july 06 2025
Judment is silence
Fine. Let’s go.
Me, I can go years without saying a word.
P.? Haven’t spoken in thirty-five years.
M.? Maybe two.
Others ? It goes back even further.
Judgment is silence. And silence is death.
When you stop talking to someone, it’s like they died.
And yeah, it works the other way too.
Which means we die more than once in a lifetime.
Every time you turn your head away.
Every time you turn a corner.
That’s why—on this precise point of silence—
we’re all killers.
No need to act surprised.
At first, I didn’t get it.
Or I got it wrong.
Or I just didn’t want to get it.
I thought silence meant someone was mad at you.
Sometimes, sure.
But it’s not just that.
Sometimes they’re just silent because, to them,
you don’t exist.
Maybe you existed five minutes.
Fifteen for Andy.
But they didn’t want to hear more.
Maybe you made them uncomfortable.
Maybe they didn’t get it.
Maybe they didn’t give a shit about not getting it.
Maybe it was all of that at once.
So they turned around.
Disappeared.
Never gave a sign again.
Killed you, plain and simple.
No headlines.
No dramatic music.
Just—that’s it.
They don’t give a fuck about you.
That’s the truth.
You don’t believe it at first.
You hold on.
You think there are rules, ties, some kind of community.
Family, maybe.
But family’s like school. Like the workplace. Like church.
A nice storefront for control.
You think they care ?
You’re wrong.
You’re just a LEGO block in the shrine of their ego.
Useful as long as you fit.
Then—trash.
The basement.
The oubliette.
We wrap it all up in culture, in morals, in democracy.
But really, it’s this :
there are assholes on one side,
and on the other, all the lost souls asking :
Is this okay ?
Can I do this ?
I don’t know…
This morning at 8 a.m. sharp, I blasted Bikini Kill.
Kathleen Hanna ? That’s me too.
I threw the window wide open.
Let the neighbors deal.
Reject All American.
Reject all fascists. All dicks.
Sometimes I think, like her—yes, it’s worth it.
Fucking with the neighbors is a form of self-care.
Like :
- still jerking off at sixty-five,
- knocking back three whiskys before lunch just to say yes, I’m bored,
- tossing weird obscure words into random café convos,
- rehearsing being the freak,
- flipping off some bourgeois lady who expects me to hold the door.
And :
- never answering the phone,
- even though I have one,
- and never call anyone anyway.
I read something this morning.
Can’t remember exactly—
something about bad writing.
Like :
If it’s bad, don’t show it. It just adds pain to pain.
Seriously ?
Fuck that.
If it’s bad—show it more.
Throw it at people.
We need more good-bad to wipe out the bad-good.
Oh—and Kathleen Hanna ?
Apparently, she stripped too.
Just like Kathy Acker.
No idea if that matters.
But I’m writing it down.
(Okay—it matters.)
Rage isn’t exclusive.
Why should rage belong to just one kind of person ?
That’s what I was thinking
as I hit play again. For the third time.
Sunday. Eight a.m.
To remind the world :
I’m not dead.
I can make noise.
Author recruitment.
Well, more like a spontaneous submission.
June Abattoir.
Born in a motel on the outskirts of Houston,
on June 13th, under a tornado warning.
Raised between a bingo hall and an abandoned library,
she started writing at the same age other kids discovered glitter glue.
Trained in the school of cutting narratives and loaded silences,
she published her first pieces under fake names
in post-industrial feminist zines.
Her work oscillates between muted scream and sudden laughter,
intimate trash and the fine lace of the real.
She currently lives between an ashtray, an empty glass,
and a Wikipedia tab open on emotional taxidermy.
Visual : pure Riot Grrrl.
Pour continuer
Carnets | Atelier
30 juillet 2025
J’avais dit "table rase", pas pour rien. SPIP et MySQL m’ont répondu en chœur. Tout ce que j’avais construit sur mon site local a été mis par terre par l’importation de ma base de données distante vers mon PhpMyAdmin local. Au début, j’ai tempêté. Des heures et des heures de boulot qui s’envolent en un clic. Puis je me suis souvenu de mon envie de faire table rase. Et je me suis dit que cet incident était plutôt une chance, que ça allait m’aider. SPIP a connu pas mal de mises à jour, et c’est là qu’il faut être vigilant. Il ne suffit pas de lancer le fameux spip_loader.php pour mettre à jour la distribution. Il faut aussi aller voir du côté de la base de données et vérifier les versions (table spip_meta). De vieux plugins non mis à jour peuvent également s’accumuler et créer des distorsions. C’est à peu près tout cela qui m’est tombé sur le coin du nez ces derniers jours. Ignorance ou négligence : le débat reste ouvert. Le fait est que SPIP, en contrepartie de sa robustesse et de sa fiabilité (quand tout roule), demande un peu de jugeote, de mémoire et d’attention. La gravité du problème rencontré n’est pas immense. J’avais bien sûr pris soin de sauvegarder mon travail. Mais quand même, devoir tout refaire ne m’amuse pas. Cela m’oblige donc à repenser, une fois encore, ce que je veux — ou ce que je ne veux pas (la seconde option est toujours plus facile). Je reprends donc, encore une fois, la reconstruction des squelettes, os près os — mais sans doute avec un peu plus d’expérience, ce qui se paie d’échecs, comme il se doit. En attendant, je continue à écrire mes textes sur le site en ligne. Je ne donne pas de date pour la mise en ligne de la prochaine version, mais j’ai déjà quelques trouvailles dans la boîte — notamment un JavaScript extra qui permet de disposer d’une imprimerie de poche pour créer des livres numériques. Reste à savoir ce que j’y mets, dans ces livres. Ce n’est pas l’embarras du choix qui manque.|couper{180}
