janvier 2023
Carnets | janvier 2023
Comme un gamin
A les écouter on deviendrait fou. C'est à dire qu'on ne serait plus soi-même. Tout cela en raison de la solitude évidemment. Alors on se rassemble, on se caresse dans le sens du poil, on se lèche copieusement, on se fourre, on se tripatouille, on s'étreint. Juste derrière la Joconde accrochée au musée du Louvres il y a le radeau de la Méduse. Hasard ou ironie ? Peut-être bien les deux comme souvent. Le fait est que lorsque on aperçoit la foule, la cohue certains jours le véritable tableau se situe entre les deux. Toute la comédie ou la tragédie humaine on peut l'admirer là , entre Da Vinci et Jéricho. Au début on ne choisit pas la solitude. Elle nous tombe dessus comme la grâce. La solitude est ce coup de hachoir flanqué par un boucher métaphysique. Un ogre fabuleux qui dévore d'un seul coup tous les appuis branlants sur lesquels assez péniblement on se croyait juste l'instant d'avant suffisamment en sécurité pour pouvoir dire "nous". C'est avec la solitude que je suis né véritablement, avant je n'étais que du nous en pagaille. Il faut que je m'éloigne de toute cette agitation, que je quitte les grandes artères, les boulevards. J'ai fait cela à Venise pour m'enfoncer dans les ruelles du ghetto. C'est irrépressible. Je crois que cela s'est installé comme ça au fond de mes cellules avant que cela n'arrive à ma cervelle. La mémoire de toutes les humeurs charriée par le sang remonte à l'infini des massacres au nom des "nous". Dans le ghetto désert tout me parle à mi voix. Ce n'est pas une parole d'homme ni de femme, pas même d'enfant. C'est un son de pierre grise, un son issu de l'eau verdâtre rejoignant la matité presque inaudible de mes pas sur le pavé de ce quartier sextière du Cannaregio. C'est le premier de tous les ghetto qui date de 1516, date à laquelle on mis en demeure les juifs d'y résider. L'origine du mot provient peut-être d'une étymologie syncrétique entre le vénitien et l'hébreu. Le terme ghetto lui-même est au rebut, associé au travail de la fonderie du cuivre, qui était une des principales activité de ce quartier, le plus septentrional de la ville. Le mot ghetto vient de "déchet" car le travail du cuivre en produisait en quantité considérable.. Tout cela bien entendu, pour construire des armes, des bombardes, des canons de cuivre. La solitude et le ghetto, le déchet, tout cela me va au poil étant donnée ma relation quasi hébraïque au monde, mon obsession du commentaire et de l'exégèse. Sauf qu'ici le silence est mon seul interlocuteur. Je me souviens avec peine d'une époque où le silence m'était encore étranger. Le silence et moi, deux étrangers dans le premier ghetto d'Europe, cela peut paraitre insolite, presque ridicule comme sujet de réflexion. Sauf si l'on pense à la mémoire de nos humeurs, de nos cellules. Le destin finalement c'est tout ce qu'on ne comprend pas, comme le hasard, tout ça n'est que de l'intime logé tout au fond de soi. Et bien sur cet intime nous rejette sur la grève. Je comprend qu'on puisse le fuir obstinément lorsque on croit à l'intimité, à la chaleur humaine, à l'amour fou, à l'avenir. J'avais perdu foi en tout cela dans le ghetto de Venise cette année là, l'hiver de cette année, semblable à cette fin d'année aujourd'hui. Tout le monde parle de liberté mais qui est vraiment prêt à en payer le prix ? Qui est prêt à échanger son sang, ses muscles ses nerfs , en ce poids de solitude de silence ? D'autant que la mesure elle aussi est exotique quand on ne pèse plus lourd, quand on ne pèse presque plus rien du tout, que l'on se tient dans l'antichambre de toutes les légèretés. Chaque fin d'année la nostalgie me revient par bouffée avec les regrets sans que je ne comprenne vraiment pourquoi. C'est comme si j'apercevais un autre moi même, cet autre parallèle, et qui marche dans une dimension contiguë de la mienne. Un autre moi-même à qui tout aurait miraculeusement réussi. Sans doute cet autre doit le penser puisque c'est son rôle. Et pour lequel pour toute cette insouciance, j'aurais moi-même arraché mes propres viscères, mes boyaux. Pour que celui là réussisse je me serais sacrifié totalement dans la solitude et le silence tel un martyr anonyme. Je pourrais en bon juif me moquer de cette impertinence à convoiter la position de martyr évidemment. Je m'en suis toujours bien fichu. Cependant que quelque chose aujourd'hui semble différent. Un vent léger s'est levé et a balayé les pavés de tous les ghettos réels ou imaginaires par lesquels je suis passé, dans la vraie vie ou dans l'imaginaire. Les nuages au dessus se sont écartés doucement sans que je ne m'en aperçoive. C'est le cri d'un oiseau quelque part au ciel qui me fait lever les yeux et voir le ciel bleu. Je n'ai plus rien à dire aujourd'hui que ce silence. Alors je peins comme on boit pour s'oublier. Comme un gamin qui creuse un trou à mains nues.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
