écriture onirique

Texte issu d’un rêve ou inspiré par un état mental onirique : transcription directe, dérive, hallucination douce ou fiction nocturne.

articles associés

Carnets | juillet 2025

4 juillet 2025

ça commence comme ça en cherchant comment écrire en inclusif ça commence par iels et là je ne sais pas ce qui se passe mais ça sort d'un seul coup on le garde on le garde pas la belle affaire on s'en fout Iels écrivent, toustes. Celleux se congratulent, s’applaudissent, se lappent, se bijent, se clap clap clap, avec des “oh !”, des “ah !”, des “comme j’aime” et des “encore… j’en peux plus… continue.” Et bon… ça rappelait quelque chose — mais quoi ? Si ça m’revient… la cour de récré, jadis, il y a longtemps, des lustres, belle lurette. Les billes, les calots, les bonbecs. Les escaliers, les jupes, les socquettes. les couetttes. Les dents qu’on montre quand on sourit — incroyable, comme ça sourit, avec des dents en avant, des dents pointues. vampires, hémoglobine, les dents de l'amer à flots. Des dents à déchirer la viande. À ronger l’os. À mordre tout c’qui bouge. Des dents de cour de récré, pas pour sourire, mais pour survivre. Des rictus de gosse carnivore. Des crocs sous les bonbecs. Et personne qui voyait rien. Les aime pas. Les déteste. Les vomis. Les piétine. Ces pourris, en rang par deux. Donnez-vous donc la main. Avancez. Vers le perron, vers la classe, vers le stade, vers la piscine, vers la cantine, vers l’entreprise, vers la guerre, vers le cimetière, vers l’oubli. Donnez-vous la main, bon dieu. Serrez-la fort. Qu’on n’en perde pas un seul. Tout compte, tout comptera, c’est le contrat. chez les verrats, les porcs, les truies, d’Ivry à Porentruy. TVA et recettes fiscales obligent mon petit, cires bien tes pompes, montre papatte blanche, remonte ta braguette, peigne-toi bordel, peigne-toi. et cours, cours, servir le petit café bien chaud à monsieur le directeur, madame la secrétaire de direction, monsieur le curé, monsieur le maire, monsieur l’abbé. et surtout, surtout, surtout — ne dis pas bonjour à cette pouffiasse de madame la pute, madame la gourde, madame l’agent, madame l’institutrice, madame la bibliothécaire, madame l’agent, madame qui joue à la dame, madame bouffe la reine, échec et mat. La colère a du bon a dit machin, c'est bien vrai ça, opine machine, oui pine la pine la donc. Encore une petite pinacollada je vous prie. Et l'autre bouche en cul de poule qui dit oui oui oui encore s'il vous plaît. iels écrivent se gargarisent s'enchantent tous ça pour se dire quoi ? mais rien, rien, rien, et encore rien — sauf qu'ils ne sont pas seuls. les conconnes. ce n'est pas politiquement correct me dit la charcutière en me montrant la tranche avec la tranche de son couteau plus fine. et j'ajoute que le politiquement incorrect est le politiquement correct de demain, avec trois saucisses de Strasbourg si c'était un effet de vot' bonté. ce que je veux dire c'est qu'à force de chauffer de chauffer de chauffer l'eau bout et que quand ça bout il faut y aller il faut mettre les pâtes les mains dans le camboui. alors bon je les regarde je les lis très attentivement entre les lignes et qu'est-ce que je trouve ? encore plus de vide donc ils mettent du vide en paravent du vide c'est ça la mode. vous savez, non pas de croissant aujourd'hui je n'ai plus la queue d'un désolé. excusez je vous en prie à genoux pardonnez-moi d'être à sec si sec C'est vert, vous pouvez y aller. si vous avez la ferraille le menue monnaie c'est mieux on m'a cloqué cette machine c'est le progrès disent-ils mais c'est pire donnez-moi l'apoint je vous prie s'il vous plait pitié ça m'évite d'ouvrir le tiroir caisse. et pourquoi tu dis bonjour et pourquoi tu ajoutes toujours bonjour bonne journée tu te le demandes ce matin. pour une fois tu dis je veux une baguette