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Histoire de dindons
Un dindon se dandinait en dodelinant de la tête ce qui procurait un drôle de tremblement à sa pendeloque à son fanon et pis sa barbe. Une vieille dinde encore coquette, affamée et hors d’elle pour ces deux raisons déraisonnables avisa notre dindon. Un glouglou par ci un glouglou par là et je te ments par là et je te ments par ci. Comme ces deux là voulaient approximativement la même chose ils essayent d’être amants. Un petit coup par ci et beaucoup de rétablissement par là. Vous vous faites vieux mon cher s’écrie la dinde hors d’elle et toujours affamée évidemment Vous êtes si exigeante tente le vieux sans vouloir la froisser. Alors que dans sa barbe , juché sur ses ergots il manque basculer croupion par dessus tête en songeant bigre qu’elle vieille peau ! Exigeante vous dites ? Vous vous regardez ? Vous ne faites que prétendre sans avoir rien de tendre ! Le fermier qui finit sa sieste se lève d’un mauvais pied en entendant le boucan des deux gallinacés et dit non mais assez ! D’un coup d’un seul il tranche le cou du gros et de la mondaine. Qui continue comme il se doit à marcher sans queue ni tête comme cette petite histoire. Moralité quand on est de l’espèce des dindons il faut profiter de l’instant présent fermer son bec et faire feu de tout bois bon an mal an sous peine de perdre toute illusion et surtout la tête. Enfin se sauver dans le bon sens voulais je dire… Dindon sauvage attrapé sur Pinterest|couper{180}
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On ne peut tout faire
Il y a des jours où je ressens que le temps va me manquer. Que je ne serai pas en mesure de réaliser en peinture tout ce que j’ai rêvé. Ça me rend fébrile, dingo, infréquentable. Je me renferme sur moi-même et me jette dans le travail à ces moments là en imaginant je ne sais quoi.. peut-on jamais rattraper le temps… celui des rêves ? Parce que le temps perdu ne se rattrapera qu’en regrets stériles. Il n’en vaut aucune peine, aucun chagrin,aucune nostalgie. C’est au présent que l’on lutte. Pour canaliser la peur. Comme un cheval fou qui se cabre devant les ombres de l’inéluctable. C’est pour apprendre à dompter cette peur que je peins. Je rate souvent. Je trouve des subterfuges pour conserver l’espoir. La créativité se joue là aussi. Elle se joue de moi. Je gratte la croûte du temps sélectionnant par ci par là des lambeaux pour faire du lent et je l,espère toujours du beau sans raison ni cause. Gratter la croûte|couper{180}
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Sur le bord du Cher
Voilà le résultat final de cette toile commencée ce matin… ( voir mon flux Instagram )peu à peu la narration que je commençais à voir poindre accompagnée de la facilité s’est dissipée… j’ai eu envie de nature encore une fois, des éléments, d’eau probablement et Manessier est doucement arrivé sans bruit pour s’asseoir un instant près de moi. Je ne connais pas la baie de Somme, mon pays c’est l’Allier et le fleuve le Cher ! Here is the final result of this painting started this morning … little by little the narration that I began to see dawning accompanied by the ease dissipated … I wanted nature once again, the elements, probably water and Manessier slowly came silently to sit down next to me for a moment. I do not know the Bay of Somme, my country is Allier and the Cher river !|couper{180}
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Fragmentation
La susceptibilité est quelque chose d’à la fois horrible et merveilleux.Elle nous propose toujours un choix entre ouverture et fermeture. Peut-être ne sert t’elle à rien d’autre… Je ne sais pas pourquoi j’écris ces mots Peut-être comme du pollen qui s’envole En attendant je revisite une idée de fleurs. J’ai toujours imaginé à tort que la fleur était un sujet mineur. Quelle andouille ! Et ça ne me dérange aussi beaucoup moins d’écouter chanter Aznavour. Huile sur papier 10x15cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}
