janvier 2023
Carnets | janvier 2023
17 janvier 2023-5
À Knossos en Crète, des jeunes gens sautent par-dessus un immense taureau. Rien à voir avec la corrida actuelle. Même si tu es en mesure d'imaginer à toute fin, pour l'animal, un sort funeste identique. L'aspect joyeux de la mosaïque, cet instantané capturé par un artiste anonyme, évoque la vie, la joie, la danse, l'harmonie, et n'incite pas à penser la mort. Et si tu te souviens de ton étonnement quand tu comprends que la civilisation minoenne, à cette époque, avait déjà compris la nécessité d'expulser hors de son habitat ses miasmes, ses déchets grâce à un ingénieux système d'égouts qui sillonne toute la ville, ces deux éléments suffisent pour t'inventer une nostalgie, celle d'un temps où l'être humain était encore digne de ce nom. Toujours le fantasme d'un paradis perdu. Ce genre de pensée qui n'a pour fonction que celle de vouloir toujours t'aider à t'enfuir du présent, d'une réalité qui ne te convient pas. Et si tu réfléchis encore un peu, que tu te souviennes des tragédies grecques, des récits d'Homère, de toute cette hémoglobine qui, en filigrane, y coule à grands flots, le doute quant à l'idée d'un tel paradis se dissipe aussitôt. La brutalité d'autrefois est bien semblable à celle d'aujourd'hui. Cependant que tu te complais encore, de temps en temps, à imaginer qu'elle ne se manifeste pas de la même façon. Une brutalité innocente, joyeuse, contre une brutalité consciente, d'une tristesse infinie. La fin justifie désormais plus que jamais les moyens. Est-ce que cette finalité est si différente aujourd'hui ? Probablement pas. Le pouvoir sur autrui, la réussite, la célébrité, le profit, l'intérêt, voici les fins pour une majorité et qui se déclinent sous tant de masques, de comédies, désormais grotesques. Et si jadis tu pensais que ces buts ne relevaient que des préoccupations d'une minorité, aujourd'hui tu sais que même un misérable est en droit de s'en illusionner au même titre qu'un magnat de l'industrie pharmaceutique. S'il ne peut régner sur un empire, il le fera depuis son angle de rue par tout moyen possible. Les buts à la con se sont emparés de la plupart des cervelles. Et même toi, tu y auras succombé comme tout un chacun. L'art naît ensuite tout au bout de ce constat. Et si enfant tu n'étais pas aussi lucide quant à ce que tu viens d'écrire, ton instinct réagissait immédiatement face aux beaux objets dont tu n'avais qu'une envie, celle de les détruire. La plupart du temps quand tu relevais un manque, que la colère t'emportait vers les zones les plus obscures de toi. La destruction des objets, pas n'importe lesquels, surtout ceux qui étaient le fruit de sacrifices, de temps passé à économiser pour se les offrir ou les créer, étaient ta cible prioritaire. À quoi donc pensais-tu lorsque tu t'emparas d'un cutter pour l'enfoncer dans une des toiles réalisées par ta mère et qu'elle avait accrochée à l'un des murs de la chambre ? Que voulais-tu anéantir sinon toute la fausseté que tu imaginais alors comme seule responsable de ton malheur enfantin ? Et que savais-tu de l'intention qui l'avait menée à peindre ces chefs-d'œuvre familiaux entre quelques heures de ménages, de repassage, le dépeçage d'un lapin, l'engorgement d'une poule, dont tu conserves encore les souvenirs ensanglantés accrochés à l'un des poiriers du jardin ? Et ce que tu considérais comme manque, il te fallait au moins une culpabilité à sa mesure, voire la dépassant pour que tu puisses l'oublier, t'en défaire afin d'être responsable, de te procurer ce vertige – cette illusion de contrôle de maîtrise qu'offre en creux une telle responsabilité. Maintenant tu t'agaces de la même façon à la lecture de certaines phrases assénées par des membres du groupe de l'atelier d'écriture sur la bonne pratique de l'écriture, la relecture, le polissage des textes. Toute cette peine que d'aucuns mettent en avant pour désigner un texte remarquable, bien écrit ou qui tombe bien comme un vêtement. Mais dont le fond est d'une indigence à hurler. Ta colère n'a pas vraiment changé. Elle est toujours aussi intacte. Sauf que tu n'utilises plus de cutter. Tu coupes autrement dans le vif. Tu tournes les talons, tu rejoins le silence. Peut-être que pour toi rester jeune nécessite cette forme de violence, cette légèreté dans la façon de l'exprimer comme de danser, sauter par dessus ce vieux taureau Minoen. Assez pathétique au final.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
17 janvier 2023-4