pas trop cuite tu paies et tu te tires. ni bonjour ni merde ni veux-tu baiser mon cul. ET VOUS FAITES QUOI DANS LA VIE ? -- j'me d'mande. et puis qu'est-ce que ça peut bien vous faire à la fin ? c'est pas comme si ça vous intéressait vraiment. mais mais mais — si tu veux pas entendre ce genre de réponse ne pose pas de question à la con. Translated in the spirit of Allen Ginsberg and Kathy Acker : part beat monologue, part punk incantation. It starts like this— trying to write inclusive, it starts with "iels," and then I don’t know what happens, but it comes out in one rush, all at once. Do we keep it ? Do we trash it ? Big deal. We don’t care. They write, all of them. Themz. They clap each other’s backs, tongue each other’s cheeks, bite love into the neck, clap clap clap, with “oh !” with “ah !” with “I love this !” with “don’t stop—I can’t—keep going—yes—go.” And then— it reminded me of something— but what ? If it comes back— the schoolyard, a long time ago, ages, forever and ever ago. Marbles. Slings. Candies. Stairs, skirts, socks, ponytails. Teeth we show when we smile— unbelievable, how we smiled, with teeth out front, pointed teeth. Vampires. Hemoglobin. The bitter bite of saltwater, flowing. Teeth to tear meat. To gnaw bone. To bite anything that moves. Schoolyard teeth, not for smiling, for surviving. Snarling kid grins. Fangs behind the sweet. And no one ever saw a thing. I don’t love them. I hate them. I puke them up. I trample them. Those bastards, in rows of two. Hold hands now. Move forward. To the front steps, to the classroom, to the field, to the pool, to the cafeteria, to the office, to the war, to the graveyard, to forgetfulness. Hold hands, goddammit. Grip tight. Don’t lose a single one. Everything counts. Everything will count. That’s the deal. With the swine, the hogs, the sows, from Ivry to Porentruy. VAT and fiscal blessings, my dear. Shine your shoes, show your clean paws, zip your fly, comb your fucking hair, comb it. And run, run, serve the steaming hot coffee to Mr. Director, Ms. Executive Assistant, Father Priest, Mr. Mayor, Monsieur l’Abbé. And above all, above all, above all— don’t say hello to that bitch Madame Slut, Madame Fool, Madame Officer, Madame Teacher, Madame Librarian, Madame again, Madame playing the lady, Madame gobbles the queen— checkmate. Anger’s good, said so-and-so. Damn right, nodded what’s-her-face. Yeah, fuck yeah, one more piña colada, please. And that other one, fish-lipped, whispers “yes, yes, yes, please, more.” They write, they gurgle it up, they delight themselves— all to say what ? Nothing, nothing, nothing, and more nothing. Except they’re not alone. The dumbcunts. “This ain’t politically correct,” says the butcher woman, showing me the cut, a sliver thinner than truth. And I say, politically incorrect is tomorrow’s righteous cause, with three Strasbourg sausages if you’d be so kind. What I mean is— heat it, heat it, heat it— till it boils. When it boils, drop the pasta, get your hands greasy. So I read them. I read between the lines. And what do I find ? More void. So they pack their voids in front of the void. That's fashion. “No croissants today.” “I’m out, sorry.” “Green light, go ahead.” “Got coins ? Better. Saves me the register.” And why do you say hello ? Why always add, hello, have a nice day ? You ask yourself that today. Just this once, you say, I want a baguette, not too crusty. You pay. You leave. No hello. No fuck you. No want to lick my ass ? WHAT DO YOU DO FOR A LIVING ?—I wonder. And then— what the hell does it matter to you ? It’s not like you care. But, but, but— If you don’t want to hear that kind of answer, don’t ask dumb fucking questions. Illustration Georges Grosz " Piliers de la société" 1926/Illustration : George Grosz, Pillars of Society, 1926.|couper{180}

