contraintes j'ai décidé au début de ne pas utiliser de bleu et de ne travailler qu'avec de l'ocre, du vermillon du noir et du blanc. Mon idée était de travailler à la fois la composition et la nuance des couleurs de façon à ce que ces petits formats soient attractifs vus de loin. Que l'on ait envie de s'approcher d'eux. J'avais donc la contrainte et le but, ce n'était pas si mal. Ensuite je pourrais disserter durant des heures et de façon psychanalytique évidemment sur les formes, sur ce que tout cela représente ou ne représente pas, cela n'a pas grand intérêt. Une chose que j'ai retenue c'est que plus le format est petit plus le rapport entre vide et plein est important à trouver. Cependant le plaisir de découvrir toutes ces couleurs, toutes ces nuances et de les apposer les unes à coté des autres m'aura fait oublier cette dernière contrainte. Finalement la peinture ressemble beaucoup à l'écriture. Ca ne sert pas à grand chose d'avoir beaucoup de matières beaucoup d'idées et de toutes les étaler en même temps. A trop vouloir en dire on finit par ne plus rien dire du tout. Cela me laisse un sale gout dans la bouche. Mais en même temps il y a là matière à réflexion et à travailler d'autant plus. Supprimer tout ce qui n'est pas essentiel demande de savoir au préalable ce qui l'est vraiment. Peut-être que tout ce désordre, ce coté brouillon dans lequel je ne cesse jamais de m'engager dans tout travail de peinture ou d'écriture n'est que la répétition perpétuelle d'une recherche d'essentiel. Cependant je m'arrête souvent avant de l'avoir découvert cet essentiel comme si je ne voulais au bout du compte pas le voir. Comme s'il allait me flanquer, sitôt aperçu, sur une mauvaise piste. Comme si soudain j'allais surtout perdre tout plaisir de désordonner le monde. Le plaisir du désordre et l'austérité de l'essentiel.. ce serait donc ainsi que je vois les choses ? Alors que la plupart des personnes me diront que c'est tout l'inverse bien sur ... Cet équilibre du vide et du plein c'est aussi celui que je m'inventerais alors entre ordre et désordre, entre s'exprimer et ne rien dire. En rephotographiant ces tableaux avec un bon appareil et en utilisant un logiciel de traitement d'images je les redécouvre tout à coup. J'effectue des sélections, des recadrages dans cette parole ininterrompue que représente la peinture. Cela pourrait très bien être un vrai travail que de partir de ces fragments pour réaliser de grands formats. Je suis sur un fil en plein vent au dessus des gouffres. Je vacille perpétuellement dans cette quête d'un équilibre qui au bout du compte me procurerait cette confiance que j'imagine nécessaire pour effectuer le pas suivant... Et bien sur , et évidemment, dans une sensation de confort ou de sécurité qui, sitôt qu'elle advient, me parait être une lâcheté de plus et que je m'emploie à détruire aussitôt. Le recours à la dispersion c'est le champs de bataille sur lequel tous les possibles tombent les uns après les autres fauchés par ce combat entre confort et risque pour ne pas s'arrêter à la facilité tout en ne cessant pas de l'explorer. Parce qu'il y a des choses qui semblent faciles et qui ne le sont pas du tout et qui rendent le difficile soudain plus supportable, car on le comprend comme refuge. Au bout du compte les deux se rejoignent- facile et difficile-, vide et plein etc. Ils se rejoignent mais ne se confondent pas. Il y a un écart parfois tellement infime que l'on peut s'y tromper, se maudire, ou s'encenser bêtement. Ceci expliquant cela entre les montées de confiance en soi intempestives et les dépressions qui ne tardent jamais à les suivre. Evidemment pénétrer dans la vacuité, l'impermanence serait une sinécure. Pas de doute que la lévitation arriverait en bonus, cet upsell comme disent les vendeurs de soupe qui veulent bourrer le panier de la ménagère. Là aussi il y aurait beaucoup à dire sur les besoins véritables et les désirs imaginaires. Surtout sur cette obsession de vouloir être autre par le fait non pas d'être mais d'avoir. Un grand fil en travers du grand Canyon, des vents qui font rage, du ciel et des gouffres et je suis là en plein milieu prêt à chuter à tout instant sans même le recours d'un balancier. Je m'y suis engagé à bras nu, avec ma bite et mon couteau. C'est surement d'une ineptie totale et ça risque de bien mal finir si je me mets à y penser. Il y a déjà eut tous ces jours à s'enfoncer dans le gras du quotidien à faire des jobs de merde, à vivre une vie de merde, et le mot merde me monte naturellement, tout ça juste parce que je ne me sentais pas d'accord, parce que je croyais que j'étais différent, et surement je pensais aussi que j'avais totalement raison envers vents et marées de m'accrocher à cette idée de m'exprimer. L'envie d'être comme tout le monde me terrasse à chaque fois de la même façon. L'envie d'être comme tout me monde arrive sur son char armée d'une lance et je suis à poil face à elle, cette salope , sur le champs de bataille. Des milliers de fois je suis parvenu à m'écarter au bon moment lorsqu'elle me fonçait dessus. Une fois ou deux peut-être j'ai réussi à la déstabiliser mais pas vraiment à la vaincre une bonne fois pour toutes. Pas faute d'avoir rêvé à ces nuées de corbeaux qui la becquèteraient par lambeaux. Je ne suis pas Prométhée faut que je me rentre ça dans le crâne aucun vautour à l'horizon, Je ne le suis plus. Dans mes pires moments, je ne suis plus qu'un sombre idiot, une sorte de débile mental ou un gamin qui ne parvient plus à se relever tant il a finit par s'infliger lui même des coups pour se sentir vivant dans le territoire des morts. Je vais ranger ça dans récits de fiction. Ce genre de choses qui me traversent et par lesquelles je me laisse traverser sans trop broncher. Je n'ai absolument aucune idée sur la teneur de ce genre de propos. Est ce du lard ou du cochon ? Du vide ou du plein ? du vrai ou du faux ? Je me contente juste de l'écrire tel que ça vient au cas où ça puisse servir un de ces quatre à moi ou à quiconque peu importe. C'est un petit format comme ceux que je peins avec souvent beaucoup trop de choses. Mais dont l'agrandissement d'un fragment réservera peut-être une ou deux surprises voilà tout simplement ce que je me dis. Et peut-être aussi que ça me permet d'avancer d'un pas de plus pour aujourd'hui sur ce putain de fil on ne sait jamais. Fragments huiles sur toiles 2021 Patrick Blanchon|couper{180}

