{ "version": "https://jsonfeed.org/version/1.1", "title": "Le dibbouk", "home_page_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/", "feed_url": "https:\/\/www.ledibbouk.net\/spip.php?page=feed_json", "language": "fr-FR", "items": [ { "id": "https:\/\/www.ledibbouk.net\/novembre-2025.html", "url": "https:\/\/www.ledibbouk.net\/novembre-2025.html", "title": "Novembre 2025 : synth\u00e8se du mois.", "date_published": "2025-12-22T17:27:24Z", "date_modified": "2025-12-23T16:05:49Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "
\nsynth\u00e8se du mois. Pour lire les entr\u00e9es de carnet enti\u00e8res vous pouvez suivre les liens <\/p>\n<\/blockquote>\n
1er novembre<\/strong><\/a> - Lecture d’un entretien de Juan Asensio. Touch\u00e9 par son attachement \u00e0 la langue, comme par celui de C\u00e9line vilipendant Proust. Relire L\u00e9on Bloy : effort sur la phrase, hargnes, envol\u00e9es lyriques sur la foi dont je suis d\u00e9pourvu. Qu’importent les id\u00e9es des bonshommes ; le temps pass\u00e9, reste le texte. Se demander si l’autofiction n’est pas une carapace pour ne pas dire ce que je pense vraiment. Est-ce que je pense vraiment quelque chose par moi-m\u00eame ?<\/p>\n
2 novembre<\/strong><\/a> - Rage et col\u00e8re sorties de leurs gonds. Temps des hordes, maltraitance par ceux cens\u00e9s nous prot\u00e9ger. Libert\u00e9 invent\u00e9e pour \u00e9conomiser le g\u00eete et le couvert des esclaves. Nous courons vers le haut de la colline pour n’y trouver personne. R\u00e9veil avec Buffon : « Le style est l’homme m\u00eame ». Se sentir d’un autre temps, refuser de b\u00ealer avec le pr\u00e9sent. Famille d’esprit : tous morts, align\u00e9s sur les rayons. March\u00e9 : l\u00e9gumes \u00e0 1 \u20ac, pot\u00e9e au four.<\/p>\n
3 novembre<\/strong><\/a> - Steiner : l’inutilisable, le complexe. « Sioniste le matin, antisioniste l’apr\u00e8s-midi ». Refus de l’identit\u00e9 politique, lucidit\u00e9 douloureuse. D\u00e9fense de la haute culture comme un droit. Pessimisme actif : la culture n’a pas sauv\u00e9 de la barbarie, mais elle est notre seul recours. Habiter un ch\u00e2teau de Barbe-Bleue. La pens\u00e9e commence l\u00e0 o\u00f9 finit l’appartenance. Relire Le Transport de A.H.<\/em>. D\u00e9jeuner pot\u00e9e : d\u00e9go\u00fbt et d\u00e9sir de la viande. Kairos : la photo du char \u00e0 Tallinn, convergence souterraine.<\/p>\n
4 novembre<\/strong><\/a> - Entre deux catastrophes, l’homme \u00e0 t\u00eate de linotte esp\u00e8re s’envoler. Il voit le bleu, devient homme bleu, traverse le d\u00e9sert en se demandant : chameau ou dromadaire ? Atelier d’\u00e9criture : vitesse d’ex\u00e9cution. Ambigu\u00eft\u00e9 fatigante du partage. Nouvelle habitude : \u00e9crire court. M\u00e9nager le blanc. 40 jours pour prendre une habitude, 40 nuits pour traverser un d\u00e9sert.<\/p>\n
5 novembre<\/strong><\/a> - Peu dormi. Texte « carnet noir » non publi\u00e9 par franchise nue. Se retirer des r\u00e9seaux comme on arr\u00eate de fumer. Panneau « PERTE DE TEMPS ».\nStage de peinture : bon prof, mais renoncement au travail personnel. Je ne peins plus depuis 2020. Temps fig\u00e9. L’\u00e9criture aide \u00e0 entrer dans cette intemporalit\u00e9, \u00e0 accepter la mort. J’\u00e9cris comme un alpiniste \u00e0 mains nues : je ne sais pas quand viendra la chute.<\/p>\n