écriture onirique Narration et Expérimentation peintres

Carnets | juin 2025

20 juin 2025

nouvelle phase d'organisation en préparation|couper{180}

écriture onirique essai rêves
20 juin 2025

Carnets | juin 2025

16 juin 2025

On annule Madrid. Et de tenter de revendre les billets pour le Prado sur Le Bon Coin. On annule ainsi, à tour de bras. Pas sans regret ni remord, on ne peut quand même pas dire ça. On annule parce que le blé manque, qu'il fera trop chaud, on annule parce que quand même faut pas pousser, on annule parce que tu ne gagnes pas assez de fric, que tout repose sur mon dos, et que ça commence à bien faire. Que la retraite, je ne la voyais pas comme ça. Que tout est bien sûr encore de ma faute et que je laisse passer l'orage parce que tu veux dire quoi, faire quoi. Encore 150 euros pour finir de payer les pneumatiques — quatre d'un coup, pour être tranquille, toute saison — et qui s'ajoutent encore au reste. J'y vais ce matin pour 9 heures, tout est prêt comme à l'hôpital, on vous attend, tout juste s'il n'y a pas masque et gants blancs. Lu un peu de tout. Rien qui me donne envie d'en parler parce qu'en parler, je ne sais pas faire. Mon truc, c'est de l'écrire, mais hier encore beaucoup plongé dans le code pour améliorer l'aspect rien de ma nouvelle version. C'est-à-dire retirer peu à peu. Oh, le graphisme, la mise en page, ce n'est rien. C'est de tout autre chose dont il faut parler. Ou plutôt non, ne rien dire du tout. Faire. Sinon, le cousin a dû rentrer de l'hôpital. Problème de vessie ou de rein, on ne sait pas encore. On gratte, on prélève, on suppute. Résultats fin de mois. Ne pas oublier. Presque oublié de le noter hier. Sinon, des rêves incroyables encore en si peu d'heures de sommeil. À croire que l'on pourrait faire une théorie basée sur le faible temps de sommeil et la qualité des détails oniriques. Le type que j'ai écrabouillé avait un imper gris maculé de taches de graisse. Mais ce n'était rien à côté de l'odeur épouvantable, un mélange de tabac et de sueur, avec un je ne sais quoi d'épicé à l'urine et au foutre. Et de le croiser comme ça au crépuscule. « Je n'arrive pas à mettre les photos sur Le Bon Coin, tu peux venir m'aider ? » Donc le croiser au crépuscule et de me souvenir d'avoir été frappé par ce type autrefois. Et lui de me sourire en me croisant et moi de lui aplatir la gueule, ni plus ni moins, comme si je voulais oblitérer son visage large, mais ma main, même écartée à fond, n'allant pas jusqu'à ses contours. Ce qui, par dépit, s'achève in extremis par un coup de pompe dans les parties. Mais ce n'est rien. La suite : je me retrouve dans une sorte de prison et un type cogne à la porte et me remet un couteau en plastique encore sale de beurre. Il faut comprendre immédiatement que l'autre que j'ai sonné a le bras long et qu'il veut se venger. Fondu au noir. On se retrouve dans une salle de sport et je vois le type qui m'a tendu le couteau qui ressurgit, mais d'en haut. Il y a un étage. Il tente de m'agresser avec des ciseaux à bout plat bizarres. Genre pelle à tarte, ce qui me fait pouffer. Du coup, je lui dis : « Salut, moi c'est Michel. » Incroyable, non ? Michel est mon second prénom. On devient copains. Mais il y aura des suites, l'autre, le commanditaire, est rancunier. Qui ne le serait pas