Le vide et le plein

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Confiance et pognon

Une chose importante pour le premier banquier venu est la confiance. Si elle n'est pas là vous n'aurez rien, vous n'existerez pas sauf si vous allez par mégarde faire un tour dans le rouge. Mais vous existerez en négatif alors, en mouton noir, en vilain petit canard. Sans la confiance il y a de grandes chances qu'aucun système économique viable n'existerait. Cependant à force d'assimiler confiance et pognon nous avons probablement fini par y perdre notre latin. Si fidus désormais ne se décline plus autrement que par fiducier, finances, on peut nonobstant le mystère des consonnes qui dérivent avec le temps du d vers n... imaginer que la confiance part d'un échange tout bête pour s'achever désormais en catastrophe planétaire. Heureusement la naïveté générale vient à la rescousse. C'est son rôle principal d'ailleurs car sans elle il y a fort à parier que nous n'entretiendrons les uns envers les autres que des relations de méfiance. Etre naïf peut ressembler à une tare lorsqu'on est jeune et inexpérimenté. Je veux dire qu'on s'en veut beaucoup à soi-même de l'être, de l'avoir été, tout en se jurant qu'on ne nous y reprendrait plus. Cependant qu'avec le temps, l'âge on s'aperçoit que c'est une ineptie de l'écarter, de la reléguer dans les oubliettes, de la conspuer ou de la maudire. Et tout ça sous prétexte que l'on aurait apprit quoique ce soit sur la vie, sur nos contemporains, qu'on serait devenu "lucide". La lucidité est une prison, je peux vous l'assurer, et une fois qu'on y est on ne cherche qu'une seule chose, c'est bel et bien de s'en évader. Se re présente alors la naïveté qui nous fait de l'œil, avec la lime adéquat à limer les barreaux, la corde tressée d'espoirs et on se dit que ce serait bien ballot de ne pas en profiter. Redonner de la confiance à la naïveté est sans doute l'une des dernières aventures digne de ce nom pour un aventurier qui se respecte un peu. Evidemment il y a toujours un risque de se faire avoir si on espère. Et n'espère t'on pas toujours plus ou moins ? Récemment j'ai été contacté par un client qui m'a déjà acheté plusieurs toiles à bon prix. Et celui ci me propose soudain de lui proposer de grands formats qu'il exposera sur une plateforme internet bien connue et sur laquelle il possède un gigantesque réseau de followers. Jusque là tout va bien. Tout est gratuit. Je n'envoie pas de toile tant qu'elle n'est pas achetée et payée... une sinécure pour artiste peintre forcément. J'allais commencer à effectuer des sélections parmi mes jpeg, créer de jolies fiches, bref tout préparer pour passer à l'action quand tout à coup je me suis demandé quel pouvait bien être l'intérêt de ce client galeriste d'exposer mes œuvres virtuellement. Qu'est ce qui le différencierait de ce que je pratique déjà moi-même... ? En allant jeter un coup d'œil à la page en question et à son fil d'actualité je vois des œuvres d'art entourées de jolies filles un peu dénudées accompagnées de musique, le tout en vidéo ou en photographies et effectivement le truc à l'air de bien fonctionner étant donné le nombre de vues pour chacun de ces post. Pas beaucoup de "like" mais énormément de vues. Ma première réaction est de me dire comme c'est de mauvais gout. Je pense à ces pubs de bagnoles avec ces nanas qui lèchent le capot et je me dis ensuite quel est donc le public visé par ce genre de produit ? Des parvenus, des nouveaux riches, des gens incultes et sans gout avec de grosses gourmettes au poignet assurément... Et où trouve t'on ce genre de spécimen le plus actuellement ? En Russie et en Chine. D'ailleurs il y a beaucoup de mannequins de l'Est et d'Asie sur les posts en question. Bien Bien Bien.... je cogite je cogite ... Finalement je me dis que j'ai un esprit petit bourgeois mâtiné de gauche caviar pour avoir un tel toupet question gout... Car finalement si on vend de la lessive, des brosses à dents, des bagnoles et des assurances déces comme ça pourquoi la peinture ferait-t 'elle exception ? Du coup je transmute gentiment le mauvais gout en phénomène d'avant garde, je me dis oh mais finalement on détourne les codes c'est tout à fait chouette pourquoi pas. Je me remets le nez dans le tri, je m'ébaubis, tout en tirant la langue en m'appliquant à bien tout noter et surtout le prix de mes œuvres dans ce joli dossier prêt à être envoyé. Je monte mes prix du coup parce que je me dis que si je mets les prix habituels on va me rire au nez. Est ce qu'un milliardaire russe ou chinois va prendre au sérieux une toile à 100 balles ? Que nenni, un peu de jugeotte mon vieux. Je me dis sois pas con monte encore un peu plus. Voilà tu y es presque encore un effort, piétine donc ta moralité à la noix, ta philanthropie, ta générosité et ta gentillesse, tout cela ne sert à rien pour l'occasion. Je m'arrête en plein vol cependant car tout à coup de sombres pensées me viennent du fin fond de l'encombrante lucidité qui certainement a pour petit nom ma connerie et qui ne cesse de m'entraver comme un boulet au pied. Et si c'était la mafia ? Et si c'était rien que pour blanchir du pognon sale toute cette affaire ? Peu importe les prix et au contraire tant mieux s'ils sont gros, ils achèteront à tour de bras. Oh la la Patriiiiiiick qu'est ce que tu es en train de penser et que t'apprêtes tu à foutre ? Et puis je me suis fait un café... j'ai fumé une clope, je me suis gratté la tète, un peu les couilles aussi pendant que j'y étais et je me suis dit t'es vraiment un putain de parano. Sois confiant en ton étoile, mise tout ce que tu as vas y, que risque tu au bout du compte ? De devenir riche juste ça, est ce vraiment si grave ? D'être ridicule aussi ? quelle importance finalement tu l'es déjà tellement, un peu plus un moins ça ne te changera pas vraiment la vie. Et depuis j'ai tout laissé en stand by, un coup je me dis oui un coup je me dis non, le diable est là au fond de moi et me tripatouille sans relâche en prenant la tête de KAAA le serpent du livre de la jungle qui susurre "aie confiance aie confiance" https://youtu.be/evt_8hluLww|couper{180}