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Quand tout est fichu
De pas de côté en pas de côté j’ai glissé doucement vers le bord de la nappe. Une jolie nappe vichy Je me suis bouché les oreilles mais j’entendais toujours Il faut tu dois etc. Et soudain boum suis tombé C’est là que j’ai senti que j’avais des ailes pour voler Sinon jamais je n’aurais jamais osé y penser. Huile sur papier 10x15cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}
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Le plaisir et l’exigence
Le plaisir est un ballon rouge, l’exigence le toise, vieille peine à jouir d’un œil torve. Un dimanche matin J’ai mis du rouge anglais du bleu de céruleum et de l’ombre brûlée Sur la palette J’ai suivi le ballon rouge La vieille me faisait des appels de phare J’ai juste dit plus tard Pour ne rien froisser huile sur papier 10x15 cm Patrick Blanchon 2021|couper{180}
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L’appétit de l’ogre
"En peinture je n'ai pas d'amis je n'ai que des amants" aurait dit Picasso. Picasso cet ogre. Ce trou noir. Durant des années je l'ai mis de côté. Son coté " business man" pour ne pas dire opportuniste m'aveuglait. Et puis aussi on a bouffé du Picasso durant des décennies, à toutes les sauces, Picasso par ci, Picasso par là, jusqu'à l'industrie automobile, l'associant à une espèce d'ultime de la modernité, et qui pour moi était un simple phénomène d'inertie. Picasso mort et enterré qui tel un zombie ressurgit systématiquement une ou deux fois l'an dans la sphère médiatique, muséale, et dont la répétition annoncée en fanfare finit par devenir lassante, comme le retour des pluies. Comme si il n'y avait pas eu grand chose d'autre en peinture que Picasso pour figurer la modernité de celle-ci. Il faut dire aussi que le public a la comprenette facile à condition de lui expliquer longtemps et...souvent. Un martèlement lié sans doute à des affaires de prébendes, de cotations, d'argent évidemment. Donc il a pour moi incarné tout ce que je n'aimais pas dans le personnage inventé de l'artiste, assez proche de ce dont je détestais dans le personnage du père. Ces deux images cherchant à se rejoindre comme dans une visée télémétrique .Ces deux images devant absolument se rejoindre pour apporter encore de l'eau au moulin de mes nombreux ressentiments enfantins. Et puis le temps passe, les rumeurs s'estompent, le bruit que l'on fait, que l'on se fait à soi-même s'atténue. On ne tend plus l'oreille de la même façon la soixantaine passée. Ce qui se produit est bien sur une nouvelle identification. Comment échapper à ce phénomène omniprésent ? Il y a évidemment quelque chose au fond, projeté du sombre vers l'extérieur, comme on projette des images de cinéma sur n'importe quel écran de fortune ou d'infortune. Cette boulimie de peinture que j'associe à Picasso comme j'associe encore la boulimie en général à la figure paternelle, se dissipe peu à peu pour laisser voir autre chose. Au début presque imperceptiblement. Comme une intuition. Quelque chose qui se meut au delà du brouillard et du brouillé par les rancœurs, les rancunes, et qui au fil des jours se précise jusqu'à l'évidence. La peur est toujours la première évidence, comme la violence, inexorablement liées. Et tout évidemment pour moi débouche à nouveau sur une des milles et une variations de la solitude. Plus que l'artiste c'est l'homme seul que je découvre. Tout comme je découvre chaque jour un peu plus ma solitude personnelle. Le fait de se tourner vers ses pères, de les dévorer d'amour pour en extraire une substantifique moelle n'est pas seulement un acte lié à l'ambition de les dépasser, mais plus de les ingérer, de les assimiler, comme certaines peuplades primitives mangent leurs morts. C'est un acte d'amour et de violence et qui montre à quel point encore une fois tout cela est lié, indissociablement. L'amour la haine la violence et l'énergie. Cette production fabuleuse