08 janvier 2023
Le narrateur explore la profondeur de la solitude, le silence du ghetto de Venise et la quête d'une vérité intérieure, tout en se confrontant à son propre destin et à une nostalgie tenace.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
7 janvier 2023
À travers une réflexion sur Shakespeare, Proust et Garouste, le texte interroge l’identité artistique et la tension permanente entre soumission et création, tragédie et humour, tout en évoquant le dilemme de l’engagement personnel dans l’œuvre.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
7 janvier 2023
Ce texte plonge dans les méandres d'une lutte intérieure contre l'autorité. Le narrateur, d'abord en quête de refuge dans l'idiotie et la soumission apparente, finit par voir émerger une autorité authentique, née d'une prise de conscience soudaine et violente. Un voyage à travers l'oppression inconsciente jusqu'à la libération personnelle.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
6 janvier 2023
Une collision entre fatigue et fausse sincérité littéraire|couper{180}
Carnets | janvier 2023
06 janvier 2023
Dans cette famille, les objets des morts ne se jettent pas. Ils circulent, héritage silencieux qui perpétue leur présence. Ce lit, celui de Charles Brunet, incarne la permanence des absents et les rêves qu’ils suscitent. Dormir dans ce lit devient une passerelle vers des souvenirs enfouis et une adolescence marquée par l’ennui et les longues marches à travers la campagne bourbonnaise. Une réflexion subtile sur le poids du passé, de l’héritage, et la confrontation à l’absence.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
le lit de la chambre 15
Tu parviens au haut de l'escalier et tu cherches le numéro 15, sur la gauche cette porte qui ne paie pas de mine, sobre, marron, mais sous laquelle un rai de lumière passe -ce qui dans l'immédiat ou l'urgence dans laquelle tu te places pour être enfin frappé par la grâce, t'apparaît de bon augure. La clef dans la serrure fonctionne sans effort, la porte s'ouvre sans difficulté ni grincement, puis s'offre la chambre au regard. C'est un matin de mai ensoleillé, la pièce est baignée de lumière et tu en pleures presque d'apercevoir à côté du petit lavabo, une table recouverte d'une toile cirée et sur laquelle trône une plaque de cuisson. Gaz à tous les étages indique une plaque sur l'un des murs, au rez de chaussée de l'hôtel. Ainsi donc tout est vrai. Comme mobilier encore une grosse armoire de chêne, une petite table de bois, marron. Puis ton regard se porte sur le lit simple installé dans un angle. Tu déposes ton sac au sol, un plancher avec relief qui gondole par endroit le linoléum. Tu t'assois sur le bord du lit pour tester la souplesse du sommier, la qualité du matelas. Tu notes avec plaisir que le couchage n'est ni dur ni mou. Tu sors ton paquet de cigarettes, en allumes une et tu te renverses doucement pour que ton corps tout entier entre en contact avec le lit. Il n'y a pas d'oreiller juste un traversin que tu plies en deux pour reposer ta nuque. Tu peux souffler après toutes les péripéties traversées, l'urgence avec laquelle,tu as déménagé à la cloche de bois de Suresnes. Toute cette violence inouïe de laquelle tu es parvenue à t'échapper, comme aussi de cette étrange période passée dans la pénombre de cette autre chambre, dans cet hôtel-restaurant tenu par un géant rugbyman Un soupçon d'empathie toutefois car de temps en temps l'homme frappait à ta porte pour s'enquérir que tu ne sois pas mort. Plus de six mois passés là-bas dans une presque complète catatonie. Allongé sur un autre lit simple à ruminer ta vie. Au terme de cette toute première cigarette fumée dans la chambre 15, tu te sens déjà chez toi. Comme c'est facile de se sentir chez soi penses-tu soudain. Il suffit d'être allongé sur un lit, de te dire que c'est ton lit que tu y es en sécurité à présent. Puis la cervelle s'en mêle forcément et tu penses à tous ces voyageurs qui ont dormi ici avant toi dans ce même lit. Étaient-ce des hommes, des femmes, des jeunes, des vieux, des personnes en bonne santé ou des malades frappés par un mal quelconque-peut-être même que certains ont été retrouvés morts par la concierge qui sera montée là pour exiger le terme en retard, ou distribuer le courrier... Mais tout cela n'est que supputations et perte de temps inutile n'est-ce pas. Tu n'as pas encore réalisé qu'une nouvelle chambre d'hôtel est comme une nouvelle chance, que tu pourrais -si vraiment tu le désirais- reconsidérer toute ta vie dans l'instant même où cette idée surgirait.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