Confiance et pognon

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Les désirs

Harry désormais partageait la pause repas avec ses coreligionnaires. Et bien que ce fut pour lui une véritable torture, le désir de se rapprocher de la petite rousse, Sophie, l'emporta. Une fois de plus constatait- il, il se retrouvait confronté à ses contradictions sans savoir vraiment comment s'en dépêtrer. C'est l'animateur du stage, Christian, qui lui donnera les clefs l'après-midi même en invoquant la notion de désir conscient et inconscient. Un exemple ? Beaucoup de personnes recherchent la gloire, la célébrité ( désir conscient) mais dans le fond ils sont agoraphobes, ils détestent la foule, parfois même l'ensemble de leurs contemporains, et parmi eux nul doute que certaines ou certains préfèreraient qu'une bombe atomique ait tout dévasté de l'humanité. Imaginer un peu ...se retrouver enfin seul et peinard pour tranquillement se rendre dans ce qui reste de supermarché, de boutiques de luxe, sans plus avoir à passer à la caisse. ( désir inconscient) Je vous laisse méditer cela quelques instants ajouta t'il en croisant les bras puis les décroisant pour finir par ne plus se concentrer visiblement que sur les ongles de sa main gauche. Tout cela pour parler de la congruence évidemment. C'est à dire cet effort d'honnêteté vis à vis de soi-même, qui alignerait nos valeurs avec nos actes et nos pensées. Un sujet éminemment passionnant qui n'empêcha nullement Harry de bailler discrètement une bonne dizaine de fois et de se sentir soulagé lorsqu'enfin l'animateur les libéra en fin de journée. Finalement pourquoi s'était-il inscrit à ce stage ? pourquoi s'intéresser au développement personnel ? Il alluma le contact de la Twingo et en roulant au pas pour sortir du parking , il se senti encore plus soulagé d'avoir découvert un sujet de réflexion pour le chemin du retour. Admettons que je veuille apprendre quoique ce soit dans ce domaine, je pourrais invoquer l'envie de me sortir de ma timidité chronique par exemple, est ce vraiment la raison principale ou bien y a t'il d'autres raisons plus profondes que je ne m'avoue pas ? Puis ses pensées dérivèrent à nouveau vers la plastique de Sophie et notamment sur la commissure de ses lèvres qu'il avaient longuement observée durant le déjeuner. La façon dont les gens utilisent leurs bouches pour se nourrir avait toujours été un indice important pour Harry. Il s'en rendait compte soudain. C'était tout à fait le genre de choses à retenir et à noter sur son journal de bord aussitôt qu'il serait de retour chez lui. Enfin ses pensées dérivèrent encore plus avant vers la texture laiteuse de la peau de Sophie, vers le lobe de l'oreille qui avait également accaparé une bonne partie de son attention au cours de cette journée de stage. Et enfin évidemment tout le reste fut passé au crible durant le reste du trajet. En gravissant les sept étages qui le conduisaient à son appartement, il fut assailli par des images érotiques, voire pornographiques. Le désespoir accompagnait le petit film qu'il se faisait. Et si dans le fond il s'était juste inscrit à ce stage pour rencontrer des femmes dans un cadre extraordinaire afin de laisser libre cours à sa libido dévastée ? C'est sur cette dernière trouvaille qu'il décida de s'endormir. Un sommeil agité naturellement ponctué de gémissements et d'encouragements qu'une géante rousse à la peau laiteuse émettait en ondulant de tout son long. .......................................................................................................................................................................................................................................... Jim se curait le nez depuis quelques minutes lorsqu'il entendit le passage des camions poubelles tout en bas de l'immeuble. Il regarda les sacs poubelle qui s'accumulaient depuis quelques temps près du coin cuisine de sa piaule et décida que c'était maintenant ou jamais. A Paris il n'était pas rare que l'on découvre des cadavres en raison des plaintes des voisins quant aux odeurs. L'idée que l'on vienne frapper à sa porte pour voir s'il était mort l'effraya d'un coup et il bondit hors de sa chaise, s'empara des sacs plastique, puis sortit de la chambre , descendit les escaliers quatre à quatre pour rejoindre la rue. Le camion arrivait juste à sa hauteur et il balança les sacs directement dans la benne. Il serait remonté aussitôt si ce n'avait été une si belle journée qui s'annonçait . Il se décida à pousser jusqu'à la rue Custine pour prendre un café. Les platanes avaient recouvré leurs feuillages, il y avait dans l'air une odeur d'essence et de pralines grillées. Jim respira