Tu intègres les actes manqués comme des actes au même niveau que tous les autres. C'est-à-dire une ruse encore qui provient de ton unité cachée. Parler de l'inconscient est trop facile à ce point donné du parcours. Ainsi hier, tu oublies complètement la réunion Zoom où doit s'exprimer Laurent Mauvignier. Peut-être que si tu y penses aujourd'hui et que tu en cherches la raison, c'est affaire de trop grande proximité. Une inquiétude qui en découle aussitôt que l'on s'imagine cette proximité. Mais ce n'est pas une première fois. Toutes les occasions où se reconstruit l'idée du danger d'une telle proximité, tu pourrais les récapituler et les lister. Une énergie est bloquée là. Et il semble qu'une volonté obscure exige qu'elle le reste. Volonté à laquelle tu as pris d'instinct l'habitude d'obéir. Obéissance que tu peux mettre en parallèle avec ton obstination à n'être toujours qu'un débutant en toute chose.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
17 janvier 2023
Le sacré et le profane. C'est une histoire de lieu. Il faut isoler un lieu d'un autre. Le mot "Kadosh" qui signifie sacré en hébreu désigne au féminin "kadosha", la prostituée. Le rapport entre les deux fonctions de ce même mot semble un peu plus clair quand on se cantonne ainsi au lieu. Il y a une autre orthographe du mot - "Quadosh" - qui signifie séparé. Kadosh est aussi un grade de franc-maçonnerie. Lors de son initiation, le chevalier kadosh est invité à piétiner le diadème papal. Ce qui signifie encore une affaire de lieu de façon symbolique. En résumé, Dieu et ses représentants sur terre, on s'en fout. Ce qui est important en revanche, c'est soi, c'est-à-dire ce cercle dans lequel on est enfermé et le labyrinthe qu'il contient - notre propre vie - comme un chemin à l'apparence complexe et qui passe, elle aussi, dans sa représentation plastique par un centre vide - nul besoin de Minotaure. Le cercle est le lieu dont Dieu s'est retiré pour que l'homme puisse agir avec son libre arbitre. Dieu, qui est le tout, ainsi laisse un vide, un espace, un lieu, un possible. Et par conséquent, on devient ainsi en droit d'effectuer une différence à ce moment-là entre sacré, sainteté et religiosité. C'est dans ce lieu du sacré que s'effectue la prise de conscience que nous sommes dans un cercle, un vide qui lutte de toute sa périphérie, sa circonférence pour ne pas se retrouver réduit à un point. D'ailleurs, une chose étonnante est de pouvoir définir la circonférence et le diamètre d'un cercle, mais impossible d'en mesurer avec une précision nette le rapport. Le nombre 3,14116 etc. par l'infinité des décimales ne s'arrête jamais. Maintenant que tout cela est dit, tu peux aussi bien te réjouir que te lamenter. Tu es comme l'une des deux souris tombées dans le bol de lait. Laquelle veux-tu être ? Celle qui dit "il n'y a rien à faire, je me laisse couler" ou l'autre qui bat des pattes et ne cesse de glisser sur le bord du bol... Oui, mais à la fin, à force de battre le lait, ça devient du beurre, on a une surface solide, et donc une possibilité de s'évader. Évidemment, aucune souris ne sait d'avance que l'obstination produit du beurre. Encore un lieu qui se situe entre ce que l'on sait et ce que l'on ignore. Un entre-deux. Ou encore le lieu même où s'exerce le mouvement. Le lieu où mouvement et immobilité sont deux forces réelles enfin. Possible aussi d'évoquer l'horizontalité et la verticalité qu'inspire l'idée du cercle comme lieu de vie ; on peut s'y déplacer dans les deux dimensions. Voir l'horizon ou voir l'ensemble de haut ou d'en bas. Un autre symbole qui vient à l'esprit presque aussitôt est celui de l'échelle de Jacob. Pourquoi les anges emprunteraient-ils une échelle alors qu'ils ont des ailes pour monter et descendre ? L'échelle est une réalité physique dans ce cas que l'on doit gravir ou descendre en opposition au fantasme de vol comme à celui de toute chute. L'échelle est aussi la matérialisation du lieu comme du chemin qui traverse tous les lieux. Ensuite, tu te demandes pourquoi tu as du mal à effectuer une distinction entre lieu et espace. Tu peux te dire que l'espace est un doute, comme le disait Perec, et que ce serait facile logiquement de désigner le lieu comme un endroit précis. L'endroit de l'envers. Mais l'origine des étymologies est comme la décimale de Pi. Chercher la définition d'un mot ou son étymologie renvoie à 100 mots et chacun encore à 100 mots, etc. Donc encore une belle occasion, si on a enfin saisi l'humour de tout cela, de se dire : "DIEU et ses décimales, on s'en fout." Surtout si on le sait désormais. Et ne surtout pas trop penser que ce que tu écris ici est une configuration de chiffres après la décimale et donc de lettres, tout comme le sont les œuvres de Pessoa, Kafka, Rabelais, Joyce, etc. à l'infini. Et tu peux aussi dire avec un sourire que ce blog est sacré puisqu'il est pour toi un lieu tout à fait à part. Que l'humour est le seul moyen, au final, de résoudre toute contradiction.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
Le double voyage 01-2.