qui s'élance à l'assaut d'un Velasquez comme on s'attaque à un Everest est de prime abord insensée. Mais c'est que Picasso était si seul qu'il allait chercher ce qu'apporte l'amour ou l'amitié ordinairement dans un passé qui l'aidait à tenir au présent. Picasso l'imbuvable, Picasso le mari, le père soit disant infect était sans doute totalement inapte à ce fameux moment présent que l'on partage en toute confiance avec nos proches. Comme je me découvre de plus en plus inapte pour les mêmes partages. Cette solitude est en relation étroite avec la notion d'exil. Peindre un sujet qui ne soit pas la peinture seule est une perte de temps, comme passer un moment en famille sans prendre un couteau et la dépecer totalement virtuellement. Pour s'enfoncer plus avant dans la réalité charnelle de la peinture. Dans la viande, dans la couleur rouge brun du sang séché et celle iridescente des cœurs battants et de l'hémoglobine jaillissante. La vie à l'état brute. Ce dialogue incessant avec la peinture comme avec une amante dont on ne peut trouver le plus petit moment de répit. De ratage en ratage comme le martèlement encore d'une impuissance fondamentale, qui se métamorphose en une seule et même chose si, par hasard, on enchaine soudain une série de réussites. Une impuissance fondamentale qui se rit de l'échec comme de la réussite. Mais qui augmente proportionnellement la violence du désir oscillant sans relâche entre espoir et désespoir. Impuissance dans laquelle on jette toutes ses forces vives, sa vie presque entière, au dépens de tout le reste. C'est cela cette boulimie comme la partie immergée d'une formidable anorexie. Le public semble admiratif en raison de l'immense production qui en même temps l'effraie, le stupéfie. Annulant de façon raisonnable la plus petite velléité de se comparer. Qui peut se comparer à Picasso qui peut se comparer à l'Ogre. Qui aura les couilles ou l'immense vulnérabilité de se lancer dans cette folie de peindre ainsi ? La plupart des artistes dignes de ce nom sont des ogres. Certains le dissimulent plus ou moins mieux que d'autres voilà tout. Et derrière l'ogre si je me souviens bien de mes classiques on trouve toujours le petit-Poucet, là aussi une des fondamentaux de l'art ; et le plus dangereux ce n'est pas celui que l'on croit si l'on s'appuie seulement sur l'évidence. Sur les strass les paillettes. Il y a des manques que rien pas même la peinture ni l'art en général ne pourront jamais totalement combler. Sculpture Giacometti.|couper{180}
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Se déserter
Par la peinture, une fois les buts traversés comme on traverse des villes, des pays, des illusions, se présente le désert et avec lui une nouvelle frayeur. Disons plutôt la même frayeur débarrassée de tout ce dont on la maquille sans relâche. Disons une frayeur brute. Peindre alors c'est pénétrer désarmé dans ce désert cette frayeur. Désarmé parce qu'aucune arme ne sert plus à rien et même entraverait toute progression. La toile vierge posée sur le chevalet face au peintre il faudrait cette rencontre du désert avec lui-même idéalement. Mais c'est encore une pensée, quelque chose que je fabrique pour tenter de me débarrasser de la gène que provoque le silence. On me dira mais où est donc le plaisir dans tout cela ? Pourquoi ne vas tu pas travailler comme tout à chacun à l'usine, au bureau au lieu de nous gonfler avec tes états d'âmes ? Et à cette question je ne répondrais comme d'habitude que fort mal, c'est à dire que je tenterais de plus en plus maladroitement de légitimiser le fait que je préfère peindre. De plus en plus maladroitement parce que ce qui compte ce n'est pas de prouver quoique ce soit à quiconque mais à moi-même en premier lieu. Et que j'ai acquis une telle adresse justement à broder et tisser que je pourrais habiller la terre entière pour des décennies. La maladresse me conduit à la nudité et j'aime ce chemin. Parce que la nudité et le désert offrent grosso modo la