fil rouge

« Même dans mes gestes les plus sombres, il y avait une tentative de me protéger, de rétablir un équilibre, et parfois, sans le savoir, de sauver quelqu’un d’autre. »

Une série d’histoires prenant appui sur ce fil rouge. Complétées au fur et à mesure qu’elle me reviendront.

#01 histoire du poulailler

Je ne sais plus exactement comment les choses se sont passées. Peut-être trop vite, peut-être comme si une main invisible avait décidé pour moi. J’accepte la possibilité d’en être responsable, mais je doute de savoir qui j’étais alors.

Depuis des semaines déjà, je rêvais de P. Mon ami imaginaire, disais-je, mais peut-être davantage. Parfois je le voyais comme mon double, parfois comme une présence étrangère qui me soufflait des pensées noires, me laissant croire qu’elles venaient de moi. Ces nuits-là, je me réveillais trempé de sueur, avec la conviction d’être possédé par quelque chose qui n’avait pas de nom. Je savais seulement que je n’avais pas été baptisé, pas comme mes camarades, et cette absence me paraissait une faille, une ouverture dans laquelle n’importe quoi pouvait s’engouffrer. J’avais supplié ma mère de m’inscrire au catéchisme pour combler ce vide.

Le début de l’été coïncida avec l’arrivée de Flip. Mon père l’avait trouvé sur une route départementale, un chien-loup maigre et nerveux, qu’il fit monter dans sa voiture comme s’il l’attendait depuis toujours. Devant nous, il inventa une histoire : Flip avait eu plusieurs maîtres, tous cruels, il s’était enfui, il avait erré longtemps avant de croiser sa route. Mon frère et moi, bouleversés par ce récit, lui donnâmes aussitôt notre affection.

Ce jour-là, la lumière était blanche, écrasante. Nous jouions dans la cour. Ma mère venait de verser la nourriture dans la gamelle de fer blanc. Mon frère s’approcha du chien pour le caresser. Peut-être Flip crut-il qu’on allait le frapper encore une fois. D’un bond, il lui attrapa l’œil. Le sang gicla, éclaboussant la poussière. Mon frère hurla, des cris que je n’oublierai jamais.

Je restai figé, incapable de bouger. Ma mère était au village. Personne pour venir. Alors, mes doigts trouvèrent au fond de ma poche une boîte d’allumettes que j’avais volée. Tandis que les hurlements se prolongeaient derrière moi, je marchai vers le poulailler. À travers les lattes du bardage, je vis les poules s’agiter, leurs plumes frottant contre le bois. J’ai gratté une allumette. La flamme a jailli, petite, fragile, mais déjà prête à dévorer. Je l’ai jetée sur la paille.

Le feu prit aussitôt. Une chaleur épaisse, un souffle. Les cris du poulailler s’ajoutèrent à ceux de mon frère, comme si deux voix se répondaient. Les pompiers arrivèrent vite. Ils éteignirent les flammes, emmenèrent mon frère. Ma mère surgit au moment où l’ambulance allait partir. Elle me vit. Et ses mots tombèrent, nets :

— Tu as le diable dans la peau.

J’ai voulu protester, dire que c’était P. Mais déjà, je savais que ce serait en vain.