à plein poumons et se dit que c'était vraiment ce genre de sensation qui importait pour lui. Se sentir libre, seul et libre et gouter de tout son saoul à cette liberté comme à cette solitude dans cette rue particulière sur laquelle il avait jeté son dévolu quelques semaines plus tôt. Les bistrots qui sortaient leurs terrasses, l'eau étincelante filant dans les caniveaux, un ciel bleu au dessus des façades et des toits des immeubles, une luminosité particulière accompagnaient les odeurs de la rue, tout paraissait converger exactement vers le centre névralgique de son rêve, ce personnage d'écrivain qu'il avait peu à peu construit grâce à John Fante, Henri Miller, Bukowski, Stendhal et Dostoïevski. Pour rêver des choses extraordinaires il s'était crée une existence pire qu'ordinaire, que n'importe qui d'autre que lui aurait pu considérer misérable. En remuant son café il se demanda pourquoi il mettait autant d'acharnement à refuser de vivre comme tout le monde et il vit passer soudain une ombre sur la façade d'en face, un nuage qui obscurcissait le ciel soudainement. Il jeta un coup d'œil à sa montre, laissa la monnaie sur le ticket de caisse pour clouer celui ci en cas de coup de vent, puis il regagna l'hôtel, monta les escaliers sans hâte et referma la porte doucement derrière lui pour ne pas faire de bruit. Quelque chose s'était mis en travers de son enthousiasme et il fallait qu'il noircisse un bon paquet de feuilles afin de tenter d'en avoir le cœur net. .............................................................................................................................................................................................................................................. Eva Klepper n'avait envie de rien. Elle avait laissé un message quelques minutes plus tôt sur le répondeur de la boite pour se porter pâle. Cela n'avait pas du tout été prémédité, elle avait décroché l'appareil comme elle avait mis en route la cafetière. Et le plus étonnant c'est qu'elle n'éprouvait aucune honte, aucune culpabilité particulière. Elle avait bien le droit de prendre une journée après tout, était-t 'elle si essentielle que cela ? Les gens indispensables peuplent les cimetières, c'était cette dernière pensée qui l'avait aidée à formuler le message laconique sur le répondeur de la boite. L'appartement était d'une propreté chirurgicale. Elle ne s'était pas ménagée la veille jusque tard dans la soirée pour tout briquer, tout effacer, la moindre trace qui pourrait lui rappeler Bob le mollusque qu'elle venait tout juste d'éjecter. A un moment elle regarda le canapé, éprouva une légère crainte comme les petites filles qui jouent à se faire peur toutes seules, puis voyant celui ci désert elle en éprouva une joie soudaine. Un peu exagérée sans doute se dit-elle. Elle se dirigea vers le canapé et s'assit. Elle n'aurait pu dire ce qui clochait vraiment. Par la fenêtre la lumière du printemps pénétrait à flot, elle gagnait bien sa vie, elle était encore potable physiquement, sans trop de douleur articulaire à 50 ans passés ce qui n'est pas négligeable, et elle venait de flanquer dehors une ambiguïté qui la taraudait depuis des semaines. Un homme enfant qui n'avait eu de cesse de lui renvoyer d'elle même l'image d'une maman un peu pute. Eva n'avait jamais voulu avoir d'enfant. Seul sa carrière comptait du moins c'est ce qu'elle s'était toujours efforcé de croire. Cela lui avait permis d'évacuer bon nombre de questions en suspens et qui désormais avec le retour du printemps cette année là précisément revenaient à la charge. Finalement elle n'était pas bien loin de céder à une vision dérisoire de sa vie qui a première vue ne lui renvoyait que son égoïsme. Bon ce n'est vraiment pas le moment de se laisser aller se dit elle en sautant sur ses jambes. Te laisse pas abattre ma vieille, elle se rendit à la salle de bain, se refit une beauté, ce qui n'était pas si difficile qu'elle l'aurait cru quelques minutes auparavant, puis elle enfila un jean, des tennis et acheva de compléter sa tenue sport avec un sweet. Sport et jeune, abordable quoi.. elle esquissa un sourire face au miroir de l'entrée, puis elle sortit de chez elle avec la ferme intention de se remettre en chasse malgré tous les signaux cardiaques qu'elle se hâta de balayer en refermant la porte de l'ascenseur. Enfin parvenu sur le trottoir de la rue Custine où elle vivait, elle était redevenue cette guerrière, cette amazone prête à lutter contre tous les petits désagréments de l'existence, à croquer la vie à pleine bouche, en lui roulant une pelle au besoin. huile sur toile 20x30 cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Les désirs