ce que dit de soi ce que l'on photographie en n'y songeant pas. La nuit d'avant, tu n'avais que peu dormi, tiraillé entre la peur et le désir d'effectuer ce voyage. Et l'idée d'y renoncer revint plusieurs fois. Tu pesais le pour et le contrepour essayer de te rassurer ou de t'effrayer encore plus. Au final le nombre des actes posés en faveur de ce départ l'emportait sur toutes les pensées qui t'assaillaient. Tu avais cette impression persistante d'être double, et de ne pas pouvoir parvenir à n'être qu'un. Peut-être que si tu t'étais penché un peu plus sur l'origine de cette séparation, de cette division, il ne t'aurait pas fallu beaucoup de temps pour en revenir à des raisons simples, fondamentales, une origine. Par exemple, du coté de ta mère, la légende faisait du voyage un mythe fondateur, et que de l'autre, du père, le terroir fondait aussi une grande part de qui tu étais. Possible que le mot voyage fait encore surgir plus de 30 années plus tard l'idée d'un abandon, d'une perte irrémédiable, d'une nécessité de se réinventer totalement, en même temps qu'elle s'y oppose en tant que loisir, ou banal bien de consommation. Et aussi, tu te rends compte aujourd'hui que tu écris ces lignes, que ton choix quoique tu aies pu penser, hésiter cette nuit là, la nuit d'avant le grand départ, était déjà fait depuis longtemps, depuis toujours. Ce grand-père estonien, qui avait déjà dû sacrifier beaucoup pour quitter l'Estonie, se rendre à Saint-Petersbourg pour étudier l'art, avant la révolution de 1917, puis décider de tout quitter encore pour s'exiler en France à Paris, ce fantôme qui te hante depuis toujours, fut le modèle que tu avais choisi sans même en prendre conscience. Cette dichotomie, la source de toutes tes hésitations et de tes choix irréfléchis en apparence, tu peux en remonter aujourd'hui la trace, poser le doigt sur cette plaie purulente qui jamais ne se sera totalement refermée ou cicatrisée. Cette blessure qui toute ta vie durant tu léchas mais aussi trituras quand l'oubli menaçait de ne plus la sentir présente, d' en souffrir. Comme si il n'y avait jamais eut d'autre vecteur plus puissant que la tristesse, la douleur, cette nostalgie étrange d'un homme, d'un pays que tu ne connus jamais, pour fonder cette part de toi, une part cachée, la plupart du temps inavouable. Aujourd'hui tu cherches les raisons pour lesquelles tu n'as pas compris cette chose simple à l'époque. C'est encore la nuit, tu t'es réveillé en sueur et en pensant à ta mère alors que tu n'y penses plus que très sporadiquement dans tes journées. Peut-être à cause d'un rêve dont tu ne te souviens plus non plus en te réveillant. Mais dont l'oubli lui-même en dit énormément. Suffisamment en tous cas pour que soudain tu comprennes que si tu as toujours voulu t'éloigner de quelqu'un, de quelque chose, c'était toujours que dans l'espoir de parvenir enfin à mieux t'en rapprocher. Cette obligation de rejet de ta mère, afin de pouvoir survivre, cette nécessité pensais-tu, pour ne plus rester bloqué dans cette immense nostalgie qu'elle chérissait comme leg et n'eut de cesse de vouloir te léguer aussi, c'était l'unique aspect négatif et dont elle ne fut qu'une victime consentante elle aussi. Et elle aussi, tout comme toi, avait sans doute opté pour ce que tu considères toujours être comme une forme de facilité, voire de lâcheté qui consiste à déclarer à haute voix ne t'inquiète pas tout va bien alors qu'en fait non, rien n'alla jamais. Rien n'alla jamais car impossible de prendre cette distance avec sa propre histoire afin de mieux la voir, la comprendre, en faire autre chose que ce que nous en avions fait. Et quand l'aube arriva, la sensation que tu éprouvas était-elle enfin à la mesure de l'éloignement auquel tu aspirais depuis toujours pour les retrouver ces fantômes ? le malaise inouï se confondant avec un soulagement immense au moment même où tu te posas sur le siège du bus qui t'emporta, ton ignorance et ta jeunesse les étouffa.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
16 janvier 2023-4