Reprise de souffle par rapport à la syntaxe, expérimentation

Je ne sais plus exactement comment tout s’est enchaîné peut-être trop vite peut-être comme si quelque chose avait décidé pour moi et je ne nie pas que j’en fus l’auteur même si je doute de savoir qui j’étais alors car depuis déjà des nuits je rêvais de P mon double imaginaire ou bien l’ombre d’une présence étrangère et chaque matin je me réveillais avec cette peur sourde d’être possédé d’être livré au démon parce que je savais que je n’avais pas été baptisé comme mes camarades et cela me paraissait une faille béante dans laquelle tout pouvait s’engouffrer et j’avais supplié ma mère de m’inscrire au catéchisme pour être enfin tranquille mais le début de l’été apporta aussi Flip le chien-loup trouvé sur la route par mon père qui l’avait ramené dans sa voiture en lui inventant une histoire de maîtres cruels et de longues errances et cette histoire me toucha au point que mon frère et moi nous lui donnâmes aussitôt notre affection mais ce jour-là dans la cour alors que la lumière blanche écrasait la poussière mon frère s’approcha de lui pour le caresser et le chien bondit et lui attrapa l’œil et le sang jaillit et les cris montèrent et je restai figé sans savoir que faire car ma mère était au village et personne ne vint et mes doigts rencontrèrent au fond de ma poche une boîte d’allumettes volée et je marchai vers le poulailler et à travers les lattes j’aperçus les poules agitées et je frottai une allumette et la flamme prit et aussitôt la paille s’embrasa et le feu grossit et les cris des volailles se mêlèrent aux hurlements de mon frère et les pompiers arrivèrent et l’ambulance emporta mon frère et ma mère surgit et ses mots tombèrent nets tu as le diable dans la peau et je voulus protester dire que c’était P mais déjà je savais que ce serait en vain.

ici, la ponctuation réduite (virgules, conjonctions) crée un flux continu. La lecture devient haletante, presque musicale, et la reprise de souffle est absorbée dans le mouvement. L’émotion se transforme en transe syntaxique : moins de drame frontal, plus de flux hypnotique.

Psalmodie

je ne sais plus exactement comment tout s’est enchaîné peut-être trop vite peut-être trop fort comme si quelqu’un avait décidé pour moi et pourtant je sens encore que ma main y était mais qui étais-je alors moi ou un autre ou bien p celui qui venait dans mes rêves depuis des nuits entières et qui me disait que je n’étais pas baptisé et que je n’étais pas comme les autres et que le diable entrerait par cette faille béante et je suppliais ma mère de m’inscrire au catéchisme mais c’était l’été déjà et mon père avait ramené ce chien trouvé au bord d’une route un chien-loup nerveux qu’il avait nommé flip et auquel il avait donné une histoire d’errance et de cruauté et cette histoire avait suffi pour que mon frère et moi nous nous y attachions mais ce jour-là dans la cour la lumière blanche tombait sur nous et ma mère était absente et mon frère s’était approché trop près du chien et le chien avait bondi et sa mâchoire avait saisi l’œil et le sang avait jailli et mon frère avait crié et le monde avait basculé et moi je ne savais plus que faire sinon appeler dans le vide et alors mes doigts avaient trouvé une boîte d’allumettes au fond de ma poche et j’étais allé vers le poulailler et à travers les planches je voyais les poules agitées et j’avais frotté une allumette et la flamme avait pris aussitôt et le feu avait grandi et les cris des poules se mêlaient aux hurlements de mon frère et les pompiers étaient arrivés et ils avaient éteint les flammes et ils avaient emporté mon frère et ma mère était revenue et ses mots étaient tombés comme une pierre tu as le diable dans la peau et moi je voulais dire que c’était p que c’était lui mais je savais déjà que personne ne croirait et que ce serait toujours ainsi moi ou lui ou le feu ou la honte mais jamais le salut.

Notes

  • Utilise le souffle comme climax → pas partout, mais aux moments où le texte doit basculer.
  • Décide de la longueur → une phrase d’une demi-page peut suffire. Pas besoin d’aller jusqu’au roman-monologue (Bernhard).
  • Laisse apparaître la musique → pense la syntaxe comme un flux respiratoire, pas seulement comme un enchaînement logique.
  • Reviens au sec après → une phrase courte, brute, peut fermer le passage comme une gifle.

En résumé : le souffle continu est un outil pour faire vivre la perte de contrôle, la transe ou l’intensité émotionnelle. Il gagne en puissance si tu l’emploies par contrastes : après un passage clair et sobre, il devient une descente, un vertige. Puis, quand tu coupes net, la chute est encore plus forte.