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Le mont des Oliviers.

Emma faisait partie de ces personnes qui se délectent lorsqu'elles propagent de mauvaises nouvelles toujours en quête d'une oreille réceptive, ce qui ne manque pas ici aux alentours de la machine à café. Ce matin là, après un bonjour de rigueur et sans plus de préambule, elle ne pouvait visiblement plus se contenir et déversa d'un coup tout ce qui semblait la torturer depuis un sacré bon moment déjà. Par manque de bol et selon les lois attribuées aux effets collatéraux, j'eus à peine le temps de m'esquiver et de rejoindre mon bureau lorsque la nouvelle m'atteignit de plein fouet. "Le président se tape Grecho j'imagine que vous ne le saviez pas." C'était effectivement une mauvaise nouvelle, le genre de truc qui érode petit à petit ce sentiment fragile que l'on soutient à bout de bras et qui se résume en gros à vouloir bien commencer sa journée. En même temps le dégout l'emportait sans conteste sur la frustration. J'imaginais ce gros porc de Weiss en train de peloter avec ses petits doigts boudinés le corps sculptural de Martine Grécho sur laquelle je ne cache pas avoir eu quelques vues. La belle brune ténébreuse dégringola du petit piédestal de mes fantasmes aussi rapidement qu'elle y était parvenue. Ce qui au bout du compte me laissa mi figue mi raisin face à ce début de journée morose et à la paix soudaine qui nous tombe dessus quand on a perdu une nouvelle illusion, avec toute l' armée d'engouements et de désirs qui l'accompagne. Tandis que les oh et les ah entourant comme un essaim d'abeilles et de bourdons Emma la messagère, des bribes d'Henri IV étrangement associées à des bouts dialogues de big little lies me revinrent inopinément " Don't shoot the messenger" Puis Laura Dern sauta vers David Lynch à l'intérieur du labyrinthe de ma mémoire et ils se perdirent je ne sais où lorsque je découvris soudain la pile de dossier en retard que j'avais sur le coin de mon bureau. J'avais mobilisé une partie importante de ce qui me restait d'énergie lorsqu'au bout de quelques minutes à peine, je refermais le dossier sur lequel je m'efforçais de trouver le moindre intérêt , une affaire de voisinage au sujet d'une haie intempestive devenue le prétexte à tous les déversements haineux de deux vieilles filles frappées par la fatlité des mitoyennetés. Je soulevais un peu le store pour m'accabler un chouia de plus en me rendant compte à quel point je gâchais ma vie et mon talent devant une si magnifique journée lorsque le téléphone sonna. C'était Martine Grecho au bout du fil. Bonjour Paul vous n'oubliez pas la réunion de 9h30 bien sur et le Président aimerait obtenir un point sur les dossiers en cours. Quelque chose comme ça bla bla bla . Puis elle raccrocha. Je consultais ma montre dans l'espoir d'avoir quelques minutes devant moi pour me refaire une contenance car j'avais totalement zappé l'affaire. Je pris ma pile de dossier sous le bras et à 9h34 j'arrivai dans la grande salle de réunion comme d'habitude bon dernier. Le Président, lunettes sur le nez, fit semblant de ne pas me voir évidemment, puis il les releva sur son front et toisa notre petite assemblée avec son air hautain et méprisant. Comme il inclinait légèrement la tète en arrière je m'aperçus qu'il n'aurait vraiment pas été difficile de lui imaginer un groin à la place du nez et du coup en attendant qu'il finisse de débiter les fadaises hebdomadaires concernant des courbes s'épousant s'entrecroisant et divorçant je fis semblant de prendre des notes, en esquissant un joli cochon engoncé dans un costard à rayures et étranglé par un nœud pap. Quand vint mon tour je ne surpris personne en démontrant une fois de plus mon talent à brasser du vent avec peu de chose, ce qui dans mon esprit caricaturait à peine le contenu global de ces putains de réunions. Le Président soupira, Martine Grecho installée près de lui en pleine prise de notes croisa les jambes, et j'eus la nette impression que mon inefficacité soulagea à ce moment là l'ensemble de mes collègues qui s'en trouvèrent comme par magie revalorisés. C'était en quelque sorte une resucée hebdo de la tragédie du Mont des Oliviers dans laquelle j'avais été choisi pour incarner le meilleur rôle. Les doigts boudinés du Président avaient fini par se rejoindre et ils se frottait les mains nerveusement comme un Ponce Pilate excédé d'apercevoir chez son collaborateur à la fois un Judas doublé d'un hurluberlu . A mon front ceint d'une couronne de bévues et d'oublis, j'incarnais très certainement le rejeton de la divine Incompétence que la Providence avait jeté en travers de ses Weston derbies. En général c'était toujours à cet