Je lis Kafka. Depuis que j'ai dû me procurer à nouveau le Journal sur Recyclivre, je ne le lâche plus. Si j'osais, je dirais très facilement, sur le ton d'une conversation normale, que je suis Kafka. Si cela n'était pas totalement ridicule. C'est parce que chaque phrase que je lis, j'ai cette impression étrange de l'avoir écrite moi-même. Et si on me parle de Kafka, j'ai aussi, bien sûr, la même impression qu'on est en train de parler de moi. Cela me fait penser soudain à ce mot tristement à la mode : intégrisme. Quelle chance d'avoir de si bons réflexes ! C'est-à-dire que l'on peut lire un livre, religieux ou pas d'ailleurs, et y déposer tellement de désirs troubles, toute une intimité, que l'on finit soi-même par devenir ce livre, jusqu'à vouloir même s'approprier l'auteur qui l'a écrit. Encore que, lorsqu'il s'agit de Kafka, possible de prendre ça avec humour. Mais que penser des intégristes de la Bible, du Coran, du Petit Livre rouge, et de Freud ? C'est sans doute que la fonction d'un tel engouement est de remplir un vide, puis de se l'expliquer ensuite, très sommairement d'ailleurs. Mais suffisante pour générer le mouvement perpétuel d'une boucle. Généralement une explication qui n'explique rien du tout, de préférence.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
16 janvier 2023-3
En exergue au Voyage au bout de la nuit, cette petite phrase comme un aveu : "C'est de la faute à l'imagination" ou "Tout n'est de la faute qu'à l'imagination". Flemme d'aller regarder dans ce livre que je n'ai plus ouvert depuis des années. Peur, probablement, de me faire happer par lui une fois encore. De subir encore une fois la même dépression qu'il causa lorsque je tombai dessus à la sortie de l'adolescence. J'ai toujours eu cette facilité à m'imbiber comme un buvard du ton, de l'esprit de tels auteurs. Et, forcément, si cela se produit, c'est qu'il y a, en amont, un terreau propice. Je me suis toujours demandé comment je parvenais à comprendre ce que je lisais dans un livre. J'imagine qu'on le porte tout autant en soi que son auteur et que de le lire nous fait soudain le découvrir. D'où ensuite cette ambiguïté concernant la notion de propriété du texte, assez risible lorsque j'y repense. Cela peut d'ailleurs aller chez moi jusqu'à imiter le ton, le style de certains auteurs que j'affectionne particulièrement parce que, naïvement, emprunter la musique me procure l'illusion de pouvoir y poser mes propres paroles. Encore que "propres paroles" soit un terme ronflant. Disons que la musique aide à exprimer l'imagination sur des thèmes communs en espérant trouver une mélodie personnelle. Ce qui n'est pas complètement idiot car les Chinois, dans le domaine de la peinture, n'ont toujours pratiqué qu'ainsi, en copiant, recopiant les maîtres jusqu'à ce qu'à un moment, un écart se produise par inadvertance chez l'élève et qui sera nommé "style d'un tel, style d'un autre". Il y a donc, dans la copie, une réalité vers laquelle on s'efforce de se rapprocher, et ce sera souvent l'impossibilité de s'en rapprocher totalement, cet écart, dans lequel il faudra puiser sa propre manière, sa propre voix, son propre ton. Est-ce que cet écart peut être nommé imagination ? Peut-être. Mais à mon avis, le désir ou l'obligation de copie, pour apprendre, appartient déjà à l'imaginaire. Il ne s'agit ni plus ni moins que d'une histoire que l'on se raconte de génération en génération. Une histoire qui a fait ses preuves, pour ainsi dire, suffisamment pour qu'on la nomme réalité. Paradoxe dont je m'aperçois encore une fois de plus : j'ai toujours été un fervent défenseur de l'imagination en peinture. C'est ce que je ne cesse de seriner à mes élèves depuis des années : "Surtout ne prenez pas de modèle, ne copiez pas, allez plutôt puiser les informations dans votre mémoire, vos souvenirs, votre imagination. Lâchez-vous donc." La raison d'une telle stratégie est que je n'ai affaire la plupart du temps qu'à des personnes ayant allègrement dépassé la cinquantaine, voire plus âgées ; j'ai très peu de jeunes. Donc trop fastidieux de commencer par les études académiques de pots, de bustes en plâtre, la reproduction de photographies des œuvres de grands maîtres. Je me dis que c'est tellement chiant, pour avoir traversé tout cela jadis moi-même, qu'il serait incongru de l'infliger à ces personnes, que sans doute elles s'enfuiraient, et que je me retrouverais alors gros-jean comme devant avec seulement une poignée de clients. Mais je me demande ce matin si ce n'est pas pure supputation de ma part, une interprétation de ma propre histoire, et de surcroît mal comprise, mal digérée. Comme si un aveuglement constitué de préjugés, d'a priori, était l'obstacle. En fait, de l'orgueil. De la vanité. Car ma vérité, elle aussi, n'appartient qu'au même domaine que tout le reste, elle n'est qu'une histoire que je me raconte à moi puis aux autres pour essayer de la valider. De m'en convaincre moi-même surtout. Et d'expérience, c'est si désagréable de poser le doigt dessus que cela procure l'amère sensation d'une très réelle réalité par conséquent.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
16 janvier 2023-2
