mai 2022

Carnets | mai 2022

4 mai 2022

Dans le journal de Kafka, qui écrivait lui aussi pas mal de conneries, il faut bien le dire, j’avais été ravi de découvrir une page sur laquelle il n’y avait que deux mots. « Aujourd’hui, rien. » C’est drôlement tentant. Et mensonger. Mais comme je ne suis plus vraiment à un mensonge près… je crois que j’ai plus peur de Google que du mensonge en général, qui m’accuserait de plagiat. Mais même cette peur là à quoi bon ? La nouvelle abrupte qu’en moins de 2 minutes la fin du monde serait pliée m’atterre je n’ai même plus envie de me mettre en rogne, de trépigner. Je me demande juste comment dépenser chaque seconde qui reste un peu moins bêtement que d’habitude lorsque je me croyais éternel. mais, même ça me parait suspect. Comme s’il fallait trouver du profit dans tout même le pire, surtout dans le pire Tout ça à cause des Grecs anciens et d’une pensée pratique à la mords moi le nœud. Y a des jours où j’adorerais être né chinois hindou, modeste. Et ça ne me rassure même pas de constater que je ne suis pas le seul. En ce moment c’est à la quantité de blancs que je peux estimer un tableau. Ces blancs qui recouvrent la couleur surtout. Et qui n’ont pas la même charge émotionnelle que le blanc de réserve. Ainsi ce tableau de Miro qui est censé être une maternité. Constater que d’autres sont déjà passés par là est une émotion aussi.|couper{180}

Carnets | mai 2022

3 mai 2022

Résolution. Autrement dit : tarte à la crème, ailleurs, demain. Au moins une à la minute en période de crise. -- Ouvrir un blog sur le jazz. -- Étudier le sanskrit. -- Couper les griffes de la chatte. -- Tout plaquer, partir en forêt. -- Relire Jack London. Jules Verne. Un long moment devant le mur de jasmin me remet un peu d’aplomb. Mais voilà que ça me reprend. Créer des fiches personnages. Que de l’action, pas de blabla. Il marche. Il saute. Il ou elle hurle. Et les expos ? Faire les listes. Revoir les prix. Noter les dates. Ne pas s’embrouiller. Retourner devant le mur de jasmin — et de chèvrefeuille. C’est mélangé. Payer l’électricien. Arrêter l’abonnement podcast. Vider la mémoire de l’iPad. Peut-être apprendre le chinois… Refaire le site. Retailler les images. Écrire des choses moins connes. Acheter du pain. Des œufs. Du lait — pour la pâte à beignets. Prévoir le cinéma jeudi. Rester calme. L’enfant a dit à son père qu’il avait peur de s’ennuyer chez nous. Réparer la trottinette. Atelier tarte aux poires : mardi, donc cet après-midi. 15-17h. Arrêter de fumer. Arrêter de prendre des résolutions. Prendre les choses comme elles viennent. Surtout celles qui ne viennent pas. Scolaires. Voilà le mot. J’avais tenté : timorés, engoncés, orgueilleux… Non. Scolaires. Hourra. Vous êtes beaucoup trop scolaires. Vous devez déborder, nom de Dieu.|couper{180}