après avoir reçu un coup de pompe dans les parties ? « Tu as vu l'heure ? Tu ne t'es pas lavé. » Donc il faut que j'arrête là, à contrecœur. Car le rêve continue encore, tout à fait net encore, et je pourrais le poursuivre les yeux ouverts sans difficultés. Mais la contingence oblige. We cancel Madrid. And try to sell the Prado tickets on Craigslist. We cancel like that. Left and right. Not without regret or remorse, you can't say that. We cancel because there's no money, it'll be too hot, we cancel because enough is enough, we cancel because you don't make enough cash, everything's on my back, and this is getting old. Retirement I didn't see like this. Everything's my fault of course and I let the storm pass because what you want to say what to do what. Another 150 bucks to finish paying for the tires—four at once, to be safe, all-season—and that goes on top of everything else. I'm going this morning at 9, everything's ready like at the hospital, they're waiting for you, just short of masks and white gloves. Read a little of everything. Nothing makes me want to talk about it because talking about it I don't know how to do. My thing is writing it but yesterday still deep in the code to improve the look nothing of my new version. That is removing little by little. Oh the graphics the layout, that's nothing. It's something else entirely we need to talk about. Or rather no, say nothing at all. Do. Otherwise the cousin had to come home from the hospital. Bladder or kidney problem we don't know yet. We scrape we take samples, we guess. Results end of month. Don't forget. Almost forgot to write it down yesterday. Otherwise incredible dreams again in so few hours of sleep. You'd think you could make a theory based on little sleep and the quality of dream details. The guy I smashed had a gray raincoat stained with grease spots. But that was nothing next to the awful smell, a mix of tobacco and sweat, with something spicy like urine and come. And running into him like that at twilight. I can't get the photos on Craigslist can you come help me. So running into him at twilight and remembering being hit by this guy before. And him smiling at me as we pass and me flattening his face plain and simple like I wanted to obliterate his wide face but my hand even spread out all the way not reaching his edges. Which out of spite ends up with a kick in the balls. But that's nothing. Next thing I'm in some kind of prison and a guy bangs on the door and hands me a plastic knife still dirty with butter. You have to understand right away that the other one I knocked out has connections and wants revenge. Fade to black. We're in a gym and I see the guy who gave me the knife coming back but from above. There's a level. He tries to attack me with weird flat-tipped scissors. Like a cake server which makes me laugh. So I tell him hi I'm Michel (incredible right ?). Michel is my middle name. We become friends. But there'll be consequences, the other one, the guy behind it, holds grudges. Who wouldn't after getting kicked in the balls. You see what time it is, you haven't washed. So I have to stop here against my will. Because the dream continues still completely clear still and I could keep going with my eyes open no problem. But reality requires it.|couper{180}