Tout a un prix, y compris l'écriture. Et si on établit la liste des ressources, des sacrifices à faire pour se payer ce luxe, c'est au bout du compte un prix très élevé, sans doute aussi élevé que l'exigence qui pousse chaque jour à recommencer. Il semble que ces derniers mois, j'ai dû vendre au clou tout ce qui me restait d'entregent, de mondanité, de diplomatie et j'en passe, pour me jeter comme un désespéré dans l'acte d'écrire des choses que je jugerais moins mièvres ou désolantes à les relire. C'est un travail à la Giacometti que celui qui consiste à ôter petit à petit tous les actes, les habitudes dans lesquels on se réconforte en se disant : "On me lit — je peux donc en toute logique continuer". Mais ce réconfort est trouble si on l'examine de près. Une satisfaction qui met encore le doigt sur un écart à combler. Écart qui sans doute, si on parvient à le combler - mais en est-on jamais certain ? - serait celui qui transforme une écriture de complaisance en quelque chose de plus substantiel. Et dans ce cas, substantiel signifierait quoi pour toi ? Tu penses aussitôt à la matière bien sûr, et surtout au vide insupportable quand elle s'absente, qu'elle n'existe pas. Matière et mère, bien entendu. Donc il n'est pas idiot à ce point de ton parcours d'imaginer que l'écriture est une invocation. Qu'elle s'adresse à ta propre mère serait si décevant, encore que cela vaudrait la peine de l'accepter. Cela t'ouvrirait en tout cas en grand les portes de la prison dans laquelle tu t'es enfermé. Et cet intérêt de plus en plus accru pour tout ce qui tourne autour de ton fantasme de judéité trouverait peut-être enfin un sens qui t'échappe terriblement en ce moment. Tu serais même prêt à t'inscrire et à payer pour effectuer des recherches sur ce site de généalogie célèbre. Remonter à l'histoire de tes ancêtres estoniens. Mais quand tu découvres au hasard d'un article que les premières pièces d'identité fournies aux ressortissants des colonies juives ne remontent qu'à 1863, sans oublier les ravages effectués par l'administration soviétique puis la Shoah, toute trace anéantie à jamais, le sol se dérobe sous tes pieds. Impossible d'obtenir des preuves administratives, de te fier à des documents authentifiés. Tout un pan de l'histoire de ta famille impossible à vérifier. Et pourtant, quand tu es devant ton écran, tu sens une foule qui ne cesse de te murmurer : "Continue, vas-y, tu y es presque, tu vas nous retrouver, tu vas nous racheter, grâce à toi nous n'aurons pas vécu en vain." Ce qui certainement me fera frissonner de honte quand je me relirai.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
16 janvier 2023
Il va faire plus froid cette semaine. Cette pensée est déjà là dans l’atelier. Elle est en toi. Ce que ton père a fait en Algérie n’est pas différent de ce qu’ont fait tous les hommes depuis que la guerre existe. Qu’ils continueront à faire pour que la guerre subsiste. Que ta mère juive se jette soudain dans les bras d’un nazi, voilà ce qui peut résumer l'athmosphère glaciale. D’autant qu’elle ne s’y jette pas par amour -elle l’avouera plus tard-encore et encore. Elle voudra enfoncer le clou encore plus profondément. —Elle préfèrait -dit-elle- la sécurité qu’offrait alors ton père. Et tu peux alors l’imaginer dans mille circonstances de l’histoire tout à coup, et aussitôt la juger, dans ces moments si précaires où un choix s’imposerait pour conserver une intégrité une dignité. Ce mauvais choix qu’elle effectue et d’une façon tellement systématique que c’en devient troublant... Ce qui la pousse ainsi à choisir les camps du pire ; tu l’ignores bien sûr et cependant la juges . En d'autres temps elle n’eut été qu’une tondue parmi les autres. Une faiblesse. Une béance. Un vide affreux. aussi affreux que celui dans lequel tu t’es engouffré toi-même croyant pouvoir fuir ce vide. Et au bout du compte ces deux vides n’en font finalement qu’un, cette sensation de froideur infinie ne te fait pas fuir, au contraire. Tu te sens capable ce matin de la transformer en lave. Est-ce que tu n'as pas passé assez longtemps à vouloir racheter je ne sais quelle faute qui n'est pas la tienne ?|couper{180}
Carnets | janvier 2023
15 janvier 2023