Autofiction et Introspection

Carnets | mai 2022

2 mai 2022

“Bien sûr que si, que je suis réelle !” protesta Alice en se mettant à pleurer. “Ce n’est pas en pleurant que vous vous rendrez plus réelle, fit remarquer Tweedledee ; et il n’y a pas là de quoi pleurer.” “Si je n’étais pas réelle, dit Alice – en riant à demi à travers ses larmes, tant tout cela lui semblait ridicule –, je ne serais pas capable de pleurer.” “J’espère que vous ne prenez pas ce qui coule de vos yeux pour de vraies larmes ?” demanda Tweedledum sur le ton du plus parfait mépris. De l’autre côté du miroir, chapitre IV Lewis Carroll — La tristesse comme la joie sont des pièges qui ne servent qu’à capturer l’attention de l’autre. Et c’est avec la plus grande froideur qu’il faut désormais considérer toutes ces fichues émotions, déclara tout à coup Charlie. — Et le savez-vous, cher ami, dit-il en se retournant vers son cadet, savez-vous que la compassion obtenue ainsi par la ruse est un nectar, que sa robe est d’un rouge plus chatoyant que celle du sang ? Puis, faisant encore mine de réfléchir un peu plus loin et comme pour lui-même : Tout bien peser la compassion possède aussi un bien meilleur gout que celui du sang. Quoique l’un n’aille vraisemblablement pas sans l’autre. Le soleil descendait sur l’horizon et les champs de tournesols de chaque coté de la départementale avaient pris des tonalités couleur de rouille. Les deux jeunes gens n’étaient pas seuls ils étaient accompagnés de leurs ombres qui cherchaient à s’abreuver en s’allongeant à leur cotés projetant leurs petites têtes dans l’ombre des fossés. La pluie avait cessé depuis quelques minutes et le clapotis de l’eau filant sa pente, seul, signalait sa présence avant de disparaitre tout en bas dans le vallon. — Est-ce que c’est encore loin Charlie ? demanda le plus jeune à son ainé. — Ne me dites pas que vous êtes déjà fatigué Louis, un peu de nerf ! C’est tout à fait le genre de question qu’il ne sert à rien de se poser . Puis, se reprenant. Nous arriverons avant la nuit je vous le promets, et cela devrait être suffisant pour ne plus vous inquiéter. — Mais j’ai mal aux pieds et j’ai faim tenta à nouveau le plus jeune des deux garçons. Mais cette fois l’ainé resta silencieux et sans même tourner le regard vers lui il accéléra le pas. Ils étaient partis de la maison à peine une heure avant l’aube. Charlie avait noué les draps de leurs lits ensemble, puis il avait balancé cette corde de fortune par la fenêtre du 1er étage tout en prenant mille précautions en l’ouvrant pour ne pas la faire grincer et ne pas éveiller les autres habitants des lieux. Il avait soulevé son jeune frère par les aisselles pour l’aider à descendre le premier tout en le rassurant qu’il ne risquerait rien s’il voulait bien lui faire confiance. Mais c’était une recommandation inutile. Louis était en admiration totale pour son grand frère. Ils étaient ensuite arrivés au bout de l’allée de graviers au grand portail et c’est encore Charlie qui s’était occupé de l’ouvrir avec minutie puis qui l’avait soigneusement refermé derrière eux. L’éclairage public dans le quartier où ils vivaient était chiche, un lampadaire sur deux possédait encore son ampoule intacte. — C’est par là dit Charlie à Louis n’ayez pas peur, vous n’avez qu’à attraper la sangle de mon sac-un petit sac tube dans lequel il avait rangé quelques victuailles chipées la veille à la cuisine pendant que les autres étaient affalés à moitié endormis devant la télévision. Puis ils avaient gravi la pente en s’enfonçant de plus en plus dans l’obscurité. Après avoir marché un moment ils virent le soleil se lever doucement alors qu’ils parvenaient au sommet de la colline. Le spectacle était grandiose, des nappes de brumes montaient de la terre laissant distinguer entre leurs volutes d’autres collines plus lointaines et tout près d’eux quelques arbres à l’aspect fantomatiques. Puis soudain la lumière avait jaillit pour repousser tous les doutes et les à priori. La merveilleuse campagne du pays Bourbonnais leur apparut. Cela leur avait donné du baume au cœur, ils avaient pris le temps de