instant précisément que je rêvais de gains pharaoniques, d'un billet de loterie gagnant qui me propulserait en plein milieu de la table de réunion et me transformerait en faune. Je sortirai ma flute de pan et vlan j'inonderais toute cette petitesse, cette mesquinerie par des jets d'urine tout azimut sur l'air de la chevauchée des Walkyries. Le seul obstacle à surmonter pour que ce genre de scénario se réalise aurait été que je me mette à croire au hasard, à la chance et que je pénètre chez un buraliste pour remplir une grille ce qui ne représentait pas autre chose que le symbole absolu d'une défaite totale. Pourquoi ne pas aller à Lourdes aussi et boire de l'eau bénite pendant que j'y suis ? La salle se vida lentement, Martine Grecho ferma la marche. En passant devant elle je tentais un mince sourire auquel elle ne répondit que par un regard bovin. Puis elle donna un tour de clef sec, et disparut au fond d'un couloir accompagnée d'un joli tintement de clochettes. Je rejoignis mon bureau reposai la pile de dossiers exactement au même endroit où je l'avais laissée puis je bougeais la souris reliée mystérieusement à l'Azus préhistorique que la boite m'avait confié. L'écran de veille s'évanouit pour laisser jaillir sur le fond blanc de la messagerie pas moins d'une centaine d'intitulés en gras menaçants comme des idées noires. Je cliquai aussitôt pour réduire la fenêtre sur la barre des taches et ouvrai une nouvelle partie de Freecell. Avec un peu de pugnacité celle ci m'occuperait jusqu'à la pause déjeuner. Bon an mal an je ne me plaignais pas. Ce job m'apportait un sacré répit depuis quelques mois et je m'enfonçais avec résignation dans la vie normale partagée par des millions de personnes, ce qui avait longtemps représenté pour moi une singularité effarante. J'avais fait les 400 coups plus d'une fois, traversé des pays, fréquenté des personnes de tout acabit, et ce sans parcimonie jusqu'au alentours de la trentaine. Et puis soudain l'automne est devenu plus froid que les autres années, la crainte de gâcher ma vie est arrivée comme une bourrasque pour m'emporter vers cette boite d'intérim de la gare de l'Est. Il y avait bien un poste m'avait confié la chargée de clientèle avec un air entendu qui accompagna son 06. Un boulot de scribouillard dans un cabinet d'avocats à l'autre bout de la capitale. C'était une bonne occasion pour me replonger dans un quotidien plus classique, moins interlope, d'autant que les horaires ne crèveraient pas ce que je considérais comme la seule bouée de sauvetage à laquelle je m'agrippais, mon obsession de devenir un grand écrivain. Au final je ne quittais décidemment pas cette vision du mont des oliviers, que ce soit dans ma vie aventureuse passée ou dans cette existence que j'espérais normale il y avait ce lien sacrificiel qui m'obligeait à me considérer comme un juif errant, une sorte d'élu, et ce même lorsque je décidais de mettre de l'eau dans mon vin, surtout lorsque je m'essayais à la modestie. Il fallait toujours que je parvienne à modifier la réalité, ce qui m'en arrivait, que je la malaxe pour me l'accaparer et qu'elle m'aide à faire de moi-même soit un héros soit une victime extraordinaire. En en prenant conscience j'ai passé de sales quarts d'heure. J'ai visité un paquets de trente sixième dessous innombrables et ce d'autant que ma fierté, mon orgueil, mon imagination ne parvenaient pas à accepter que tout cela n'était qu'une sorte de pansement sur une jambe de bois. De la case grand écrivain en devenir je passais régulièrement à la catégorie dernier des cons. A bien y penser c'était encore briguer une place exceptionnelle que je ne méritais certainement pas au bout du compte. Je crois qu'à partir de cette prise de conscience, j'ai arrêté totalement de me rendre à la machine à café , j'ai même arrêté de travailler dans cette boite quelques semaines plus tard, je désirais prendre ma vie en main, en faire quelque chose , arrêter de divaguer. J'ai pris cette année là un sacré coup de vieux qui me flanqua le blues au moins durant 6 mois. Et puis j'ai fini par me dire que tout cela était parfaitement injuste, que je ne méritais vraiment pas ça et je suis vite reparti vers ma vie loufoque et mon rêve d'écriture. En y ajoutant l'alcool -une bouteille de Balantines par jour. Même si c'était une illusion elle me permettait malgré tout d'endurer la médiocrité ambiante qui ne cesse jamais de me sauter au visage à tous les coins de rue et mieux, d'en faire comme de la banalité de profondes sources d'inspiration à venir, quelque chose dans le voisinage du merveilleux. Huile sur toile format 24x30 cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Le mont des Oliviers.