Autofiction et Introspection écriture onirique rêves

Carnets | décembre 2024

03 décembre 2024

archive Dauphiné Libéré Aragon et Elsa Accrochage aujourd’hui à Saint-Donat-sur-l’Herbasse, dans le nord de la Drôme. Une quarantaine de toiles au Palais Delphinal, et au moins autant de l’ami G. Pour l’occasion, j’ai relu Le Traité du Style et Le Paysan de Paris, m’imaginant croiser le couple Andrieux dans les ruelles alentour. Peut-être en apprendrai-je davantage samedi, lors du vernissage. L’autre ami G., poète de son état, connaît, il me semble, quelqu’un de l’association qui s’occupe de préserver la mémoire des promenades de Louis et Elsa dans les environs. Je n’ai que peu de connaissances précises sur Aragon. Je sais qu’il s’est battu pendant les deux guerres, pas qu’un peu, en tant que médecin. Qu’il a connu Breton dans la biffe, ce terme ancien désignant les tranchées, qui ajoute à la violence de l’époque. Que leur désaccord fut certainement politique par la suite. Quelques poèmes de lui me reviennent, glanés sur les bancs de l’école, notamment La Rose et le Réséda. J’ai toujours imaginé Aragon plus frêle qu’il ne devait l’être, sans savoir pourquoi, mais il m’est devenu admirable au fil du temps, presque malgré moi, et sans même avoir lu l’ensemble de ses livres. En additionnant ses prises de position contre le franquisme, sa fidélité au Parti communiste – quoi qu’on en dise – et ce que j’ai appris de son enfance tourmentée, peu à peu une figure d’homme, bien avant celle de l’écrivain, s’est imposée. Comme ça. Tout bonnement. Quand je redécouvre Feu ( Feu sur le Parti socialiste ! ) je trouve qu'il irait tout à fait bien dans le contexte actuel, il me semble si éclatant. Toute la rage mise ainsi en mots, formidable. Mais ce n’est pas tant ses positions politiques, que son style, qui parachève mon admiration. La lecture de quelques pages du Paysan de Paris m’a renvoyé à mes propres déambulations urbaines. Ce sentiment de proximité m’a pris aux tripes, comme si je plaçais mes pas dans les siens, presque au même endroit, presque avec les mêmes pensées. Errer dans une ville, laisser l’esprit divaguer, c’est une expérience que je connais tellement. Moi aussi, je préfère les passages aux grands boulevards, qui n’ont jamais été ma tasse de thé. Dès que je le pouvais, je m’y engouffrais, à la recherche de cette suspension onirique que seuls ces lieux intermédiaires semblent offrir. Un souvenir m’est revenu en lisant ces lignes d’Aragon. Ce restaurant où je me rendais parfois, chez Chartier, qui incarnait à mes yeux une forme de modestie joyeuse. On pouvait y déjeuner pour des sommes correctes, mais ma bourse plate m’obligeait tout de même à regarder à deux fois avant d’y mettre les pieds. C’était un autre temps, où les serrures des portes – comme celles évoquées par Aragon – semblaient réellement s’ouvrir sur l’infini. Aujourd'hui, je m'y suis rendu il y a quelques années ce n'est plus tout à fait le même établissement et nous avons préféré tourner les talons pour aller manger un couscous à Belleville. Voir des choses que personne ne prendrait le temps de regarder. Perdre du temps, en somme, rêvasser. Transformer, en continu, ce que la réalité nous impose. La lire chez d'autres est toujours un bonheur, un pincement au coeur, on aimerait écrire rien que pour pouvoir provoquer ça. Mais, à l’époque, je ne savais pas poser de mots sur ce que je voyais, ou plutôt sur ce que j’imaginais. J’avais ce regard mais pas encore la langue pour le dire. Et c’est en cela que la lecture a du bon. Souvent, les sots pensent que lire n’est qu’une activité inutile, passive, un simple passe-temps. Mais c’est tout le contraire. On refait le plein de souvenirs qu’on croyait perdus, d’émotions qu’on n’avait pas su avec raison capter. À chaque nouvelle page, paragraphe, phrase, c’est comme si un chalut invisible ramenait à la surface ce qui avait sombré dans les eaux profondes de l’oubli. Aragon, finalement, a cette faculté rare d’éclairer ce qu’il y a de flou et d’illisible en nous. Il nomme ces "serrures s’ouvrant sur l’infini", et je comprends. Je le comprends à travers lui, et je me comprends un peu aussi. Ce que je n’ai jamais su écrire, il l’a posé sur papier. Ses mots réveillent en moi un monde oublié, et je pense qu’il est là, le véritable miracle de la lecture. Pas seulement découvrir l’autre, mais redécouvrir ce qu’on porte en soi. Il y a encore aller vingt ans j'en aurais été jaloux, aujourd'hui ce que je ressens est bien plus un sentiment de fraternité. Je ne sais pas si samedi, lors du vernissage, je croiserai quelqu’un de cette association qui saura me parler des itinéraires empruntés par Elsa et Aragon , apprendre encore autre chose, autrement, sous un autre angle. Mais peu importe. Ce qu’il m’a déjà donné dans ses pages, ces souvenirs greffés aux miens, me suffit déjà amplement. Il faut que ma cervelle saisisse le moment où la satiété l'atteint, l'apaise, toute avidité n'étant que passage à vide.|couper{180}