même sensation, une fois passée la stupéfaction, le silence. Et tout alors se joue à la fois au niveau de l'œil comme de l'oreille pour évacuer le bruit, trouver le mélodieux. Mais avant s'opère une destruction de toutes les images comme de toutes les mélodies. Non pas qu'une volonté soit à l'œuvre pour détruire. Ce sont plutôt des pans entiers qui se dissipent comme s'ils n'avaient plus aucune sorte d'utilité. C'est à dire que l'on devient étranger à l'image comme au son. Comme un nouveau né qui découvrirait le monde. Sauf qu'aucune mère aimante, aucun père rassurant ne se trouve à cet instant à ses cotés. C'est en ce sens que j'évoque le désert. Et aussi ce fantasme accompagné d'une hâte de l'incarner encore une fois en quelqu'un ou quelque chose. Le désert n'est ni mère ni père, il est seulement cette vastitude dans laquelle on hésite à s'engager, à faire confiance. Exactement comme la toile vierge. On trempe alors le pinceau dans la peinture, et quelque chose encore s'offre comme un passage, un sas. Ce temps à mélanger le pigment au liant, au médium est comme une chanson que l'on invente pour se donner du cœur au ventre. Aspiration, les poumons se remplissent Puis le pinceau parvient après un voyage dont non ne peut mesurer la durée ni l'origine à la surface de la toile. L'acte de peindre commence comme la marche du voyageur dans le désert. Aucun chemin n'est indiqué, des sables et des dunes à perte de vue. Il faut avancer seul. C'est sans doute pourquoi j'invoque souvent le hasard comme compagnon. Pour tromper ma solitude. Par une sorte d'abracadabra je redeviens primitif et je m'accroche à l'invisible comme cette part de moi dissociée enfouie à laquelle je n'ai pas d'accès sinon par les mots ou plutôt ce qui réside toujours entre les mots. dissocié coupé en deux je progresse ainsi en gesticulant comme un pantin tiraillé par ce qu'il pense comme par ce qu'il ignore et qui ne cesse d'agir sous la pensée. Puis enfin après un temps difficile à mesurer à l'horloge arrive ce point particulier du tableau où je suis totalement incapable de dire si c'est bon ou mauvais. Un point qui si je n'en tiens pas compte entraine irrémédiablement le tableau dans la boue ou dans la séduction. C'est sans doute ce point que j'ai cherché tout au long de ma vie et dans toutes les circonstances de celle-ci. Parvenir à déceler enfin sa présence de manière irréfutable. A cet instant je m'écarte du tableau comme le désert s'écarte sous les pas du voyageur. Je crois, j'espère, mais je ne peux jamais en être vraiment certain que je me suis enfin déserté. Et c'est ce doute qui me fait prendre une nouvelle toile, qui me fait reprendre le processus tout entier depuis zéro. Et là effectivement on pourrait dire que peindre c'est renaitre. Mais cela ne vaut que si on sait la présence du désert. Grand carré bleu 100x100 huile sur toile Patrick Blanchon 2021|couper{180}
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Le but c’est quoi ?
Quels sont les buts que nous nous fixons ? Nous appartiennent-t’ils vraiment ou bien les récupérons nous par mimétisme ? Y a t’il une différence marquée entre le besoin et le but ? Et si oui laquelle ? Est ce que la faim nous pousse à créer des buts pour répondre au besoin de se nourrir ? Exemple j’ai une inextinguible faim de créer, de peindre, comment vais-je m’y prendre ? Avec brutalité avidité sauvagerie ? Afin d’atteindre à un état de satiété le plus rapidement possible, comme pourrait le faire un chien qui ne relève le mufle de sa gamelle qu’une fois celle-ci vide ? Ou bien avec élégance, raffinement en repoussant le plus loin possible cette sensation de satiété pour conserver l’appétit le désir ? Évidemment que je préfère la seconde solution. Je veux dire lorsque j’y pense, que je peux me projeter dans ce processus . Mais dans les faits ce n’est pas le cas. Je fonctionne de façon impulsive dans le moment où ça me traverse. J’ai faim je bouffe j’ai envie de dormir je m’allonge n’importe où , j’ai envie de peindre je peins. Je vis ainsi dans une sorte de perpétuel présent et sans jamais me projeter au lendemain. Est ce un but ? Je ne le crois pas, c’est répondre de façon plus ou moins pulsionnelle à un besoin. Pourquoi m’en plaindrais-je cela me convient la plupart du temps. Là où ça se gâte c’est lorsqu’on me demande que fais tu ? De quoi as tu vraiment envie ? Peux tu te projeter à une semaine ? Un mois ? Dix ans ? J’en suis incapable. Et cette incapacité devient alors un problème comme si c’était une tare voir un délit dont je devais répondre face à un tribunal …fournir des preuves etc. Je crois que je suis malade de toutes ces idées de buts, de projets. Mon incapacité chronique à établir des plans auxquels je puisse me tenir dans une durée est insupportable tout autant pour les autres que pour moi-même. J’ai parfois la sensation d’un vide extrême dont la raison d’être serait la pensée d’avoir épuisé tous les buts, tous les désirs qui ne m’appartiennent d’ailleurs pas mais qui sont propres et communs à l’espèce. À ces moments là je me retrouve avec mon pinceau en suspens incapable de décider de la moindre touche. La journée s’écoule dans un désœuvrement magistral qui ressemble à l’état dans lequel je me retrouvais après les raclées que me filait mon paternel. Un désœuvrement qui ressemble à une révolte toute entière repliée dans la passivité. C’est à se cogner la tête contre les murs d’avoir encore autant de haine de ressentiment comme d’ignorance en soi. De ne jamais totalement parvenir à les surmonter. Je suis ce gamin qui a tout épuisé de ses ressources , qui s’enfonce dans la forêt et qui ne cesse de s’y perdre en espérant toujours y parvenir à la fois par hasard et pour de bon. Exactement la même façon que j’emploie pour peindre au hasard en espérant que quelque chose enfin s’achève. La jeunesse d’Hercule et sa folie.|couper{180}
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L’insensé mis au ban
En mars 2019 Grégoire Falque alias "Le Délesteur" a été "effacé" des pages de recherche de Google sous prétexte que ses publications étaient " vide de sens" pour un employé de la célèbre firme accompagné de son fidèle algorithme. Grégoire Falque a eut beau protester et il continue de le faire, en vain. Cela fait réfléchir. Si un sombre scribouillard a ainsi pouvoir d'effacer le travail d'un artiste sous prétexte qu'il le trouve "vide de sens" qu'en est t'il alors des publications de chacun de nous ? On le sait désormais tout ce qui passe par le numérique nécessite désormais une contrainte c'est la fameuse "meilleure expérience utilisateur" Et ce sont des robots qui se chargent la plupart du temps d'en décider en épluchant un certain nombre de critères. Nous l'auront donc compris tout ce qui est insensé et inconfortable doit être mis au ban de la sphère numérique. Il y a maintes manières d'être effacé de la plus subtile à la plus grossière. Soit les robots considèrent que votre contenu n'est pas intéressant et ne vous référencent pas dans les fameuses pages google, soit vous pouvez recevoir un message directement par mail vous indiquant de rejoindre une certaine conformité sous peine de sanctions. Si l'art ne peut plus exprimer à voix haute ce que les gens normaux nomment l'insensé, il y a une sacrée couille dans le pâté. Car l'insensé mis au ban d'une société ne tardera pas à en devenir le cœur névralgique par un phénomène mystérieux dont je ne vous fatiguerai pas à expliquer les méandres, le cheminement. C'est un peu comme la mort que l'on a expulsé du cœur des villes pour laisser croire aux citadins que celle ci avait disparu, qu'elle n'existait plus. Avez vous vu le cœur de la ville désormais, y a-t-il jamais eu quelque chose de plus mortel que toutes ces agences bancaires, ces officines d'assurance, et ces magasins de fringues à perte de vue ? On ne peut pas traiter ainsi l'insensé ni la mort sous peine de subir tôt ou tard le retour du boomerang en pleine poire. En attendant je vous laisse le lien pour aller voir le travail de Grégoire Falque que personnellement après les premières strates où j'ai explosé d'un rire nerveux, j'ai découvert extrêmement poétique, pour ne pas dire "essentiel" afin de ne pas crever la gueule ouverte étouffé par les miasmes de cette organisation de malfaiteurs qui désormais nous extorquent non seulement nos données personnelles, mais tout ce qui donne un peu de sel à la vie. https://www.facebook.com/byarseneca https://www.arseneca.com/?fbclid=IwAR2ThITleSo4KaMNpNErCkxelFWi_U0aejaMftN6Pt-m_VA4DGIlacYyDE8|couper{180}