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Pas besoin d’être content

Souvent j'ai peint des trucs qui, avec le recul me semblent vains. Je les planque, les enfouis, comme des hontes. Je n'en suis pas content. Et c'est souvent aussi lorsque par hasard un visiteur arrive et explore les piles de toiles, les cartons, les archives qu'il pousse des oh et des ah, tout un tas de petites onomatopées sensées exprimer l'admiration. ça me fait drôle à chaque fois. Ce qui ne me plait pas à moi ça plait à d'autres c'est d'ailleurs assez souvent comme ça. Aussi pour résumer j'ai fini par faire comme Diogène avec son bol qui l'a jeté en voyant un enfant boire juste à même les mains. Le résultat final de chaque peinture, pas besoin d'être ou non content. Et plus ça va plus c'est ainsi chaque jour des choses naissent et meurent dans l'atelier, comme des fruits mort humide, mort sèche mais peu importe les résultats les énervements, la joie comme la tristesse l'essentiel n'est pas dans un résultat il est dans l'obstination de recommencer tout le temps. Non il n'est nul besoin de s'accrocher à cette idée d'être content ou triste de ce que l'on fait. On le fait du mieux qu'on peut à cet instant, comme on le peut et c'est déjà largement suffisant. huile sur papier 36x48 cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Pas besoin d'être content

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Visage

Elle se résume à une écume, quelques syllabes, une ou deux plumes. Et toujours elle ressurgit, et ce n'est pas grand chose, un rien recrée le dialogue, l'analogie née d'un instant suspendu du carrefour du regard elle est lune traversant les nuées les rancunes de toutes les patientes récoltes souvenirs d'avare le fleuron du catalogue la nostalgie hiéroglyphe cher à l'égyptologue peinard bien plus précieux que la moindre thune. Echapper à l'enfance des yeux ce serait fuir ton beau visage l'éternité les chronologies. C'est pour cela sans doute qu'existent les rondeurs la brutalité la douceur l'exploration spatiale sans oublier les mineurs, les forgerons les spéléologues Qui vont chercher dans un ailleurs la tendresse première l'éblouissement du cœur Tous ces errements cet acharnement ce naufrage obligé dans le monologue. même les plus grandes gueules, les brutes se font tatouer cette putain d'amertume qu'enferment ces deux sons doubles qu'on sonne l'horreur et la splendeur du mot maman. Visage huile sur papier 36x48 cm|couper{180}

Visage

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Une petite joie.

Il tire sur la cupule d'alu et ô miracle, elle résiste suffisamment pour que le couvercle baille puis s'ouvre en grand. Au fond bien rangées cinq sardines brillantes plus une rondelle de citron si fine qu'elle en est diaphane. Fourchette ou couteau ? Tout doucement il passe les dents sous un ventre puis lève. La sardine est toute entière dans l'assiette, une petite joie.|couper{180}

Une petite joie.

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Un autre rêve

Toutes ces peines, ces chagrins, ces désirs, un essaim incessant qui bourdonne gentiment dans la nuit. Une richesse qui se brasse toute seule au tout dedans d'un regard avare. Un ivrogne avide de conserver toute sa soif. Une constipation à n'en plus finir. On voudrait tout garder encore et encore, ne rien lâcher. S'y vautrer par confort face à l'inquiétude du rien. Ressasser, en rajouter des couches, encore et encore et des questions et des et si. Une abondance stupéfiante et toxique qui abolit l'espace et le temps. Suffirait de faire un pas de côté pour sentir le froid grimper. Glacé par ce face à face, on voudrait bien mais on ne peut point. On ne peut pas et on se réfugie vite fait dans le fameux c'est plus fort que moi. On ne peut point on n'est que ligne. Mais quand même on retente, on s'accroche, l'évasion fait rêver. Imagine un autre rêve que celui-ci. Peut-être une autre chance, une page blanche. Mais que dit la mort sinon ce que l'on sait déjà encore et encore. Epuise tout ça mon petit gars, épuise. Epuise encore et tu verras. Un peu comme Pavese mal compris "La mort viendra et elle aura tes yeux." Je m'attendais à une amante, un genre de bombe qui ferait tout exploser qui réduirait tout ça en poudre pour toujours En poussière d'étoile, en origine. Je n'ai vu au final qu'un voile orange. Le chirurgien tombe à point nommé , me débarrasse gentiment de mes vieux cristallins. Changer de vision ce n'est pas rien Mais l'habitude est reine, le confort de la peine est roi. Pour un clin d'œil de joie on paie ici des millénaires de chagrins. C'est le prix, c'est sans doute ce que ça vaut. On serait bien foutu d'en abuser je me connais. Se ruer vers la joie pour échapper à soi. Se barrer à l'anglaise encore une fois. Mais n'as tu pas du tout de rêve ? Bien sur j'en ai plein mais rien que des ne servant à rien. Rêver à rien c'est tout de même quelque chose c'est comme des coups d'épée dans l'eau ça ne fait rien à l'eau ça dit juste que t'as une épée dont tu ne sais pas quoi foutre Tu ne l'emporteras pas au paradis mon petit gars ah ça non. Pour t'en débarrasser juste un enfer à traverser. Et puis maintenant nu comme un ver vas-y Parle moi donc de cet autre rêve je plongerais le nez dans ton haleine de bébé j'écouterais ton silence et si tout se passe bien, alors je serais apaisé. Dessin sur logiciel Procreate Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Un autre rêve