écriture onirique

fictions

Nuit d’insomnie : L’épuisement et les fantômes de la nuit

Sous un ciel d’orage, la nuit d’insomnie s’étire. Les pensées défilent comme des éclairs, tandis que l’épuisement s’installe sournoisement. Accompagné d’un dibbouk pétrifié, le narrateur se perd dans une plaine onirique, cherchant désespérément à capter un sommeil insaisissable. C’est une nuit où l’épuisement devient un refuge, et où chaque pensée est une menace. Une exploration poétique de l’insomnie et de l’épuisement qui pousse à la lisière de la réalité.|couper{180}

écriture onirique

import

Esquisse d’une sensation ( exercice d’écriture )

Variations autour de la sensation d'une transition de saison, tout ce qui arrive sans y penser, le premier jet, sans réécriture, ou, autre expression : improvisé. <em>L'improvisation</em> valant peut-être ce qu'on entend par <em>préparation</em>. Préparation comme en cuisine, préparer un plat, puis le dresser ensuite dans l'assiette sur une table. Avec ou sans fioriture, suivant l'humeur, les circonstances, l'ordinaire, l'extraordinaire, amitiés, fêtes, naissances, mariages et enterrements. Ce que déclenche en tout premier lieu, l’idée de la variation d’une phrase, c'est mon inaptitude à la réécriture. Ce blocage face à la musique. Cet excessif respect face à toute musique désormais après en avoir tâté et reconnu cette inaptitude. Après m'être fourré cette sensation d'inaptitude dans le crâne surtout. La sensation qu’on ne peut pas refaire ce qui vient d’être fait. Qu'il faille passer par une forme de destruction irréversible du passé pour recréer à vif. Et aussi, en opposition, cette sensation que ce qui est fait ne l’est pas entièrement par moi ou je. La sensation que réécrire c’est mettre un peu trop je en avant comme chef des opérations. La sensation que je ne suis pas que je quand j’écris. La sensation qu’éprouve le petit je ballotté par la langue , qu' il le sait pertinemment, que ça, la langue, n’appartient pas qu’à lui. La sensation de vouloir entrer dans une langue qui en grande partie se refuse en raison d’une croyance qu’on y est avant tout pour moitié étranger. La sensation que si je me voue entièrement à la langue française je trahis la langue maternelle. Je les trahis car j’emprunte une autre langue, je les trahis tous ceux qui s’exprimèrent autrement qu’en français, en estonien, mais aussi dans le français de tous les jours, le français ordinaire, le français d'une époque, le français d'une période économique, politique, le français comme creuset de tous les drames, de toutes les tragédies, le laisser aller du français dans la violence verbale, la médiocrité, et parfois aussi sa tendresse très privée. L’exercice qui consiste à partir d’une sensation, de la tentative d’écriture de cette sensation, du manque que l’écriture en premier lieu ne peut dire. Comment est-ce que je m’en sors, ou plutôt ne parviens jamais à m'en sortir, de cette traduction personnelle de la sensation. Comment je l’esquive, comment je ne m’y appesantis pas alors que je m’appesantis sur tellement d’autres choses. comme pour me divertir, pour m'aveugler par et dans le divertissement. Comment je peux aussi me mettre à délirer au travers de cet exercice de traduction, devenir fou à lier parfois, en essayant de rejoindre quelque chose qui m’échappe en lui échappant moi-même le plus souvent. C'est à dire en bottant en touche. Le piège est-il dans ce délire comme échappatoire au véritable travail ? C’est à dire de parvenir à dire la sensation, le simple passage d’une saison à une autre. Sans doute parce que la sensation vient de loin, que lorsqu’elle ressurgit elle m’ébranle dans mes certitudes, la certitude d’arriver