Le rêve d’un deuxième cerveau. Déconnecté, mais là, toujours. On y plonge sans y penser, comme on tourne un robinet. Ce matin encore, tu t’es adressé à ChatGPT. Une page HTML à corriger, un doute technique. Tu aurais pu chercher, tâtonner, essayer. Mais non. Tu tapes ta requête. La réponse s’affiche : efficace, propre. Rien d’étonnant pourtant. Tu le sais bien, ce code, tu aurais pu l’écrire seul. Si seulement tu avais pris le temps. Le temps de l’essai, du raté, du détour. Ce temps où quelque chose surgit — un détail inattendu, une idée qui s’impose par accident. Mais l’intelligence artificielle ne connaît pas les accidents. Elle va droit au but, supprime le hasard. Et qu’est-ce que le hasard sinon la vie elle-même ? Le drame et la comédie, la poésie et le tragique ? Tout ce qui fait que nous avançons en trébuchant. Tu te rends compte que dans cette dépendance naissante à l’outil, c’est ton propre cerveau que tu oublies. Celui qui hésite, qui cherche, qui se perd pour mieux trouver. Ce matin encore, tu as choisi la facilité — ou peut-être était-ce la paresse ? Mais à chaque fois que tu fais ce choix, quelque chose se retire du monde. Une part de toi-même s’efface. L’outil est là pour aider, dis-tu. Mais il te vole aussi : le hasard des chemins non empruntés et cette lenteur où parfois naît une fulgurance. Alors tu te demandes : que reste-t-il quand tout devient rapide et sûr ? Où est passée cette part d’incertitude qui faisait de chaque geste une aventure ?|couper{180}
Carnets | janvier 2023
Profil du voyageur
Un jour, le voyageur avait dit "je vais partir en voyage". Il l'avait dit au beau milieu de la place du village pour que de nombreuses personnes puissent l'entendre. Il avait inventé ainsi cette sorte de promesse que l'on fait à tout le monde et à personne et dont on a un mal de chien par la suite à se départir. — Non on ne peut plus reculer désormais. Tant que l'on cherche à être vu en société, à être accepté par les autres, à ne pas passer pour un idiot , se martelait jour après jour le voyageur. Nous étions dans le creux de l'hiver et le grand départ était prévu pour le printemps. Pour le moment celui qui se fait appeler le voyageur est un homme d'une trentaine d'année dont le quotidien est d'une banalité à pleurer. Il vit au second étage de cet immeuble de banlieue que vous pouvez apercevoir, face à ce supermarché. Pour gagner sa vie il travaille comme manutentionnaire dans une des nombreuses usines que l'on peut trouver à la périphérie des grandes villes. Rien de vraiment extraordinaire comme vous pouvez le constater. Toute son existence pourrait ainsi tenir en quelques mots. Célibataire, pas de chat, pas de chien, pas de voiture, il lui arrive d'emprunter les transports en commun, mais le plus souvent il aime marcher. Il adore marcher et, tout en marchant avec cette sorte de frénésie que possèdent les timides, il rêve à tout un tas de choses.. Ce voyage par exemple occupe désormais une grande partie de ses pensées. Cependant qu'il ressort toujours de ces rêveries une sensation mi-figue mi-raisin. Tout bien pesé l'idée du voyage l'attire autant qu'elle l'angoisse. Le voyageur n'avait jamais voyagé vraiment jusque là. A peine avait-il franchi les frontières du département, les limites de la banlieue. Du moins tout seul. Car voyager était lié à l'idée de la solitude avant tout. Voyager c'était s'enfoncer dans une plus grande solitude encore que toutes celles qu'il avait déjà connues. Bien sur, plus jeune, il était parti du coté de Tours dans un étrange château peuplé de gamins comme lui, il avait été envoyé en colonie de vacances. Bien sur il s'était aussi déplacé dans le centre de la France en famille pour se rendre chez quelque oncle ou tante. Mais lorsqu'il avait comptabilisé tous ces déplacements effectués dans le passé, il ne s'était jamais vraiment senti suffisamment seul. Ou alors ce genre de solitude insupportable tellement proche de l'ennui. Ce genre de solitude qui réunit en même temps la sécurité, un confort apparent crée par la proximité d'autrui, mais qui souvent oscille entre le familier et l'étrangeté, voire l'hostilité. Partir seul et loin, c'était à la fois son rêve et sa plus grande peur. Lorsqu'il y pensait en marchant, il imaginait de nombreuses scènes comme s'il prenait une sorte de plaisir louche à vouloir être arrivé déjà avant même de partir. Il rentrait de ses longues marches éreinté, sans doute bien plus par son imagination que par la marche elle-même. L'argent lui servait à temporiser, à repousser le moment. Il n'y en aurait jamais assez se disait-il pour effectuer cet important voyage. Une fois parti il ne savait pas quand il reviendrait. La durée de ce voyage lui était totalement abstraite et cela aussi l'installait dans quelque chose d'à la fois agréable et de terrifiant. Il avait donc trouvé plusieurs emplois, de jour comme de nuit afin d'accumuler un pécule susceptible d'être "suffisant" sans même savoir les bornes de ses futurs besoins, de ces nécessités à venir. — Alors ce voyage, c'est pour quand ? commençait-on à lui demander alors que décembre était passé et que l'on se dirigeait vers la nouvelle année. — Oui, n'oublie pas, tu as dit que tu allais partir, nous avons tous bien retenu. Quelle date le départ alors ? Le voyageur compris qu'il fallait alors donner