Carnets | Atelier
29 juillet 2025
Contrôler l'accès à la nourriture, c'est contrôler les corps, les territoires, les populations. Impossible de ne pas penser aux famines organisées, aux embargos, aux politiques agricoles. En même temps qu'à la télévision on aperçoit ces parachutages de denrées sur Gaza, on repassait hier La Passion de Dodin Bouffant, du réalisateur Trần Anh Hùng. Il s’est produit quelque chose d’étrange à cet instant. Une attirance et une répulsion dans un même mouvement, pour la nourriture, mais plus encore pour cette culture de la mangeaille. Et ce, malgré la qualité visuelle et sonore — surtout sonore — du film. Ça m’est resté en travers de la gorge. Soudain, cette surreprésentation de la bouffe m’est apparue profondément obscène. Mais pas plus, au fond, que ce qu’on nous fait avaler sur papier glacé, dans les affiches publicitaires, sur les réseaux sociaux. L’importance que la nourriture a prise ces dernières années est considérable. Peut-être que le culte de la boustifaille est vraiment apparu sur les réseaux lors des premiers confinements de 2019 ou 2020. Il y avait là déjà quelque chose d’abject, mais j’y accordais sans doute moins d’importance. Peut-être même en ai-je profité, en recopiant quelques recettes. Mais hier soir, non. En écoutant le frémissement du bouillon clair, les rissolements des foies, les rôtis en train de suer, j’avais plutôt envie de dégueuler qu’autre chose. J’avais déjà vu ce film en 2023, je crois, et je n’avais pas éprouvé la nausée à un tel point. Cette célébration m’avait même laissé admiratif, et en même temps nostalgique, voire envieux. Les souvenirs du culte sont nombreux, ils remontent à l’enfance, aux grandes tablées, aux aurores embaumées par l’odeur de brûlure de pattes de volaille, par l’oignon qui revient vers une tendre transparence. Autant de souvenirs olfactifs que l’on se passe comme un relais dans les familles françaises de classe moyenne depuis des générations. Ce goût de la bouffe, de la “bonne chair”, je le transporte encore dans mes gènes. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, à tant de reprises, de m’en séparer. De traverser des périodes d’austérité, peut-être dans l’unique but de m’en débarrasser. Mais ça revient. Par le nez, par les papilles. C’est plus fort que moi, comme on dit. Un réflexe pavlovien de chien qui revient vers le maître, celui qui, à la fois, le bat et le caresse. Une voix, tout au fond de moi, voudrait me ramener à je ne sais quelle “raison”. Tu confonds tout, me dit-elle. Tu ne peux pas mettre sur un même plan les exactions, les guerres, l'effroi des images que ces événements charrient, avec l'atmosphère tellement chaleureuse d'un film célébrant la gastronomie française. Tu ne peux pas, tu n’en as pas le droit, continue-t-elle. Je l’écoute, je la respecte. Mais pourtant, si je mets cela en parallèle, si je les place sur un même plan, c’est que le plan du dégoût est devenu si vaste, une fois les apparences traversées — les apparences tellement claires — ainsi que les contours fumeux des lendemains qui ne chantent pas.|couper{180}
Carnets | Atelier
paupière tombante
Voir la honte au moment même où elle vous prend, c’est voir par en-dessous. Par défaut. À rebours. Ce n’est plus une image, c’est un voile. Une membrane lente descend sur la pupille, un clignement avorté, comme une fermeture en suspens. J’ai connu un perroquet honteux. Il chantait à tue-tête auprès de ma blonde, mais sa paupière flanchait à chaque syllabe. Elle s’écroulait sur l’œil, molle, involontaire. Il continuait de chanter, mais à moitié aveugle. Un œil fermé par la honte et l’autre qui insistait. L’entêtement du regard blessé. La honte n’arrive pas de l’extérieur. Elle monte. Elle boursoufle la vue. Elle se glisse entre le monde et soi comme un écran bistre, opaque, figé. Elle ne trouble pas la vue : elle l’arrête. Et quand elle laisse passer un peu de lumière, c’est une lumière malade, caverneuse. Voir par la honte, c’est comme voir à travers un œil d’aiguille : un point, rien de plus. Honte d’être là. Nu, immobile. Pris dans une impudeur si totale qu’elle semble presque tranquille. Et pourtant personne ne voit. Personne ne regarde. L’invisibilité n’apaise rien. Elle épaissit. Elle appuie là où ça brûle. Elle fait mieux que montrer : elle isole. Le regard manque, mais l’essentiel reste. La honte ne dépend pas de l’œil de l’autre. Elle se propage par en dedans, de la peau jusqu’au nerf optique. la honte au centre du paysage n’arrondit pas les angles. Elle tient le milieu comme un pion figé. Autour, les allées blanches dessinent une spirale hésitante, un tourbillon à ras du sol. Le sable crisse sous les pas, sans rythme net. J’avance d’un pas, je recule de trois. Chaque détour me ramène au point d’avant. À la manière d’un patineur sur carton glacé, glissant sans grâce sur un vieux jeu de l’oie. On ne gagne rien, on recommence. Une case vide, une case piégée, une case où l’on attend.|couper{180}