grignoter quelque chose que Charlie avait tiré de son sac tout en énonçant son plan d’action. — Nous allons devoir marcher toute la journée probablement, c’est une épreuve qui demande du courage, de l’endurance Louis. Si vous ne vous sentez pas capable il est encore temps de rebrousser chemin. De plus une fois parvenus là-bas, le plus dur nous attendra encore. Je vous prie de bien vouloir réfléchir à tout cela avant de prendre définitivement votre décision. — C’est bon Charlie, je vous suivrais en enfer s’il le faut ! avait répondu le jeune homme en essayant de mettre le plus de conviction possible dans cette réplique qui appartenait à l’un des protagonistes de l’une de ses bandes dessinées favorites. Blek le Rock. Tu as pris de l’eau , ajouta t’il en oubliant le vouvoiement. — Vous avez pris de l’eau ! Le repris son frère ainé. Et il extirpa du sac une gourde de plastique qu’il lui tendit avec une pointe de mépris. — Le tutoiement c’est pour les faibles et les hypocrites cher ami, souvenez-vous en ! Louis regarda son frère attentivement, mais le regard qu’il trouva n’appelait pas le moindre doute, il ne plaisantait pas, il croyait vraiment à ce qu’il disait. Pour la première fois depuis qu’ils étaient partis il éprouva un léger frisson qui n’était pas du à la température. La fin de l’été approchait et quelques instants auparavant il venait de s’éponger le front après avoir gravit la grande cote du Cluzeau à la sortie de Vallon en Sully. Les parents des jeunes gens s’étaient levés comme à l’ordinaire. La femme avait préparé le café et en attendant qu’il coule, elle était allée allumer la télévision pour suivre une émission dans laquelle le couple de présentateurs présentait pèle mêle : une recette de cuisine, quelques conseils de jardinage, et bien sur les divers outils et ustensiles nécessaires pour réaliser toutes ces choses. Sans omettre d’indiquer le plus de facilités et de marches à suivre possibles pour les acquérir soit en magasin, par téléphone ou par correspondance. Vers 10 h ne voyant aucun des deux enfants apparaitre la femme poussa la porte de leur chambre et resta bouche bée en apercevant les deux lits jumeaux vides et la fenêtre grande ouverte. Puis elle appela son mari. — Claude je crois que nous avons un problème. Elle adorait cette expression sans doute parce qu’à chaque fois qu’elle la disait son mari lui répondait qu’il n’y avait jamais pas de problème mais que des solutions. Elle était assez curieuse de voir comment cette fois il allait trouver la solution. — Mais c’est pas vrai dit l’homme, quels petits cons ! Puis il s’en retourna vers la cuisine et s’assit pour avaler son bol de café, le front barré de grosses rides qui signifiait ostensiblement l’inquiétude qui à cet instant même devait être en train de le ronger. La femme s’installa aussi et tout en beurrant les tartines ils commencèrent à échanger quelques hypothèses. — tu y as été un peu fort avec Charly, tu n’aurais pas dû le frapper autant et avec ta ceinture en plus, ça laisse des traces. Et puis quand tu commences tu ne sais pas t’arrêter, ce n’est pas la première fois. Il a failli s’évanouir encore la dernière fois. On aurait l’air fin de devoir appeler le médecin. — Il m’agace tellement que c’est plus fort que moi. Et quand il me tient tête ça me rend carrément dingue. — Ce n’est qu’un gamin voyons Claude, tente de temporiser la femme. Il ne comprend pas, il ne comprend rien. tu ne peux pas lui demander autant, il n’a pas vécu ce que tu as vécu à son âge. Les temps ont changé les enfants ne sont plus les mêmes. — Je vais prendre la voiture pour aller voir au canal s’ils n’y sont pas dit l’homme en allumant une cigarette et exhalant lentement une première bouffée. — tu crois qu’ils sont partis pécher ? L’homme ne répond pas il hausse les épaules. — Il faut qu’ils choisissent spécialement le week-end pour m’emmerder dit il d’un ton fatigué. Puis il enchaina avec un « on ne va tout de même pas appeler la gendarmerie » … comme s’il se parlait à lui-même cette fois. Le père avait refermé le portail et rejoint son véhicule garé devant la maison. Une Ami 8 flambant