On peut bien sûr compter : Lecture 123 / 1234 / 123 :

Le chien avait mordu (1-2-3)

Le sang jaillissait encore (1-2-3-4)

J’appelais mais personne (1-2-3)

"et je voyais le sang qui ne cessait pas et je pensais que ma mère n’était pas là et que personne ne viendrait et que peut-être j’avais été choisi pour voir cela et que tout le reste n’avait jamais compté"

Si tu le lis en pulsations 123 / 1234 / 123, tu t’aperçois que la phrase trouve un équilibre respiratoire malgré son excès apparent.


Digression sur les différents rythmes prosodiques

Quelques rythmes prosodiques au-delà du 123 / 1234 / 123

  1. Le binaire (2/4, 4/4)

Très courant en musique occidentale moderne (rock, pop).

En prose : effet de marche, d’insistance, de régularité militaire.

Exemple : Il frappe. Il attend. Il frappe. Il attend. 👉 Rythme sec, martelé, presque mécanique.

  1. Le ternaire pur (3/3/3)

Fréquent dans les chants religieux, la poésie médiévale, les litanies.

Effet d’incantation, de balancement hypnotique.

Exemple : J’appelle la nuit / J’appelle le feu / J’appelle la honte. 👉 Proche d’une psalmodie.

  1. Le quintuple (5 temps)

Plus rare dans notre oreille, mais fréquent en poésie arabe, persane, ou en musique indienne.

Effet : instabilité, tension permanente (on n’arrive jamais à “tomber juste” en 4).

Exemple (5 battements) : Il s’avance, regarde, se tait, retient, respire. 👉 En prose, ça donne une impression de déséquilibre maîtrisé.

  1. Le septénaire (7 temps)

Très utilisé dans les haïkus (5-7-5) et la poésie japonaise.

Effet : respiration ample mais non occidentale, un souffle qui se déploie en décalage.

Exemple : Sous la lumière / la maison semble attendre / une voix muette. 👉 Rythme contemplatif, suspendu.

  1. Le rythme libre mais cadencé

Hérité de la poésie moderne (Whitman, Ginsberg, Saint-John Perse).

Pas de schéma fixe, mais une périodicité du souffle : chaque segment est une “vague” de 10 à 20 syllabes, comme des vagues qui reviennent mais jamais identiques.

Exemple (Whitman) : I sing the body electric, / the armies of those I love engirth me, / and I engirth them. 👉 Rythme océanique, expansif.

  1. Les rythmes africains ou afro-diasporiques (call & response, syncopes)

Rythmes basés sur la répétition et la variation.

Dans la prose : effet de transe, d’énergie accumulée par retour.

Exemple : Je frappe le sol, je frappe encore, je frappe toujours, et le sol me répond. 👉 Rythme circulaire, dialogique.

  1. Les talas indiens

Systèmes complexes (ex. tintal en 16 temps, rupak en 7 temps).

Peu “naturels” pour une oreille occidentale mais fascinants si transposés en prose.

Exemple (7 temps) :

Un souffle, une pause, deux pas, un souffle, une pause, un pas, silence. 👉 Le lecteur ne peut pas anticiper, ce qui crée une étrangeté prosodique.

🎼 Synthèse

Occidental classique : binaire, ternaire, quaternaire → facile, familier.

Autres cultures : quintuple, septénaire, talas → instables, déstabilisants.

Poésie moderne : rythmes libres mais réguliers (Whitman, Perse, Ginsberg).

Oralité traditionnelle : litanies, call & response, psalmodie → effet incantatoire.

👉 Changer de rythme, c’est changer de perception. Un texte en 3/4 apaise, en 4/4 martèle, en 5 ou 7 déstabilise, en flux libre enivre.