05 janvier 2023-2
L'homme marche dans les rues d'une ville qui lui est étrangère, bien qu'il y soit né. Le texte relate ses réflexions et son quotidien marqué par un sentiment persistant de décalage avec la société environnante. Les moments d'isolement deviennent des instants de réflexion, où la monotonie du travail et la solitude prennent le dessus, le menant vers une forme d’évasion intérieure.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
05 janvier 2023
Le lit devient ici une métaphore du voyage entre mondes parallèles et temps anciens. Un lieu où s’effacent les distinctions entre matière et esprit, réalité et illusion, et où se joue la répétition symbolique du passage vers un autre monde, à chaque fois que l’on ferme les yeux.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
Rejoindre le lit
Illustration : Peinture de Munch. Des promenades qui durent des heures dans la ville éternelle. Tout un labyrinthe traversé. L'œil boit tout ce qu'il voit sans s'arrêter un seul instant et sans y penser surtout. Un plein comme celui que l'on fait à la station service, mais gratuit pense t'on. Juste du temps à dépenser quand d'autres dépensent leur énergie à accumuler des trophées. Aucune importance d'opposer ce qui pourrait être différent à ce qui est ta réalité dans cet instant, aucune raison valable d'y penser sauf la comparaison. Autrement dit la volonté encore enfantine de mesurer un écart avec le monde normal quand tu n'acceptes pas d'être cet étranger qui marche dans sa ville de naissance et qui toujours te paraît étrangère. Pour calmer la souffrance provoquée par le hiatus obsédant, par pur instinct tu retournes soudain vers la chambre, et une fois son seuil franchi, la porte refermée sur ce monde incompréhensible, tu te laisses aller, et choir enfin sur le lit. Et tu peux ici passer des périodes sans temporalité véritable. Le temps n'a plus d'importance que de s'achever lui-même et toi inclus, à l'heure fatidique où tu devras repartir au boulot. Tu ne prends presque plus le métro, ce cauchemar peuplé de zombis aux yeux vides. Tu prends la précaution de tailler au plus large le temps du trajet qui te conduit depuis Château-Rouge jusqu'à Montrouge à pied encore et toujours et surtout en surface. Le travail d'enquête téléphonique est une nouvelle opportunité d'apprendre à disparaître. Recherche permanente de cette voix la plus neutre et qu'elle produise un oui ou un non t'es égal désormais, tu enchaînes les appels. Tu ne vas plus à la machine à café aux moments de pause non plus. La déperdition d'énergie ici ressemble à une hémorragie. Assis sur ta chaise face à l'écran tu t'engouffres dans l'étude de l'indifférence. À supprimer aussitôt qu'elle surgit toute velléité d'empathie. Ce sont des heures à passer là comme on donne un tribut au diable. Puis tu repars par le même chemin, il fait nuit, aux façades des immeubles ton œil buvard absorbe des lampées de vie ordinaire, ce théâtre d'ombres qui se joue en boucle derrière les fenêtres éclairées qui parfois te fait envie mais souvent te repousse encore plus avant dans la nuit, te procure comme un allant de danseur, un second souffle de marathonien. Et puis l'hôtel enfin, la loge de la concierge faiblement éclairée derrière les rideaux de velours, les escaliers, la porte, le lit. Rejoindre le lit mais non pour y dormir. Pour creuser les murs d'acier et de béton avec l'outil à l'apparence si dérisoire du souffle qui t'aide à réduire le nombre des battements du cœur, dans ton apprentissage aussi horizontal qu'éreintant de chaman|couper{180}
Carnets | janvier 2023
4 janvier 2023-5
À travers les œuvres de Kokoschka et Garouste, cet article explore l'importance du geste et de l'expression faciale dans la représentation humaine. Loin d'être des éléments distincts, visage et mains se répondent, capturant l'essence même de l'émotion et de l'humanité. Une coïncidence artistique qui invite à méditer sur la profondeur de l'expression corporelle|couper{180}
Carnets | janvier 2023
4 janvier 2023-4
À travers une série de réflexions intimes, l'auteur dresse un inventaire des différents lits qui ont marqué son existence. Au-delà de la diversité des lieux et des contextes, il explore la permanence de la sensation de sécurité et la questionne : est-ce une véritable chaleur humaine ou une illusion réconfortante qui nous permet de traverser les aléas de la vie ?|couper{180}