8 novembre<\/strong><\/a> - Le gros du troupeau ne s’en sortira pas. Le berger est cingl\u00e9, les chiens ont la rage. L’inexorable poursuit. Chiens d’Erzurum courant apr\u00e8s le bus : m\u00eame leurre. On sait tout, mais on r\u00e9clame du nouveau dans l’horreur. Tentative de fuite vers le portail, la nuit, le froid. Je reviens vers les « proches-\u00e9trangers ». Un \u00e9crivain ne peut avoir d’amis. Je suis plus \u00e0 l’aise avec des ouvriers qu’avec des dipl\u00f4m\u00e9s. Instinct de survie ou parano\u00efa ? Je ne veux plus rien savoir, sauf ma nuit.<\/p>\n
9 novembre<\/strong><\/a> - Obstination contre la machine (code) ou l’alcool. Insulter le monde. Le probl\u00e8me est ailleurs. L’ailleurs : tout ce qui n’est pas ici. Bannir ce mot. Grisaille. Chat mangeant une banane. Tenir jusqu’au bout du bouh. Dent branlante pour contrarier l’in\u00e9branlable. Transform\u00e9 en bille d’argile.<\/p>\n
10 novembre<\/strong><\/a> - [R\u00c9CIT]<\/strong> La maison de Marthe. Une bo\u00eete dans l’entr\u00e9e pour y d\u00e9poser son nom, son alias, son fardeau. « Tant que vous dormez ici, la maison vous garde ». \u00c0 la Toussaint, on ouvre la bo\u00eete, les pi\u00e8ces prennent des caract\u00e8res (Maman, Caporal, Perdue). Arriv\u00e9e d’\u00c9l\u00e9onore Prat, sans surnom. Elle \u00e9crit son vrai nom. Le lendemain, la maison ne la reconna\u00eet plus.\n\/\/ Si je disparais des r\u00e9seaux, quelle part se d\u00e9sagr\u00e8ge ? Celle fictive. Oublier son nom d’\u00e9tat-civil ? Se nommer Philippe ? L’identit\u00e9 tient au mensonge. Peur de rater quelque chose : une arme.<\/p>\n
11 novembre<\/strong><\/a> - \u00c9couter un critique litt\u00e9raire en se curant le nez. « Un tel m\u00e9pris ne peut \u00eatre provoqu\u00e9 que par une telle d\u00e9tresse ». Attention flottante. Semblant d’existence d\u00e9samorc\u00e9 par l’ironie. Achat d’un frigo d’occasion \u00e0 20 \u20ac. P\u00e9riple vers Chatuzange-le-Goubet, erreur d’autoroute, tension. Le frigo para\u00eet neuf. Deux fa\u00e7ons de prendre la p\u00e9rip\u00e9tie. S. et moi avions quelque chose de gros sur le c\u0153ur sans vouloir en parler.<\/p>\n
12 novembre<\/strong><\/a> - Sous le soleil de Satan<\/em>, Bernanos. Action vers 1880-1885. Incipit citant Toulet : lumi\u00e8re m\u00e9lancolique, \u00e9preuve int\u00e9rieure. Gallet le d\u00e9put\u00e9 prudent, Cadignan le noble rat\u00e9. Le mal affleure sous l’ordinaire. Comparaison avec Roger B\u00e9sus (Cet homme qui vous aimait<\/em>) : salut et faute \u00e0 hauteur d’hommes.<\/p>\n
14 novembre<\/strong><\/a> - Arr\u00eater le jeu parce que personne ne voit ? Au contraire. Incarner l’exil, le bannissement. R\u00eaver une dissidence totale. On nous a vol\u00e9 le temps. Garder la col\u00e8re, la rage, m\u00eame si on dit qu’elle est vaine. Le choix de prendre ce « ils » \u00e0 t\u00e9moin.\nConformit\u00e9 horripilante. Le meilleur interlocuteur reste moi-m\u00eame (univers, bact\u00e9ries, puanteurs inclus).\nPolice des m\u0153urs : « ceci est bien, ceci ne l’est pas ». La parano\u00efa sert \u00e0 surmonter l’indiff\u00e9rence. Retour de Don Quichotte sur une vedette.<\/p>\n
15 novembre<\/strong><\/a> - Repartir de presque rien. Apr\u00e8s l’incendie, ne reste que le noyau. Le « presque rien » n’est pas un reste, c’est tout, distill\u00e9.\nH., \u00e9l\u00e8ve aphasique et h\u00e9mipl\u00e9gique. Sa volont\u00e9, son sourire devant la peinture. Honte de mes tergiversations. La vie tient par la modestie. Ma maladie est de r\u00e9ussir trop vite et de m’appuyer dessus pour justifier l’insatisfaction. Je suis un \u00e9ternel d\u00e9butant.\nNaus\u00e9e transform\u00e9e en projet : Encyclop\u00e9die du Laid. Arch\u00e9ologie du pr\u00e9sent pestif\u00e9r\u00e9.\nBesoin physiologique de grand large : la phrase longue, Rabelais, Villon. Faire cohabiter le rire gras et l’os sec. Respirer dans une pi\u00e8ce sans air.<\/p>\n