neuve, une voiture de service que lui prêtait la société dans laquelle il travaillait. L’odeur de cuir et de plastique neuf le rassura un peu, puis il démarra pour se rendre dans la direction du canal. Avec un peu de chance ils seraient là se disait-il tout en n’y croyant pas beaucoup. Il avait prit le temps de regarder le hangar où était rangé le matériel de pèche et visiblement personne n’y avait pénétré depuis plusieurs jours. Néanmoins il rejoint le pont puis tourna vers l’Allée des soupirs et gara son véhicule pour se rendre à l’endroit favori des deux enfants lorsqu’ils allaient pécher. Bien sur il ne vit personne. Et il poussa un nouveau juron. Puis il prit encore un petit moment avant de tourner la clef de contact de l’Ami 8, il alluma une cigarette pour faire le point. Qu’allait il pouvoir dire aux gendarmes pour expliquer cette fugue car c’était désormais une évidence il s’agissait de ça ni plus ni moins. Il s’en voulait de tout un tas de choses soudainement, ce genre de choses auxquelles on ne pense guère mais qui reviennent par la bande en certaines occasions désagréables. Comme le fait d’être colérique et impulsif par exemple. Comme le fait de ne pas savoir s’arrêter lorsqu’il commençait à frapper Charlie. Il n’y avait personne à l’accueil lorsque l’homme fit irruption dans le poste de gendarmerie. Au loin il lui sembla entendre des voix en train de discuter dans un bureau et il s’engagea aussitôt dans le couloir qui menait vers celui-ci. Deux hommes en uniforme étaient attablés en train de boire un café et ils furent surpris de le voir pénétrer dans la pièce. — Je veux parler au responsable dit Claude avec un ton bourru. Il avait pris cette habitude de toujours vouloir s’adresser au responsable. Que ce soit dans un magasin, dans une société où il se rendait pour prospecter de nouveau clients pour son travail, au centre des impôts, à la banque, il ne semblait pas pouvoir supporter de s’adresser à qui que ce soit d’autre. Comme s’il désirait adresser convenablement son effort que ce soit celui de placer ses produits ou de se déverser sa colère à la bonne personne. Et la plupart du temps ça fonctionnait plutôt assez bien. D’ailleurs pouvait il y avoir quelqu’un d’autre que la personne responsable qui pouvait réellement agir, prendre la moindre décision, dans une situation une configuration donnée ? C’était pour lui d’une logique élémentaire. — Il n’est pas là c’est le week-end lui répondit-on tout en l’enjoignant de rejoindre l’accueil ou l’un des brigadier reprit son poste derrière le comptoir puis lui demanda quel était son problème. — Quel est vôtre problème Monsieur. Et c’était dit avec un ton tellement méprisant eut il l’impression qu’il sentit la colère s’emparer de lui immédiatement. — Comment ça il n’y a pas de responsable ? vous devez avoir un numéro de téléphone où le joindre oui ou non ? appelez le. Lança t’il excédé. — Et bien c’est sa journée de congés répliqua l’autre qui visiblement faisait un effort de patience. Mais si vous voulez bien m’énoncer les faits… — Ecoutez c’est moi qui vous paie oui ou merde ? je ne vous demande jamais rien en général mais là je ne veux m’adresser qu’à votre responsable — Calmez vous s’il vous plait je comprends que vous ayez un problème monsieur ce n’est pas nécessaire d’être impoli pour autant et je vous garantis que je peux tout à fait m’en occuper aussi bien que le responsable, nous sommes là pour ça. — Vous êtes vraiment une bande de branquignoles lâcha l’homme soudainement. Puis il se souvint de la raison pour laquelle il avait poussé la porte de la gendarmerie. Il allait s’en aller en claquant la porte lorsque tout à coup il s’en souvint. Peu avant 15 heures le temps se mit à changer brutalement. Les deux enfants avaient trouvé un coin paisible au bord de l’Aumance à la hauteur d’Hérisson pour déjeuner. Ils eurent à peine le temps de se réfugier sous le pont que de grosses gouttes se mirent à tomber. — On ne peut pas rester bloqué ici trop longtemps dit Charlie, il faut qu’on y aille, et il fit un clin d’œil à Louis en extirpant du fond de son sac deux Kway roulés en boules