régulièrement au bout de ma vie notamment. Non, quand cette sensation ressurgit, elle gomme cette certitude. Je me retrouve souvent l’enfant que j’étais. Je me retrouve en tant qu’enfant. La sensation me transforme, fait voler le temps en éclats, la sensation de passer de l’hiver au printemps comme une métaphore d’une autre sensation plus onirique encore de la vieillesse qui passe à la jeunesse. Évidemment qu’Il doit bien y avoir un lien mais comment ça se fait que cette sensation surgit la toute première fois, lorsqu’on sort de l’hiver, vers mettons 6 ou 7 ans ? Se sentir déjà vieux que d'aspirer à la jeunesse ainsi tiendrait-il. Que me raconte cette sensation lorsque je la vois surgir en moi soudain sur le chemin de l’école un matin. Comment je la perçois comme retrouvailles déjà dans le chant des oiseaux, dans une légèreté nouvelle de l’air qui caresse la joue. A quoi je pense en éprouvant enfant cette sensation à la sortie de ces hivers si longs déjà, interminables, est-ce que je pense d’ailleurs à quoi que ce soit, ou bien n’est-ce que la sensation du corps qui a moins à lutter tout simplement, qui se sent débarrassé d’un poids, celui des lourds vêtements d’hiver, les ayant troqué pour des tenues plus légères. Le retour du short, de l'air frais sur les mollets. Quelles images viennent simultanément avec la sensation, la sensation qui charrie, la sensation comme le Cher qui coule en bas sous le grand pont et qui charrie les flaques de sang des abattoirs voisins, mais pas seulement, parfois aussi un tronc qui flotte, une transparence au travers de quoi on aperçoit, dans son lit au lever du soleil, des cheveux d’algues d’un vert tendre. Charroi et sensation. Et cette expression qui revient comme un cheveu d’ange dans l’air léger, que disait-elle déjà ? —arrête de charrier, tu me charries, tu charries — Quelque chose est transporté d’un lieu l’autre, d’un temps l’autre par la sensation qui ressurgit. La sensation me transporte, comme la musique peut me transporter, comme les variations musicales qu’on reconnaît sans vraiment en prendre conscience au moment où on les entend. Parce qu’on ne fait qu’entendre on n’écoute pas. Parce que je n'est pas seul à l'écoute, il ne peut l'être, ce serait un illogisme. Parce qu’il faut dépasser beaucoup de difficultés pour écouter vraiment, notamment celle du cœur qui cogne dans la poitrine, la douleur que ça fait dans la poitrine et qu’on ne peut pas dire, la douleur qu’on garde pour soi dans la poitrine. Pour soi ce n'est pas que moi ou je, c'est bien autre chose, c'est un ensemble. Cette douleur que l’on aiguise comme un bâton de réglisse pour pouvoir la sucer, s’en nourrir, et à la fin des fins pouvoir même en éprouver un certain plaisir. Un plaisir solitaire à marcher sur le chemin de l’école en éprouvant cette sensation d’un cœur qui se serre envahit soudain par le chant des oiseaux, qui se brise se fend, éclate comme une bogue de marron à la moindre sensation retrouvée d'une légèreté de l’air, d' une transparence entr'aperçue entre les flaques du sang qui flottent à la surface du Cher. Est-ce qu’il manque encore quelque chose à cet instant de l’écriture de la sensation, est-ce que quelque chose de terrible se dissimule encore après cet écoulement de mots qui charrie des flaques de sang, des zones de douleurs, le vert des algues qui dansent sous la surface des eaux. La sensation très présente de la mort se dissimule encore. Et aussi le contentement de voir ressurgir comme une issue à cette peur dans l’arrivée soudaine du printemps, dans le chant des oiseaux, quelque chose de violent et de doux en même temps.|couper{180}

écriture onirique
Esquisse d'une sensation ( exercice d'écriture )