\/\/ Tentative de r\u00e9\u00e9criture (salle de r\u00e9union) : montrer l’asphyxie par la forme. Phrases courtes, blocs, slides vs phrase longue du carnet qui refuse de se briser. Tenir sa respiration sous l’eau pour v\u00e9rifier qu’on peut remonter.<\/p>\n
16 novembre<\/strong><\/a> - Ann\u00e9es 80. Plonge en restaurant. Tache jaune dans la nuit. Repas debout, graillon, regard du cuisinier. Salaire en nourriture, dette du corps. Serviette en papier rouge, froiss\u00e9e, au sol : le d\u00e9chet est la chose la plus vraie. Naus\u00e9e du jetable.\nCinquante ans apr\u00e8s : lien avec D\u00e9paysement<\/em> de Bailly et Tropique du Cancer<\/em> de Miller. L’autod\u00e9rision juive comme commentaire vivant.\nMagasin de p\u00eache : attente arm\u00e9e, ritualis\u00e9e. Se pr\u00e9parer \u00e0 affronter le temps.<\/p>\n
17 novembre<\/strong><\/a> - L’IA comme miroir et oracle. Elle ne pense pas, elle redistribue. La v\u00e9rit\u00e9 loge dans la distorsion du reflet.\nLangue pens\u00e9e : plus tout \u00e0 fait prose, plus tout \u00e0 fait po\u00e9sie. Voix de celui qui cherche.\nNotre v\u00e9rit\u00e9 est un objet trop lourd. Nous nous engageons dans les fictions pour maintenir l’\u00e9lan. Insecte dans l’ambre : sa v\u00e9rit\u00e9 est la s\u00e8ve. La n\u00f4tre est l’immobilit\u00e9 qui guette.\nTot es niens<\/em>. Tout est rien. Pesanteur du n\u00e9ant. \u00c9crire pour peupler le vide. Composer une musique si obstin\u00e9e qu’elle fait presque oublier le silence.<\/p>\n
18 novembre<\/strong><\/a> - Hiver, calfeutr\u00e9. Panne de po\u00eale.\nDescente \u00e0 la biblioth\u00e8que : Fran\u00e7ois Copp\u00e9e, Charles-Louis Philippe. G\u00e9ographie, filiation.\nImmersion dans le XIXe si\u00e8cle. Contraste avec le contemporain (Echenoz brillant mais d\u00e9sincarn\u00e9, Michon cruel d’\u00e9rudition).\nBesoin de ferveur t\u00eatue (Flaubert, Balzac). \u00c9crire sans que ce soit un jeu d’intelligence. V\u00e9rifier si je peux me tenir dans cette ferveur sans me mentir.<\/p>\n
19 novembre<\/strong><\/a> - L’IA est un soliloque, comme la plupart des conversations avec le monde. Partager ses conversations avec l’IA, c’est comme partager des nus : pas sexy.\nPrise de conscience du d\u00e9sert. R\u00e9seaux sociaux : violence du silence, miroir sans concession. T\u00e9l\u00e9phones comme petites glaces pour se mirer ou se conspuer.\nInstitutions : l\u00e8pre bureaucratique, langage abscons, silence \u00e9pais. Sensation d’\u00eatre m\u00e2ch\u00e9 et recrach\u00e9 par des forains ambulants.<\/p>\n
20 novembre<\/strong><\/a> - Achat nouveau po\u00eale. L’ancien remarche. Retour au magasin. Fatigue morale, sensation de glissement vers l’in\u00e9luctable. Une bombe pourrait tomber sur la boulangerie.\nAper\u00e7u d’une altercation politique. Bignole acari\u00e2tre. R\u00e2ler par anticipation du r\u00e2le majuscule.<\/p>\n