Pour continuer

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embryons —à faire pousser dans l’encre

notes pour Le sabbath des calques Une surcouche AR (= augmented reality overlay, calque de réalité augmentée), c’est une couche d’informations numériques affichée par-dessus le monde réel via un écran (téléphone, lunettes, pare-brise). Elle ne remplace pas le réel : elle l’annote, le guide, le filtre. Concrètement, ça fait quoi ? Affichage : flèches de navigation sur la rue, étiquettes “Boulangerie — ouvert”, prix sur produits vus par la caméra, noms des plantes dans un parc. Action : bouton “ouvrir la porte”, “signaler un nid-de-poule”, “appeler un ascenseur”, “déverrouiller un trottinette” quand tu regardes l’objet. Filtrage : tu ne vois que certains commerces (ex : partenaires), ou seulement les bornes de recharge compatibles avec ton abonnement. Maintenance : un technicien voit les canalisations invisibles sous la chaussée, l’état d’un transformateur, la vanne à fermer. Comment ça marche (simple) La caméra/localisation capte où tu es et ce que tu vises. Un calque (la surcouche) associe à ce lieu/objet des données + droits (texte, icônes, commandes). Le système rend ces données alignées sur la scène réelle (position/orientation). Pourquoi c’est important dans “Le sabbat des calques” Dans l’histoire, chaque surcouche AR n’est pas qu’un visuel : elle porte des droits et des flux (livraison, entretien, accès, soins). Si on désactive les calques sans procédure de retour, certaines choses sortent du graphe (plus d’ID, plus de tournée) et “n’existent” plus pour la ville. D’où le nom résolutoire : un énoncé public qui ré-attache officiellement les lieux/objets/personnes au système. En bref : une surcouche AR, c’est un calque opératoire qui dit au monde numérique quoi est où et qui peut faire quoi avec. Quand tu coupes le calque, tu coupes souvent l’accès autant que l’affichage. ID 1 Dans une métropole gouvernée par des surcouches de réalité augmentée qui pilotent livraisons, soins, entretien et droits d’accès, un collectif obtient une heure hebdomadaire sans calques pour “souffler”. Effet pervers : ce qui n’est pas re-référencé à la reprise est considéré obsolète par les plateformes, dé-publié des index, puis “cesse d’exister” pour la ville (plus d’ambulance, plus de tournée, plus d’adresse résolue). Quand une petite clinique disparaît des systèmes, une cartographe d’infrastructures remonte la chaîne technique et découvre que visibilité = existence procédurale ; désactiver sans formule de retour équivaut à effacer. Elle invente un « nom résolutoire » : une nomenclature publique, prononcée sur site et horodatée, que les opérateurs doivent accepter pour ré-attacher lieux, objets et personnes au graphe urbain. Climax sur la place centrale : la ville lit ses propres noms pour se faire revenir, tandis que les éditeurs de calques tentent d’en limiter la portée. Enjeu : reprendre la responsabilité d’“éditer” le réel sans renoncer au repos collectif. ID 2 Le locataire non inscrit Dans un vieil immeuble où l’existence des habitants tient à un registre calligraphié du hall, le nom de Lise refuse de “prendre” : l’encre perle et s’efface. La nuit, un voisin invisible prononce son nom avec une exactitude troublante — chaque syllabe qu’il dit fixe sa propre chambre (odeurs, objets, chaleur), tandis que Lise disparaît des sonnettes, du courrier, du bail. En fouillant les archives notariales, Lise découvre le vrai nom du voisin, effacé après un décès douteux : pour se sauver, elle devra le prononcer en face dans l’appartement muré — geste résolutoire qui le libérera… ou la rayera définitivement du registre. Scène-pivot : minuit, palier glacé, Lise ouvre la porte condamnée, lit à voix claire le nom exact ; les lettres du hall se remettent à l’encre — mais pas toutes. Thèmes : nom comme emprise (parasitage d’identité) → nom résolutoire (révocation par adresse), droit d’exister par inscription, loyers fantômes, éthique de la restitution. 3 Le nom-miroir Dans une petite ville, un photographe ambulant promet de révéler aux clients leur “vrai nom” en développant leurs portraits au nitrate d’argent. Sur chaque cliché, un mot apparaît sur le col ou la peau, différent du prénom civil : “Déserteur”, “Fiancée”, “Veilleur”, “Fille de personne”… Celui qui adopte ce nom gagne un pouvoir discret (veille sans dormir, franchit une barrière, traverse le fleuve gelé) mais perd une chose intime en échange (un souvenir, une capacité). Une femme veuve découvre que le mot sur sa photo — “Soeur” — rétablit une sœur que sa famille a gommée. Pour arrêter l’hémorragie de pertes, il faudra renommer la ville entière lors d’une exposition nocturne où l’on retourne les photos et déclare publiquement le nom qu’on refuse de porter. -- Nom en jeu : habiliter (adopter le mot confère) ↔ emprise (le mot prélève) → résolutoire (publiciser le refus d’un nom). 4 La maison aux noms empruntés Une maison bourgeoise accueille des colocataires à bas prix… à condition de déposer, dans un coffret, un nom dont on ne se sert plus (surnom d’enfance, nom d’artiste, nom d’emprunt). Tant qu’on y habite, la maison protège (pas de cauchemars, pas de cambriolages). À la Toussaint, le coffret s’ouvre et la maison revêt ces noms : les pièces prennent des caractères (une cuisine “Maman”, un couloir “Caporal”, une chambre “Perdue”). Quand une nouvelle locataire dépose par erreur son vrai nom complet, la maison s’en pare et la dépossède : plus personne dehors ne la reconnaît. Pour la récupérer, les habitants doivent organiser une veillée de restitution où chacun ré-appelle un nom prêté à son vrai détenteur, jusqu’au dernier — le sien. -- Nom en jeu : emprise (la maison vit des noms prêtés) → résolutoire (rite de restitution, nom rendu au bon destinataire, à voix claire).|couper{180}