compactes. Toujours se renseigner sur la météo ajouta t’il en tendant le vêtement à Louis. Et ils repartirent sous la pluie — On a encore combien de kilomètres à faire demanda Louis — Une bonne vingtaine encore il faut pas trainer et puis si on marche à une bonne cadence si on se concentre sur la marche vous verrez qu’on ne sentira bientôt plus la pluie. Il ne faut pas se laisser impressionner par les émotions pas plus que par les intempéries. Vers 22 heures le véhicule de la gendarmerie se gara devant l’Amy 8. La mère était à la fenêtre derrière les rideaux, c’était presque la fin du film sur la une. Son regard alternait entre le poste de télévision et ce qui était en train de se passer dehors. Elle vit les hommes en uniforme ouvrir les portes pour faire sortir les deux enfants en même temps que John Wayne embrassait enfin Maureen O’Hara. Et elle poussa un soupir de soulagement. Puis secoua le bras de son époux assoupi sur le canapé. — Réveille toi on les a retrouvés. — C’est une dame de Saint-Bonnet qui nous a téléphoné en les voyant errer dans le bourg dit l’un gendarmes dont la moustache pensa t’elle ressemblait à celle d’Errol Flynn. Il y eut des remerciements de la part des parents mais l’un des deux gendarmes ajouta qu’il y aurait une suite, que forcément une enquête serait ouverte, car ce n’était pas normal que des enfants si jeunes commencent à fuguer. — Vous vous rendez compte 8 et 6 ans… c’est complètement absurde ajouta le gendarme qui avait l’âge du père. Ils se regardèrent un instant en silence puis les flics saluèrent les parents et retournèrent à leur véhicule. Les deux enfants étaient là au milieu du salon devant la télé. — Charlie que tu fasses des conneries … mais qu’en plus tu entraines ton frère, ce n’est pas possible dit le père en dégrafant sa ceinture. Puis il agrippa le gamin et comme d’habitude il ne connut plus aucune limite. Mais Charlie tint bon. Il serra les dents aussi fort aussi longtemps qu’il put. — La tristesse comme la joie, et toute la cohorte des émotions ne sont que des pièges pour capturer l’attention se répéta t’il encore une fois avant de s’évanouir encore une fois, de ne plus rien sentir du tout Il y a des cons qui savent tout sur tout. Parce qu’ils se pensent « riches » nantis d’une expérience particulière dont ils font une généralité. De là à asséner leur vérité à tout bout de champs pour un oui pour un non, comme pour toujours mieux la conforter, se rassurer, se barricader derrière celle-ci. Nous sommes tous cons plus ou moins de cette même façon. Et ce qui nous hérisse n’est rien d’autre que ce reflet projeté par une intention trouble que nous apercevons à la surface de ceux que nous nommons les autres. Mais ce ne seront jamais les autres vraiment, ce ne seront jamais autre chose que des satellites de nous mêmes tant que nous restons enfermés dans cette pseudo vérité. Le réseau social est le lieu idéal dans lequel tournent en rond toutes ces petites vérités qu’on ne cesse d’assener dans le vide finalement. Il n’a de social qu’une apparence car ce n’est pas autre chose qu’un agglomérat de solitudes retournées contre elles-mêmes, de singularités mal digérées, une grégarité de colères, d’élans fumeux, d’ignorances enfouies dans le péremptoire le mot d’ordre, le slogan. A de très rares exceptions près, suffisantes pour valider la règle ou pour donner l’illusion qu’il est possible de s’évader de cette taule communautaire. Il ne suffit pas d’être seulement , il faut encore beaucoup le paraitre. Mettre son grain de sel à toutes les sauces, se donner la sensation de participer à la manœuvre. Je retrouve une saine fatigue enfin. Celle qui me guide depuis toujours à me débarrasser de tout ce qui ne convient pas, de ce qui m’entrave pour voir, tout en sachant déjà que j’y verrais encore moins. Que la moindre clarté perçue me vaudra de plus grandes opacités encore. Il suffit juste de prendre une bonne respiration, un peu de blanc et de nettoyer tout le bavardage, et tant pis si rien n’en sort qu’une pauvre image qui ne veut rien dire au monde sinon que je n’ai pas grand chose à lui dire.|couper{180}