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Le modèle
J'avais passé une annonce dans un journal il y a de cela des lustres. Cherche modèle, sexe et âge indifférent. J'avais eu un nombre de coups de fil prodigieux durant les quelques jours qui suivirent la parution. A chaque fois que je décrochais je fixais toute mon attention sur la voix de mon interlocutrice ou interlocuteur, pour traquer la fausseté. Elle appela en fin de semaine, un vendredi en tout début d'après-midi et le timbre de sa voix était tellement spécial, que je décidais d'aller à sa rencontre dans un café de Saint-Germain. Elle n'était pas jolie, ni laide et pourtant pas quelconque non plus. Une femme qui avait dépassé la trentaine avec les traits qui commençaient à s'affaisser. Et durant notre entretien elle parla avec le même timbre qui me fit penser à une frontière, à la lisière d'une foret impénétrable. Cela m'excita bien sur et je n'eus plus qu'une envie alors c'est de pénétrer cette frontière. Nous traversâmes tout Paris pour nous rendre à Aubervilliers où je vivais. J'installais une toile sur le chevalet et lui demandais de s'asseoir près de la fenêtre. Lorsque je me déplaçais pour la voir enfin, elle était nue. Je dus montrer un signe d'étonnement car elle me dit à ce moment là Il fallait bien que je me mette toute nue n'est ce pas ? Toujours avec cette voix parfaitement égale sans la moindre aspérité. Evidemment que cela m'excita encore plus. J'ai pris un morceau de fusain et sans la quitter des yeux j'ai strié la toile de lignes Son regard était dans le vague elle semblait fixer un point de la cloison derrière moi, jamais elle ne croisait mon regard. Regarde moi dis je en passant au tutoiement Elle orienta alors son regard vers le mien et j'eus cette sensation assez désagréable de me sentir traversé. Comme si j'étais transparent. Je tentais de mettre de coté cette sensation pour dessiner mais je voyais bien qu'elle agissait sur mon trait quelque chose qui n'arrivait pas à se fixer entre l'hésitation et la décision. Au bout du compte j'obtins assez rapidement un gribouillis, quelque chose d'insupportable. comme si le désordre était la seule chose dont j'étais capable face à cette femme qui s'était mise nue devant moi pour que je la peigne. Je n'étais déjà pas bien riche à l'époque et ce n'était pas l'argent qui l'avait convaincue. Je crois que l'on s'était mis d'accord pour un échange, quelques dessins contre une séance. Elle travaillait, ce n'était pas pour l'argent m'avait t'elle déclaré. Et cependant elle ne semblait afficher aucune curiosité, elle paraissait être là dans cette pièce comme si elle avait été n'importe où ailleurs. Et bien sur moi j'étais un peintre comme j'aurais pu être facteur, boulanger ou chef de gare, cela ne semblait pas revêtir pour elle la plus petite importance. Au bout de l'heure et de nombreuses esquisses ratées Elle me dit, tu as l'air de vouloir t'acharner contre toi-même. Je posais le fusain et me laissais tomber sur le tabouret attenant sans répondre quoi que ce soit. -ça se voit que tu ne tournes pas rond, ajouta t'elle -Les autres peintres m'auraient déjà touchée tu sais tu n'es pas le premier. C'est à cet instant précis qu'elle se leva et marcha vers moi et j'eus la sensation de voir une géante me foncer dessus j'étais désarçonné totalement impuissant Elle me prit dans ses bras comme un petit enfant et je sentis à ce