carnet de fiction documentation le vrai nom Narration et Expérimentation

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Comment écrire une histoire avec un peu de méthode

Protocole léger — pour ne pas s’égarer Pour le moment, seules la première et la sixième propositions de l’atelier d’écriture en cours me proposent des pistes que je pourrais relier à un travail personnel. Disons qu’elles « matchent » dans les circonstances actuelles, par l’expansion que je constate à vouloir les développer. Mais pour ne pas m’égarer, il me faut un fil d’Ariane : une méthode — même légère suffirait. D’où l’envie de rédiger un modeste protocole. 1. Partir d’un embryon (format fixe) Fiche minuscule à chaque graine — 6 lignes, pas plus. Signe (trace perçue) : sifflement / buée / vitre / odeur de térébenthine / feux rougeâtres. Geste du corps (déclencheur) : ralentir / bifurquer / s’asseoir / lever la main / détourner le regard. Seuil (lieu précis) : porte / vitre / entrée de dancing / butte / péage / atelier. Distance (échelle) : hors-champ / voix seule / silhouette / face-à-face muet. Objet-totem (détail récurrent) : terre de sienne / yak / Abbesses / Keaton / autoroute. Sortie (chute) : question / rire étouffé / non-réponse / retour marche. Garder la fiche en tête de texte (ou en commentaire). C’est l’« ADN » de la série. 2. Écrire en échelles (x3) À partir d’une même graine, produire trois tailles — on ne réécrit pas, on déplie. Nano (50–80 mots) : une image + une action. Court (150–220 mots) : ajouter un seuil et une résonance sensorielle. Plein (300–450 mots) : même scène, avec bascule (ex. : vitre → café → geste non rendu). Résultat : 3 versions compatibles, pas 3 textes concurrents. 3. Invariants / variables (cohérence douce) Choisir 4 invariants pour toute la série (ex. : il ne parle pas directement ; jamais de prénom ; un seuil par scène ; une seule sensation dominante par texte). Tout le reste = variables (lieux, météo, vitesse, foule/solitude). Chaque nouveau texte repiquera 2 éléments du dictionnaire (ex. : « vitre » + « sifflement ») et ajoutera 1 élément neuf.4. Matrice des axes (pour générer vite) Quand ça sèche, combiner 4 axes (au dé, ou au hasard). Lieu : rue / intérieur sombre / hauteur / périphérie / transit. Signe : son / lumière / odeur / chaleur-froid / objet déplacé. Distance : trace / voix / silhouette / présence derrière vitre. Sortie : question sans réponse / rire / coupure / marche. Tirer 1–1–1–1 → embryon prêt en 10 secondes. 5. Numérotation claire (versioning sans peine) Nom : 2025-10-22_Porte_A1.0.md (A = parcours canonique ; B = alternance ; C = enquête). Patch : A1.1 (même scène, échelle différente), A1.2 (chute modifiée), etc. En tête de fichier : une ligne Changelog (≤ 12 mots) : « + vitre embuée ; – ponctuation coupée ».6. Couture entre versions (le lien cohérent) Passe « couture » hebdo : on n’écrit pas, on ajoute des échos croisés. Le sifflement réapparaît au dancing (à la sortie des toilettes). La terre de sienne existe en reflet rouge sur un feu arrière. Les Abbesses laissent une buée qui reviendra sur la vitre du café. Relier par capillarité, pas par explication. 