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Le pays où il fait toujours beau

En carte postale c'est bien, ça fait plaisir cinq minutes, surtout s'il y a du texte écrit derrière, de l'interligne qui semble dire "je pense à toi", ou plutôt je te fais croire que je pense à toi pour maintenir le lien, la relation. En vrai la plupart des cartes postales sont comme des œuvres de charité, elles ne sont destinées qu'à se donner bonne conscience, et puis ensuite on peut aller baiser, se balader, faire du shopping le cœur serein, l'âme en paix, autant que cela soit possible évidemment. https://youtu.be/F1dTv_WsMRI Mais en réalité il faut vivre quelques temps dans un pays ensoleillé tout au long de l'année pour comprendre comme c'est chiant. C'est aussi chiant que les pays où il pleut toujours, où il fait toujours froid. Passé les premières impressions fugaces, l'étonnement, on retombe inéluctablement dans l'habitude. Dans cette façon obsédante de voir les choses du fin fond d'un ennui personnel dont on n'arrive plus à se désengluer. Car autrement, si on est véritablement occupé, si on a un but, si on s'y attelle avec ferveur, jour après jour, quelle importance qu'il fasse beau ou pas ? C'est pareil pour tout. Que ce soit un job, une rencontre, une passion. Passé le cap de la surprise, de l'excitation l'amygdale ne cesse plus de créer des lassitudes, des peurs, des hantises. Saleté de glande toujours aux aguets, n'ayant pour seule obsession que l'arrivée aussi imminente que plausible du pépin. Le bruit du courrier dans la boite à lettres a remplacé le grognement du tigre à dent de sabre. C'est toujours une jungle peuplée de dangers . Il faut que s'en soit une sinon ce ne sera pas drôle, ce ne sera pas palpitant. Ne subsistera que cette impression bizarre d'être ce navet planté là dont le destin est de finir au mieux dans la soupe. Pas question de devenir poireau ou tomate, non non non. L'image obsédante de ce légume désolant de fadeur accompagné du fameux bon sens nous en empêchera. Croyez vous pouvoir changer ainsi à votre guise ? Imaginez l'effort, la transmutation du plomb en or. Cela existe bien sur, les scientifiques savent faire, avec un appareillage qui s'étale sur des kilomètres. Suffit de bombarder, de créer de magnifiques collisions pour qu'enfin un atome de plomb accepte enfin par lassitude de lâcher quelques uns de ses protons et neutrons dans l'urgence afin de devenir un atome d'or. A quel prix tout cela ? Franchement est ce que ça vaut vraiment la peine de dépenser l'argent du contribuable dans ces fadaises ? Si tout ce qui brille n'est pas de l'or, ce qui ne brille pas n'est pas pour autant de la merde, voulais je dire. On ne pense pas au courage qu'il faut pour être seulement ce que l'on est et s'y tenir. Mais avant évidemment il faut être persuadé d'être quelque chose, ou quelqu'un. C'est le plus difficile. Sauf si on croit que tout ce que l'on nous dit est vrai depuis le début. Sauf si l'amour est là. Et on met aussi un temps fou à comprendre qu'il est toujours là. C'est un sacré parcours que tout le monde n'a pas vraiment l'envie, le courage d'effectuer. Et que l'on effectue pourtant peu ou prou. Comme d'aller vivre tout à coup dans ce putain de pays où il fait toujours beau. Car même si d'un coup on s'habitue aux éléphants roses, si on commence à les entretenir, à les nourrir, il serait bien étonnant qu'on ne soit pas rattrapé à un moment ou un autre par un fantôme d'éléphant gris. Et celui ci dirait en barrissant : Assassin tu me relègues dans la catégories des fossiles, des cadavres du placard, et pourtant j'ai vécu moi aussi, j'ai existé, je n'ai pas été qu'une illusion, une belle ou une sale histoire ! Savoir qui on est peut-être que ça commence par tenter d'admettre que tout est à sa place, que le gris et le rose ont autant leur place dans la farandole que les jours de pluie et les jours ensoleillés, que ce qui nous entrave pour s'en apercevoir c'est cette idée de confort, de sécurité qui accompagne obstinément l'ennui. Huile sur toile format 60x80cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}

Le pays où il fait toujours beau

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Gammes

Une journée comme ça, avec une simple envie à laquelle on s'accroche. Une envie de revenir au meilleur de soi avec la petite béquille de l'application. Cahin caha juste cette envie de faire des gammes. « Gammes » huiles sur toile petits formats|couper{180}

Gammes