21 novembre<\/strong><\/a> - Remboursement du po\u00eale sans encombre.\nNourriture pr\u00e9m\u00e2ch\u00e9e, \u00e9crans vomissant du pr\u00e9m\u00e2ch\u00e9. Robbe-Grillet avait raison : \u00e8re du vide ? Non, \u00e8re du plein qui \u00e9touffe.\nLecture des Morticoles<\/em>. Soci\u00e9t\u00e9 o\u00f9 la norme est d’\u00eatre malade.\nCorrection des carnets par l’IA : les textes ne servent \u00e0 rien en l’\u00e9tat. Cr\u00e9ation de compilations pour nourrir la machine et en tirer un « grand texte » fictif sur Joannes Musti. Espoir qu’une forme en jaillisse.<\/p>\n
22 novembre<\/strong><\/a> - Jean de la Croix : « \u00c0 l’obscur et en s\u00fbret\u00e9 ». Nuit : le souffle n’est plus au centre. Le noir comme mati\u00e8re tranquille. Le moi r\u00e9duit \u00e0 une vie de cellule, rendant possible une appartenance plus vaste. Eckhart, Th\u00e9r\u00e8se d’Avila : plein du vide.\nImpudeur \u00e0 \u00e9crire ce qui se retire. Laisser une trace avant que la m\u00e9canique du jour ne remette tout \u00e0 sa place.<\/p>\n
23 novembre<\/strong><\/a> - Grand froid. Lutte d\u00e9risoire : rideau de velours, boudin de porte. Retard, \u00e9parpillement. \u00c9criture en salmigondis. IA : r\u00e9sultat pi\u00e8tre (5000 mots), elle n’a pas le souffle. La r\u00e9daction m\u00e9canis\u00e9e pointe la nostalgie du dur. R\u00e9importation d’archives 2019-2020 : trous de m\u00e9moire, vertige. L’homme que j’\u00e9tais remonte. Peur d’Alzheimer vicieux. Le billet s’arr\u00eate quand l’inach\u00e8vement devient palpable.<\/p>\n
24 novembre<\/strong><\/a> - R\u00e9\u00e9criture de 2019 avec l’IA (prompt « Juan Asensio »). La machine force la pens\u00e9e \u00e0 s’avancer, montre o\u00f9 l’on triche. Fin de la posture romantique.\nL’IA ne copie pas le ton. Elle place devant ce qui manque. Litt\u00e9rature vs eau ti\u00e8de. L’art n’est pas dans la machine, mais dans ce qu’on d\u00e9cide d’en faire, dans ce qu’on accepte de couper.<\/p>\n
25 novembre<\/strong><\/a> - Atelier Michaux : Face aux verrous<\/em>. Se placer devant ce qui bloque. R\u00e9\u00e9criture du texte sur le cerisier en mode « Non ». Le cerisier comme alibi po\u00e9tique, la beaut\u00e9 comme calmant. Image de pelleteuses d\u00e9truisant une ville int\u00e9rieure. Le « non » face aux textes de l’IA est l’\u00e9cho de celui de Michaux. Distance \u00e0 parcourir pour un oui.<\/p>\n
26 novembre<\/strong><\/a> - R\u00e9\u00e9criture : J.M. (Musti) n’est plus sympathique. L’\u00e9chec comme maison, la lucidit\u00e9 comme alibi de la l\u00e2chet\u00e9. D\u00e9jeuner avec JPDS. S. n’aime pas la cannelle. R\u00e9flexions sempiternelles. « Sois m\u00e9chant ». Kraus : Pro domo et mundo<\/em>. Misogynie paternelle.\nSi le dibbouk est moi, qui martyris\u00e9-je ? Rejeter le masque, avancer m\u00e9chant et baveux.<\/p>\n
27 novembre<\/strong><\/a> - Compression. Fatigue de la r\u00e9\u00e9criture IA qui r\u00e9v\u00e8le mon propre bavardage. Couper devient facile. Le vide lisible entre les phrases (C.). Prose ou po\u00e9sie : question pour bordurer l’innommable. Ne pas publier trop vite. Laisser passer la premi\u00e8re impulsion (l’odeur de merde). Qu’est-ce qu’on garde sur le sable apr\u00e8s le naufrage ? D\u00e9sabonnement g\u00e9n\u00e9ral : incapacit\u00e9 \u00e0 soutenir autrui quand je ne me soutiens pas moi-m\u00eame. Charit\u00e9 bien ordonn\u00e9e.<\/p>\n
28 novembre<\/strong><\/a> - Relecture \u00e9puisante. J’ai avanc\u00e9 avec une mani\u00e8re rod\u00e9e de me mettre en sc\u00e8ne. Me prendre en grippe pour de bonnes raisons. Inqui\u00e9tude : quelque chose en moi se frotte les mains devant cette crucifixion. Me traiter de con est encore une fa\u00e7on de me placer au centre.<\/p>\n