7. Arches de lecture (A/B/C…) Garder les 3 ordres (A/B/C). À chaque nouvel épisode (ex. : Autoroute), décider tout de suite : A = pont entre deux nœuds (entre Question et Voix). B = coda hors séquence (ne pas toucher à l’alternance dedans/dehors). C = indice supplémentaire (C4, C5, etc.). Chaque texte rejoint au moins une arche — parfois deux. 8. Rituel (30 minutes chrono) 10 min : écrire Nano à partir d’une graine. 10 min : passer en Court (ajouter seuil + sensation). 5 min : Couture (ajouter l’écho croisé vers un ancien texte). 5 min : Classer (A/B/C), nommer (…_A1.1), noter le changelog.9. « Bible » d’une page (pour ne pas dévier) Un seul document, vivant : Règles d’or : tes 4 invariants. Dico de détails : 10 totems max. Topologie : 5 lieux maîtres (porte, vitre, dancing, butte, autoroute/atelier). Timeline fantôme : ordre canonique + derniers ajouts (à cocher après chaque session).Annexe — Fiche-embryon (copier/coller) Signe : Geste du corps : Seuil : Distance : Objet-totem : Sortie :|couper{180}

Ateliers d’écriture carnet de fiction fil rouge synopsis

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drôle de nuit

-- Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais un cube empilé parmi d’autres cubes. Cette promiscuité était d’autant plus difficile à vivre que je ne pouvais faire aucun mouvement ni même protester : aucun son ne sortait de ma bouche. D’ailleurs je n’avais pas de bouche. Juste une face lisse, une face avant exactement semblable aux cinq autres. Pour m’en sortir, j’ai rêvé dans mon rêve que je devenais sphérique, puis j’arrivais à m’extraire de la pile, non sans mal ; j’ai fait une chute vertigineuse. Une chute dans le noir sans fin qui durait durait durait. Pour m’évader de ce rêve-ci, je me suis encore transformé en mouche parce que je ne pouvais pas vraiment faire autre chose. J’aurais préféré quelque chose de plus noble. Mais on fait avec ce qu’on peut. En fin de compte, au moment même où j’apercevais enfin la lumière, que j’allais m’élever dans les airs au-dessus de je ne sais quel paysage, voici que je me suis fait gober par un oiseau et je suis devenu oiseau par je ne sais quelle alchimie onirique. Mais l’oiseau est mécanique, il est un produit d’une gigantesque intelligence artificielle qui désormais gouverne toute la Terre. Ses rêves sont des rêves de cubes, et me revoici à mon point de départ. La question, au réveil : seules les mouches sont-elles vivantes, non altérées encore par l’intelligence artificielle ?|couper{180}

fictions brèves