une date et il la donna au hasard, — je partirai le 1er mars. Ce qui lui laissait une avance confortable tout en retrouvant une tranquillité qu'il avait un peu perdue ces derniers temps. Il s'enfonça donc dans les trajets d'autant plus que ceux-ci se multipliaient d'un point à l'autre de la ville et de la banlieue pour satisfaire à toutes les exigences de ses divers emplois. Et au bout de plusieurs jours même le début mars finit par devenir abstrait. Janvier vient de s'achever pour laisser la place à février. Il fait un froid de canard, le vent glacial lui fouette les joues mais l'homme marche toujours de bon cœur ses rêves semblent lui tenir encore plus chaud que sa pelisse. — Alors c'est pour bientôt ce voyage lui demande Marie. Marie c'est une collègue de travail, ils flirtent depuis quelques temps le soir après le boulot. Il lui a tout dit évidemment et Marie l'encourage à mener son rêve jusqu'au bout. — En plus tu pourras m'envoyer des cartes postales de toutes les villes que tu vas traverser lui dit-elle avec un sourire un peu triste. L'idée d'avoir quelqu'un à qui envoyer des cartes postales le réjouit tout en l'effrayant aussi , que pourra t'il donc écrire au dos de toutes ces cartes ? encore quelque chose à méditer en marchant pense le futur voyageur. Mars est arrivé et on retrouve le voyageur à Istamboul, dans une chambre d'hôtel du quartier Beyazit, le quartier des épices. La fenêtre est entr'ouverte et un vent léger chargé de parfums insolites pénètre dans la petite pièce. C'est le matin et dans le ciel bleu les martinets voltigent. Sur le lit des liasses de billets de banque et un appareil photo. Le voyageur se tient devant un petit miroir au dessus du lavabo et observe le reflet de la chambre. L'eau fraiche sur son visage ne le réveille pas. Il a de plus en plus la sensation d'être dans un rêve. Au loin les premiers coups de klaxon lui indique que la ville se réveille elle aussi. Il a envie d'aller boire un café et de fumer une cigarette, d'aller marcher dans cette ville où il est arrivé la veille dans la nuit. La déception augmente au fur et à mesure qu'il arpente les rues. Cette sensation tant espérée de liberté se trouve chassée par la solitude désagréable qu'il retrouve en parvenant à la mosquée de Soliman le Magnifique. Une solitude mélangée à l'ignorance, car il peine à déchiffrer les pancartes, les enseignes, et il ne sait même pas qui pouvait bien être ce Soliman. Ereinté il aperçoit un établissement où des hommes moustachus et âgés sont attablés devant de petites tasses de café. Il entre et s'assoit puis contemple le va et vient des passants dans la rue. De sa poche il sort la carte postale qu'il vient d'acheter et un stylo et il écrit Bien arrivé à Istamboul. Il fait beau temps. Je t'embrasse. Paul. Ces quelques mots lui paraissent d'une pauvreté incommensurable, il a envie de déchirer la carte postale. Mais quelques instants plus tard, il avise une boite à lettres et la glisse dans la fente. — Tu écoutes de la musique américaine lui demande le jeune homme ? — oui répond le voyageur. Il est à la gare routière et a acheté un billet pour se rendre à Téhéran. — Si tu as des cassettes et que tu nous les fait écouter dans le bus, on t'héberge à la maison autant que tu voudras dit le jeune homme à nouveau. Ils sont un petit groupe, trois jeunes gens qui reviennent de vacances et rentrent au pays. Ils s'expriment dans un anglais approximatif mais tout le monde finit par se comprendre avec force signe de tête et de main. La jeune fille a des yeux de biche, le voyageur est troublé. Est-ce possible enfin que commence vraiment l'aventure se demande t'il ? Le conducteur baisse le volume de la radio, "sex machine" disparait progressivement, le bus arrive à Erzurum et ralenti. Au delà des vitres du véhicule, il y a des chiens errants qui cavalent la queue basse dans les petites rues poussiéreuses. Ils aboient au passage du véhicule, le voyageur remarque leurs babines retroussées sur des crocs, des canines blanches inquiétantes. — Very closed to the border dit la fille aux yeux de biche en se retournant vers le voyageur qui durant toute la route s'est attardé sur le reflet de son profil dans la vitre. Ils vont repartir après l'examen des bagages en douane, lorsqu'un immense bonhomme moustachu appelle le voyageur par son nom. — Mister, please come on. Et il se retrouve dans un bureau face au bonhomme moustachu qui lui tend un paquet de cigarettes — Tu fumes ? Le voyageur se dit qu'il vaut mieux décliner. Puis le douanier part dans une tirade amoureuse sur la France et sur les jeunes gens qui voyagent, notamment les jeunes hommes. Et puis la lumière s'éteint. Le voyageur dégaine