brouillons

Carnets | mai 2022

1 mai 2022

Le terme hypersensible utilisé désormais à toutes les sauces, bon sang comme il m’agace. Comme tous ces mots valises qui permettent de s’installer dans une case et de ne plus réfléchir par soi-même. De plus en plus en cette époque, ce qui peut mener chez moi, l’agacement , certains jours, à des sommets. Ou Zèbre. Drôle de Zèbre disait ma grand-mère. Rien de nouveau sous le soleil donc. Sauf que la connerie s’est tellement répandue qu’on ne le voit plus. Il faut de l’original à tout prix. En bas le bas de gamme et tout en haut le plus couteux, avec de temps à autre une promo en tête de gondole. Hypersensibilité, comment faire ? la promo dure trois jours et vous aurez un petit brin de muguet en prime aller on n’est pas chien chez Leclerc. Je vais surement perdre des abonnés au train où je vais. Pas grave, seront remplacés par des marabouts. Finalement je m’entends plutôt bien avec ces derniers. Ils en connaissent un sacré rayon sur la bêtise humaine. On n’échange jamais ensemble, pas besoin. Mais le seul fait qu’il me fasse cet honneur de s’abonner les uns après les autres à ce blog me fait sourire. Bon j’ai bien quelques petites attaques de magie noire par ci par là, venant des plus jeunes et moins expérimentés. Il faut bien que jeunesse se fasse comme on dit. Je ne leur en tiens pas rigueur si ça peut les aider à améliorer leur pratique pas de problème. Hypersensible vous dites ? bah oui, ça fait joli comme mot, mais moi j’aurais seulement dit humain vous savez. Dans un monde de robots, ou les gens ne réfléchissent plus, un humain ça peut être autant un hypersensible qu’un marabout ou un chaman. C’est même que ça si vous voulez vraiment avoir mon avis. Du coup j’enchaine avec l’éveil. Ce mot là aussi quel plaie, et toute la pseudo spiritualité vendue en option au rayon développement personnel du décathlon du coin. L’éveil c’est d’une simplicité renversante et tout le monde en fait des caisses. Hallucinant vraiment à quel point on est devenu nouille. Moi je me suis pris le portail de la maison familiale en pleine figure un jour de décembre 1966, le fer était gelé ce qui m’a zébré la figure quelques semaines. J’ai appris en même temps que le froid brûle et que je n’étais pas celui que je croyais être. J’étais une parfaite andouille. Quel éveil ! après avoir cru être Zorro Thierry la Fronde, Thibaud des Croisades, Bleck le rock, et le dernier des Mohicans. Je crois que les gens s’ennuient trop ils confondent l’ennui avec le sommeil, c’est pour cette raison qu’ils rêvent d’éveil. Alors qu’ils leur suffirait de s’occuper les mains, de faire un petit pas de coté pour s’amuser tout simplement. Tradition du repas dominical en famille. Une fois ou deux l’an, ça va bien. Plus, ce serait trop abuser des bonnes choses, de la gourmandise. La vieille dame de 91 ans viendra accompagnée de ses grands et petits enfants. Se souviendra t’elle des prénoms, quelle importance… Une journée ensoleillée sans mémoire c’est très bien aussi. J’avais autrefois une habileté pour mordre au sang avec les mots. Beaucoup d’ironie brillait. Et bon Dieu ça chauffait ! Comme un phare j’attirais les naufragés de tout acabit, les désespérés, celles et ceux en manque de tout, surtout celles d’ailleurs, et dans l’ensemble, les désabusés. Ca m’est passé. L’ironie s’est fini comme Capri. De temps en temps j’essaie, comme le coyote qui continue à courir alors qu’il a les deux pattes arrières dans le vide , et je me fracasse évidemment la tronche tout en bas sur l’évidence de l’inutile. Je n’éprouve plus autant cette envie de faire rire les autres non plus à mes dépens. D’être un clown, un Auguste qui fait toutes ces choses pour un sourire peut-être mais ne tombe que sur des rires gras et suffisants. Cette méchanceté, ce malheur se sont enfuis avec la jeunesse, assez tardivement. L’humour a des limites certains jours. Il est même tout à fait détestable. Et c’est en le constatant chez l’autre que le mien m’est devenu encore plus détestable tout à coup. Est-ce une sorte de progrès, une avancée vraiment ? moi qui ai toujours tant de mal à mépriser, par peur de l’être en retour, il se pourrait qu’enfin hourra ! j’y arrive. Je ne sais pas si la gratitude est de circonstance. Mais qui ne tente rien n’a rien, et peu importe j’ai envie de le dire : un merci s’impose. Merci pour apprendre aussi le mépris, redescendre de la lune, tomber sur le plancher des vaches. Parviendrais je bientôt à cracher à la gueule d’autrui pour être résolument comme tout le monde, j’ai hâte ! Quand on n’a plus de politesse c’est qu’on n’a plus d’orgueil ni de fierté Et moi je fus poli comme un gars laid évidemment j’ai tout connu des marées, des grandes comme des petites. Celles qui défeuillent les coquillages comme des marguerites pour en extraire le grain du sable. Le mépris d’un grain de sable vaut bien tout l’or du monde, à ma bourse perso. Mais qui le saura qui le piétine et s’en fout comme de l’an quarante aveuglé par je ne sais quel miroir aux alouettes Du selfie c’est bien mais avez vous essayé l’anti selfie ?|couper{180}