moment là l'odeur de ses aisselles affreusement désagréable mais dont pourtant je ne pouvais me détacher. je me débattais mollement pour ne pas la vexer - du moins c'est ce que j'imaginais. Elle se mit à genoux, dégrafa ma ceinture, baissa mon pantalon et me prit sans un mot dans sa bouche. Ce fut si long que quelque chose de douloureux m'en reste encore à la mémoire. Je ne me souviens même plus d'avoir joui ou pas. Cette fascination de la voir à l'œuvre de la sentir enfin vivante, réelle, agissante était de la même teneur que ce que j'ai coutume de chercher dans la peinture. Une réalité. Et qui sans cesse m'échappe évidemment. Elle se leva enfin et me caressa la joue. Une sorte de geste automatique comme avec les chevaux. Voilà ça va aller mieux maintenant me dit-elle Et elle fit mine de retourner s'asseoir. Mais je n'étais plus du tout à la peinture à cet instant je voulais la baiser sauvagement pour me venger comme si elle m'avait dérobé quelque chose d'important. Peut-être un truc comme mon âme je me disais. Je fis mine de me ruer vers elle mais elle leva la main paume grande ouverte -Il n'en est pas question- dit elle avec une autorité que je ne lui aurais pas prêtée quelques minutes auparavant. Je me remis à l'ouvrage avec une sorte de dégout, d'écœurement de moi-même Et chose inconcevable le dessin prit aussitôt fière allure. Nous nous vîmes plusieurs fois durant quelques semaines durant lesquelles exactement le même scénario se produisit. Et puis je ne la vis plus. La vérité c'est que je ne l'ai jamais pénétrée ou possédée comme on dit et je n'ai jamais su si c'était quelque chose qu'il fallait considérer comme une défaite ou une victoire. Mais je crois que j'ai été comme guéri de quelque chose à partir de là bien que je sois totalement infichu de dire quoi. Visage imaginaire Patrick Blanchon 2021 huile sur papier 46x 38 cm|couper{180}
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Le but en peinture
Je place une nouvelle toile sur le chevalet, je recommence. Et tout de suite la question "qu'est ce que je vais bien pouvoir peindre" se présente. Et m'envahit . Durant quelques instants je ne suis plus que cette question. Tétanisé, paralysé, impossible de faire quoi que ce soit. Je repose le pinceau. J'allume une cigarette et je contemple la toile blanche. Durant des années je me suis imaginé que cela fonctionnait ainsi. En écrabouillant la clope en me ruant à nouveau vers le pinceau pour me jeter à l'ouvrage soudain flanquant le bordel dévastant la virginité. comme une indignation si l'on veut et qui concerne ma propre virginité. Cette perpétuelle obsession de non savoir. de vanité d'un quelconque savoir Ce nœud gordien des mille et une comparaisons dans lequel les brins de l'ignorance comme du savoir se retrouvent embrouillés. Au fond de tout ça un sultan qui n'a plus aucun engouement pour Shérazade. Un barbare devenu las d'être civilisé et qui retourne ventre à terre vers la boue et le sang des champs de bataille. -------------------------------------------------------------------------------------------------- comment être certain de ne plus rien savoir enfin ? qu'il ne reste plus une seule once de prétention ? Du genre qui pourrit tout en donnant une orientation une chasse au trésor ou un jeu de piste. Que l'on décortiquera pour fabriquer encore du faux de l'illusion des bobards vous êtes marteau mon bon ami vous ne pouvez exister sans clou. J'ai essayé tellement de choses, de combines et de trucs Pour ne plus rien être ça me résiste. Et c'est intolérable que cette chose ne cesse de me résister. Cette chose en moi Plus qu'une seule solution se mettre à poil et danser devant la toile tourner en rond sur soi-même centrifuge et centripète et s'enfoncer dans la blancheur aveuglante pour y voir enfin clair. Et soudain cette voix qui traverse la cour Tu pourrais mettre ton bol dans le lave-vaisselle quand même ! ouf me voici sauvé encore pour cette fois. taches d'encre sur papier|couper{180}