un briquet et tente de s'éclairer. Le visage du moustachu apparait et disparait, ses yeux sont brillants et il passe sa langue sur sa moustache comme un énorme chat. Ce sont les jeunes gens qui le délivreront. Impatients et inquiets ils sont venus toquer à la porte du bureau. — Que se passe t'il où est notre ami , que lui voulez vous ? La lumière revient, le douanier retrouve une tenue et tend le passeport au voyageur. — Ok mister it's good, all right let's go and good luck Le voyageur conservera cette anecdote comme une sorte de trésor. De temps en temps il essaiera de l'écrire pour mieux s'en souvenir et échafauder des hypothèses. Il se la rappellera des dizaines de fois, l'arrangera parfois, la modifiera, ou au contraire tentera d'énoncer le plus froidement les faits. Puis il n'en parlera plus, ni aux autres ni à lui-même. Comme d'ailleurs des voyages qu'il a effectués ces années là, ces années de jeunesse où s'affrontaient encore en lui le désir et la peur des voyages. Toutes ces anecdotes pittoresques ne sont, somme toute, que des anecdotes pittoresques. S'en rendre compte prend du temps. Et en construire un récit véritable encore bien plus. Le voyageur est désormais un vieil homme. Il ouvre un carnet à spirales où sont consignés quelques phrases rares et pauvres, c'était la plupart du temps des brouillons qu'il tentait d'écrire pour Marie. Les brouillons des pauvres contenus qu'il avait expédiés tout au long de son périple. Mais Marie était désormais semblable à ces souvenirs de voyage. Quelque chose d'aussi semblable que le souvenir d'un rêve que l'on tente de retrouver en se réveillant, et qui nous échappe, nous échappe toujours.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
14 janvier 2023-2
On commence par là, ce qui bute. Toujours. Ce qui empêche. Le doute, comme une pierre dans la chaussure, sur cette voix qu’on a quand on parle et celle qu’on a quand on écrit. Deux voix, deux corps, deux rythmes. Et la question qui revient, lancinante : laquelle est la vraie ? Est-ce qu’on s’entend parler comme les autres nous écoutent ? Est-ce qu’on se lit soi-même comme les autres nous lisent ? Ou bien tout ça n’est qu’un jeu d’échos mal accordés ? Quand tu parles, tu n’es jamais seul. Toujours un autre en face, ou à côté, ou même au-dessus. Alors tu ajustes, tu tailles dans le vif de ta langue, tu fais simple pour que ça passe. Une langue de surface, fonctionnelle, avec ses silences entre les phrases courtes. Et ces mots qu’on répète sans même y penser : bonjour, bonsoir, bonne journée. Une hypnose sociale où chacun joue son rôle. Mais toi, dans ce jeu-là, tu t’effaces un peu plus à chaque fois. Et puis il y a l’écriture. Là où personne ne te regarde en direct. Là où tu ne sais rien du lecteur, et où pourtant tu ne perds pas de temps à l’imaginer. L’écriture n’a pas besoin de plaire ni de convaincre ; elle creuse son propre sillon. Elle dilate le temps ou le contracte selon son bon vouloir. Elle agrandit un instant jusqu’à l’infini ou condense des années en quelques lignes. C’est un espace à part, où le lieu et le moment deviennent malléables. Mais il faut remonter loin pour comprendre pourquoi cette fracture existe entre l’oral et l’écrit. L’enfance, toujours elle. Ce moment où tu as tenté d’utiliser ta propre voix et où personne ne t’a écouté. Ou pire : on s’en est moqué. Alors tu as appris à parler comme tout le monde, dans une langue réduite au strict nécessaire. Une langue qui protège mais qui ne dit rien des mystères auxquels tu te heurtais déjà. Et pourtant, avec le temps, une autre exigence est née : celle de la justesse. Dire ce qui est vrai, même si ça brusque. Ne plus tolérer la fausseté dans les échanges. Parfois au point de couper court, brutalement. Mais quelle énergie perdue à entrer dans ces jeux sociaux pour les refléter comme un miroir ! À quoi bon ? Alors écrire devient une manière de reprendre pied. Pas une solution simple ou définitive — non, écrire pose d’autres problèmes — mais une tentative d’intégrité face aux compromis imposés par la parole. Écrire pour chercher cette voix unique qui vacille entre deux mondes. Et peut-être que c’est ça finalement : accepter que cette tension entre l’oral et l’écrit ne disparaisse jamais vraiment. Parce que c’est là que tout se joue : dans ce frottement entre ce qu’on montre et ce qu’on est vraiment.|couper{180}
Carnets | janvier 2023
Travaux en cours
Un peu moins disponible en fin de semaine, mais avancée tout de même sur deux des 6 toiles en cours. Acheté deux grandes toiles 137x97 cm pas encore préparées. Si je parviens à 4 achevées ce mois ci je serai bien content. huile sur toile 60x80 huile sur toile 100x80|couper{180}